×

Nous utilisons des cookies pour rendre LingQ meilleur. En visitant le site vous acceptez nos Politique des cookies.


image

LA MACHINE À EXPLORER LE TEMPS, CHAPITRE IV – LE VOYAGE

CHAPITRE IV – LE VOYAGE

« J'AI déjà exposé, jeudi dernier, à quelques-uns d'entre vous, les principes de ma machine pour voyager dans le Temps, et je vous l'ai montrée telle qu'elle était, mais inachevée et sur le métier. Elle y est encore maintenant, quelque peu fatiguée par le voyage, à vrai dire ; l'une des barres d'ivoire est fendue, et une traverse de cuivre est faussée ; mais le reste est encore assez solide. Je pensais l'avoir terminée le vendredi ; mais vendredi, quand le montage fut presque fini, je m'aperçus qu'un des barreaux de nickel était trop court de deux centimètres et demi exactement, et je dus le refaire, de sorte que la machine ne fut entièrement achevée que ce matin. C'est donc aujourd'hui à dix heures que la première de toutes les machines de ce genre commença sa carrière. Je l'examinai une dernière fois, m'assurai de la solidité des écrous, mis encore une goutte d'huile à la tringle de quartz et m'installai sur la selle. Je suppose que celui qui va se suicider et qui tient contre son crâne un pistolet doit éprouver le même sentiment que j'éprouvai alors de curiosité pour ce qui va se passer immédiatement après. Je pris dans une main le levier de mise en marche et dans l'autre le levier d'arrêt – j'appuyai sur le premier et presque immédiatement sur le second. Je crus chanceler, puis j'eus une sensation de chute comme dans un cauchemar. Alors, regardant autour de moi, je vis mon laboratoire tel qu'à l'ordinaire. S'était-il passé quelque chose ? Un moment je soupçonnai mon intellect de m'avoir joué quelque tour. Je remarquai alors la pendule ; le moment d'avant elle marquait, m'avait-il semblé, une minute ou deux après dix heures ; maintenant il était presque trois heures et demie !

« Je respirai, serrai les dents, empoignai des deux mains le levier de mise en train et partis d'un seul coup. Le laboratoire devint brumeux, puis sombre. La servante entra, et se dirigea, sans paraître me voir, vers la porte donnant sur le jardin. Je suppose qu'il lui fallut une minute ou deux pour traverser la pièce, mais il me sembla qu'elle était lancée d'une porte à l'autre comme une fusée. J'appuyai sur le levier jusqu'à sa position extrême. La nuit vint comme on éteint une lampe ; et un moment après, demain était là. Le laboratoire devint confus et brumeux, et à chaque moment de plus en plus confus. Demain soir arriva tout obscur, puis le jour encore, puis une nuit, puis des jours et des nuits de plus en plus précipités ! Un murmure vertigineux emplissait mes oreilles, une mystérieuse confusion descendait sur mon esprit.

« Je crains de ne pouvoir exprimer les singulières sensations d'un voyage à travers le Temps. Elles sont excessivement déplaisantes. On éprouve exactement la même chose que sur les montagnes russes, dans les foires : un irrésistible élan, tête baissée ! J'éprouvais aussi l'horrible pressentiment d'un écrasement inévitable et imminent. Pendant cette course, la nuit suivait le jour comme le battement d'une grande aile noire. L'obscure perception du laboratoire disparut bientôt et je vis le soleil sauter précipitamment à travers le ciel, bondissant à chaque minute, et chaque minute marquant un jour. Je pensai que le laboratoire avait dû être détruit et que j'étais maintenant en plein air. J'eus la vague impression d'escalader des échafaudages, mais j'allais déjà beaucoup trop vite pour avoir conscience des mouvements qui m'entouraient. L'escargot le plus lent qui rampa jamais bondissait trop vite pour que je le visse. La scintillante succession de la clarté et des ténèbres était extrêmement pénible à l'œil. Puis, dans les ténèbres intermittentes, je voyais la lune parcourir rapidement ses phases et j'entrevoyais faiblement les révolutions des étoiles. Bientôt, tandis que j'avançais avec une vélocité croissante, la palpitation du jour et de la nuit se fondit en une teinte grise continue. Le ciel revêtit une admirable profondeur bleue, une splendide nuance lumineuse comme celle des premières lueurs du crépuscule ; le soleil bondissant devint une traînée de feu, un arc lumineux dans l'espace ; la lune, une bande ondoyante et plus faible, et je ne voyais plus rien des étoiles, sinon de temps en temps un cercle brillant qui tremblotait.

« Le paysage était brumeux et vague ; j'étais toujours au flanc de la colline sur laquelle est bâtie cette maison, et la pente s'élevait au-dessus de moi, grise et confuse. Je vis des arbres croître et changer comme des bouffées de vapeur ; tantôt roux, tantôt verts ; ils croissaient, s'étendaient, se brisaient et disparaissaient. Je vis d'immenses édifices s'élever, vagues et splendides, et passer comme des rêves. Toute la surface de la terre semblait changée, ondoyant et s'évanouissant sous mes yeux. Les petites aiguilles, sur les cadrans qui enregistraient ma vitesse, couraient de plus en plus vite. Bientôt je remarquai que le cercle lumineux du soleil montait et descendait, d'un solstice à l'autre, en moins d'une minute, et que par conséquent j'allais à une vitesse de plus d'une année par minute ; et de minute en minute la neige blanche apparaissait sur le monde et s'évanouissait pour être suivie par la verdure brillante et courte du printemps.

« Les sensations désagréables du départ étaient maintenant moins poignantes. Elles se fondirent bientôt en une sorte d'euphorie nerveuse. Je remarquai cependant un balancement lourd de la machine, dont je ne pouvais m'expliquer la cause. Mais mon esprit était trop confus pour y faire grande attention. Si bien que je me lançais dans l'avenir avec une sorte de folie croissante. D'abord, à peine pensai-je à m'arrêter, à peine pensai-je à autre chose qu'à ces sensations nouvelles. Mais bientôt une autre série d'impressions me vint à l'esprit – une certaine curiosité et avec elle une certaine crainte –, jusqu'à ce qu'enfin elles se fussent complètement emparées de moi. Quels étranges développements de l'humanité, quelles merveilleuses avances sur notre civilisation rudimentaire n'allais-je pas apercevoir quand j'en arriverais à regarder de près ce monde vague et illusoire qui se déroulait et ondoyait devant mes yeux ! Je voyais des monuments d'une grande et splendide architecture s'élever autour de moi, plus massifs qu'aucun des édifices de notre époque, et cependant, me semblait-il, bâtis de brume et de faible clarté. Je vis un vert plus riche s'étendre sur la colline et demeurer là sans aucun intervalle d'hiver. Même à travers le voile qui noyait les choses, la terre semblait très belle. C'est alors que l'idée me vint d'arrêter la machine.

« Le risque que je courais était de trouver quelque nouvel objet à la place que la machine et moi occupions. Aussi longtemps que je voyageais à toute vitesse, cela importait fort peu. J'étais pour ainsi dire désintégré – je glissais comme un éther à travers les interstices des substances interposées ! Mais s'arrêter impliquait peut-être mon écrasement, molécule par molécule, dans ce qui pouvait se trouver sur mon passage, comportait un contact si intime de mes atomes avec ceux de l'obstacle qu'il en résulterait une profonde réaction chimique – peut-être une explosion formidable, qui m'enverrait, mon appareil et moi, hors de toute dimension possible… dans l'Inconnu. Cette possibilité s'était bien souvent présentée à mon esprit pendant que je construisais la machine ; mais alors je l'avais de bon cœur envisagée comme un risque nécessaire un de ces risques qu'un homme doit toujours accepter. Maintenant qu'il était inévitable, je ne le voyais plus du tout sous le même jour. Le fait est que, insensiblement, l'absolue étrangeté de toute chose, le balancement ou l'ébranlement écœurant de la machine, par-dessus tout la sensation de chute prolongée, avait absolument bouleversé mes nerfs. Je me disais que je ne pouvais plus m'arrêter et, dans un sursaut nerveux, je résolus de m'arrêter sur le champ. Avec une impatience d'insensé, je tirai sur le levier : aussitôt la machine se mit à ballotter, et je dégringolai la tête la première dans le vide.

« Il y eut un bruit de tonnerre dans mes oreilles ; je dus rester étourdi un moment. Une grêle impitoyable sifflait autour de moi, et je me trouvai assis, sur un sol mou, devant la machine renversée. Toutes choses me paraissaient encore grises, mais je remarquai bientôt que le bruit confus dans mes oreilles s'était tu. Je regardai autour de moi. J'étais sur ce qui pouvait sembler une petite pelouse, dans un jardin, entouré de massifs de rhododendrons dont les pétales mauves et pourpres tombaient en pluie sous les volées de grêlons. La grêle dansante et rebondissante s'abattait sur la machine et descendait sur le sol comme une fumée. En un instant, je fus trempé jusqu'aux os.

« Excellente hospitalité, dis-je, envers un homme qui vient de parcourir d'innombrables années pour vous voir ! » « Enfin je songeai qu'il était stupide de se laisser tremper ; je me levai et je cherchai des yeux où me réfugier. Une figure colossale, taillée apparemment dans quelque pierre blanche, apparaissait, incertaine, au-delà des rhododendrons, à travers l'averse brumeuse. Mais le reste du monde était invisible.

« Il serait malaisé de décrire mes sensations. Comme la grêle s'éclaircissait, j'aperçus plus distinctement la figure blanche. Elle devait être fort grande, car un bouleau ne lui allait qu'à l'épaule. Elle était de marbre blanc, et rappelait par sa forme quelque sphinx ailé, mais les ailes, au lieu d'être repliées verticalement, étaient étendues de sorte qu'elle semblait planer. Le piédestal, me sembla-t-il, était de bronze et couvert d'une épaisse couche de vert-de-gris. Il se trouva que la face était de mon côté, les yeux sans regard paraissaient m'épier ; il y avait sur les lèvres l'ombre affaiblie d'un sourire. L'ensemble était détérioré par les intempéries et donnait l'idée désagréable d'être rongé par une maladie. Je restai là à l'examiner pendant un certain temps – une demi-minute peut-être ou une demi-heure. Elle semblait reculer ou avancer suivant que la grêle tombait entre elle et moi plus ou moins dense. À la fin, je détournai mes yeux, et je vis que les nuages s'éclaircissaient et que le ciel s'éclairait de la promesse du soleil.

« Je reportai mes yeux vers la forme blanche accroupie, et toute la témérité de mon voyage m'apparut subitement. Qu'allait-il survenir lorsque le rideau brumeux qui m'avait dissimulé jusque-là serait entièrement dissipé ?

Qu'avait-il pu arriver aux hommes ? Que faire si la cruauté était devenue une passion commune ? Que faire si, dans cet intervalle, la race avait perdu son humanité, et s'était développée dans la malfaisance, la haine et une volonté farouche de puissance ? Je pourrais sembler quelque animal sauvage du vieux monde, d'autant plus horrible et dégoûtant que j'avais déjà leur conformation – un être mauvais qu'il fallait immédiatement supprimer.

« Déjà j'apercevais d'autres vastes formes, d'immenses édifices avec des parapets compliqués et de hautes colonnes, au flanc d'une colline boisée qui descendait doucement jusqu'à moi à travers l'orage apaisé. Je fus saisi d'une terreur panique. Je courus éperdument jusqu'à la machine et fis de violents efforts pour la remettre debout. Pendant ce temps, les rayons du soleil percèrent l'amoncellement des nuages. La pluie torrentielle passa et s'évanouit comme le vêtement traînant d'un fantôme. Au-dessus de moi, dans le bleu intense du ciel d'été, quelques légers et sombres lambeaux de nuages tourbillonnaient en se désagrégeant. Les grands édifices qui m'entouraient s'élevaient clairs et distincts, brillant sous l'éclat de l'averse récente, et ressortant en blanc avec des grêlons non fondus, amoncelés au long de leurs assises. Je me sentais comme nu dans un monde étrange. J'éprouvais ce que, peut-être, ressent l'oiseau dans l'air clair, lorsqu'il sait que le vautour plane et va s'abattre sur lui. Ma peur devenait de la frénésie. Je respirai fortement, serrai les dents, et en vint aux prises, furieusement, des poignets et des genoux, avec la machine : à mon effort désespéré, elle céda et se redressa, en venant me frapper violemment au menton. Une main sur la selle, l'autre sur le levier, je restai là, haletant sourdement, prêt à repartir.

« Mais avec l'espoir d'une prompte retraite, le courage me revint. Je considérai plus curieusement, et avec moins de crainte, ce monde d'un avenir éloigné. Dans une fenêtre ronde, très haut dans le mur du plus proche édifice, je vis un groupe d'êtres revêtus de riches et souples robes. Ils m'avaient vu, car leurs visages étaient tournés vers moi.

« J'entendis alors des voix qui approchaient. Venant à travers les massifs qui entouraient le Sphinx Blanc, je voyais les têtes et les épaules d'hommes qui couraient. L'un d'eux déboucha d'un sentier qui menait droit à la petite pelouse sur laquelle je me trouvais avec ma machine. C'était une délicate créature, haute d'environ un mètre vingt, vêtue d'une tunique de pourpre retenue à la taille par une ceinture de cuir. Des sandales ou des brodequins (je ne pus voir distinctement) recouvraient ses pieds ; ses jambes étaient nues depuis les genoux ; elle ne portait aucune coiffure. En faisant ces remarques, je m'aperçus pour la première fois de la douceur extrême de l'air.

« Je fus frappé par l'aspect de cette créature très belle et gracieuse, mais étonnamment frêle. Ses joues roses me rappelaient ces beaux visages de phtisiques – cette beauté hectique dont ou nous a tant parlé. À sa vue, je repris soudainement confiance, et mes mains abandonnèrent la machine. »


CHAPITRE IV – LE VOYAGE KAPITEL IV - DIE REISE CHAPTER IV - TRAVEL CAPÍTULO IV - EL VIAJE HOOFDSTUK IV - DE REIS ГЛАВА IV - ПУТЕШЕСТВИЕ

« J'AI déjà exposé, jeudi dernier, à quelques-uns d'entre vous, les principes de ma machine pour voyager dans le Temps, et je vous l'ai montrée telle qu'elle était, mais inachevée et sur le métier. “I already exposed, last Thursday, to some of you, the principles of my machine to travel in time, and I showed it to you such as it was, but unfinished and on the job. Elle y est encore maintenant, quelque peu fatiguée par le voyage, à vrai dire ; l'une des barres d'ivoire est fendue, et une traverse de cuivre est faussée ; mais le reste est encore assez solide. She is still there now, somewhat weary from the trip, to tell the truth; one of the ivory bars is split, and a copper crosspiece is bent; but the rest is still pretty solid. Una de las barras de marfil está agrietada y un travesaño de cobre está alabeado, pero el resto sigue siendo bastante sólido. Je pensais l'avoir terminée le vendredi ; mais vendredi, quand le montage fut presque fini, je m'aperçus qu'un des barreaux de nickel était trop court de deux centimètres et demi exactement, et je dus le refaire, de sorte que la machine ne fut entièrement achevée que ce matin. Ich dachte, ich hätte sie am Freitag fertiggestellt; aber am Freitag, als die Montage fast abgeschlossen war, bemerkte ich, dass einer der Nickelstäbe genau zweieinhalb Zentimeter zu kurz war, und ich musste ihn neu machen, sodass die Maschine erst heute Morgen vollständig fertiggestellt war. I thought I finished it on Friday; but on Friday, when the assembly was almost finished, I noticed that one of the nickel bars was too short by two and a half centimeters exactly, and I had to redo it, so that the machine was not completely finished until this morning. C'est donc aujourd'hui à dix heures que la première de toutes les machines de ce genre commença sa carrière. It is therefore today at ten o'clock that the first of all machines of this kind began its career. Je l'examinai une dernière fois, m'assurai de la solidité des écrous, mis encore une goutte d'huile à la tringle de quartz et m'installai sur la selle. Je suppose que celui qui va se suicider et qui tient contre son crâne un pistolet doit éprouver le même sentiment que j'éprouvai alors de curiosité pour ce qui va se passer immédiatement après. Ich nehme an, dass jemand, der sich umbringen will und eine Pistole an seinen Schädel hält, das gleiche Gefühl haben muss, das ich damals hatte, nämlich Neugier auf das, was unmittelbar danach passieren wird. I suppose that someone who is about to commit suicide and who holds a gun against his head must experience the same feeling that I felt then of curiosity for what will happen immediately afterwards. Je pris dans une main le levier de mise en marche et dans l'autre le levier d'arrêt – j'appuyai sur le premier et presque immédiatement sur le second. Ich nahm den Starthebel in eine Hand und den Stopphebel in die andere - ich drückte den ersten und fast sofort den zweiten. I took the start lever in one hand and the stop lever in the other – I pressed the first and almost immediately the second. Je crus chanceler, puis j'eus une sensation de chute comme dans un cauchemar. Ich dachte, ich wäre taumelnd, dann hatte ich das Gefühl, wie in einem Albtraum zu fallen. I thought I was staggering, then I had a feeling of falling like in a nightmare. Alors, regardant autour de moi, je vis mon laboratoire tel qu'à l'ordinaire. Als ich mich umschaute, sah ich mein Labor wie gewohnt. So, looking around me, I saw my laboratory as usual. S'était-il passé quelque chose ? War etwas passiert? Had something happened? Un moment je soupçonnai mon intellect de m'avoir joué quelque tour. Je remarquai alors la pendule ; le moment d'avant elle marquait, m'avait-il semblé, une minute ou deux après dix heures ; maintenant il était presque trois heures et demie ! Ich bemerkte dann die Uhr; in dem Moment, bevor es sich abzeichnete, schien es mir, ein oder zwei Minuten nach zehn Uhr; jetzt war es fast halb vier! I then noticed the clock; the moment before it marked, it seemed to me, a minute or two after ten o'clock; now it was nearly three-thirty!

« Je respirai, serrai les dents, empoignai des deux mains le levier de mise en train et partis d'un seul coup. "Ich atmete tief durch, biss die Zähne zusammen, packte mit beiden Händen den Fahrhebel und ging mit einem Satz los. "I took a breath, gritted my teeth, grabbed the start lever with both hands, and sped off. Le laboratoire devint brumeux, puis sombre. La servante entra, et se dirigea, sans paraître me voir, vers la porte donnant sur le jardin. Der Diener trat ein und ging, ohne mich zu sehen, zur Tür, die zum Garten führte. The servant entered, and walked, without seeming to see me, towards the door leading to the garden. Je suppose qu'il lui fallut une minute ou deux pour traverser la pièce, mais il me sembla qu'elle était lancée d'une porte à l'autre comme une fusée. Ich glaube, sie hat ein oder zwei Minuten gebraucht, um den Raum zu durchqueren, aber es schien mir, als würde sie wie eine Rakete von Tür zu Tür geschleudert. I guess it took her a minute or two to cross the room, but it seemed to me that she was launched from door to door like a rocket. J'appuyai sur le levier jusqu'à sa position extrême. Ich drückte den Hebel bis in die äußerste Position. I pressed the lever to its extreme position. La nuit vint comme on éteint une lampe ; et un moment après, demain était là. Die Nacht kam, als man eine Lampe löschte; und einen Moment später war morgen hier. Night came as one extinguishes a lamp; and a moment later, tomorrow was here. Le laboratoire devint confus et brumeux, et à chaque moment de plus en plus confus. Demain soir arriva tout obscur, puis le jour encore, puis une nuit, puis des jours et des nuits de plus en plus précipités ! Tomorrow evening came all dark, then day again, then night, then more and more hurried days and nights! Un murmure vertigineux emplissait mes oreilles, une mystérieuse confusion descendait sur mon esprit. Ein schwindelerregendes Flüstern erfüllte meine Ohren, eine geheimnisvolle Verwirrung senkte sich auf meinen Geist.

« Je crains de ne pouvoir exprimer les singulières sensations d'un voyage à travers le Temps. “I fear that I cannot express the singular sensations of a journey through Time. Elles sont excessivement déplaisantes. They are exceedingly unpleasant. On éprouve exactement la même chose que sur les montagnes russes, dans les foires : un irrésistible élan, tête baissée ! Wir erleben genau das Gleiche wie auf Achterbahnen auf Messen: eine unwiderstehliche Dynamik, Kopf runter! You experience exactly the same thing as on roller coasters, at fairs: an irresistible momentum, head down! J'éprouvais aussi l'horrible pressentiment d'un écrasement inévitable et imminent. Ich hatte auch die schreckliche Vorahnung eines unvermeidlichen und bevorstehenden Schwarms. I also had the horrible presentiment of an inevitable and imminent crash. Pendant cette course, la nuit suivait le jour comme le battement d'une grande aile noire. Während dieses Rennens folgte die Nacht dem Tag wie das Schlagen eines großen schwarzen Flügels. During this race, the night followed the day like the flapping of a great black wing. L'obscure perception du laboratoire disparut bientôt et je vis le soleil sauter précipitamment à travers le ciel, bondissant à chaque minute, et chaque minute marquant un jour. Die dunkle Wahrnehmung des Labors ließ bald nach und ich sah die Sonne hastig über den Himmel springen, jede Minute und jede Minute einen Tag markieren. The dim perception of the laboratory soon disappeared and I saw the sun jumping precipitously across the sky, leaping every minute, and every minute marking a day. Je pensai que le laboratoire avait dû être détruit et que j'étais maintenant en plein air. I thought the lab must have been destroyed and I was now in the open. J'eus la vague impression d'escalader des échafaudages, mais j'allais déjà beaucoup trop vite pour avoir conscience des mouvements qui m'entouraient. Ich hatte den vagen Eindruck, auf ein Gerüst zu klettern, aber ich war schon viel zu schnell unterwegs, um mir der Bewegungen um mich herum bewusst zu werden. I had the vague impression of climbing scaffolding, but I was already going much too fast to be aware of the movements around me. L'escargot le plus lent qui rampa jamais bondissait trop vite pour que je le visse. Die langsamste Schnecke, die jemals gekrochen ist, sprang zu schnell, als dass ich sie hätte sehen können. The slowest snail that ever crawled was bouncing too fast for me to see. La scintillante succession de la clarté et des ténèbres était extrêmement pénible à l'œil. The scintillating succession of light and darkness was extremely painful to the eye. Puis, dans les ténèbres intermittentes, je voyais la lune parcourir rapidement ses phases et j'entrevoyais faiblement les révolutions des étoiles. Bientôt, tandis que j'avançais avec une vélocité croissante, la palpitation du jour et de la nuit se fondit en une teinte grise continue. Soon, as I advanced with increasing velocity, the throbbing of day and night melted into a continuous gray hue. Le ciel revêtit une admirable profondeur bleue, une splendide nuance lumineuse comme celle des premières lueurs du crépuscule ; le soleil bondissant devint une traînée de feu, un arc lumineux dans l'espace ; la lune, une bande ondoyante et plus faible, et je ne voyais plus rien des étoiles, sinon de temps en temps un cercle brillant qui tremblotait. Der Himmel nahm eine bewundernswerte blaue Tiefe an, einen herrlichen leuchtenden Schatten wie der des ersten Lichts der Dämmerung; Die springende Sonne wurde zu einer Feuerspur, einem leuchtenden Bogen im Weltraum. der Mond, eine schwankende und schwächere Bande, und ich konnte nichts von den Sternen sehen, außer von Zeit zu Zeit einen leuchtenden Kreis, der flackerte. The sky took on an admirable blue depth, a splendid luminous hue like that of the first glimmers of twilight; the leaping sun became a trail of fire, a luminous arc in space; the moon a faint, rippling band, and I could see nothing of the stars, except now and then a bright flickering circle.

« Le paysage était brumeux et vague ; j'étais toujours au flanc de la colline sur laquelle est bâtie cette maison, et la pente s'élevait au-dessus de moi, grise et confuse. “The landscape was hazy and vague; I was still on the side of the hill on which this house is built, and the slope rose above me, gray and confused. Je vis des arbres croître et changer comme des bouffées de vapeur ; tantôt roux, tantôt verts ; ils croissaient, s'étendaient, se brisaient et disparaissaient. I saw trees grow and change like puffs of steam; sometimes red, sometimes green; they grew, expanded, broke and disappeared. Je vis d'immenses édifices s'élever, vagues et splendides, et passer comme des rêves. I saw immense edifices rising, vague and splendid, and passing like dreams. Toute la surface de la terre semblait changée, ondoyant et s'évanouissant sous mes yeux. Das ganze Gesicht der Erde schien verändert zu sein, plätscherte und verschwand vor meinen Augen. The whole surface of the earth seemed changed, undulating and vanishing before my eyes. Les petites aiguilles, sur les cadrans qui enregistraient ma vitesse, couraient de plus en plus vite. Die kleinen Hände auf den Zifferblättern, die meine Geschwindigkeit registrierten, liefen immer schneller. The little hands on the dials that registered my speed were running faster and faster. Bientôt je remarquai que le cercle lumineux du soleil montait et descendait, d'un solstice à l'autre, en moins d'une minute, et que par conséquent j'allais à une vitesse de plus d'une année par minute ; et de minute en minute la neige blanche apparaissait sur le monde et s'évanouissait pour être suivie par la verdure brillante et courte du printemps. Soon I noticed that the luminous circle of the sun rose and fell, from one solstice to the next, in less than a minute, and that consequently I was going at a speed of more than a year per minute; and minute by minute the white snow appeared over the world and faded away to be followed by the bright, short greenery of spring.

« Les sensations désagréables du départ étaient maintenant moins poignantes. “The unpleasant sensations of leaving were now less poignant. Elles se fondirent bientôt en une sorte d'euphorie nerveuse. Sie verschmolzen bald zu einer Art nervöser Euphorie. Je remarquai cependant un balancement lourd de la machine, dont je ne pouvais m'expliquer la cause. However, I noticed a heavy rocking of the machine, the cause of which I could not explain. Mais mon esprit était trop confus pour y faire grande attention. Si bien que je me lançais dans l'avenir avec une sorte de folie croissante. So sehr, dass ich mich mit einer Art wachsendem Wahnsinn in die Zukunft stürzte. So much so that I launched myself into the future with a kind of increasing madness. D'abord, à peine pensai-je à m'arrêter, à peine pensai-je à autre chose qu'à ces sensations nouvelles. At first, I barely thought of stopping, I barely thought of anything other than these new sensations. Mais bientôt une autre série d'impressions me vint à l'esprit – une certaine curiosité et avec elle une certaine crainte –, jusqu'à ce qu'enfin elles se fussent complètement emparées de moi. Aber bald kamen mir andere Eindrücke in den Sinn - eine gewisse Neugier und damit eine gewisse Angst -, bis sie mich endlich vollständig ergriffen hatten. But soon another series of impressions came to mind – a certain curiosity and with it a certain fear – until at last they had completely taken hold of me. Quels étranges développements de l'humanité, quelles merveilleuses avances sur notre civilisation rudimentaire n'allais-je pas apercevoir quand j'en arriverais à regarder de près ce monde vague et illusoire qui se déroulait et ondoyait devant mes yeux ! Welche seltsamen Entwicklungen der Menschheit, welche wunderbaren Fortschritte in unserer rudimentären Zivilisation würde ich nicht wahrnehmen, wenn ich mir diese vage und illusorische Welt genauer ansah, die sich vor meinen Augen entfaltete und wogte! What strange developments of humanity, what marvelous advances in our rudimentary civilization would I not see when I came to look closely at this vague and illusory world that unfolded and undulated before my eyes! Je voyais des monuments d'une grande et splendide architecture s'élever autour de moi, plus massifs qu'aucun des édifices de notre époque, et cependant, me semblait-il, bâtis de brume et de faible clarté. I saw monuments of grand and splendid architecture rising around me, more massive than any of the edifices of our time, and yet, it seemed to me, built of mist and dim light. Je vis un vert plus riche s'étendre sur la colline et demeurer là sans aucun intervalle d'hiver. I saw a richer green spreading over the hill and remaining there without any winter gap. Même à travers le voile qui noyait les choses, la terre semblait très belle. Selbst durch den Schleier, der die Dinge ertränkte, sah das Land sehr schön aus. Even through the veil that drowned things out, the land looked very beautiful. C'est alors que l'idée me vint d'arrêter la machine.

« Le risque que je courais était de trouver quelque nouvel objet à la place que la machine et moi occupions. „Das Risiko, das ich einging, bestand darin, an der Stelle, an der sich die Maschine und ich befanden, ein neues Objekt zu finden. “The risk I ran was to find some new object in the place that the machine and I occupied. Aussi longtemps que je voyageais à toute vitesse, cela importait fort peu. Solange ich mit voller Geschwindigkeit unterwegs war, war es egal. As long as I was traveling at full speed, it mattered very little. J'étais pour ainsi dire désintégré – je glissais comme un éther à travers les interstices des substances interposées ! Ich war sozusagen aufgelöst - ich schlüpfte wie ein Äther durch die Zwischenräume der dazwischenliegenden Substanzen! I was, so to speak, disintegrated – I slipped like an ether through the interstices of the interposed substances! Mais s'arrêter impliquait peut-être mon écrasement, molécule par molécule, dans ce qui pouvait se trouver sur mon passage, comportait un contact si intime de mes atomes avec ceux de l'obstacle qu'il en résulterait une profonde réaction chimique – peut-être une explosion formidable, qui m'enverrait, mon appareil et moi, hors de toute dimension possible… dans l'Inconnu. Aber das Anhalten beinhaltete vielleicht mein Zerkleinern, Molekül für Molekül, auf dem Weg, der sich auf meinem Weg befinden könnte, und einen so engen Kontakt meiner Atome mit denen des Hindernisses, dass es zu einer tiefgreifenden chemischen Reaktion führen würde - vielleicht. - eine gewaltige Explosion zu sein, die mich, mein Gerät und mich aus jeder möglichen Dimension ins Unbekannte schicken würde. But stopping might involve my crushing, molecule by molecule, into what might be in my path, involving such intimate contact of my atoms with those of the obstacle that a profound chemical reaction would result - perhaps -to be a formidable explosion, which would send me, my camera and me, out of all possible dimension… into the Unknown. Cette possibilité s'était bien souvent présentée à mon esprit pendant que je construisais la machine ; mais alors je l'avais de bon cœur envisagée comme un risque nécessaire un de ces risques qu'un homme doit toujours accepter. This possibility had occurred to me many times while building the machine; but then I had gladly considered it as a necessary risk, one of those risks which a man must always accept. Maintenant qu'il était inévitable, je ne le voyais plus du tout sous le même jour. Now that it was inevitable, I didn't see it at all in the same light. Le fait est que, insensiblement, l'absolue étrangeté de toute chose, le balancement ou l'ébranlement écœurant de la machine, par-dessus tout la sensation de chute prolongée, avait absolument bouleversé mes nerfs. The fact is that, imperceptibly, the utter strangeness of everything, the sickening swaying or shaking of the machine, above all the sensation of a prolonged fall, had absolutely shaken my nerves. El hecho es que, insensiblemente, la absoluta extrañeza de todo, el enfermizo balanceo o sacudida de la máquina, sobre todo la sensación de caída prolongada, habían destrozado absolutamente mis nervios. Je me disais que je ne pouvais plus m'arrêter et, dans un sursaut nerveux, je résolus de m'arrêter sur le champ. I told myself that I couldn't stop and, with a nervous start, I decided to stop on the spot. Avec une impatience d'insensé, je tirai sur le levier : aussitôt la machine se mit à ballotter, et je dégringolai la tête la première dans le vide. Mit wahnsinniger Ungeduld zog ich am Hebel: Die Maschine begann sofort zu werfen, und ich stürzte mit dem Kopf voran in die Leere. With mad impatience, I pulled the lever: the machine immediately began to wobble, and I tumbled headlong into the void. Con la impaciencia de un loco, tiré de la palanca: inmediatamente la máquina empezó a balancearse y yo caí de cabeza al vacío.

« Il y eut un bruit de tonnerre dans mes oreilles ; je dus rester étourdi un moment. “There was a sound of thunder in my ears; I must have been dazed for a moment. Une grêle impitoyable sifflait autour de moi, et je me trouvai assis, sur un sol mou, devant la machine renversée. Ein gnadenloser Hagel zischte um mich herum und ich saß auf weichem Boden vor der umgestürzten Maschine. A pitiless hail whistled around me, and I found myself sitting on soft ground in front of the overturned machine. Toutes choses me paraissaient encore grises, mais je remarquai bientôt que le bruit confus dans mes oreilles s'était tu. All things still seemed gray to me, but I soon noticed that the confused noise in my ears had fallen silent. Je regardai autour de moi. J'étais sur ce qui pouvait sembler une petite pelouse, dans un jardin, entouré de massifs de rhododendrons dont les pétales mauves et pourpres tombaient en pluie sous les volées de grêlons. I was on what looked like a small lawn, in a garden, surrounded by clumps of rhododendrons whose mauve and purple petals rained down under the volleys of hailstones. La grêle dansante et rebondissante s'abattait sur la machine et descendait sur le sol comme une fumée. The dancing, bouncing hail crashed down on the machine and descended to the ground like smoke. En un instant, je fus trempé jusqu'aux os. In an instant, I was soaked to the skin.

« Excellente hospitalité, dis-je, envers un homme qui vient de parcourir d'innombrables années pour vous voir ! "Excellent hospitality," I said, "to a man who has traveled countless years to see you!" » « Enfin je songeai qu'il était stupide de se laisser tremper ; je me levai et je cherchai des yeux où me réfugier. “At last I thought it was stupid to let yourself be soaked; I got up and looked around for refuge. Une figure colossale, taillée apparemment dans quelque pierre blanche, apparaissait, incertaine, au-delà des rhododendrons, à travers l'averse brumeuse. A colossal figure, apparently carved out of some white stone, loomed uncertain beyond the rhododendrons through the misty downpour. Mais le reste du monde était invisible. But the rest of the world was invisible.

« Il serait malaisé de décrire mes sensations. “It would be difficult to describe my feelings. Comme la grêle s'éclaircissait, j'aperçus plus distinctement la figure blanche. Elle devait être fort grande, car un bouleau ne lui allait qu'à l'épaule. Sie musste sehr groß sein, denn eine Birke passte ihr nur bis zur Schulter. She must have been very tall, for a birch only fit her shoulder. Elle était de marbre blanc, et rappelait par sa forme quelque sphinx ailé, mais les ailes, au lieu d'être repliées verticalement, étaient étendues de sorte qu'elle semblait planer. It was of white marble, and resembled in form some winged sphinx, but the wings, instead of being folded vertically, were extended so that it seemed to hover. Le piédestal, me sembla-t-il, était de bronze et couvert d'une épaisse couche de vert-de-gris. The pedestal, it seemed to me, was of bronze and covered with a thick layer of verdigris. Il se trouva que la face était de mon côté, les yeux sans regard paraissaient m'épier ; il y avait sur les lèvres l'ombre affaiblie d'un sourire. Es stellte sich heraus, dass das Gesicht auf meiner Seite war, die blicklosen Augen schienen mich zu belauern; auf den Lippen lag der geschwächte Schatten eines Lächelns. The face happened to be on my side, the sightless eyes seemed to be watching me; there was the faint shadow of a smile on the lips. L'ensemble était détérioré par les intempéries et donnait l'idée désagréable d'être rongé par une maladie. The set was damaged by bad weather and gave the unpleasant idea of being eaten away by a disease. Je restai là à l'examiner pendant un certain temps – une demi-minute peut-être ou une demi-heure. I stood there looking at it for some time – maybe half a minute or half an hour. Elle semblait reculer ou avancer suivant que la grêle tombait entre elle et moi plus ou moins dense. She seemed to retreat or advance depending on whether the hail fell between her and me more or less dense. À la fin, je détournai mes yeux, et je vis que les nuages s'éclaircissaient et que le ciel s'éclairait de la promesse du soleil. At last, I looked away, and saw the clouds clearing and the sky brightening with the promise of the sun.

« Je reportai mes yeux vers la forme blanche accroupie, et toute la témérité de mon voyage m'apparut subitement. “I looked back at the crouching white form, and all the temerity of my journey suddenly dawned on me. Qu'allait-il survenir lorsque le rideau brumeux qui m'avait dissimulé jusque-là serait entièrement dissipé ? What would happen when the misty curtain that had concealed me until then was entirely dissipated?

Qu'avait-il pu arriver aux hommes ? What could have happened to the men? Que faire si la cruauté était devenue une passion commune ? What if cruelty had become a common passion? Que faire si, dans cet intervalle, la race avait perdu son humanité, et s'était développée dans la malfaisance, la haine et une volonté farouche de puissance ? Was, wenn die Rasse in dieser Zeit ihre Menschlichkeit verloren und sich in Bosheit, Hass und einem wilden Willen zur Macht entwickelt hatte? What if, in the meantime, the race had lost its humanity, and grown in malevolence, hatred and a fierce will to power? ¿Y si, mientras tanto, la raza hubiera perdido su humanidad y se hubiera convertido en una raza de malicia, odio y una feroz voluntad de poder? Je pourrais sembler quelque animal sauvage du vieux monde, d'autant plus horrible et dégoûtant que j'avais déjà leur conformation – un être mauvais qu'il fallait immédiatement supprimer. Ich könnte wie ein wildes Tier aus der alten Welt wirken, umso schrecklicher und ekelhafter, da ich bereits ihre Gestalt hatte - ein böses Wesen, das sofort beseitigt werden musste. I could look like some wild animal from the old world, all the more horrible and disgusting because I already had their conformation – an evil being that had to be eliminated immediately. Podía parecer un animal salvaje del viejo mundo, tanto más horrible y repugnante cuanto que ya tenía su conformación: un ser maligno que había que eliminar de inmediato.

« Déjà j'apercevais d'autres vastes formes, d'immenses édifices avec des parapets compliqués et de hautes colonnes, au flanc d'une colline boisée qui descendait doucement jusqu'à moi à travers l'orage apaisé. “Already I could see other vast shapes, huge buildings with intricate parapets and tall columns, on the side of a wooded hill that sloped gently down to me through the stilling storm. Je fus saisi d'une terreur panique. I was seized with panic terror. Je courus éperdument jusqu'à la machine et fis de violents efforts pour la remettre debout. I ran frantically to the machine and made violent efforts to put it back on its feet. Pendant ce temps, les rayons du soleil percèrent l'amoncellement des nuages. La pluie torrentielle passa et s'évanouit comme le vêtement traînant d'un fantôme. The torrential rain passed and vanished like the trailing garment of a ghost. Au-dessus de moi, dans le bleu intense du ciel d'été, quelques légers et sombres lambeaux de nuages tourbillonnaient en se désagrégeant. Above me, in the intense blue of the summer sky, a few light, dark shreds of clouds swirled as they crumbled. Les grands édifices qui m'entouraient s'élevaient clairs et distincts, brillant sous l'éclat de l'averse récente, et ressortant en blanc avec des grêlons non fondus, amoncelés au long de leurs assises. The tall buildings around me stood clear and distinct, shining in the glare of the recent downpour, and standing out white with unmelted hailstones heaped along their courses. Je me sentais comme nu dans un monde étrange. I felt naked in a strange world. J'éprouvais ce que, peut-être, ressent l'oiseau dans l'air clair, lorsqu'il sait que le vautour plane et va s'abattre sur lui. I felt what, perhaps, the bird feels in the clear air, when he knows that the vulture is hovering and will fall on him. Ma peur devenait de la frénésie. My fear turned into frenzy. Je respirai fortement, serrai les dents, et en vint aux prises, furieusement, des poignets et des genoux, avec la machine : à mon effort désespéré, elle céda et se redressa, en venant me frapper violemment au menton. I breathed heavily, gritted my teeth, and came to grips, wrists and knees, furiously with the machine: at my desperate effort, it yielded and straightened up, coming to strike me violently on the chin. Une main sur la selle, l'autre sur le levier, je restai là, haletant sourdement, prêt à repartir.

« Mais avec l'espoir d'une prompte retraite, le courage me revint. “But with the hope of a speedy retirement, courage returned to me. Je considérai plus curieusement, et avec moins de crainte, ce monde d'un avenir éloigné. I looked more curiously, and with less fear, at this world of the distant future. Dans une fenêtre ronde, très haut dans le mur du plus proche édifice, je vis un groupe d'êtres revêtus de riches et souples robes. In a round window, high in the wall of the nearest building, I saw a group of beings clothed in rich and supple robes. Ils m'avaient vu, car leurs visages étaient tournés vers moi. They had seen me, because their faces were turned towards me.

« J'entendis alors des voix qui approchaient. “I then heard voices approaching. Venant à travers les massifs qui entouraient le Sphinx Blanc, je voyais les têtes et les épaules d'hommes qui couraient. Coming through the clumps that surrounded the White Sphinx, I saw the heads and shoulders of running men. L'un d'eux déboucha d'un sentier qui menait droit à la petite pelouse sur laquelle je me trouvais avec ma machine. One of them emerged from a path that led straight to the small lawn on which I was with my machine. C'était une délicate créature, haute d'environ un mètre vingt, vêtue d'une tunique de pourpre retenue à la taille par une ceinture de cuir. Des sandales ou des brodequins (je ne pus voir distinctement) recouvraient ses pieds ; ses jambes étaient nues depuis les genoux ; elle ne portait aucune coiffure. En faisant ces remarques, je m'aperçus pour la première fois de la douceur extrême de l'air. As I made these remarks, I noticed for the first time the extreme softness of the air.

« Je fus frappé par l'aspect de cette créature très belle et gracieuse, mais étonnamment frêle. “I was struck by the appearance of this very beautiful and graceful creature, but surprisingly frail. "Me impresionó el aspecto de esta criatura tan bella y grácil, pero sorprendentemente frágil. Ses joues roses me rappelaient ces beaux visages de phtisiques – cette beauté hectique dont ou nous a tant parlé. Her rosy cheeks reminded me of those beautiful consumptive faces—that hectic beauty that we've talked about so much. À sa vue, je repris soudainement confiance, et mes mains abandonnèrent la machine. » At the sight of it, I suddenly regained my confidence, and my hands left the machine. »