#92 - De Paris au Pérou (1)
Salut à toutes et à tous ! C'est un plaisir de vous retrouver pour cet épisode un peu spécial. C'est un épisode spécial parce que c'est le quatrième anniversaire du podcast. Enfin, je triche. J'ai quelques jours d'avance. La date officielle de l'anniversaire, c'est le 28 avril. Mais comme il y aura pas d'épisode la semaine prochaine, on le fête aujourd'hui. Donc oui, déjà 4 ans, le temps passe vite. Je me souviens du premier épisode que j'ai enregistré : mon vibrant hommage au professeur Stephen Krashen ! Je m'en souviens comme si c'était hier. En même temps, quand je pense à tout ce qui s'est passé ces quatre dernières années, ça me semble être une éternité. Je crois que j'ai déjà dit la même chose la dernière fois pour les trois ans. Ça y est, je suis vieux, je radote. Radoter, ça signifie qu'on répète toujours la même chose parce qu'on oublie ce qu'on dit. Bref, je veux juste profiter de ce quatrième anniversaire pour vous remercier, vous, les auditeurs et auditrices d'InnerFrench. Que vous écoutiez le podcast depuis le début ou seulement depuis hier, merci de faire partie de la communauté. C'est un honneur de vous aider à apprendre le français. Bravo pour tous les efforts que vous faites. Je suis toujours impressionné quand je reçois vos messages ou que je lis vos commentaires, je vois les progrès que vous faites et c'est un plaisir de vous aider dans votre aventure. D'ailleurs, maintenant, je suis plus seul. On est trois pour vous aider. Vous savez que l'année dernière, j'ai recruté Anna, dont vous avez entendu l'interview il y a quelques semaines. Et récemment, une nouvelle recrue nous a rejoint, Ingrid. Je vous ai déjà parlé d'elle. Vous savez qu'elle m'aide à préparer certains épisodes du podcast, comme celui sur la liberté de la presse en France, par exemple. Elle s'occupe aussi de répondre aux questions des élèves de Raconte ton histoire, notre cours avancé. Donc aujourd'hui, on va faire les présentations officielles. Vous allez entendre la voix d'Ingrid pour la première fois. On a enregistré l'interview ensemble pour qu'elle nous parle de son parcours, de son enfance en région parisienne jusqu'à son expatriation au Pérou. Je vous en dit pas plus pour ne pas tout vous dévoiler, mais j'étais très content de pouvoir discuter plus longuement avec elle parce qu'on n'avait pas vraiment eu le temps de le faire jusque là. On a découvert qu'on a pas mal de points communs. Vous allez voir qu'on n'a pas fait d'effort particulier pour adapter notre façon de parler. On parle assez naturellement. Donc, cet épisode sera un bon défi pour vous. N'hésitez pas à l'écouter plusieurs fois et à lire la transcription sur le site si vous ne comprenez pas certaines phrases. Allez maintenant, je vous laisse écouter ma conversation avec Ingrid.
Salut Ingrid !
Salut Hugo !
t'avoir comme invitée dans le podcast aujourd'hui. L'idée, c'est de te présenter aux auditeurs parce que tu as rejoint l'équipe InnerFrench récemment. Et ça va aussi être l'occasion pour nous de faire un peu plus connaissance parce que, bon, t'as rejoint l'équipe assez rapidement. Et on a pas eu le temps vraiment de se poser, et de parler. Donc voilà, je suis très content de t'avoir dans le podcast. C'est vrai. Bah moi aussi, je suis très contente. En plus, avec la distance, on n'a pas eu l'occasion de discuter un peu tranquillement, comme ça, de tout et de rien. Donc ça me fait plaisir qu'on puisse le faire. Et puis qu'on puisse partager avec, avec tous les followers d'InnerFrench. Justement, donc, tu parles de la distance. Est-ce que tu peux nous dire où tu es en ce moment ?
Alors là, tout de suite, je suis à Lima, au Pérou. Donc ça fait déjà plusieurs années que je suis au Pérou. Euh… Et bon, bah en plus, avec en ce moment la pandémie, tout ça… je suis restée ici toute la période du covid,
Donc on va parler justement de ton expatriation au Pérou. Je pense que c'est une aventure qui va intéresser pas mal d'auditeurs. Mais pour commencer, j'aimerais que tu te présentes pour, voilà, que les gens sachent un peu à qui ils ont affaire. Bah alors bah du coup, moi c'est Ingrid. J'ai 29 ans, je suis Française, j'ai grandi en région parisienne. J'ai fait mes études à Paris, donc pur produit de banlieue parisienne, puis de la capitale. J'ai fait des études de journalisme et donc j'ai commencé à travailler à Paris comme journaliste. Ensuite, j'ai voyagé. J'ai voyagé… bon ça on pourra en reparler… j'ai fini par rester au Pérou sans l'avoir forcément planifié. Et en fait, j'ai… Quand j'étais sur place, comme le travail de journaliste, je le continuais, mais ça me prenait pas nécessairement beaucoup de temps, je me suis dit qu'il était temps de réaliser mon deuxième rêve, qui était d'être prof, puisque j'ai toujours voulu être soit journaliste, soit prof. Et voilà. Et c'est comme ça que j'ai, j'ai commencé à donner des cours de français. J'ai fait une formation et j'ai fini par travailler un petit peu comme journaliste et un petit peu comme prof. Et donc à jongler entre les deux jusqu'à atterrir à InnerFrench où je fais vraiment un peu des deux. Mi journaliste, mi-professeur.
Ouais, pour moi, j'avoue que c'était vraiment le profil parfait. Je cherchais quelqu'un qui soit capable de m'aider à créer du contenu. Mais qui ait cette approche aussi pédagogique, et c'est pas si facile que ça à trouver. Je pense qu'avec Internet, depuis quelques années, il y a de plus en plus de profs de FLE qui se mettent à la création de contenu. C'est super parce qu'il y a de plus en plus de choses, de ressources qui sont disponibles pour les apprenants. Mais voilà, les profs ont pas toujours la rigueur journalistique. Ou voilà, c'est pas non plus quelque chose qui peut s'improviser. Et toi, tu as vraiment été formée à ça, t'as vraiment fait tes études en journalisme. Ouais.
Ouais du coup, pour moi aussi, ça a été un peu le coup du destin, quelque chose qui me permette de m'épanouir sur les deux choses que j'aime finalement. Donc, ouais, je suis plutôt contente qu'on se soit trouvés professionnellement. C'est plutôt cool pour les deux côtés. Et pour la petite histoire, je m'étais servi dans des articles pour un épisode du podcast. C'était celui sur l'expatriation et l'immigration. Quand tu as postulé à l'offre, justement, je me suis dit que j'avais déjà vu ton nom quelque part, mais j'arrivais plus à m'en souvenir. Après t'avoir googlée, là voilà, j'ai fait le rapprochement et j'ai vu que tu étais l'auteur justement de cet article, et je me suis dit que le monde est petit. Ouais, effectivement encore plus… C'était encore plus un signe que… On pouvait bosser ensemble et qu'on avait des idées de sujets un petit peu en commun. Exactement. Alors, en te présentant, tu as dit que tu étais un pur produit de banlieue parisienne. Et je sais que dans le cours Raconte ton histoire, je parle un peu de la banlieue. Et c'est vrai que c'est un mot qui est assez compliqué à expliquer en français parce qu'il peut avoir plusieurs significations. Donc, toi, qu'est-ce que tu entends par pur produit de banlieue parisienne ? Dans ton esprit, à quoi ça correspond ?
Bah, c'est simplement que j'ai grandi dans la périphérie de Paris, donc dans dans une petite ville, bon pas si petite, mais dans une ville des Yvelines, dans le 78. Et en fait, j'ai… Si, j'ai de la famille en dehors de la région parisienne. D'ailleurs, quand je suis à l'étranger, je dis que je suis de Paris, mais que ma famille est dans les Alpes, comme ça, ça permet aux gens de situer un petit peu que je suis, pas que de là-bas. Mais en réalité, si, j'ai grandi en banlieue, qui donc pour situer, c'est comment dire… C'est vrai qu'il y a beaucoup de clichés autour de la banlieue, de fantasmes. Pourquoi ? Parce qu'il y a certaines banlieues qui sont, disons, très populaires et qui, dans l'histoire, ont eu quelques grands faits divers du fait d'être des territoires qui sont un peu oubliés, des territoires où il y a parfois un peu plus de violence ou un peu plus de pauvreté. Et donc c'est vrai que, notamment quand j'étais au collège, par exemple, je me rappelle il y a eu quelques mois où il y avait eu des voitures qui avaient été brûlées, etc. Des émeutes, qu'ils appelaient ça. Donc, dans l'esprit de certaines personnes qui n'ont pas vécu là bas, toute la banlieue est un endroit horrible où les gens sont perdus. Mais en fait, c'est pas le cas. Déjà, il y a des banlieues qui sont très riches, très, très riches. Il ne faut pas oublier que Versailles ou Neuilly-sur-Seine, c'est en banlieue. Et puis après, il y a beaucoup d'endroits qui sont simplement moyens, où les gens coulent une vie paisible. Et bon, on va dire que moi, là d'où je viens, c'est exactement entre les deux. J'ai eu… Voilà, la ville d'où je viens a ses quartiers un petit peu plus populaires, et puis aussi des endroits plus plus bourgeois, on peut dire. Et moi, là où j'ai grandi, c'était vraiment exactement entre les deux, ni ni l'un ni l'autre. Mais c'est vrai que du coup, j'ai grandi à coté de Paris, la première grande ville où je suis allée quand j'étais au collège pour aller faire les magasins, c'était Paris. Et quand j'ai commencé à étudier à Paris, je sentais la différence. Le fait que je vienne de banlieue, ça, ça me donnait une identité un petit peu particulière aux yeux de certaines personnes. Et de fait, mes amis que je me suis faits à Paris en général, c'étaient des personnes qui aussi avaient grandi dans une banlieue et avaient vécu la même, la même réalité. Est-ce qu'on t'appelait «la banlieusarde» ou pas ? Euh… Ça m'est arrivé, ouais. Alors c'est drôle parce que quand j'étais en dehors de Paris, de la région parisienne, on m'appelait la Parisienne et quand j'étais à Paris avec des Parisiens, on m'a déjà appelé, ouais, la banlieusarde. Surtout à l'époque où j'avais pas encore les moyens de vivre toute seule. Et du coup, je faisais les allers-retours. Donc, c'est vrai que j'allais en soirée, il fallait que je dorme chez les gens. Ou alors il fallait que je rentre avant minuit pour prendre le dernier train. Sinon, c'était le Noctilien, le bus de nuit qui est un bus horrible, donc… Donc, oui, c'était une réalité un petit peu différente avec tout le chemin que je devais faire. Et puis mon autre vie que j'avais en dehors de Paris. Ouais donc, justement pour expliquer, ce mot « banlieusard », et « banlieusarde » au féminin, c'est un nom qu'on utilise. C'est plutôt familier, c'est un peu péjoratif, pour qualifier quelqu'un qui habite en banlieue. Et en général, c'est plutôt les gens de la ville, donc, par exemple les Parisiens, qui se distinguent des banlieusards. Et voilà dans la bouche d'un Parisien, banlieusard, c'est plutôt péjoratif. C'est plutôt négatif. Et dans la bouche aussi, d'un, en réel… En vérité, d'un provincial aussi. J'ai rencontré beaucoup de personnes qui venaient pas de Paris, qui ont monté à la capitale pour faire leurs études. Et quand on leur disait « non, mais moi, j'ai… j'hab… j'ai pas d'appartement à Paris, je retourne chez mes parents en banlieue bah tous les jours ». Ils te regardaient un peu, genre « ah ouais, ouais tu viens de banlieue ». Alors que bon après, quand ils connaissent mieux, les gens en général, ils comprennent que c'est pas du tout l'image qui a pu être véhiculée dans les médias, en particulier quand nous, on était jeune et que c'était un peu l'époque, la grande époque des reportages télé qui font peur, C'est vrai. Et comme tu l'a rappelé au début, tout dépend vraiment de la banlieue dans laquelle tu vis. Ce mot, il recouvre une réalité, vraiment, vraiment variée.
Ouais.
Et pour toi, c'était toujours une évidence, pendant… au collège et au lycée, qu'un jour, tu irais vivre à Paris ? Que tu irais étudié à Paris ? Ou c'est arrivé finalement un peu par hasard ? Ah non, c'était 100% depuis l'enfance. Enfin, euh… De fait, je pense que quand tu grandis en banlieue parisienne et que du coup, tu veux faire des études que tu te vois… Voilà, moi, très jeune, je disais soit je serai journaliste, soit je serai prof et dans tous les cas, je voulais faire des études. Le seul endroit où je me visualisais, c'était à Paris. J'ai jamais envisagé, c'est vrai, et ça, c'est un défaut, je pense de la France qui est si centralisée : je me suis jamais vu faire des études ailleurs qu'à Paris, jusqu'à bien sûr, plus tard ou quand tu te rends compte de la réalité pour aller en master ou quoi, j'ai envisagé d'aller ailleurs. Mais au début, quand j'étais jeune, c'était vraiment… Je pense que si on retrouvait mes carnets de petite fille ou d'ado, où j'écrivais mes rêves dans la vie, il y avait avoir un appartement à Paris, boire un Starbucks à Paris. Le truc super cliché de : Paris, Paris.
Alors que c'est exactement les mêmes Starbucks à Paris et en banlieue… Ouais… Nan, mais à l'époque, je crois, je pense qu'il y avait pas de Starbucks en banlieue. Il y a des choses que… Ouais, il y avait pas les mêmes magasins. C'était… J'avais des copines qui avaient, par exemple, leurs mamans qui les emmenaient faire les magasins à Paris. Et c'était : waouh ! Parce que moi j'allais au Gémo d'Élancourt. Donc ouais, il y avait quand même une réalité différente. Mais c'est vrai que au final, j'aurais très bien pu aller dans une ville de province pour faire des études en particulier. La vie aurait été la même. Finalement, la vie étudiante.
Justement, concernant tes études, pourquoi tu as choisi le journalisme ?
Bah alors là, ça, c'est une très bonne question. Parce que du coup, ça remonte à tellement loin. Le fait de vouloir être journaliste que j'ai eu plusieurs phases. En fait, je pense qu'au tout début, c'est la base de base, c'est que j'adore écrire. Depuis toute petite, j'adorais lire et écrire et on va dire, échanger, transmettre des idées. D'où le rapprochement avec professeurs ou journaliste. Puis après, j'ai eu plusieurs phases. J'ai voulu être journaliste de mode, ce qui me fait rire maintenant, parce que quand on sait maintenant mon rapport avec la mode… Mais à une époque, ouais, je voulais… Plus parce que je lisais des magazines féminins qui avaient des tons un peu légers, très chronique, très, je raconte ma vie d'une manière drôle, etc. Très Sex and the City, finalement. Et après, j'ai eu une autre phase à partir de 15 16 ans, où j'ai commencé à recevoir le magazine L'Express à la maison, gratuitement. Et donc, mes parents, évidemment, ne lisaient pas du tout ce genre de journaux politiques ou quoi. Ils m'ont jamais transmis un amour de… J'ai jamais vu Le Monde ou Le Figaro ou Libération à la maison, nan, c'est des choses que j'ai découvert après. Mais quand je recevais L'Express à la maison, j'ai commencé à me dire : « ah ouais, non, pas journaliste de mode, je veux être journaliste politique ». Et là, je me suis mise à fond à souligner, à surligner les interviews des politiques, etc. Et voilà, et au final, je me suis un peu calmée sur les deux et c'est pour ça que j'ai fait plus des sujets de société qui, finalement, permettent à la fois de parler de la vie quotidienne, des choses un peu plus chronique, un peu plus témoignages de vie, mais sur des sujets qui touchent quand même un peu la politique, mais pas la politique politicienne. Plus vraiment des choses de la vie réelle.
Et c'est difficile de rejoindre une école de journalisme à Paris ? Ouais.
Ouais, c'est ultra… Alors moi, j'étais… J'ai eu la chance d'intégrer une association de préparation aux concours que je conseille totalement. Qui est vraiment une association génialissime qui s'appelle La Chance au concours. Donc, c'est une asso de journalistes qui prépare des étudiants boursiers, donc des personnes qui… Boursiers, c'est des personnes qui, qui en fait, sont… n'ont pas forcément… leur famille, n'a pas forcément beaucoup de ressources. Et qui donc reçoivent pour faire leurs études des aides de l'État. Donc, il y a des boursiers avec plusieurs échelons : il y a des personnes qui reçoivent une petite aide et d'autres plus importante. Et donc La Chance aux concours, c'est une association qui nous permettait, avec un groupe qui avait été sélectionné sur la motivation, la situation des parents, le parcours, etc. On allait tous les samedis, il me semble, là-bas pour préparer les concours. C'est des examens qu'on passe, où il y a plusieurs étapes. Donc, je pense que tu as déjà expliqué ça par rapport aux concours en école de commerce. Pour ceux qui te suivent, ils doivent déjà savoir ce que c'est ? Ouais, j'en ai parlé, mais seulement dans le cours Raconte ton histoire. Dans le podcast, je pense pas l'avoir évoqué, donc c'est bien que tu te rappelles. Donc du coup, pour les grandes écoles, c'est à dire les écoles de journalisme, les écoles de commerce, d'ingénieurs, pour entrer en fait il y a un nombre de places limitée et donc pour faire partie des heureux élus, il faut passer un concours. En général, c'est un concours écrit d'abord où il y a une première sélection. Et puis après, c'est un oral. Donc moi, j'ai passé tous les concours et bon de fait, j'ai, je pense que j'ai de la chance parce que je suis… J'ai toujours été très bonne élève et assez scolaire, donc j'ai eu la chance d'être admissible à tous les concours. Donc une quinzaine, je crois qu'il y a 15 écoles reconnues en France et j'ai dû en passer 10 parce qu'il y a des masters, quelque chose comme ça. Alors là, ça vaut la peine parce qu'il y a souvent une confusion avec le verbe passer pour les examens. Ah oui.
Parce qu'en fait en français, ouais, passer un examen, ça veut dire essayer cet examen, mais ça ne veut pas nécessairement dire le réussir. Donc toi, tu… voilà, tu t'es inscrite à tous les examens, tu as passé tous les examens et tu les a réussis. Ouais, c'est ça, donc j'ai été admissible à tous les concours et j'étais admise à tous, sauf un, celui qui est classé… l'École de Lille. Par contre, ouais j'ai pu choisir, j'ai eu la chance de pouvoir choisir, entre guillemets, la meilleure école. Je dis entre guillemets parce que… La meilleure école de Paris. Parce qu'en réalité, moi, je pense que à partir du moment où tu es pris en master, que tu es dans une école reconnue, que t'es avec des supers professeurs, des camarades qui vont être des futurs confrères, etc. Dans tous les cas, c'est des bonnes écoles. Il y a… Les histoires de celle ci est meilleure qu'une autre, ça dépend vraiment de chaque personne et de ce qu'on fait à l'école. Mais en tout cas, oui, c'était, c'était difficile et j'ai eu la chance d'avoir cette association qui m'a préparée parce que… Il y a beaucoup d'autres personnes qui ont… qui peuvent avoir des prépas privées, en fait, et qui donc payent assez cher pour pouvoir rentrer dans la formation. Enfin, en tout… Elles payent pas forcément pour… Elles payent pour être préparées
Pour être préparées, oui.
…avec les meilleurs professeurs, etc.
Tu peux payer énormément une préparation et ne pas être du tout admis dans l'école. Exactement. Non, parce que c'est pas comme dans certaines universités américaines où là, vraiment, on peut… Pas toujours officiellement, mais acheter sa place. En France, il y a toujours quand même cette histoire de concours à passer. Et ça, c'est la distinction entre grandes écoles et universités. Les universités, il n'y a pas de concours, donc la sélection, elle, se fait plutôt sur dossier, en fonction des notes que les élèves ont au lycée. Ça, le concours, c'est seulement pour les grandes écoles, mais c'est pas pour toutes les études supérieures en France. Peut être qu'on fera un épisode sur ça. Je pense que ça peut intéresser pas mal de monde.
Ouais, ça peut être intéressant parce qu'en plus, les études en France, c'est vrai que c'est un grand mystère mondial. Ça n'a rien à voir avec le système des autres pays. Ça peut être intéressant.
C'est vrai. Et donc est-ce que ça valait la peine tous ces efforts pour intégrer une école de journalisme ? Est-ce que t'as trouvé que ces études t'ont vraiment formée, t'ont vraiment apporté quelque chose ? Ouais.
Ouais, ouais, complètement. J'ai complètement appris le métier de journaliste. En plus, j'ai eu la chance de… Je fais que de dire que j'ai de la chance. Mais oui, j'aime reconnaitre que, voilà il y a des personnes qui n'ont pas forcément toutes les options qu'on a. Et c'est vrai que j'ai trouvé que parfois, c'était plus une question de chance, que de mérite. Mais ouais… Donc bref, j'ai pu, j'ai pu faire mes études, mon master en alternance. Donc ce qui m'a permis de travailler. Donc l'alternance, c'est quand on est à moitié dans une entreprise et à moitié dans la formation. Et quand on est en formation, on reçoit notre salaire, qui est pas un salaire complet, mais qui est une rémunération intéressante par rapport à quelqu'un qui fait des études et qui donc doit parfois travailler à côté ou quoi. Et donc ça m'a permis de travailler comme journaliste, d'avoir déjà ma carte de presse, d'être déjà professionnelle, alors que j'étais encore en master. Après, j'ai pu côtoyer des professeurs qui étaient des très grands journalistes, des… Voilà, travailler comme journaliste, être formée sur le tas, pouvoir connaître la réalité, etc. Et vraiment, ça a été une très, très bonne formation qui… Que je continue à être journaliste ou pas, parce qu'après le marché du travail, en tant que journaliste, c'est complètement autre chose, ça ne dépend plus du tout de ta formation. Ça reste difficile pour tout le monde. Mais dans tous les cas, c'est une formation intellectuelle qui me servira toute ma vie, qui me sert chez InnerFrench et qui m'a servi aussi en tant que professeur ou… et même dans la vie, dans la vie quotidienne, finalement, pour mieux comprendre le monde, mieux s'exprimer, mieux appréhender les médias et toutes les sources d'information qu'on trouve autour de soi. Et… Tu as fait ton alternance dans quelle rédaction ?
Alors, j'ai fait mon alternance dans une rédaction qui s'appelle Le Figaro Classifieds, qui est en fait une des branches du Figaro. Mais qui n'est… En fait, j'étais sur des sites Internet qui étaient dédiés à l'emploi, à la recherche d'emploi, à la formation. Des choses comme ça, donc très spécialisé. Et ça aussi, ça m'a aussi bien formée parce que le fait d'être très spécialisée sur quelque chose, ça te permet d'apprendre d'une autre manière, de faire des interviews beaucoup plus techniques, de s'informer sur l'actualité, de faire de la veille beaucoup plus précise, etc. Donc c'est aussi quelque chose qui… qui a été une très bonne formation. Ouais, ça je comprends tout à fait l'attrait de cette spécialisation parce que justement, avec le podcast, j'ai couvert quand même pas mal de sujets, des sujets à l'origine qui m'intéressaient, et que j'avais envie de creuser un peu. Mais ce, c'est jamais possible d'aller vraiment au cœur du sujet, de lire tout ce qui est disponible dessus. C'est vrai que c'est assez frustrant en fait, d'être plutôt généraliste, de passer d'un sujet à l'autre. On a quelques jours pour se documenter, essayer d'avoir un fil directeur, un axe. Mais c'est un peu frustrant en fait d'être généraliste, et de pas être vraiment expert dans un domaine, et d'être sûr de tout ce qu'on raconte. Donc j'imagine que ouais, ça doit être difficile pour les journalistes qui ont vraiment cette pression du temps, en plus. Quand il faut qu'un article soit prêt tel jour à telle heure, il faut qu'il soit prêt. Sinon, il ne peut pas partir en impression. Alors que moi, comme vous le savez avec le podcast, bon je suis pas toujours très régulier. Mais ouais, je comprends que ce soit quelque chose qui t'a plu. Et à ce moment-là, tu as réalisé aussi ton rêve d'avoir un appartement à Paris. Ouais.
Ouais, ouais. J'ai eu un premier studio quand je préparais les concours. Je me rappelle que… J'étais acceptée à La Chance au concours, donc, donc j'ai su que j'allais pouvoir préparer les concours de façon gratuite. En plus, avec des aides financières parce que les concours, parfois, il faut payer les droits d'inscription ou le voyage quand c'est des concours en province, etc. Et La Chance aux concours se chargeait de rembourser ces frais. Je me souviens que là, je me suis dit : « bon, la prochaine étape, c'est vivre à Paris. Parce que comment je vais faire les allers retours si je passe trois heures (parce que c'était une heure et demie pour aller à Paris, une heure et demie pour rentrer), je vais passer trop de temps les transports, et je ne vais pas pouvoir être efficace. » Et donc j'ai fait une espèce de présentation PowerPoint à mes parents pour leur expliquer que c'était vraiment important que je puisse avoir un petit studio à Paris qui puisse m'aider. Et puis, que, l'année suivante, j'allais probablement être en alternance et pouvoir à nouveau assumer financièrement, etc. Et donc, en voyant toute ma motivation et en voyant à quel point je savais ce que je faisais, ils ont accepté et donc j'ai réussi à trouver mon petit studio pas cher, bien situé, etc. Qui était pour moi un super plan, jusqu'à me rendre compte, évidemment, qu'il était insalubre. Mais ça c'est une autre histoire… Mais bon toute façon j'étais contente. Qu'est ce que ça veut dire… Qu'est ce que ça veut dire insalubre ? Tu peux expliquer pour les auditeurs ?
Ouais insalubre, en fait, c'est un immeuble ou un appartement qui n'est pas sain, donc qui a des problèmes d'humidité ou alors des problèmes d'isolement. Ça peut être quand il y a des rats, par exemple. Voilà tout ce qui fait qu'un endroit n'est pas vivable, en fait. Et donc, dans mon cas, c'était humide, donc tellement humide que les murs sont devenus verts avec de la moisissure, etc. Et voilà, c'était… Mais bon, à Paris, ce genre d'histoire est très… n'est pas du tout rare, et ça fait partie du folklore du début de vie parisienne d'être dans un petit appartement pourri… Ça fait partie de l'expérience. Voilà, c'est ça. Donc j'étais content quand même. Et tu étais dans quel arrondissement ?
Dans le 18ème. Dans le 18ème, j'ai toujours… En fait j'ai fait une prépa dans le dix… À Place de Clichy et à partir de là, je suis tombée amoureuse du 18ème, de Montmartre, etc. Toutes mes… Tous mes copains étaient aussi là bas. Donc quand j'ai cherché un appart, j'ai cherché vraiment que dans un quartier en particulier autour du métro Lamarck-Caulaincourt. Très cliché, parce que maintenant, à chaque fois que je vois des photos de Paris sur Instagram ou quoi, c'est toujours des… C'est toujours exactement ma rue ou les alentours de là où je vivais. C'est vrai que c'est un quartier qui est devenu très, très populaire ces dernières années, qui était pas si cher que ça en plus, au départ. Non même, même quand j'ai déménagé. Finalement, c'était… C'était pas très cher. C'est aussi pour ça que tous mes amis étaient restés là bas et que c'était un quartier. C'est un quartier qui était beau, qui avait vraiment une identité particulière et en même temps, les apparts n'étaient pas si chers que ça par rapport à d'autres quartiers, notamment dans les zones étudiantes, dans le cinquième ou quoi, où là vraiment c'était hors de prix. Et comment ça s'est passé après tes études ? Le début de ta carrière ?
Alors, du coup, j'ai commencé en étant pigiste. Tout de suite après la fin de mon alternance, j'ai commencé à travailler comme pigiste. Et puis après, j'ai eu une expérience. Tu peux expliquer ce que c'est un… un ou une pigiste ? Pigiste, c'est un journaliste qui travaille à la pige et donc la pige c'est un contrat ponctuel, donc c'est un contrat de salarié, mais seulement pour une mission, une journée. Donc, ça permet de travailler de façon indépendante pour plusieurs médias. C'est comme si on était, pour une journée embauchée par un média, et puis le jour suivant, pour un autre, etc. Donc c'est très précaire. Donc, c'est pas du tout quelque chose qui est économiquement souhaitable ou qui est facile. Parce que bah pour trouver un appartement, pour avoir un prêt auprès de la banque, ces choses-là, c'est difficile. Mais c'est vrai que moi, en étant jeune et en n'ayant pas forcément envie d'une très grande stabilité au début, ça me paraissait être plutôt la possibilité d'avoir plein d'opportunités, d'être libre, de faire des choses différentes, etc. Donc voilà.
Donc, c'est un peu comme free-lance. Mais attention, pigiste seulement dans le journalisme. Donc, ce n'est pas l'équivalent de free-lance, c'est seulement pour le journaliste free-lance. Parce que free-lance, on est son propre patron alors que journaliste pigiste, c'est que pour les journalistes, c'est un type de contrat bien particulier qui permet d'être quand même salarié d'une entreprise, mais de façon ponctuelle, pas sur des contrats de six mois ou des choses comme ça. Donc là après c'est des détails administratifs, mais que je précise parce que c'est vrai que c'est important dans la profession de faire la différence entre les deux. Et voilà.