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Histoire d'Europe et du monde: "Nota Bene", Les origines de la Grande Muraille de Chine (2)

Les origines de la Grande Muraille de Chine (2)

En -198, Gaozu conclut avec les Xiongnu un traité de paix, matérialisé par un mariage

et le versement par les Chinois d'un tribut. Le traité est perçu comme humiliant mais il permet

de restaurer une paix relative. Dans les 60 années de paix qui suivent, il n'y a plus que quelques

escarmouches entre les Chinois et les Xiongnu. On le sait malheureusement bien,

la paix a toujours une fin. L'empereur Wu des Han succède à Jingdien -141 et

relance la guerre contre les Xiongnu. Mais l'Empereur est malin : il prépare

cette guerre. L'armée chinoise est réformée, avec la création d'une véritable cavalerie,

des efforts logistiques et l'utilisation de troupes de barbares comme auxiliaires.

Et en plus de ça, il s'appuie largement sur le dispositif de la Grande Muraille.

Wudi sort victorieux de l'affrontement : en -119 il conquiert des territoires importants

sur les barbares et fait construire de nouvelles fortifications, du Gobi jusqu'en Mandchourie,

pour renforcer sa frontière. Mais il ne s'arrête pas là, son but est clair et

affiché : il veut écraser les Xiongnu et par la même développer un commerce avec l'Asie centrale.

A partir des années 111 avant notre ère, il va étendre sa ligne de défense jusqu'à Dunhuang

(Gansu) à l'ouest, et jusqu'en Corée du Nord, à l'est. Des milliers de kilomètres de tours, de

murailles et de forts sont étendues pour marquer la limite de l'Empire grandissant. Le dispositif

est impressionnant et les raids Xiong'nu ne sont alors plus la principale source d'inquiétude pour

le pouvoir. Les murailles permettent en effet de prévenir la désertion des soldats. C'est au

Nord-Ouest de la Chine, que l'on a les vestiges les mieux conservés de cette muraille, comme la

Passe de Jade qui marquait la limite ouest de l'Empire. Les archéologues ont découverts des

milliers de courriers militaires et administratifs rédigés par les soldats et scribes aux frontières.

Les Han et la loi, c'était une grande histoire d'amour. Si un soldat manquait à son devoir,

on le décapitait ou on le coupait en deux. Voilà. Sympa hein ? En tout cas, après cette période

d'expansion de la Grande Muraille, on assiste à un petit stand by de quelques siècles. Il faut un peu

se reposer les muscles avant de pouvoir remettre un coup de pelleteuse si vous voyez ce que je

veux dire ! Il faut attendre le IVe siècle pour que les murs redeviennent à nouveau

d'actualité. Entre-temps, la dynastie Han s'est éteinte vers 220 de notre ère.

Au IVe siècle, les peuples des steppes envahissent la Chine du Nord, tandis que la dynastie chinoise

des Jin se recentre sur le Sud. Ce sont les Xianbei, les barbares qui ont succédé

aux Xiongnu, qui prennent la Chine du Nord et établissent leur capitale à Pingcheng en 386.

Problème, envahir une région c'est une chose, s'y maintenir,

s'en est une autre ! Il faut consolider leurs positions sur leurs nouvelles conquêtes,

contrôler les régions chinoises agricoles sédentaires qui se révoltent régulièrement,

et s'occuper des régions peuplées de barbares nomades dont ils sont originaires.

Tout un programme ! Bon courage les gars ! Les Xianbei s'intègrent progressivement dans

la société chinoise. Pour administrer un large territoire comprenant tout le nord, est, et centre

de la chine, ils vont se proclamer "Dynastie des Wei du Nord". Pourquoi Wei ? Parce que c'est le

nom d'un roi de l'antiquité chinoise, ce qui leur permet de légitimer leur pouvoir. Leur dirigeant

se proclame empereur en 396 et ils s'attaquent à leur tour aux peuples du nord, construisant à leur

tour de nouvelles fortifications pour protéger la Chine du Nord. Des structures qui font là

aussi plus de 1 000 kilomètres de long et qui sont construites sur le même modèle que celles des Han,

avec mur en terre, fossé, tours et casernes. Les Xianbei, devenus Wei, deviennent donc une

dynastie de plus en plus chinoise, même si ils sont d'origine turco-mongole,

et leur participation à la construction de la Grande Muraille est un élément important qui

montre ce changement de mentalité et de culture. Les Wei sont d'ailleurs les premiers à reconnaître

le Bouddhisme du Grand Véhicule venu d'Inde par l'Asie centrale, comme religion d'État.

Mais tout n'est pas rose et progressivement deux entités rivales émergent au sein de l'empire

qui se disloque. Les dynasties qui se battent entre elles pour contrôler la Chine du Nord,

à cette époque, construisent elles aussi des Longues Fortifications sur le même modèle,

jusqu'à ce que le général Yang Jian ne parvienne à réunifier la Chine sous l'Empire des Sui en 581.

Entre 581 et 618, les Sui vont construire beaucoup, mais alors beaucoup de fortifications

en envoyant des centaines de milliers voire des millions de travailleurs forcés,

dont un grand nombre meurt sur les chantiers. Un épisode historique qui a donc aussi participé,

faut bien le dire, à nourrir le rejet des Grandes murailles dans la culture chinoise.

Cette dynastie des Sui disparaît à son tour assez vite, en raison d'une guerre

extérieure contre le royaume de Goguryeo, qui correspond à une partie de la Corée, de la

Mandchourie et de l'extrême-orient russe actuels. Pendant près de 300 ans, les dynasties issues

des steppes du Nord, qui ont adopté la culture chinoise, participent grandement au développement

de la Grande Muraille. Plusieurs milliers de kilomètres de murs sont construits en quelques

années grâce à la facilité de la mise en œuvre de la technique du pisé, mais aussi à l'expérience

des chinois de l'époque en la matière. Pendant les 300 ans qui suivent,

de 618 à 908, la dynastie Tang ne construit pas un seul bout de muraille. Et pour cause,

ils changent radicalement la gestion de leurs frontières en déléguant les postes de commandants

aux frontières à des personnalités non-Han, par exemple à des turcs. La ligne défensive devient

inutile puisque les responsables de ces espaces tampons entre la Chine et les peuples voisins

sont capables de diplomatiquement tenir les relations en réduisant les conflits.

Le IXe siècle est une longue période de déclin pour les Tang : troubles internes

et difficultés sur la frontière nord de l'Empire les font progressivement sombrer au tout début

du Xe siècle. La Chine est alors à nouveau divisée, mais la dynastie Song, chinoise elle,

règne sur la plus grande partie de l'ancien empire, à l'exception du Nord-Est : à savoir la

Mandchourie et la Mongolie intérieure, dominé par les Liao, et le Nord-Ouest contrôlé par les Xixia.

Sans compter les Mongols qui vont bientôt rentrer dans la partie ! En gros les Song

vont avoir besoin de pas mal de motivation pour résister. Et ils vont plutôt bien y arriver !

Plutôt que de reconstruire de nouvelles lignes de défenses, les songs vont consolider les lignes

des dynasties Qin et Han. Cela réduit les coûts et les murs, faits de blocs de pisés, pouvaient être

rapidement révisés et augmentés d'une courtine. En plus des murs de terre classiques, les Song

utilisent de nombreux stratagèmes comme des murs faits de végétation en plantant des arbres, mais

aussi des canaux et des lacs artificiels. Combiné avec leur cavalerie, ils arriveront à contrer la

cavalerie nomade pendant presque 200 ans ! Mais au XIIe siècle les Liao sont battus

par une nouvelle dynastie barbare, les Jin. Après s'être emparés du Nord-Est,

les Jin vont également repousser les Song vers le Sud. Adoptant à leur tour la culture chinoise

et la pratique des Longues Fortifications, ils vont eux aussi en construire énormément. Et ils

leur apportent en plus quelques améliorations, notamment ce qu'on appelle le dédoublement. Les

fortifications des Jin ne sont plus composées d'un seul fossé extérieur avec son mur, mais

d'un premier fossé extérieur, d'un premier mur, d'un fossé intérieur et enfin d'un second mur.

Autant vous dire que pour les traverser, va falloir s'accrocher !

Les Jin ont construit des murs selon deux tracés, un premier à environ 500 kilomètres au Nord de

leur capitale, Zhongdu, proche de l'actuelle Pékin, l'autre à 1 000 kilomètres au Nord,

presque au Sud des montagnes de Sibérie. Une particularité qui a poussé les historiens

à s'interroger sur l'utilité réelle de telles fortifications. Ils ont même émis l'hypothèse

qu'à cette époque, la construction de ces fortifications auraient pu devenir, pour

les Jin, une coutume voire une punition pour les prisonniers. Des murs qui auraient pu mobiliser

jusqu'à 750 000 travailleurs en même temps !On l'a dit tout à l'heure, un nouvelle force va faire son

entrée dans l'Histoire de la Chine, les mongols ! Dès les années 1210, le chef mongol Gengis Khan

est en guerre avec les Jin et il connaît d'importants succès. Mais il faut attendre

1234 pour que les Jin disparaissent, quelques années après la mort de Gengis

Khan. Le dernier empereur Jin, Aizong, se suicide alors que sa capitale est assiégée.

Malgré les améliorations apportées par les Jin à la construction de la Grande Muraille,

celles-ci semblent avoir été sans effet face à l'invasion mongole. Dans les décennies suivantes

les Mongols conquièrent le reste de la Chine : les Song, que les Jin avaient repoussé au Sud, sont

les suivants à succomber à l'invasion mongole. En 1279 la Chine est conquise par Kubilai Khan,

un petit-fils de Gengis Khan, qui renomme sa dynastie “Yuan”. Mais les Mongols ne s'arrêtent

pas à la Chine. Ils prennent possession d'un territoire qui s'étend de la Corée à l'Ukraine,

en passant par l'Asie centrale et le Moyen-Orient. Comme les Song, les Yuan mongols font bon

usage des places fortes chinoises pour les réaffecter et les utiliser à leurs avantages.

Résultat : ils n'avaient pas besoin de la Grande Muraille pour se défendre.

Le seul mur construit par les Yuan sera celui qui entoure leur capitale Dadu l'actuelle Pékin,

avec une muraille protégeant 10km2 de la ville. J'en profite au passage vu que l'épisode est

relativement long, pour rappeler que depuis tout à l'heure j'utilise “Grande Muraille”

pour désigner les fortifications chinoises mais qu'à cette époque là, on utilise pas du tout

ce terme. D'ailleurs le marchand vénitien Marco Polo, présent en Chine à cette période de la fin

du XIIIe siècle et qui a laissé un récit de ses voyages, semble n'avoir jamais entendu parlé des

nombreux murs construits par les chinois au cours de leur histoire. En tout cas, il n'en fait jamais

mention dans ses écrits. Ça ne veut pas dire que les murs n'existaient pas, mais juste qu'ils

n'étaient pas considérés comme un ensemble ! Dès le XIVe siècle la dynastie Yuan est mise

en difficulté par la révolte des turbans rouges, nom donné en référence au foulard

rouge que portaient les rebelles. Ces révoltes, suivant des mauvaises récoltes,

durent en fait plusieurs décennies et font peu à peu plonger la Chine dans la guerre civile.

C'est un des généraux meneurs de la révolte, Zhu Yuanshang, un chinois,

qui fonde la dynastie suivante après la prise de la capitale des Yuan en 1368.

Il baptise sa nouvelle dynastie « Ming », qui signifie « brillant ». Les débuts

de cette nouvelle dynastie sont prospères : le territoire est contrôlé par une armée efficace,

qui se déplace beaucoup, et les chinois ne construisent toujours pas de nouveaux murs.

Pour l'instant ! Si les Ming prennent le contrôle de la Chine,

les Mongols n'ont pas complètement disparu, ils sont seulement repoussés en Mongolie et

les Chinois doivent continuer de se défendre. Au départ les Ming construisent des forteresses

isolées, qu'ils relient ensuite par des murs à proximité de la capitale. On est donc sur des

constructions défensives. Mais plus pour longtemps puisqu'après 1380, ils construisent aussi des

forteresses offensives dans la steppe, qui servent de bases avancées pour attaquer les nomades.

Au début du XVe siècle cependant, une erreur stratégique est commise par l'empereur. A

priori à cause de soucis économiques, ces places fortes sont abandonnées, permettant aux Mongols

de réoccuper une partie de la Chine du Nord et de menacer sérieusement le pouvoir Ming.

Pire encore, la forteresse de Tumu est perdue en 1449 face aux Mongols, à seulement une centaine

de kilomètres de Pékin. L'armée chinoise est vaincue, le jeune empereur Yingzhong est capturé

et une partie de la cour meurt au cours de la bataille. La régence est assurée par son frère,

Jingtai, qui devient encore plus intransigeant avec les Mongols et refuse toute négociation.

Les origines de la Grande Muraille de Chine (2) Die Ursprünge der Chinesischen Mauer (2) The origins of the Great Wall of China (2) De oorsprong van de Chinese Muur (2)

En -198, Gaozu conclut avec les Xiongnu un  traité de paix, matérialisé par un mariage

et le versement par les Chinois d'un tribut. Le  traité est perçu comme humiliant mais il permet

de restaurer une paix relative. Dans les 60 années  de paix qui suivent, il n'y a plus que quelques

escarmouches entre les Chinois et les Xiongnu. On le sait malheureusement bien,

la paix a toujours une fin. L'empereur  Wu des Han succède à Jingdien -141 et

relance la guerre contre les Xiongnu. Mais l'Empereur est malin : il prépare

cette guerre. L'armée chinoise est réformée,  avec la création d'une véritable cavalerie,

des efforts logistiques et l'utilisation  de troupes de barbares comme auxiliaires.

Et en plus de ça, il s'appuie largement  sur le dispositif de la Grande Muraille.

Wudi sort victorieux de l'affrontement : en  -119 il conquiert des territoires importants

sur les barbares et fait construire de nouvelles  fortifications, du Gobi jusqu'en Mandchourie,

pour renforcer sa frontière. Mais il ne  s'arrête pas là, son but est clair et

affiché : il veut écraser les Xiongnu et par la  même développer un commerce avec l'Asie centrale.

A partir des années 111 avant notre ère, il va  étendre sa ligne de défense jusqu'à Dunhuang

(Gansu) à l'ouest, et jusqu'en Corée du Nord, à  l'est. Des milliers de kilomètres de tours, de

murailles et de forts sont étendues pour marquer  la limite de l'Empire grandissant. Le dispositif

est impressionnant et les raids Xiong'nu ne sont  alors plus la principale source d'inquiétude pour

le pouvoir. Les murailles permettent en effet  de prévenir la désertion des soldats. C'est au

Nord-Ouest de la Chine, que l'on a les vestiges  les mieux conservés de cette muraille, comme la

Passe de Jade qui marquait la limite ouest de  l'Empire. Les archéologues ont découverts des

milliers de courriers militaires et administratifs  rédigés par les soldats et scribes aux frontières.

Les Han et la loi, c'était une grande histoire  d'amour. Si un soldat manquait à son devoir,

on le décapitait ou on le coupait en deux. Voilà.  Sympa hein ? En tout cas, après cette période

d'expansion de la Grande Muraille, on assiste à un  petit stand by de quelques siècles. Il faut un peu

se reposer les muscles avant de pouvoir remettre  un coup de pelleteuse si vous voyez ce que je

veux dire ! Il faut attendre le IVe siècle  pour que les murs redeviennent à nouveau

d'actualité. Entre-temps, la dynastie  Han s'est éteinte vers 220 de notre ère.

Au IVe siècle, les peuples des steppes envahissent  la Chine du Nord, tandis que la dynastie chinoise

des Jin se recentre sur le Sud. Ce sont  les Xianbei, les barbares qui ont succédé

aux Xiongnu, qui prennent la Chine du Nord et  établissent leur capitale à Pingcheng en 386.

Problème, envahir une région  c'est une chose, s'y maintenir,

s'en est une autre ! Il faut consolider leurs  positions sur leurs nouvelles conquêtes,

contrôler les régions chinoises agricoles  sédentaires qui se révoltent régulièrement,

et s'occuper des régions peuplées de  barbares nomades dont ils sont originaires.

Tout un programme ! Bon courage les gars ! Les Xianbei s'intègrent progressivement dans

la société chinoise. Pour administrer un large  territoire comprenant tout le nord, est, et centre

de la chine, ils vont se proclamer "Dynastie des  Wei du Nord". Pourquoi Wei ? Parce que c'est le

nom d'un roi de l'antiquité chinoise, ce qui leur  permet de légitimer leur pouvoir. Leur dirigeant

se proclame empereur en 396 et ils s'attaquent à  leur tour aux peuples du nord, construisant à leur

tour de nouvelles fortifications pour protéger  la Chine du Nord. Des structures qui font là

aussi plus de 1 000 kilomètres de long et qui sont  construites sur le même modèle que celles des Han,

avec mur en terre, fossé, tours et casernes. Les Xianbei, devenus Wei, deviennent donc une

dynastie de plus en plus chinoise, même  si ils sont d'origine turco-mongole,

et leur participation à la construction de la  Grande Muraille est un élément important qui

montre ce changement de mentalité et de culture. Les Wei sont d'ailleurs les premiers à reconnaître

le Bouddhisme du Grand Véhicule venu d'Inde  par l'Asie centrale, comme religion d'État.

Mais tout n'est pas rose et progressivement deux  entités rivales émergent au sein de l'empire

qui se disloque. Les dynasties qui se battent  entre elles pour contrôler la Chine du Nord,

à cette époque, construisent elles aussi des  Longues Fortifications sur le même modèle,

jusqu'à ce que le général Yang Jian ne parvienne  à réunifier la Chine sous l'Empire des Sui en 581.

Entre 581 et 618, les Sui vont construire  beaucoup, mais alors beaucoup de fortifications

en envoyant des centaines de milliers  voire des millions de travailleurs forcés,

dont un grand nombre meurt sur les chantiers. Un  épisode historique qui a donc aussi participé,

faut bien le dire, à nourrir le rejet des  Grandes murailles dans la culture chinoise.

Cette dynastie des Sui disparaît à son  tour assez vite, en raison d'une guerre

extérieure contre le royaume de Goguryeo, qui  correspond à une partie de la Corée, de la

Mandchourie et de l'extrême-orient russe actuels. Pendant près de 300 ans, les dynasties issues

des steppes du Nord, qui ont adopté la culture  chinoise, participent grandement au développement

de la Grande Muraille. Plusieurs milliers de  kilomètres de murs sont construits en quelques

années grâce à la facilité de la mise en œuvre de  la technique du pisé, mais aussi à l'expérience

des chinois de l'époque en la matière. Pendant les 300 ans qui suivent,

de 618 à 908, la dynastie Tang ne construit  pas un seul bout de muraille. Et pour cause,

ils changent radicalement la gestion de leurs  frontières en déléguant les postes de commandants

aux frontières à des personnalités non-Han, par  exemple à des turcs. La ligne défensive devient

inutile puisque les responsables de ces espaces  tampons entre la Chine et les peuples voisins

sont capables de diplomatiquement tenir  les relations en réduisant les conflits.

Le IXe siècle est une longue période de  déclin pour les Tang : troubles internes

et difficultés sur la frontière nord de l'Empire  les font progressivement sombrer au tout début

du Xe siècle. La Chine est alors à nouveau  divisée, mais la dynastie Song, chinoise elle,

règne sur la plus grande partie de l'ancien  empire, à l'exception du Nord-Est : à savoir la

Mandchourie et la Mongolie intérieure, dominé par  les Liao, et le Nord-Ouest contrôlé par les Xixia.

Sans compter les Mongols qui vont bientôt  rentrer dans la partie ! En gros les Song

vont avoir besoin de pas mal de motivation pour  résister. Et ils vont plutôt bien y arriver !

Plutôt que de reconstruire de nouvelles lignes  de défenses, les songs vont consolider les lignes

des dynasties Qin et Han. Cela réduit les coûts et  les murs, faits de blocs de pisés, pouvaient être

rapidement révisés et augmentés d'une courtine.  En plus des murs de terre classiques, les Song

utilisent de nombreux stratagèmes comme des murs  faits de végétation en plantant des arbres, mais

aussi des canaux et des lacs artificiels. Combiné  avec leur cavalerie, ils arriveront à contrer la

cavalerie nomade pendant presque 200 ans ! Mais au XIIe siècle les Liao sont battus

par une nouvelle dynastie barbare, les  Jin. Après s'être emparés du Nord-Est,

les Jin vont également repousser les Song vers  le Sud. Adoptant à leur tour la culture chinoise

et la pratique des Longues Fortifications, ils  vont eux aussi en construire énormément. Et ils

leur apportent en plus quelques améliorations,  notamment ce qu'on appelle le dédoublement. Les

fortifications des Jin ne sont plus composées  d'un seul fossé extérieur avec son mur, mais

d'un premier fossé extérieur, d'un premier mur,  d'un fossé intérieur et enfin d'un second mur.

Autant vous dire que pour les  traverser, va falloir s'accrocher !

Les Jin ont construit des murs selon deux tracés,  un premier à environ 500 kilomètres au Nord de

leur capitale, Zhongdu, proche de l'actuelle  Pékin, l'autre à 1 000 kilomètres au Nord,

presque au Sud des montagnes de Sibérie. Une  particularité qui a poussé les historiens

à s'interroger sur l'utilité réelle de telles  fortifications. Ils ont même émis l'hypothèse

qu'à cette époque, la construction de ces  fortifications auraient pu devenir, pour

les Jin, une coutume voire une punition pour les  prisonniers. Des murs qui auraient pu mobiliser

jusqu'à 750 000 travailleurs en même temps !On l'a  dit tout à l'heure, un nouvelle force va faire son

entrée dans l'Histoire de la Chine, les mongols ! Dès les années 1210, le chef mongol Gengis Khan

est en guerre avec les Jin et il connaît  d'importants succès. Mais il faut attendre

1234 pour que les Jin disparaissent,  quelques années après la mort de Gengis

Khan. Le dernier empereur Jin, Aizong, se  suicide alors que sa capitale est assiégée.

Malgré les améliorations apportées par les  Jin à la construction de la Grande Muraille,

celles-ci semblent avoir été sans effet face à  l'invasion mongole. Dans les décennies suivantes

les Mongols conquièrent le reste de la Chine : les  Song, que les Jin avaient repoussé au Sud, sont

les suivants à succomber à l'invasion mongole. En 1279 la Chine est conquise par Kubilai Khan,

un petit-fils de Gengis Khan, qui renomme sa  dynastie “Yuan”. Mais les Mongols ne s'arrêtent

pas à la Chine. Ils prennent possession d'un  territoire qui s'étend de la Corée à l'Ukraine,

en passant par l'Asie centrale et le Moyen-Orient. Comme les Song, les Yuan mongols font bon

usage des places fortes chinoises pour les  réaffecter et les utiliser à leurs avantages.

Résultat : ils n'avaient pas besoin de  la Grande Muraille pour se défendre.

Le seul mur construit par les Yuan sera celui  qui entoure leur capitale Dadu l'actuelle Pékin,

avec une muraille protégeant 10km2 de la ville. J'en profite au passage vu que l'épisode est

relativement long, pour rappeler que depuis  tout à l'heure j'utilise “Grande Muraille”

pour désigner les fortifications chinoises mais  qu'à cette époque là, on utilise pas du tout

ce terme. D'ailleurs le marchand vénitien Marco  Polo, présent en Chine à cette période de la fin

du XIIIe siècle et qui a laissé un récit de ses  voyages, semble n'avoir jamais entendu parlé des

nombreux murs construits par les chinois au cours  de leur histoire. En tout cas, il n'en fait jamais

mention dans ses écrits. Ça ne veut pas dire  que les murs n'existaient pas, mais juste qu'ils

n'étaient pas considérés comme un ensemble ! Dès le XIVe siècle la dynastie Yuan est mise

en difficulté par la révolte des turbans  rouges, nom donné en référence au foulard

rouge que portaient les rebelles. Ces  révoltes, suivant des mauvaises récoltes,

durent en fait plusieurs décennies et font peu  à peu plonger la Chine dans la guerre civile.

C'est un des généraux meneurs de la  révolte, Zhu Yuanshang, un chinois,

qui fonde la dynastie suivante après la  prise de la capitale des Yuan en 1368.

Il baptise sa nouvelle dynastie « Ming  », qui signifie « brillant ». Les débuts

de cette nouvelle dynastie sont prospères : le  territoire est contrôlé par une armée efficace,

qui se déplace beaucoup, et les chinois ne  construisent toujours pas de nouveaux murs.

Pour l'instant ! Si les Ming prennent le contrôle de la Chine,

les Mongols n'ont pas complètement disparu,  ils sont seulement repoussés en Mongolie et

les Chinois doivent continuer de se défendre.  Au départ les Ming construisent des forteresses

isolées, qu'ils relient ensuite par des murs à  proximité de la capitale. On est donc sur des

constructions défensives. Mais plus pour longtemps  puisqu'après 1380, ils construisent aussi des

forteresses offensives dans la steppe, qui servent  de bases avancées pour attaquer les nomades.

Au début du XVe siècle cependant, une erreur  stratégique est commise par l'empereur. A

priori à cause de soucis économiques, ces places  fortes sont abandonnées, permettant aux Mongols

de réoccuper une partie de la Chine du Nord  et de menacer sérieusement le pouvoir Ming.

Pire encore, la forteresse de Tumu est perdue en  1449 face aux Mongols, à seulement une centaine

de kilomètres de Pékin. L'armée chinoise est  vaincue, le jeune empereur Yingzhong est capturé

et une partie de la cour meurt au cours de la  bataille. La régence est assurée par son frère,

Jingtai, qui devient encore plus intransigeant  avec les Mongols et refuse toute négociation.