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innerFrench Podcast - Episodes #97 Onward, #113 - Le français belge (3)

#113 - Le français belge (3)

Élisabeth: [00:29:34] Non, bah c'est peut-être effectivement en fait les particularités du français de Belgique sont souvent des transpositions à partir de belgicismes et donc on ne sait plus trop finalement si c'est un belgicisme repris du brusseleir ou quelque chose qui se dit aussi en France. Oui, oui. Donc effectivement, « dikkenek » c'est tel quel la figure type du Bruxellois et de son parler bruxellois.

Hugo: [00:30:09] D'accord. Est-ce que vous pouvez nous donner un ou deux exemples d'expressions ou de mots qui sont très populaires et qui appartiennent au bruxellois ?

Élisabeth: [00:30:17] Oui, bah de nouveau ça va être utilisé dans certaines situations, pas dans toutes, mais… « il fait doef », il fait très chaud pour l'instant en Belgique et je pense en France, « il fait doef ». « Doef », ça s'écrit D-O-E-F. Alors c'est marrant, les Français ont un peu de mal quand ils voient cette [graphie], cette écriture « O-E », ils ne savent pas très bien s'il faut prononcer /e/ ou… Non, en fait c'est… En néerlandais si vous écrivez « O-E » ça se prononce /u/ comme « O-U » en français. Donc notez que quand vous allez boire une Hoegaarden, je ne sais pas si vous connaissez cette marque de bière…

Hugo: [00:30:59] Bien sûr !

Élisabeth: [00:31:00] Ouais, ouais. C'est une bière belge bien connue. Je ne pouvais pas m'empêcher de. Oui donc on prononce Hoegaarden /u/.

Hugo: [00:31:09] D'accord. Ok. C'est vrai que je pense que pour les Français, ça peut porter à confusion. Parce que nous, on a le mot verlan « ouf » que vous connaissez peut-être. Et quand on dit voilà « quelque chose de ouf », pas « d'ouf », mais « de ouf » quelque chose qui est, qui est fou, qui est incroyable. Donc « il fait doef » effectivement ça peut…

Élisabeth: [00:31:30] Il fait doef = il fait très chaud.

Hugo: [00:31:32] Ok, moi je ne l'aurais pas compris sans explication. « Il fait doef » ok. Une expression qui va être de plus en plus utile malheureusement dans les années à venir.

Élisabeth: [00:31:39] Ouais, ouais, ouais. Non… alors il y a aussi le mot « zinneke » qui était très très lié… c'est un « bâtard », une personne, un peu… dont les origines sont plutôt populaires, indéfinies. Au départ, c'est un chien bâtard, mais on l'utilise… Alors ce n'est pas nécessairement une insulte, ce n'est pas un méchant, pour voilà quelqu'un qui a un parcours de vie particulier, qui a des idées… Mais c'est très affectueux, c'est très, c'est sympathique.

Hugo: [00:32:23] « Zinneke », c'est ça ?

Élisabeth: [00:32:25] « Un zinneke », ouais. « Une zine », en fait, c'est une idée bizarre. Donc « zinneke » c'est… donc quand vous avez « eke » c'est plutôt pour quelque chose d'affectueux.

Hugo: [00:32:38] Ok, ok.

Élisabeth: [00:32:39] « Chouke » ! Par exemple, « chouke ». Un « chou » bah, c'est un petit nom sympathique pour une personne qu'on aime. Et à Bruxelles on va dire « chouke », en ajoutant le « ke ».

Hugo: [00:32:50] C'est « petit chou », « mon p'tit chou ».

Élisabeth: [00:32:51] Oui voilà, tout à fait. Ouais, ouais. Ah d'autres encore ? Bah comme je l'ai dit, il y en a plein. Alors il y a François Damiens qui a fait un film qui s'intitule « Mon Ket ». « Un ket », c'est un petit garçon.

Hugo: [00:33:08] D'accord, là aussi c'est… Ok. ok. Je ne sais pas… Si, il a dû sortir en France, mais ça ne me dit rien. Il est sorti il y a longtemps ?

Élisabeth: [00:33:16] Non. Il y a quelques années, trois, quatre ans.

Hugo: [00:33:18] D'accord. Ok.

Élisabeth: [00:33:18] Peut-être qu'effectivement, il a pas eu la même diffusion parce que là, il utilisait vraiment énormément de belgicismes. C'était un film, en fait, qu'il a réalisé avec des caméras cachées. Donc toutes les scènes intégraient des personnes qui ne savaient pas qu'elles étaient filmées.

Hugo: [00:33:49] Maintenant, je vais partager quelques expressions qui, selon nous, les Français, sont belges. Et vous allez nous dire si… si oui ou non, elles le sont. Alors pour commencer…

Élisabeth: [00:34:02] Je ne suis qu'un témoin, hein.

Hugo: [00:34:04] Oui…

Élisabeth: [00:34:04] Mais pas la… Comme je l'ai dit, moi, je suis de Bruxelles, mais après, dans d'autres villes, à Liège, à Namur, à Spa, les gens vont peut-être avoir d'autres manières de le dire.

Hugo: [00:34:16] C'est vrai, moi aussi je suis souvent surpris dans mes vidéos justement parce que, par exemple, dans la vidéo que j'avais faite avec Geneviève sur le français québécois, par moments, je disais : « ah non ça, on ne le dit pas du tout en France » et ensuite dans les commentaires des personnes du Nord, par exemple, me disait : « Ah si si, chez nous, on dit comme ça » etc. Donc c'est vrai que voilà…

Élisabeth: [00:34:36] Oui, oui. Nous, on a très bien compris « la carabistouille » d'Emmanuel Macron quand il était, il avait le débat avec Marine Le Pen, qu'il lui disait « vous dites des carabistouilles ». En Belgique, il y a même un jeu qui s'appelait « Carabistouille ».

Hugo: [00:34:50] D'accord. Ok, ok. C'est vrai qu'Emmanuel Macron a un talent pour ressortir certaines expressions un peu désuètes, un peu démodées, et les remettre sur le devant de la scène.

Élisabeth: [00:35:01] Oui, oui, des mots du Nord de la France, puisque… Bah ici je dis des belgicismes, en tout cas de Bruxelles, mais il y a beaucoup de mots que les Belges francophones utilisent, mais qui s'utilisent aussi dans le Nord, à Roubaix…

Hugo: [00:35:18] Hum, ok. Alors le premier mot, c'est plutôt une expression, c'est « une fois ». Alors ça, ça a été aussi popularisé par Coluche. Et nous, on pense en France que les Belges terminent toutes leurs phrases par « une fois ».

Élisabeth: [00:35:31] « Voulais-je une fois seulement dit ici ? » Non, en fait, ça vient d'une caricature produite par des Belges eux-mêmes. Au début du XXᵉ siècle, il y a une pièce de théâtre qui a eu vraiment beaucoup, beaucoup de succès en Belgique et à Paris, qui s'appelait « Le Mariage de Mademoiselle Beulemans », dans laquelle les auteurs avaient volontairement caricaturé le bruxellois et donc avaient placé des « une fois » dans presque toutes les répliques des personnages. Alors, je vais pas du tout vous dire qu'aucun Belge n'utilise jamais ce « une fois », mais on va beaucoup plus utiliser maintenant, je crois que ça a été beaucoup corrigé, donc les jeunes Belges francophones utilisent peut-être plus « un peu ». Donc : « viens un peu ici » plutôt que « viens une fois ici. »

Hugo: [00:36:20] D'accord ok.

Élisabeth: [00:36:21] Voilà ça arrive, mais placer des « une fois » dans toutes les phrases comme le faisait Coluche, non.

Hugo: [00:36:26] D'accord. Ensuite on a, vous l'avez déjà dit, mais « septante » et « nonante ». Donc ça par contre c'est bien utilisé en Belgique.

Élisabeth: [00:36:34] C'est tellement plus pratique que « soixante-dix », non ?

Hugo: [00:36:39] C'est sûr, c'est sûr. Mais vous avez « quatre-vingt » quand-même.

Élisabeth: [00:36:43] Oh oui, oui. On est resté à mi-chemin. « Quatre-vingt », voilà, c'était une seule multiplication ça… Mais « soixante-dix », non, non. Et alors « quatre-vingt-dix »…

Hugo: [00:36:56] Oui, ça pour les étudiants…

Élisabeth: [00:36:57] Multiplication plus…

Hugo: [00:36:58] Pour les apprenants de français langue étrangère, c'est vraiment le boss final : le « quatre-vingt-dix-neuf ». Ensuite l'expression « il drache » ?

Élisabeth: [00:37:10] Eh oui. Bah de nouveau dans une situation formelle, si je dois m'adresser à mon supérieur hiérarchique, je ne vais pas lui dire : « Oh, qu'est ce qu'il drache », mais dans un contexte familier, oui, bien sûr. Même à la télévision, on parle…

Hugo: [00:37:24] Et qu'est ce que ça veut dire ?

Élisabeth: [00:37:27] « Il pleut beaucoup. » On parle de… Souvent lorsqu'il pleut le jour de la fête nationale, le 21 juillet, les médias vont parler de « la drache nationale. »

Hugo: [00:37:36] D'accord, ok.

Élisabeth: [00:37:38] Mais ça se perd un peu. Effectivement, avec le réchauffement climatique, on a eu moins de drache nationale ces dernières années.

Hugo: [00:37:44] Parce qu'il fait doef.

Élisabeth: [00:37:46] Eh oui.

Hugo: [00:37:47] Et dans le Nord de la France, on utilise aussi « il drache », il me semble. Donc voilà, les frontières administratives ne correspondent pas aux frontières linguistiques.

Élisabeth: [00:37:57] Non.

Hugo: [00:37:59] Ensuite, « une chique ». Qu'est-ce que c'est, une « chique » ?

Élisabeth: [00:38:03] Ah ! Ça, ça va être… Si vous regardez un petit film, une petite vidéo produite par les autorités belges francophones, un film parodique, en fait « une chique » ça va dépendre : à Bruxelles, c'est du chewing-gum, si je peux utiliser un anglicisme. Mais à Liège, à Liège, ça va être une sucrerie. Je ne sais pas si vous utilisez le… En France, vous allez dire « bonbec », peut-être, ou « un bonbon ».

Hugo: [00:38:31] Ouais. Un bonbec.

Élisabeth: [00:38:32] Un « bonbec », on n'utilise pas du tout, du tout ça. Je ne donnerai jamais de bonbecs à mes enfants, tout simplement parce que je vois pas enfin… Je ne sais pas si je demande dans un magasin en Belgique, on va jamais me dire : « ah oui, c'est par là ». Des « bonbons » à Bruxelles et à Liège. Donc Liège, c'est une ville qui se trouve à la frontière des Pays-Bas, près de la frontière des Pays-Bas et de l'Allemagne. Là, « une chique » oui, « un bonbec ». Mais donc effectivement, dans la vidéo, je sais pas si je peux vous mettre des liens, après vers…

Hugo: [00:39:06] Si, si si, bien sûr.

Élisabeth: [00:39:08] C'est un Liégeois et un Bruxellois qui discutent. Et en fait, ils n'arrivent pas à se comprendre. Enfin, Ils se disputent un petit peu, justement parce que les belgicismes qu'ils utilisent ne sont pas les mêmes.

Hugo: [00:39:22] C'est comme avec « une poche » en France où dans le Sud-Ouest « une poche », c'est un sac, un sac plastique pour faire les courses. Alors que dans le reste de la France, c'est simplement les poches d'un pantalon par exemple.

Élisabeth: [00:39:36] Ouais, ouais, ouais.

Hugo: [00:39:37] Ensuite, l'expression « j'te dis quoi », « je te dis quoi ». Dans quel contexte vous l'utilisez ?

Élisabeth: [00:39:43] Oui ! Alors quand on ne s'est pas encore donné, on donne… on n'a pas encore de réponse à donner. Par exemple : « quand est-ce qu'on pourrait se voir ? ». « Attends, je dois d'abord savoir quand sera fixée cette réunion et puis après, je te dis quoi. »

Hugo: [00:40:00] D'accord.

Élisabeth: [00:40:01] Donc c'est pour dire : « pour l'instant, je ne peux pas te donner de réponse, mais bientôt, on va, on va, on va discuter de ça et on fixera on…on aura une réponse. »

Hugo: [00:40:14] Et vous l'utilisez à la forme interrogative aussi ? Est-ce que vous dites « tu me dis quoi » par exemple ?

Élisabeth: [00:40:20] Oui, bien sûr. C'est tellement pratique !

Hugo: [00:40:23] C'est sûr.

Élisabeth: [00:40:24] Mais c'est amusant parce que c'est une structure en fait pour laquelle j'avais pas conscience que c'était un belgicisme. En fait, à l'école, on va plutôt corriger des belgicismes lexicaux du type « dracher » ou… qu'est-ce qu'on avait d'autres qu'on corrigeait beaucoup. Oui, « un brol« , par exemple, que la chanteuse Angèle a utilisé comme titre de son premier album. Mais on ne corrige pas beaucoup les structures syntaxiques ou les expressions. Et donc c'est un étudiant étranger qui me dit : « Ah en fait, qu'est-ce que ça veut dire : « je te dis quoi ? » » Je dis : « Ah t'as pas appris ça en… ? » Et c'est là que je me suis rendu compte qu'en France, ça ne se disait pas.

Hugo: [00:41:12] Ouais, parce que c'est plus utilisé à l'oral aussi, j'imagine. Donc vous le… vous le voyez rarement.

Élisabeth: [00:41:18] Oui à l'écrit peut-être dans un mail informel « je te dis quoi », mais non, effectivement, ça ne s'emploie pas à l'écrit.

Hugo: [00:41:27] D'accord.

Élisabeth: [00:41:28] Bah, c'est pratique comme structure.

Hugo: [00:41:29] Très pratique, très pratique. Effectivement.

Élisabeth: [00:41:31] Plutôt que : « je reviens vers vous avec une réponse. »

Hugo: [00:41:35] Ouais, ouais. Ou comment, de manière plus informelle, je pense qu'on dirait : « je te dis ça ». Nous, on dirait « je te dis ça ».

Élisabeth: [00:41:42] Ouais.

Hugo: [00:41:56] « Je te dis ça plus tard. » Hum. Quand on quitte quelqu'un qu'on va revoir un peu plus tard en français, on dit « à tout à l'heure » et en Belgique, vous avez une autre expression, il me semble.

Élisabeth: [00:41:56] « À tantôt », ouais.

Hugo: [00:41:56] « À tantôt ».

Élisabeth: [00:41:57] « À tantôt » hein. Mais de nouveau, ça s'utilise, c'est à l'oral, c'est familier. Je ne vais pas non plus saluer mon supérieur hiérarchique. Je vais lui dire : « Alors à bientôt », mais pas « à tantôt ». C'est vraiment dans le contexte amical et familier. Mais oui, oui.

#113 - Le français belge (3) #113 - Belgian French (3) #113위 - 벨기에 프랑스어 (3) #113 - Francês belga (3)

Élisabeth: [00:29:34] Non, bah c'est peut-être effectivement en fait les particularités du français de Belgique sont souvent des transpositions à partir de belgicismes et donc on ne sait plus trop finalement si c'est un belgicisme repris du brusseleir ou quelque chose qui se dit aussi en France. Oui, oui. Donc effectivement, « dikkenek » c'est tel quel la figure type du Bruxellois et de son parler bruxellois.

Hugo: [00:30:09] D'accord. Est-ce que vous pouvez nous donner un ou deux exemples d'expressions ou de mots qui sont très populaires et qui appartiennent au bruxellois ?

Élisabeth: [00:30:17] Oui, bah de nouveau ça va être utilisé dans certaines situations, pas dans toutes, mais… « il fait doef », il fait très chaud pour l'instant en Belgique et je pense en France, « il fait doef ». « Doef », ça s'écrit D-O-E-F. Alors c'est marrant, les Français ont un peu de mal quand ils voient cette [graphie], cette écriture « O-E », ils ne savent pas très bien s'il faut prononcer /e/ ou… Non, en fait c'est… En néerlandais si vous écrivez « O-E » ça se prononce /u/ comme « O-U » en français. Donc notez que quand vous allez boire une Hoegaarden, je ne sais pas si vous connaissez cette marque de bière…

Hugo: [00:30:59] Bien sûr !

Élisabeth: [00:31:00] Ouais, ouais. C'est une bière belge bien connue. Je ne pouvais pas m'empêcher de. Oui donc on prononce Hoegaarden /u/.

Hugo: [00:31:09] D'accord. Ok. C'est vrai que je pense que pour les Français, ça peut porter à confusion. Parce que nous, on a le mot verlan « ouf » que vous connaissez peut-être. Et quand on dit voilà « quelque chose de ouf », pas « d'ouf », mais « de ouf » quelque chose qui est, qui est fou, qui est incroyable. Donc « il fait doef » effectivement ça peut…

Élisabeth: [00:31:30] Il fait doef = il fait très chaud.

Hugo: [00:31:32] Ok, moi je ne l'aurais pas compris sans explication. « Il fait doef » ok. Une expression qui va être de plus en plus utile malheureusement dans les années à venir.

Élisabeth: [00:31:39] Ouais, ouais, ouais. Non… alors il y a aussi le mot « zinneke » qui était très très lié… c'est un « bâtard », une personne, un peu… dont les origines sont plutôt populaires, indéfinies. Au départ, c'est un chien bâtard, mais on l'utilise… Alors ce n'est pas nécessairement une insulte, ce n'est pas un méchant, pour voilà quelqu'un qui a un parcours de vie particulier, qui a des idées… Mais c'est très affectueux, c'est très, c'est sympathique.

Hugo: [00:32:23] « Zinneke », c'est ça ?

Élisabeth: [00:32:25] « Un zinneke », ouais. « Une zine », en fait, c'est une idée bizarre. Donc « zinneke » c'est… donc quand vous avez « eke » c'est plutôt pour quelque chose d'affectueux.

Hugo: [00:32:38] Ok, ok.

Élisabeth: [00:32:39] « Chouke » ! Par exemple, « chouke ». Un « chou » bah, c'est un petit nom sympathique pour une personne qu'on aime. Et à Bruxelles on va dire « chouke », en ajoutant le « ke ».

Hugo: [00:32:50] C'est « petit chou », « mon p'tit chou ».

Élisabeth: [00:32:51] Oui voilà, tout à fait. Ouais, ouais. Ah d'autres encore ? Bah comme je l'ai dit, il y en a plein. Alors il y a François Damiens qui a fait un film qui s'intitule « Mon Ket ». « Un ket », c'est un petit garçon.

Hugo: [00:33:08] D'accord, là aussi c'est… Ok. ok. Je ne sais pas… Si, il a dû sortir en France, mais ça ne me dit rien. Il est sorti il y a longtemps ?

Élisabeth: [00:33:16] Non. Il y a quelques années, trois, quatre ans.

Hugo: [00:33:18] D'accord. Ok.

Élisabeth: [00:33:18] Peut-être qu'effectivement, il a pas eu la même diffusion parce que là, il utilisait vraiment énormément de belgicismes. C'était un film, en fait, qu'il a réalisé avec des caméras cachées. Donc toutes les scènes intégraient des personnes qui ne savaient pas qu'elles étaient filmées.

Hugo: [00:33:49] Maintenant, je vais partager quelques expressions qui, selon nous, les Français, sont belges. Et vous allez nous dire si… si oui ou non, elles le sont. Alors pour commencer…

Élisabeth: [00:34:02] Je ne suis qu'un témoin, hein.

Hugo: [00:34:04] Oui…

Élisabeth: [00:34:04] Mais pas la… Comme je l'ai dit, moi, je suis de Bruxelles, mais après, dans d'autres villes, à Liège, à Namur, à Spa, les gens vont peut-être avoir d'autres manières de le dire.

Hugo: [00:34:16] C'est vrai, moi aussi je suis souvent surpris dans mes vidéos justement parce que, par exemple, dans la vidéo que j'avais faite avec Geneviève sur le français québécois, par moments, je disais : « ah non ça, on ne le dit pas du tout en France » et ensuite dans les commentaires des personnes du Nord, par exemple, me disait : « Ah si si, chez nous, on dit comme ça » etc. Donc c'est vrai que voilà…

Élisabeth: [00:34:36] Oui, oui. Nous, on a très bien compris « la carabistouille » d'Emmanuel Macron quand il était, il avait le débat avec Marine Le Pen, qu'il lui disait « vous dites des carabistouilles ». We clearly understood Emmanuel Macron's "nonsense" when he had the debate with Marine Le Pen, and told her "you're talking nonsense". En Belgique, il y a même un jeu qui s'appelait « Carabistouille ».

Hugo: [00:34:50] D'accord. Ok, ok. C'est vrai qu'Emmanuel Macron a un talent pour ressortir certaines expressions un peu désuètes, un peu démodées, et les remettre sur le devant de la scène. It's true that Emmanuel Macron has a talent for bringing out certain expressions that are a little outdated, a little old-fashioned, and putting them back in the spotlight.

Élisabeth: [00:35:01] Oui, oui, des mots du Nord de la France, puisque… Bah ici je dis des belgicismes, en tout cas de Bruxelles, mais il y a beaucoup de mots que les Belges francophones utilisent, mais qui s'utilisent aussi dans le Nord, à Roubaix…

Hugo: [00:35:18] Hum, ok. Alors le premier mot, c'est plutôt une expression, c'est « une fois ». Alors ça, ça a été aussi popularisé par Coluche. Et nous, on pense en France que les Belges terminent toutes leurs phrases par « une fois ».

Élisabeth: [00:35:31] « Voulais-je une fois seulement dit ici ? » Non, en fait, ça vient d'une caricature produite par des Belges eux-mêmes. Au début du XXᵉ siècle, il y a une pièce de théâtre qui a eu vraiment beaucoup, beaucoup de succès en Belgique et à Paris, qui s'appelait « Le Mariage de Mademoiselle Beulemans », dans laquelle les auteurs avaient volontairement caricaturé le bruxellois et donc avaient placé des « une fois » dans presque toutes les répliques des personnages. Alors, je vais pas du tout vous dire qu'aucun Belge n'utilise jamais ce « une fois », mais on va beaucoup plus utiliser maintenant, je crois que ça a été beaucoup corrigé, donc les jeunes Belges francophones utilisent peut-être plus « un peu ». Donc : « viens un peu ici » plutôt que « viens une fois ici. »

Hugo: [00:36:20] D'accord ok.

Élisabeth: [00:36:21] Voilà ça arrive, mais placer des « une fois » dans toutes les phrases comme le faisait Coluche, non.

Hugo: [00:36:26] D'accord. Ensuite on a, vous l'avez déjà dit, mais « septante » et « nonante ». Donc ça par contre c'est bien utilisé en Belgique.

Élisabeth: [00:36:34] C'est tellement plus pratique que « soixante-dix », non ?

Hugo: [00:36:39] C'est sûr, c'est sûr. Mais vous avez « quatre-vingt » quand-même.

Élisabeth: [00:36:43] Oh oui, oui. On est resté à mi-chemin. « Quatre-vingt », voilà, c'était une seule multiplication ça… Mais « soixante-dix », non, non. Et alors « quatre-vingt-dix »…

Hugo: [00:36:56] Oui, ça pour les étudiants…

Élisabeth: [00:36:57] Multiplication plus…

Hugo: [00:36:58] Pour les apprenants de français langue étrangère, c'est vraiment le boss final : le « quatre-vingt-dix-neuf ». Ensuite l'expression « il drache » ?

Élisabeth: [00:37:10] Eh oui. Bah de nouveau dans une situation formelle, si je dois m'adresser à mon supérieur hiérarchique, je ne vais pas lui dire : « Oh, qu'est ce qu'il drache », mais dans un contexte familier, oui, bien sûr. Même à la télévision, on parle…

Hugo: [00:37:24] Et qu'est ce que ça veut dire ?

Élisabeth: [00:37:27] « Il pleut beaucoup. » On parle de… Souvent lorsqu'il pleut le jour de la fête nationale, le 21 juillet, les médias vont parler de « la drache nationale. »

Hugo: [00:37:36] D'accord, ok.

Élisabeth: [00:37:38] Mais ça se perd un peu. Effectivement, avec le réchauffement climatique, on a eu moins de drache nationale ces dernières années.

Hugo: [00:37:44] Parce qu'il fait doef.

Élisabeth: [00:37:46] Eh oui.

Hugo: [00:37:47] Et dans le Nord de la France, on utilise aussi « il drache », il me semble. Donc voilà, les frontières administratives ne correspondent pas aux frontières linguistiques.

Élisabeth: [00:37:57] Non.

Hugo: [00:37:59] Ensuite, « une chique ». Qu'est-ce que c'est, une « chique » ?

Élisabeth: [00:38:03] Ah ! Ça, ça va être… Si vous regardez un petit film, une petite vidéo produite par les autorités belges francophones, un film parodique, en fait « une chique » ça va dépendre : à Bruxelles, c'est du chewing-gum, si je peux utiliser un anglicisme. Mais à Liège, à Liège, ça va être une sucrerie. Je ne sais pas si vous utilisez le… En France, vous allez dire « bonbec », peut-être, ou « un bonbon ».

Hugo: [00:38:31] Ouais. Un bonbec.

Élisabeth: [00:38:32] Un « bonbec », on n'utilise pas du tout, du tout ça. Je ne donnerai jamais de bonbecs à mes enfants, tout simplement parce que je vois pas enfin… Je ne sais pas si je demande dans un magasin en Belgique, on va jamais me dire : « ah oui, c'est par là ». Des « bonbons » à Bruxelles et à Liège. Donc Liège, c'est une ville qui se trouve à la frontière des Pays-Bas, près de la frontière des Pays-Bas et de l'Allemagne. Là, « une chique » oui, « un bonbec ». Mais donc effectivement, dans la vidéo, je sais pas si je peux vous mettre des liens, après vers…

Hugo: [00:39:06] Si, si si, bien sûr.

Élisabeth: [00:39:08] C'est un Liégeois et un Bruxellois qui discutent. Et en fait, ils n'arrivent pas à se comprendre. Enfin, Ils se disputent un petit peu, justement parce que les belgicismes qu'ils utilisent ne sont pas les mêmes.

Hugo: [00:39:22] C'est comme avec « une poche » en France où dans le Sud-Ouest « une poche », c'est un sac, un sac plastique pour faire les courses. Alors que dans le reste de la France, c'est simplement les poches d'un pantalon par exemple.

Élisabeth: [00:39:36] Ouais, ouais, ouais.

Hugo: [00:39:37] Ensuite, l'expression « j'te dis quoi », « je te dis quoi ». Dans quel contexte vous l'utilisez ?

Élisabeth: [00:39:43] Oui ! Alors quand on ne s'est pas encore donné, on donne… on n'a pas encore de réponse à donner. Par exemple : « quand est-ce qu'on pourrait se voir ? ». « Attends, je dois d'abord savoir quand sera fixée cette réunion et puis après, je te dis quoi. »

Hugo: [00:40:00] D'accord.

Élisabeth: [00:40:01] Donc c'est pour dire : « pour l'instant, je ne peux pas te donner de réponse, mais bientôt, on va, on va, on va discuter de ça et on fixera on…on aura une réponse. »

Hugo: [00:40:14] Et vous l'utilisez à la forme interrogative aussi ? Est-ce que vous dites « tu me dis quoi » par exemple ?

Élisabeth: [00:40:20] Oui, bien sûr. C'est tellement pratique !

Hugo: [00:40:23] C'est sûr.

Élisabeth: [00:40:24] Mais c'est amusant parce que c'est une structure en fait pour laquelle j'avais pas conscience que c'était un belgicisme. En fait, à l'école, on va plutôt corriger des belgicismes lexicaux du type « dracher » ou… qu'est-ce qu'on avait d'autres qu'on corrigeait beaucoup. Oui, « un brol« , par exemple, que la chanteuse Angèle a utilisé comme titre de son premier album. Mais on ne corrige pas beaucoup les structures syntaxiques ou les expressions. Et donc c'est un étudiant étranger qui me dit : « Ah en fait, qu'est-ce que ça veut dire : « je te dis quoi ? » » Je dis : « Ah t'as pas appris ça en… ? » Et c'est là que je me suis rendu compte qu'en France, ça ne se disait pas.

Hugo: [00:41:12] Ouais, parce que c'est plus utilisé à l'oral aussi, j'imagine. Donc vous le… vous le voyez rarement.

Élisabeth: [00:41:18] Oui à l'écrit peut-être dans un mail informel « je te dis quoi », mais non, effectivement, ça ne s'emploie pas à l'écrit.

Hugo: [00:41:27] D'accord.

Élisabeth: [00:41:28] Bah, c'est pratique comme structure.

Hugo: [00:41:29] Très pratique, très pratique. Effectivement.

Élisabeth: [00:41:31] Plutôt que : « je reviens vers vous avec une réponse. »

Hugo: [00:41:35] Ouais, ouais. Ou comment, de manière plus informelle, je pense qu'on dirait : « je te dis ça ». Nous, on dirait « je te dis ça ».

Élisabeth: [00:41:42] Ouais.

Hugo: [00:41:56] « Je te dis ça plus tard. » Hum. Quand on quitte quelqu'un qu'on va revoir un peu plus tard en français, on dit « à tout à l'heure » et en Belgique, vous avez une autre expression, il me semble.

Élisabeth: [00:41:56] « À tantôt », ouais.

Hugo: [00:41:56] « À tantôt ».

Élisabeth: [00:41:57] « À tantôt » hein. Mais de nouveau, ça s'utilise, c'est à l'oral, c'est familier. Je ne vais pas non plus saluer mon supérieur hiérarchique. Je vais lui dire : « Alors à bientôt », mais pas « à tantôt ». C'est vraiment dans le contexte amical et familier. Mais oui, oui.