×

Usamos cookies para ayudar a mejorar LingQ. Al visitar este sitio, aceptas nuestras politicas de cookie.


image

innerFrench Podcast - Episodes #97 Onward, #113 - Le français belge (2)

#113 - Le français belge (2)

Hugo: [00:15:20] C'est vrai, il me semble que dans le Sud de la France, ils ont tendance aussi à prononcer les /o/ de manière plus ouverte, ce qui se rapproche peut-être plus de la prononciation belge, comme vous l'avez dit avec « vélo » /ɔ/.

Élisabeth: [00:15:32] Oui, oui.

Hugo: [00:15:34] Il me semble que c'est le cas aussi dans le Sud de la France.

Élisabeth: [00:15:36] Dans le Sud de la France en fait tout ce qui normalement est… tout ce qui est écrit « A-U » suivi d'une consonne, donc par exemple « elle saute » /ɔ/ pour « elle saute » /o/. « Elle saute en l'air » /o/ = « elle saute en l'air » /ɔ/.

Mais oui, donc oui, il y a quelques particularités, même si c'est beaucoup moins marqué que pour le français québécois. Je crois que là… Alors il n'y a pas tellement, tellement de films ou de séries télévisées belges qui passent à la télévision française, mais en fait, ce qui… si c'est le cas, ce qui va être demandé aux comédiens, c'est de se redoubler entre guillemets, de… par exemple de redire certaines phrases qui contenaient des belgicismes, mais beaucoup moins pour… pour faciliter la compréhension. D'ailleurs, la plupart des étudiants étrangers qui viennent ici me disent : « Ah, j'avais peur de rien comprendre en arrivant. Et pourtant, c'est pas tellement différent de ce que j'entendais dans mes cours de français donnés par un Français. »

Hugo: [00:16:48] Hum. Vous voulez dire qu'on attend des acteurs qu'ils forcent encore leurs particularismes ? C'est ça ? Qu'ils exagèrent ?

Élisabeth: [00:16:56] Ah pour les séries télévisées ? Non, en fait pour… donc les séries télévisées belges, produites en Belgique par des acteurs belges, si elles doivent passer à la télévision française, ce qu'on va demander aux comédiens, c'est de redire certaines phrases sans les belgicismes. Donc par exemple, si dans une phrase ils ont dit : « Ah, je vais téléphoner, donne-moi mon GSM ! » Ils vont devoir redire la phrase : « Je vais téléphoner, donne-moi, passe-moi mon portable. »

Hugo: [00:17:23] D'accord.

Élisabeth: [00:17:25] Et évidemment, peut-être pour certaines particularités, mais sous-titrer totalement la série, comme ça pourrait… ou le film, comme ça pourrait se faire pour des films québécois, non.

Hugo: [00:17:35] D'accord. Ok, ok. C'est vrai que, à ma connaissance, il me semble que sur Netflix, il y a eu quelques séries belges assez populaires qui ont bien marché en France aussi. Mais même de manière plus générale, les acteurs et actrices belges sont très très populaires en France et très très demandés. Benoît Poelvoorde, évidemment, François Damiens, Virginie Efira, etc. Et c'est assez intéressant de voir comment ils adaptent leur façon de parler selon les films, selon les rôles qu'ils doivent jouer. Je pense à Poelvoorde notamment qui, voilà d'un film à l'autre, sa façon de s'exprimer et ses… les particularismes belges s'entendent plus ou moins en fait.

Élisabeth: [00:18:17] Ouais, ouais, mais c'est… Vous, ne vous en rendez pas compte, mais ça fait presque partie du programme scolaire de prendre conscience des différences entre le français de Belgique et la variété tant admirée et contemplée du français de France qui est complètement idéalisé.

Hugo: [00:18:37] Le fameux français standard.

Élisabeth: [00:18:39] Ouais, ouais. Pour vous donner une anecdote, dans les années soixante et septante (soixante-dix), on avait… la télévision publique diffusait des émissions de « La Quinzaine du bon langage » où on expliquait au public qu'il ne fallait pas prononcer tel mot, qu'il ne fallait pas prononcer de telle manière ce qu'il n'y aurait pas vraiment, j'imagine mal sur France 2 une émission : « Attention, vous parlez mal français ».

Hugo: [00:19:13] On a l'Académie française qui s'en charge très bien, donc…

Élisabeth: [00:19:16] Oui, oui, oui, oui.

Hugo: [00:19:17] Ils n'ont pas d'émission télé, c'est vrai, mais…

Élisabeth: [00:19:19] Mais il y a une conscience en fait dans la mentalité belge du : « Attention, le français n'est pas tout à fait notre langue. On doit toujours mieux prouver qu'on le parle, qu'on le parle mieux, même si c'est notre langue maternelle. »

Hugo: [00:19:33] Ouais. J'ai l'impression que c'est en train de changer justement grâce à ces acteurs et actrices ou des artistes comme Stromae, Angèle, etc., revendiquent au contraire leur « belgitude » entre guillemets. Et maintenant en France, c'est un peu en train de devenir cool, justement et au lieu de se moquer de ces belgicismes, on a tendance à essayer de se les approprier. Donc c'est intéressant de voir ces évolutions qui sont plus liées finalement à la culture qu'à la linguistique.

Élisabeth: [00:20:04] Oui, oui. Oui, c'est un mouvement aussi assez général dans d'autres grandes aires linguistiques. Dans les pays anglophones aussi. Mais oui oui. Ça, la francophonie, pas uniquement avec le Paris comme centre.

Hugo: [00:20:28] On essaye d'être un peu moins franco-centré. J'ai l'impression.

Élisabeth: [00:20:31] Oui. Bah en tout cas, en Belgique, il y a un petit retour effectivement à une… je ne veux pas dire une fierté parce que fier d'être belge, c'est très compliqué, mais une acceptation de soi au lieu d'avoir cette… ce regard totalement admiratif par rapport à la France. Oui, oui, oui et des belgicismes… Beh en fait, ce ne serait pas possible d'empêcher… enfin de supprimer tous les belgicismes de la manière dont les Belges parlent français, puisque si on prend… Bon, là, j'en ai pris un, il y a d'autres versions du « dictionnaire des belgicismes ». Il y en a ! Et il y en a, et il y en a, et il y en a…

Hugo: [00:21:16] Waouh, c'est assez épais.

Élisabeth: [00:21:19] Oui, oui, oui. Oui, oui. Donc on peut commencer à indiquer à un enfant tous les belgicismes qu'il ne devrait pas prononcer s'il veut parler un bon français, mais on s'est finalement rendu compte que ça n'avait pas beaucoup de sens et que c'était peut-être en fait dommage de perdre [certaines aspects] certains aspects, certaines particularités.

Hugo: [00:21:44] D'accord.

Élisabeth: [00:21:44] Mais oui, oui, pour la prononciation, on va prononcer un « wagon » /wa/, un « wc » /we/ et pas le « W » comme le « V ».

Hugo: [00:21:53] Exactement.

Élisabeth: [00:21:53] Vu le contact en fait avec des langues proches de l'anglais, parce que le néerlandais est une langue de la même famille que l'anglais, hein. Si vous apprenez le néerlandais, vous allez vous rendre compte que, par exemple, « eten » c'est « manger » comme en anglais « to eat ». Donc il y a beaucoup, beaucoup de mots très proches.

Hugo: [00:22:15] Ce qui est finalement plus logique parce que nous on prononce les « W » /w/ comme « les watts » par exemple. Mais effectivement, pour certains mots comme « wagon » donc on dit pas « wagon » /w/, mais « wagon » /v/. Et “WC” /vece/ ou « double-V-C” parfois. Alors que vous êtes plus cohérents finalement en Belgique.

Élisabeth: [00:22:40] Oh non, non plus cohérent ça… Non, non. Vu les particularités politiques, les incohérences ne manquent pas.

Hugo: [00:22:53] Hum. Il me semble que les lettres « U-I » aussi vous les prononcez de manière un peu différente par rapport à nous, donc le chiffre nous on dit « huit » /ɥi/. Et vous dites ?

Élisabeth: [00:23:06] « Huit » /wi/ comme un « oui » en fait, comme le mot pour accepter. Donc on va dire « cuit » /wi/. Alors tous les francophones ne le prononcent pas de manière aussi caractéristique, mais « cuisine » avec un… comme si on prononçait /kwi/ avec « oui ». C'est vrai, c'est vrai. Parfois j'essaye de corriger ça ou de… mais si je demande par exemple à mon téléphone de programmer « huit minutes » /ɥi/ avec la commande vocale, je vais toujours dire « huit minutes” /wi/ et il comprend pas, ça ne s'enclenche pas.

Hugo: [00:23:47] Donc, il ont le… Oui, je pense que ça dépend des systèmes d'opération et parce que parfois, je sais que pour le québécois, par exemple, ils ont une version français québécois, mais peut-être pas pour le français belge. Et le mot « bruit » /ɥi/, par exemple, vous dites « bruit »/wi/ ?

Élisabeth: [00:24:03] Ça peut arriver. Ouais ouais, « un bruit » /wi/.

Hugo: [00:24:06] D'accord. Ok, ok. Et au niveau de la prononciation, le dernier mot qui est assez drôle parce que nous, les Français, on vous corrige sur le nom de votre capitale, parce qu'on a tendance à le prononcer « Bruxelles », alors que c'est « Bruxelles ».

Élisabeth: [00:24:23] C'est Bruxelles. Et quand vous prononcez « soixante », vous prononcez « soixante » ? Non, mais de toute façon, la graphie je ne sais pas très bien d'où vient le « X » parce que c'était « S-C » comme dans « science », en fait donc « Bruscella » avec « S-C ». Je ne sais pas quand est apparue l'écriture avec le « X ». Ah mais oui, oui. « Bruxelles » bien sûr, hein ? « Brussels ».

Hugo: [00:24:53] « Bruxelles » donc. Et non pas « Bruxelles », donc ça c'est pour tous les francophones français qui vont nous regarder.

Élisabeth: [00:24:56] Mais tous les Français effectivement, tous les Français prononcent « Bruxelles ». Et les habitants de Bruxelles savent qu'un Français s'adresse à eux quand il prononce « Bruxelles ». Ah ouais.

Hugo: [00:25:10] On est repéré tout de suite.

Élisabeth: [00:25:11] Les Belges sont repérés tout de suite en France, mais ne croyez pas que le contraire ne soit pas le cas.

Hugo: [00:25:30] Donc on va passer peut-être à la partie lexique et on va parler un peu des belgicismes. Et pour commencer, on l'a abordé rapidement, mais est-ce que vous pourriez nous en dire plus sur ce qu'on appelle le parler bruxellois ?

Élisabeth: [00:25:46] En fait, comme je… donc le brusseleir, c'était un dialecte. C'est toujours hein, il y a très très peu mais encore quelques personnes qui parlent assez couramment le brusseleir. C'est un dialecte, c'est un type de langue, de la même famille que le néerlandais, donc la famille des langues : néerlandais, anglais, allemand. On appelle ça des langues germaniques. Et ce parler est resté dans, pour beaucoup de mots, dans la manière dont parlent les personnes dans des situations familières ou les personnes d'origine populaire. Mais disons que, en fait, ce qui est considéré, ce qui est décrit comme bruxellois, c'est un français qui reprend, qui intègre beaucoup de ces mots d'origine brusseleir. Donc beaucoup, beaucoup de mots que les Bruxellois, dans des situations familières, populaires, utilisent sont en fait des mots de cette langue, puisque c'est une langue, hein. Alors il existe des vidéos avec de vieux Bruxellois qui vous proposent quelques phrases… d'apprendre quelques phrases en bruxellois. Et alors moi je suis née à Bruxelles, mais je ne parle pas du tout le bruxellois, mais je connais très très bien les mots qui sont couramment repris dans cette espèce de variété de français qui est finalement le bruxellois. Mais c'est… La syntaxe, c'est du [français], enfin la structure des phrases et du français, la plupart des mots courants sont du français. Mais effectivement voilà, il y a pas mal de mots… C'est ça qu'on va retrouver dans des films où on vous présente, dans lesquels apparaît un personnage de Bruxellois authentique. Mais c'est un type de personnage. Je suis tout autant une Bruxelloise authentique puisque je suis née là et j'habite à Bruxelles. Mais si vous avez un extrait d'un film dans lequel ils montrent bien que le personnage essaye d'apprendre à une femme étrangère à se faire passer pour une Belge. Attention, si tu es plutôt de tel quartier de Bruxelles tu dois parler comme ça si tu… Bruxelles est une ville comme Paris avec des quartiers différents, des catégories sociales différentes. Mais le bruxellois, effectivement, c'est cette image d'une personne bon vivante et populaire qui n'hésite pas à utiliser dans son français beaucoup de mots du dialecte brusseleir.

Hugo: [00:28:42] D'accord, je pense au film « Dikkenek ». Est-ce que « Dikkenek », c'est un mot justement du parler bruxellois ?

Élisabeth: [00:28:48] Ouais ouais. Ouais donc « dikk », c'est « gros » et « nek » c'est la nuque en fait le cou. Donc oui, ça veut dire « gros cou ». Ça existe aussi en français je pense cette expression « avoir le gros cou », être une personne arrogante, trop sûre d'elle, non ?

Hugo: [00:29:10] On dit « avoir les chevilles qui enflent« . Je sais pas si vous avez cette expression aussi ? « Avoir les chevilles qui enflent », c'est justement quand on a une espèce de fierté un peu excessive. On dit « prendre le melon » aussi, donc « avoir une grosse tête », voilà, « prendre le melon », mais un « gros cou » ? Moi, je l'ai jamais entendu, mais peut-être, peut-être dans certaines régions, peut-être dans le Nord, mais c'est possible.

#113 - Le français belge (2) #113 - Belgian French (2) #113位 - ベルギー・フレンチ (2) #113 - Francês belga (2) #113 - Belgiska Franska (2) #113 - Belçika Fransızcası (2)

Hugo: [00:15:20] C'est vrai, il me semble que dans le Sud de la France, ils ont tendance aussi à prononcer les /o/ de manière plus ouverte, ce qui se rapproche peut-être plus de la prononciation belge, comme vous l'avez dit avec « vélo » /ɔ/. Hugo: [00:15:20] It's true, it seems to me that in the South of France, they also tend to pronounce the /o/ in a more open way, which is perhaps closer to the Belgian pronunciation, as you said with "bicycle" /ɔ/.

Élisabeth: [00:15:32] Oui, oui.

Hugo: [00:15:34] Il me semble que c'est le cas aussi dans le Sud de la France.

Élisabeth: [00:15:36] Dans le Sud de la France en fait tout ce qui normalement est… tout ce qui est écrit « A-U » suivi d'une consonne, donc par exemple « elle saute » /ɔ/ pour « elle saute » /o/. « Elle saute en l'air » /o/ = « elle saute en l'air » /ɔ/.

Mais oui, donc oui, il y a quelques particularités, même si c'est beaucoup moins marqué que pour le français québécois. Je crois que là… Alors il n'y a pas tellement, tellement de films ou de séries télévisées belges qui passent à la télévision française, mais en fait, ce qui… si c'est le cas, ce qui va être demandé aux comédiens, c'est de se redoubler entre guillemets, de… par exemple de redire certaines phrases qui contenaient des belgicismes, mais beaucoup moins pour… pour faciliter la compréhension. I believe that there... So there are not so many Belgian films or television series that are shown on French television, but in fact, what... if so, what will be asked of the actors , it is to repeat oneself in quotation marks, to… for example to repeat certain sentences which contained belgicisms, but much less for… to facilitate understanding. D'ailleurs, la plupart des étudiants étrangers qui viennent ici me disent : « Ah, j'avais peur de rien comprendre en arrivant. Moreover, most of the foreign students who come here tell me: “Ah, I was afraid of not understanding anything when I arrived. Et pourtant, c'est pas tellement différent de ce que j'entendais dans mes cours de français donnés par un Français. And yet, it's not so different from what I heard in my French lessons given by a Frenchman. »

Hugo: [00:16:48] Hum. Vous voulez dire qu'on attend des acteurs qu'ils forcent encore leurs particularismes ? You mean that we expect actors to force their particularisms again? C'est ça ? Qu'ils exagèrent ? Are they exaggerating?

Élisabeth: [00:16:56] Ah pour les séries télévisées ? Elisabeth: [00:16:56] Ah for television series? Non, en fait pour… donc les séries télévisées belges, produites en Belgique par des acteurs belges, si elles doivent passer à la télévision française, ce qu'on va demander aux comédiens, c'est de redire certaines phrases sans les belgicismes. No, in fact for… therefore Belgian television series, produced in Belgium by Belgian actors, if they are to be shown on French television, what we are going to ask the actors is to repeat certain sentences without the Belgianisms. Donc par exemple, si dans une phrase ils ont dit : « Ah, je vais téléphoner, donne-moi mon GSM ! So for example, if in one sentence they said: "Ah, I'm going to call, give me my mobile!" » Ils vont devoir redire la phrase : « Je vais téléphoner, donne-moi, passe-moi mon portable. They will have to repeat the sentence: "I'm going to call, give me, pass me my cell phone." »

Hugo: [00:17:23] D'accord.

Élisabeth: [00:17:25] Et évidemment, peut-être pour certaines particularités, mais sous-titrer totalement la série, comme ça pourrait… ou le film, comme ça pourrait se faire pour des films québécois, non. Élisabeth: [00:17:25] And obviously, maybe for certain particularities, but completely subtitling the series, as that could... or the film, as that could be done for Quebec films, no.

Hugo: [00:17:35] D'accord. Ok, ok. C'est vrai que, à ma connaissance, il me semble que sur Netflix, il y a eu quelques séries belges assez populaires qui ont bien marché en France aussi. It's true that, to my knowledge, it seems to me that on Netflix, there have been some fairly popular Belgian series which have also worked well in France. Mais même de manière plus générale, les acteurs et actrices belges sont très très populaires en France et très très demandés. But even more generally, Belgian actors and actresses are very, very popular in France and very much in demand. Benoît Poelvoorde, évidemment, François Damiens, Virginie Efira, etc. Et c'est assez intéressant de voir comment ils adaptent leur façon de parler selon les films, selon les rôles qu'ils doivent jouer. Je pense à Poelvoorde notamment qui, voilà d'un film à l'autre, sa façon de s'exprimer et ses… les particularismes belges s'entendent plus ou moins en fait. I'm thinking of Poelvoorde in particular who, from one film to another, there is his way of expressing himself and his… the Belgian particularisms are more or less agreeable in fact.

Élisabeth: [00:18:17] Ouais, ouais, mais c'est… Vous, ne vous en rendez pas compte, mais ça fait presque partie du programme scolaire de prendre conscience des différences entre le français de Belgique et la variété tant admirée et contemplée du français de France qui est complètement idéalisé. Élisabeth: [00:18:17] Yeah, yeah, but it's... You don't realize it, but it's almost part of the school curriculum to become aware of the differences between Belgian French and the much-admired variety and contemplated by the French of France which is completely idealized.

Hugo: [00:18:37] Le fameux français standard. Hugo: [00:18:37] The famous standard French.

Élisabeth: [00:18:39] Ouais, ouais. Pour vous donner une anecdote, dans les années soixante et septante (soixante-dix), on avait… la télévision publique diffusait des émissions de « La Quinzaine du bon langage » où on expliquait au public qu'il ne fallait pas prononcer tel mot, qu'il ne fallait pas prononcer de telle manière ce qu'il n'y aurait pas vraiment, j'imagine mal sur France 2 une émission : « Attention, vous parlez mal français ». To give you an anecdote, in the sixties and seventies (seventies), we had… the public television broadcast programs of “La Quinzaine du bon langue” where we explained to the public that it was not necessary to pronounce such and such a word, that it was not necessary to pronounce in such a way what there would not really be, I imagine badly on France 2 a emission: “Attention, you speak French badly”.

Hugo: [00:19:13] On a l'Académie française qui s'en charge très bien, donc… Hugo: [00:19:13] We have the French Academy which takes care of it very well, so…

Élisabeth: [00:19:16] Oui, oui, oui, oui.

Hugo: [00:19:17] Ils n'ont pas d'émission télé, c'est vrai, mais… Hugo: [00:19:17] They don't have a TV show, it's true, but...

Élisabeth: [00:19:19] Mais il y a une conscience en fait dans la mentalité belge du : « Attention, le français n'est pas tout à fait notre langue. Élisabeth: [00:19:19] But there is in fact an awareness in the Belgian mentality of: “Attention, French is not quite our language. On doit toujours mieux prouver qu'on le parle, qu'on le parle mieux, même si c'est notre langue maternelle. We always have to prove better that we speak it, that we speak it better, even if it is our mother tongue. »

Hugo: [00:19:33] Ouais. J'ai l'impression que c'est en train de changer justement grâce à ces acteurs et actrices ou des artistes comme Stromae, Angèle, etc., revendiquent au contraire leur « belgitude » entre guillemets. Et maintenant en France, c'est un peu en train de devenir cool, justement et au lieu de se moquer de ces belgicismes, on a tendance à essayer de se les approprier. And now in France, it's becoming a bit cool, precisely and instead of making fun of these Belgianisms, we tend to try to appropriate them. Donc c'est intéressant de voir ces évolutions qui sont plus liées finalement à la culture qu'à la linguistique. So it's interesting to see these developments which are ultimately more linked to culture than to linguistics.

Élisabeth: [00:20:04] Oui, oui. Oui, c'est un mouvement aussi assez général dans d'autres grandes aires linguistiques. Dans les pays anglophones aussi. Mais oui oui. Ça, la francophonie, pas uniquement avec le Paris comme centre. That, the Francophonie, not only with Paris as the center.

Hugo: [00:20:28] On essaye d'être un peu moins franco-centré. J'ai l'impression.

Élisabeth: [00:20:31] Oui. Bah en tout cas, en Belgique, il y a un petit retour effectivement à une… je ne veux pas dire une fierté parce que fier d'être belge, c'est très compliqué, mais une acceptation de soi au lieu d'avoir cette… ce regard totalement admiratif par rapport à la France. Well in any case, in Belgium, there is indeed a small return to a... I don't mean a pride because proud to be Belgian, it's very complicated, but a self-acceptance instead of having this … this totally admiring gaze in relation to France. Oui, oui, oui et des belgicismes… Beh en fait, ce ne serait pas possible d'empêcher… enfin de supprimer tous les belgicismes de la manière dont les Belges parlent français, puisque si on prend… Bon, là, j'en ai pris un, il y a d'autres versions du « dictionnaire des belgicismes ». Yes, yes, yes and Belgicisms… Well, in fact, it wouldn't be possible to prevent… finally to remove all Belgicisms from the way Belgians speak French, since if we take… Well, there, I have some taken one, there are other versions of the “dictionary of belgicisms”. Il y en a ! There are! Et il y en a, et il y en a, et il y en a… And there are, and there are, and there are...

Hugo: [00:21:16] Waouh, c'est assez épais. Hugo: [00:21:16] Wow, that's pretty thick.

Élisabeth: [00:21:19] Oui, oui, oui. Oui, oui. Donc on peut commencer à indiquer à un enfant tous les belgicismes qu'il ne devrait pas prononcer s'il veut parler un bon français, mais on s'est finalement rendu compte que ça n'avait pas beaucoup de sens et que c'était peut-être en fait dommage de perdre [certaines aspects] certains aspects, certaines particularités.

Hugo: [00:21:44] D'accord.

Élisabeth: [00:21:44] Mais oui, oui, pour la prononciation, on va prononcer un « wagon » /wa/, un « wc » /we/ et pas le « W » comme le « V ».

Hugo: [00:21:53] Exactement.

Élisabeth: [00:21:53] Vu le contact en fait avec des langues proches de l'anglais, parce que le néerlandais est une langue de la même famille que l'anglais, hein. Si vous apprenez le néerlandais, vous allez vous rendre compte que, par exemple, « eten » c'est « manger » comme en anglais « to eat ». If you learn Dutch, you will realize that, for example, "eten" is "to eat" as in English "to eat". Donc il y a beaucoup, beaucoup de mots très proches.

Hugo: [00:22:15] Ce qui est finalement plus logique parce que nous on prononce les « W » /w/ comme « les watts » par exemple. Mais effectivement, pour certains mots comme « wagon » donc on dit pas « wagon » /w/, mais « wagon » /v/. Et “WC” /vece/ ou « double-V-C” parfois. Alors que vous êtes plus cohérents finalement en Belgique.

Élisabeth: [00:22:40] Oh non, non plus cohérent ça… Non, non. Vu les particularités politiques, les incohérences ne manquent pas. Given the political peculiarities, inconsistencies abound.

Hugo: [00:22:53] Hum. Il me semble que les lettres « U-I » aussi vous les prononcez de manière un peu différente par rapport à nous, donc le chiffre nous on dit « huit » /ɥi/. Et vous dites ?

Élisabeth: [00:23:06] « Huit » /wi/ comme un « oui » en fait, comme le mot pour accepter. Donc on va dire « cuit » /wi/. Alors tous les francophones ne le prononcent pas de manière aussi caractéristique, mais « cuisine » avec un… comme si on prononçait /kwi/ avec « oui ». C'est vrai, c'est vrai. Parfois j'essaye de corriger ça ou de… mais si je demande par exemple à mon téléphone de programmer « huit minutes » /ɥi/ avec la commande vocale, je vais toujours dire « huit minutes” /wi/ et il comprend pas, ça ne s'enclenche pas.

Hugo: [00:23:47] Donc, il ont le… Oui, je pense que ça dépend des systèmes d'opération et parce que parfois, je sais que pour le québécois, par exemple, ils ont une version français québécois, mais peut-être pas pour le français belge. Et le mot « bruit » /ɥi/, par exemple, vous dites « bruit »/wi/ ?

Élisabeth: [00:24:03] Ça peut arriver. Ouais ouais, « un bruit » /wi/.

Hugo: [00:24:06] D'accord. Ok, ok. Et au niveau de la prononciation, le dernier mot qui est assez drôle parce que nous, les Français, on vous corrige sur le nom de votre capitale, parce qu'on a tendance à le prononcer « Bruxelles », alors que c'est « Bruxelles ».

Élisabeth: [00:24:23] C'est Bruxelles. Et quand vous prononcez « soixante », vous prononcez « soixante » ? Non, mais de toute façon, la graphie je ne sais pas très bien d'où vient le « X » parce que c'était « S-C » comme dans « science », en fait donc « Bruscella » avec « S-C ». Je ne sais pas quand est apparue l'écriture avec le « X ». Ah mais oui, oui. « Bruxelles » bien sûr, hein ? « Brussels ».

Hugo: [00:24:53] « Bruxelles » donc. Et non pas « Bruxelles », donc ça c'est pour tous les francophones français qui vont nous regarder.

Élisabeth: [00:24:56] Mais tous les Français effectivement, tous les Français prononcent « Bruxelles ». Et les habitants de Bruxelles savent qu'un Français s'adresse à eux quand il prononce « Bruxelles ». Ah ouais.

Hugo: [00:25:10] On est repéré tout de suite.

Élisabeth: [00:25:11] Les Belges sont repérés tout de suite en France, mais ne croyez pas que le contraire ne soit pas le cas. Elisabeth: [00:25:11] Belgians are spotted right away in France, but don't think the opposite is not the case.

Hugo: [00:25:30] Donc on va passer peut-être à la partie lexique et on va parler un peu des belgicismes. Et pour commencer, on l'a abordé rapidement, mais est-ce que vous pourriez nous en dire plus sur ce qu'on appelle le parler bruxellois ?

Élisabeth: [00:25:46] En fait, comme je… donc le brusseleir, c'était un dialecte. C'est toujours hein, il y a très très peu mais encore quelques personnes qui parlent assez couramment le brusseleir. C'est un dialecte, c'est un type de langue, de la même famille que le néerlandais, donc la famille des langues : néerlandais, anglais, allemand. On appelle ça des langues germaniques. Et ce parler est resté dans, pour beaucoup de mots, dans la manière dont parlent les personnes dans des situations familières ou les personnes d'origine populaire. Mais disons que, en fait, ce qui est considéré, ce qui est décrit comme bruxellois, c'est un français qui reprend, qui intègre beaucoup de ces mots d'origine brusseleir. Donc beaucoup, beaucoup de mots que les Bruxellois, dans des situations familières, populaires, utilisent sont en fait des mots de cette langue, puisque c'est une langue, hein. Alors il existe des vidéos avec de vieux Bruxellois qui vous proposent quelques phrases… d'apprendre quelques phrases en bruxellois. Et alors moi je suis née à Bruxelles, mais je ne parle pas du tout le bruxellois, mais je connais très très bien les mots qui sont couramment repris dans cette espèce de variété de français qui est finalement le bruxellois. Mais c'est… La syntaxe, c'est du [français], enfin la structure des phrases et du français, la plupart des mots courants sont du français. Mais effectivement voilà, il y a pas mal de mots… C'est ça qu'on va retrouver dans des films où on vous présente, dans lesquels apparaît un personnage de Bruxellois authentique. Mais c'est un type de personnage. Je suis tout autant une Bruxelloise authentique puisque je suis née là et j'habite à Bruxelles. Mais si vous avez un extrait d'un film dans lequel ils montrent bien que le personnage essaye d'apprendre à une femme étrangère à se faire passer pour une Belge. Attention, si tu es plutôt de tel quartier de Bruxelles tu dois parler comme ça si tu… Bruxelles est une ville comme Paris avec des quartiers différents, des catégories sociales différentes. Mais le bruxellois, effectivement, c'est cette image d'une personne bon vivante et populaire qui n'hésite pas à utiliser dans son français beaucoup de mots du dialecte brusseleir.

Hugo: [00:28:42] D'accord, je pense au film « Dikkenek ». Est-ce que « Dikkenek », c'est un mot justement du parler bruxellois ?

Élisabeth: [00:28:48] Ouais ouais. Ouais donc « dikk », c'est « gros » et « nek » c'est la nuque en fait le cou. Donc oui, ça veut dire « gros cou ». Ça existe aussi en français je pense cette expression « avoir le gros cou », être une personne arrogante, trop sûre d'elle, non ?

Hugo: [00:29:10] On dit « avoir les chevilles qui enflent« . Je sais pas si vous avez cette expression aussi ? « Avoir les chevilles qui enflent », c'est justement quand on a une espèce de fierté un peu excessive. On dit « prendre le melon » aussi, donc « avoir une grosse tête », voilà, « prendre le melon », mais un « gros cou » ? Moi, je l'ai jamais entendu, mais peut-être, peut-être dans certaines régions, peut-être dans le Nord, mais c'est possible.