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Cinq semaines en ballon de Jules Verne, CHAPITRE XLI

CHAPITRE XLI

Les approches du Sénégal.—Le Victoria baisse de plus en plus.—On jette, on jette toujours.—Le marabout El-Hadji.—MM.

Pascal, Vincent, Lambert.—Un rival de Mahomet. —Les montagnes difficiles.—Les armes de Kennedy.—Une man uvre de Joe.—Halte au-dessus d'un forêt.

Le 27 mai, vers neuf heures du matin, le pays se présenta sous un nouvel aspect : les rampes longuement étendues se changeaient en collines qui faisaient présager de prochaines montagnes ; on aurait à franchir la chaîne qui sépare le bassin du Niger du bassin du Sénegal et détermine l'écoulement des eaux soit au golfe de Guinée, soit à la baie du cap Vert.

Jusqu'au Sénégal, cette partie de l'Afrique est signalée comme dangereuse.

Le docteur Fergusson le savait par les récits de ses devanciers ; ils avaient souffert mille privations et couru mille dangers au milieu de ces nègres barbares ; ce climat funeste dévora la plus grande partie des compagnons de Mungo-Park. Fergusson fut donc plus que jamais décidé à ne pas prendre pied sur cette contrée inhospitalière.

Mais il n'eut pas un moment de repos ; le Victoria baissait d'une manière sensible ; il fallut jeter encore une foule d'objets plus ou moins inutiles, surtout au moment de franchir une crête.

Et ce fut ainsi pendant plus de cent vingt milles ; on se fatigua à monter et à descendre ; le ballon, ce nouveau rocher de Sisyphe, retombait incessamment ; les formes de l'aérostat peu gonflé s'efflanquaient déjà ; il s'allongeait, et le vent creusait de vastes poches dans son enveloppe détendue.

Kennedy ne put s'empêcher d'en faire la remarque.

« Est-ce que le ballon aurait une fissure ?

dit-il.

—Non, répondit le docteur ; mais la gutta-percha s'est évidemment ramollie ou fondue sous la chaleur, et l'hydrogène fuit à travers le taffetas.

—Comment empêcher cette fuite

—C'est impossible.

Allégeons-nous ; c'est le seul moyen ; jetons tout ce qu'on peut jeter.

—Mais quoi ?

fit le chasseur en regardant la nacelle déjà fort dégarnie.

—Débarrassons-nous de la tente, dont le poids est assez considérable.»

Joe, que cet ordre concernait, monta au-dessus du cercle qui réunissait les cordes du filet ; de là, il vint facilement à bout de détacher les épais rideaux de la tente, et il les précipita au dehors.

« Voilà qui fera le bonheur de toute une tribu de nègres, dit-il ; il y a là de quoi habiller un millier d'indigènes, car ils sont assez discrets sur l'étoffe.

» Le ballon s'était relevé un peu, mais bientôt il devint évident qu'il se rapprochait encore du sol. Descendons, dit Kennedy, et voyons ce que l'on peut faire à cette enveloppe.

—Je te le répète, Dick, nous n'avons aucun moyen de la réparer.

—Alors comment ferons-nous ?

—Nous sacrifierons tout ce qui ne sera pas complètement indispensable ; je veux à tout prix éviter une halte dans ces parages ; les forêts dont nous rasons la cime en ce moment ne sont rien moins que sûres.

—Quoi !

des lions, des hyènes ? fit Joe avec mépris.

—Mieux que cela, mon garçon, des hommes, et des plus cruels qui soient en Afrique.

—Comment le sait-on ?

—Par les voyageurs qui nous ont précédés ; puis les Français, qui occupent la colonie du Sénégal, ont eu forcément des rapports avec les peuplades environnantes ; sous le gouvernement du colonel Faidherbe, des reconnaissances ont été poussées fort avant dans le pays ; des officiers, tels que MM.

Pascal, Vincent, Lambert, ont rapporté des documents précieux de leurs expéditions. Ils ont exploré ces contrées formées par le coude du Sénégal, là où la guerre et le pillage n'ont plus laissé que des ruines.

—Que s'est-il donc passé ?

—Le voici.

En 1854, un marabout du Fouta sénégalais, Al-Hadji, se disant inspiré comme Mahomet, poussa toutes les tribus à la guerre contre les infidèles, c'est-à-dire les Européens. Il porta la destruction et la désolation entre le fleuve Sénégal et son affluent la Falémé. Trois hordes de fanatiques guidées par lui sillonnèrent le pays de façon à n'épargner ni un village ni une hutte, pillant et massacrant ; il s'avança même dans la vallée du Niger, jusqu'à la ville de Sego, qui fut longtemps menacée. En 1857, il remontait plus au nord et investissait le fort de Médine, bâti par les Français sur les bords du fleuve ; cet établissement fut défendu par un héros, Paul Holl, qui pendant plusieurs mois, sans nourriture, sans munitions presque, tint jusqu'au moment où le colonel Faidherbe vint le délivrer. Al-Hadji et ses bandes repassèrent alors le Sénégal, et revinrent dans le Kaarta continuer leurs rapines et leurs massacres ; or, voici les contrées dans lesquelles il s'est enfui et réfugié avec ses hordes de bandits, et je vous affirme qu'il ne ferait pas bon tomber entre ses mains.

—Nous n'y tomberons pas, dit Joe , quand nous devrions sacrifier jusqu'à nos chaussures pour relever le Victoria .

—Nous ne sommes pas éloignés du fleuve, dit le docteur ; mais je prévois que notre ballon ne pourra nous porter au-delà.

—Arrivons toujours sur les bords, répliqua le chasseur, ce sera cela de gagné.

—C'est ce que nous essayons de faire, dit le docteur ; seulement, une chose m'inquiète.

—Laquelle ?

—Nous aurons des montagnes à dépasser, et ce sera difficile, puisque je ne puis augmenter la force ascensionnelle de l'aérostat, même en produisant la plus grande chaleur possible.

—Attendons, fit Kennedy, et nous verrons alors.

—Pauvre Victoria !

fit Joe, je m'y suis attaché comme le marin à son navire ; je ne m'en séparerai pas sans peine ! Il n'est plus ce qu'il était au départ, soit ! mais il ne faut pas en dire du mal ! Il nous a rendu de fiers services, et ce sera pour moi un crève-coeur de l'abandonner.

—Sois tranquille, Joe ; si nous l'abandonnons, ce sera malgré nous.

Il nous servira jusqu'à ce qu'il soit au bout de ses forces. Je lui demande encore vingt-quatre heures.

—Il s'épuise, fit Joe en le considérant, il maigrit, sa vie s'en va.

Pauvre ballon !

—Si je ne me trompe, dit Kennedy, voici à l'horizon les montagnes dont tu parlais, Samuel.

—Ce sont bien elles, dit le docteur après les avoir examinées avec sa lunette ; elles me paraissent fort élevées, nous aurons du mal à les franchir.

—Ne pourrait-on les éviter ?

—Je ne pense pas, Dick ; vois l'immense espace qu elles occupent : près de la moitié de l'horizon !

—Elles ont même l'air de se resserrer autour de nous, dit Joe ; elles gagnent sur la droite et sur la gauche.

—Il faut absolument passer par-dessus.

» Ces obstacles si dangereux paraissaient approcher avec une rapidité extrême, ou, pour mieux dire, le vent très fort précipitait le Victoria vers des pics aigus. Il fallait s'élever à tout prix, sous peine de les heurter.

« Vidons notre caisse à eau, dit Fergusson ; ne réservons que le nécessaire pour un jour.

—Voilà !

dit Joe —Le ballon se relève-t-il ? demanda Kennedy.

—Un peu, d'une cinquantaine de pieds, répondit le docteur, qui ne quittait pas le baromètre des yeux.

Mais ce n'est pas assez. » En effet, les hautes cimes arrivaient sur les voyageurs à faire croire qu'elles se précipitaient sur eux ; ils étaient loin de les dominer ; il s'en fallait de plus de cinq cents pieds encore. La provision d'eau du chalumeau fut également jetée au dehors ; on n'en conserva que quelques pintes ; mais cela fut encore insuffisant.

« Il faut pourtant passer, dit le docteur.

—Jetons les caisses, puisque nous les avons vidées, dit Kennedy.

—Jetez-les.

—Voilà ! fit Joe. C'est triste de s'en aller morceau par morceau.

—Pour toi, Joe, ne va pas renouveler ton dévouement de l'autre jour !

Quoi qu il arrive, jure-moi de ne pas nous quitter.

—Soyez tranquille, mon maître, nous ne nous quitterons pas.

» Le Victoria avait regagné en hauteur une vingtaine de toises, mais la crête de la montagne le dominait toujours. C'était une arête assez droite qui terminait une véritable muraille coupée à pic. Elle s'élevait encore de plus de deux cents pieds au-dessus des voyageurs.

« Dans dix minutes, se dit le docteur, notre nacelle sera brisée contre ces roches, si nous ne parvenons pas à les dépasser !

—Eh bien, Monsieur Samuel ?

fit Joe. —Ne conserve que notre provision de pemmican, et jette toute cette viande qui pèse. » Le ballon fut encore délesté d'une cinquantaine de livres ; il s'éleva très sensiblement, mais peu importait, s'il n'arrivait pas au-dessus de la ligne des montagnes. La situation était effrayante ; le Victoria courait avec une grande rapidité ; on sentait qu'il allait se mettre en pièces ; le choc serait terrible en effet.

Le docteur regarda autour de lui dans la nacelle.

Elle était presque vide.

« S'il le faut, Dicks, tu te tiendras prêt à sacrifier tes armes.

—Sacrifier mes armes !

répondit le chasseur avec émotion.

—Mon ami, si je te le demande, c'est que ce sera nécessaire.

—Samuel !

Samuel ! —Tes armes, tes provisions de plomb et de poudre peuvent nous coûter la vie. —Nous approchons !

s'écria Joe, nous approchons ! » Dix toises! La montagne dépassait le Victoria de dix toises encore.

Joe prit les couvertures et les précipita au dehors.

Sans en rien dire à Kennedy, il lança également plusieurs sacs de balles et de plomb.

Le ballon remonta, il dépassa la cime dangereuse, et son pôle supérieur s'éclaira des rayons du soleil.

Mais la nacelle se trouvait encore un peu au-dessous des quartiers de rocs, contre lesquels elle allait inévitablement se briser.

« Kennedy !

Kennedy! s'écria le docteur, jette tes armes, ou nous sommes perdus.

—Attendez, Monsieur Dick !

fit Joe, attendez ! » Et Kennedy, se retournant, le vit disparaître au dehors de la nacelle. « Joe !

Joe! cria-t-il.

—Le malheureux !

» fit le docteur.

La crête de la montagne pouvait avoir en cet endroit une vingtaine de pieds de largeur, et de l'autre côté, la pente présentait une moindre déclivité.

La nacelle arriva juste au niveau de ce plateau assez uni ; elle glissa sur un sol composé de cailloux aigus qui criaient sous son passage,

« Nous passons !

nous passons ! nous sommes passés ! » cria une voix qui fit bondir le coeur de Fergusson.

L'intrépide garçon se soutenait par les mains au bord inférieur de la nacelle ; il courait à pied sur la crête, délestant ainsi le ballon de la totalité de son poids ; il était même obligé de le retenir fortement, car il tendait à lui échapper.

Lorsqu'il fut arrivé au versant opposé, et que l'abîme se présenta devant lui, Joe, par un vigoureux effort du poignet, se releva, et s'accrochant aux cordages, il remonta auprès de ses compagnons.

« Pas plus difficile que cela, fit-il.

—Mon brave Joe !

mon ami ! dit le docteur avec effusion.

—Oh !

ce que j'en ai fait ; répondit celui-ci, ce n'est pas pour vous ; c'est pour la carabine de M. Dick ! Je lui devais bien cela depuis l'affaire de l'Arabe ! J'aime à payer mes dettes, et maintenant nous sommes quittes, ajouta-t-il en présentant au chasseur son arme de prédilection. J'aurais eu trop de peine à vous voir vous en séparer. » Kennedy lui serra vigoureusement la main sans pouvoir dire un mot. Le Victoria n'avait plus qu'à descendre ; cela lui était facile ; il se retrouva bientôt à deux cents pieds du sol, et fut alors en équilibre.

Le terrain semblait convulsionné ; il présentait de nombreux accidents fort difficiles à éviter pendant la nuit avec un ballon qui n'obéissait plus. Le soir arrivait rapidement, et, malgré ses répugnances, le docteur dut se résoudre à faire halte jusqu'au lendemain.

« Nous allons chercher un lieu favorable pour nous arrêter, dit-il.

—Ah !

répondit Kennedy, tu te décides enfin ?

—Oui, j'ai médité longuement un projet que nous allons mettre à exécution ; il n'est encore que six heures du soir, nous aurons le temps.

Jette les ancres, Joe. » Joe obéit, et les deux ancres pendirent au-dessous de la nacelle. « J'aperçois de vastes forêts, dit le docteur ; nous allons courir au-dessus de leurs cimes, et nous nous accrocherons à quelque arbre.

Pour rien au monde, je ne consentirais à passer la nuit à terre.

—Pourrons-nous descendre ?

demanda Kennedy. —A quoi bon ? Je vous répète qu il serait dangereux de nous séparer. D'ailleurs, je réclame votre aide pour un travail difficile. » Le Victoria , qui rasait le sommet de forêts immenses, ne tarda pas à s'arrêter brusquement ; ses ancres étaient prises ; le vent tomba avec le soir, et il demeura presque immobile au-dessus de ce vaste champ de verdure formé par la cime d'une forêt de sycomores.


CHAPITRE XLI CHAPTER XLI CAPÍTULO XLI

Les approches du Sénégal.—Le Victoria baisse de plus en plus.—On jette, on jette toujours.—Le marabout El-Hadji.—MM. Approaches to Senegal.—The Victoria falls more and more.—One throws, one always throws.—The marabout El-Hadji.—MM.

Pascal, Vincent, Lambert.—Un rival de Mahomet. —Les montagnes difficiles.—Les armes de Kennedy.—Une man uvre de Joe.—Halte au-dessus d'un forêt. —The Difficult Mountains.—Kennedy's Weapons.—Joe's Maneuver.—Stop Over a Forest.

Le 27 mai, vers neuf heures du matin, le pays se présenta sous un nouvel aspect : les rampes longuement étendues se changeaient en collines qui faisaient présager de prochaines montagnes ; on aurait à franchir la chaîne qui sépare le bassin du Niger du bassin du Sénegal et détermine l'écoulement des eaux soit au golfe de Guinée, soit à la baie du cap Vert. On May 27, around nine in the morning, the country presented itself under a new aspect: the long extended ramps changed into hills which foreshadowed the next mountains; we would have to cross the chain which separates the Niger basin from the Senegal basin and determines the flow of water either in the Gulf of Guinea or in the bay of Cape Verde.

Jusqu'au Sénégal, cette partie de l'Afrique est signalée comme dangereuse. Up to Senegal, this part of Africa is reported as dangerous.

Le docteur Fergusson le savait par les récits de ses devanciers ; ils avaient souffert mille privations et couru mille dangers au milieu de ces nègres barbares ; ce climat funeste dévora la plus grande partie des compagnons de Mungo-Park. Doctor Fergusson knew this from the accounts of his predecessors; they had suffered a thousand privations and run a thousand dangers in the midst of these barbarian negroes; this fatal climate devoured most of Mungo-Park's companions. Fergusson fut donc plus que jamais décidé à ne pas prendre pied sur cette contrée inhospitalière. Fergusson was therefore more than ever determined not to gain a foothold in this inhospitable region.

Mais il n'eut pas un moment de repos ; le  Victoria baissait d'une manière sensible ; il fallut jeter encore une foule d'objets plus ou moins inutiles, surtout au moment de franchir une crête. But he did not have a moment of rest; the Victoria fell appreciably; a crowd of more or less useless objects had to be thrown away, especially when crossing a ridge.

Et ce fut ainsi pendant plus de cent vingt milles ; on se fatigua à monter et à descendre ; le ballon, ce nouveau rocher de Sisyphe, retombait incessamment ; les formes de l'aérostat peu gonflé s'efflanquaient déjà ; il s'allongeait, et le vent creusait de vastes poches dans son enveloppe détendue. And it was so for over a hundred and twenty miles; we got tired of going up and down; the balloon, this new rock of Sisyphus, fell constantly; the shapes of the slightly inflated aerostat were already sagging; it lay down, and the wind dug large pockets into its relaxed envelope.

Kennedy ne put s'empêcher d'en faire la remarque. Kennedy couldn't help making the point.

« Est-ce que le ballon aurait une fissure ? "Would the balloon have a crack?"

dit-il.

—Non, répondit le docteur ; mais la gutta-percha s'est évidemment ramollie ou fondue sous la chaleur, et l'hydrogène fuit à travers le taffetas. "No," replied the doctor; but the gutta-percha has obviously softened or melted under the heat, and the hydrogen leaks through the taffeta.

—Comment empêcher cette fuite —How to prevent this leak

—C'est impossible.

Allégeons-nous ; c'est le seul moyen ; jetons tout ce qu'on peut jeter. Let us be lightened; It is the only way ; throw everything we can throw away.

—Mais quoi ? -But what ?

fit le chasseur en regardant la nacelle déjà fort dégarnie. said the hunter, looking at the basket, already very bare.

—Débarrassons-nous de la tente, dont le poids est assez considérable.» "Let’s get rid of the tent, which is quite heavy."

Joe, que cet ordre concernait, monta au-dessus du cercle qui réunissait les cordes du filet ; de là, il vint facilement à bout de détacher les épais rideaux de la tente, et il les précipita au dehors. Joe, whom this order concerned, ascended above the circle which united the strings of the net; from there he easily came to the point of tearing off the thick curtains from the tent, and he threw them outside.

« Voilà qui fera le bonheur de toute une tribu de nègres, dit-il ; il y a là de quoi habiller un millier d'indigènes, car ils sont assez discrets sur l'étoffe. "This will make the happiness of a whole tribe of negroes," said he; there is enough to dress a thousand natives, because they are quite discreet on the fabric.

» Le ballon s'était relevé un peu, mais bientôt il devint évident qu'il se rapprochait encore du sol. The ball rose a little, but soon it became clear that it was still getting closer to the ground. Descendons, dit Kennedy, et voyons ce que l'on peut faire à cette enveloppe. Let's go down, said Kennedy, and see what we can do with this envelope.

—Je te le répète, Dick, nous n'avons aucun moyen de la réparer. “Again, Dick, we have no way of fixing it.

—Alors comment ferons-nous ? "So how shall we do it?"

—Nous sacrifierons tout ce qui ne sera pas complètement indispensable ; je veux à tout prix éviter une halte dans ces parages ; les forêts dont nous rasons la cime en ce moment ne sont rien moins que sûres. - We will sacrifice all that is not completely essential; I want at all costs to avoid a halt in these parts; the forests whose top we are shaving at the moment are nothing less than safe.

—Quoi !

des lions, des hyènes ? fit Joe avec mépris. said Joe contemptuously.

—Mieux que cela, mon garçon, des hommes, et des plus cruels qui soient en Afrique. "Better than that, my boy, men and the cruelest people in Africa."

—Comment le sait-on ?

—Par les voyageurs qui nous ont précédés ; puis les Français, qui occupent la colonie du Sénégal, ont eu forcément des rapports avec les peuplades environnantes ; sous le gouvernement du colonel Faidherbe, des reconnaissances ont été poussées fort avant dans le pays ; des officiers, tels que MM. -By travelers who have preceded us; then the French, who occupy the colony of Senegal, had inevitably relations with the surrounding peoples; under the government of colonel Faidherbe, reconnaissance was pushed far before in the country; Officers such as Messrs.

Pascal, Vincent, Lambert, ont rapporté des documents précieux de leurs expéditions. Pascal, Vincent, Lambert, brought back precious documents from their expeditions. Ils ont exploré ces contrées formées par le coude du Sénégal, là où la guerre et le pillage n'ont plus laissé que des ruines. They explored these regions formed by the bend of Senegal, where war and pillage have left nothing but ruins.

—Que s'est-il donc passé ? “What happened then?

—Le voici. -Here it is.

En 1854, un marabout du Fouta sénégalais, Al-Hadji, se disant inspiré comme Mahomet, poussa toutes les tribus à la guerre contre les infidèles, c'est-à-dire les Européens. Il porta la destruction et la désolation entre le fleuve Sénégal et son affluent la Falémé. It brought destruction and desolation between the Senegal river and its tributary the Falémé. Trois hordes de fanatiques guidées par lui sillonnèrent le pays de façon à n'épargner ni un village ni une hutte, pillant et massacrant ; il s'avança même dans la vallée du Niger, jusqu'à la ville de Sego, qui fut longtemps menacée. Three hordes of fanatics guided by him crisscrossed the country so as to spare neither a village nor a hut, plundering and massacring; he even advanced into the Niger valley, as far as the town of Sego, which was threatened for a long time. En 1857, il remontait plus au nord et investissait le fort de Médine, bâti par les Français sur les bords du fleuve ; cet établissement fut défendu par un héros, Paul Holl, qui pendant plusieurs mois, sans nourriture, sans munitions presque, tint jusqu'au moment où le colonel Faidherbe vint le délivrer. In 1857, it went further north and invested the fort of Medina, built by the French on the banks of the river; this establishment was defended by a hero, Paul Holl, who for several months, without food, almost without ammunition, held out until Colonel Faidherbe came to deliver him. Al-Hadji et ses bandes repassèrent alors le Sénégal, et revinrent dans le Kaarta continuer leurs rapines et leurs massacres ; or, voici les contrées dans lesquelles il s'est enfui et réfugié avec ses hordes de bandits, et je vous affirme qu'il ne ferait pas bon tomber entre ses mains. Al-Hadji and his gangs then crossed Senegal, and returned to Kaarta to continue their robberies and their massacres; Now here are the countries in which he fled and took refuge with his hordes of bandits, and I assure you that it would not be good to fall into his hands.

—Nous n'y tomberons pas, dit Joe “We won't fall for it,” said Joe, “when we have to sacrifice up our shoes to raise the Victoria. , quand nous devrions sacrifier jusqu'à nos chaussures pour relever le  Victoria . "We are not far from the river," said the doctor; but I foresee that our balloon will not be able to carry us beyond.

—Nous ne sommes pas éloignés du fleuve, dit le docteur ; mais je prévois que notre ballon ne pourra nous porter au-delà. "Let's always get to the edges," replied the hunter.

—Arrivons toujours sur les bords, répliqua le chasseur, ce sera cela de gagné. "That is what we are trying to do," said the doctor; only one thing worries me.

—C'est ce que nous essayons de faire, dit le docteur ; seulement, une chose m'inquiète.

—Laquelle ? —We will have mountains to overcome, and it will be difficult, since I cannot increase the upward force of the aerostat, even while producing the greatest possible heat.

—Nous aurons des montagnes à dépasser, et ce sera difficile, puisque je ne puis augmenter la force ascensionnelle de l'aérostat, même en produisant la plus grande chaleur possible. "Wait," said Kennedy, "and we will see then."

—Attendons, fit Kennedy, et nous verrons alors.

—Pauvre  Victoria ! said Joe, "I attached myself like the sailor to his ship; I will not part with pain!

fit Joe, je m'y suis attaché comme le marin à son navire ; je ne m'en séparerai pas sans peine ! It is not what it was originally, either! Il n'est plus ce qu'il était au départ, soit ! but don't say bad! mais il ne faut pas en dire du mal ! He has done us great service, and it will be heartbreaking for me to give it up. Il nous a rendu de fiers services, et ce sera pour moi un crève-coeur de l'abandonner. “Don't worry, Joe; if we abandon it, it will be in spite of us.

—Sois tranquille, Joe ; si nous l'abandonnons, ce sera malgré nous. He will serve us until he is at the end of his strength.

Il nous servira jusqu'à ce qu'il soit au bout de ses forces. I ask him another twenty-four hours. Je lui demande encore vingt-quatre heures. "He's getting exhausted," said Joe, considering him. "He's losing weight, his life is going away."

—Il s'épuise, fit Joe en le considérant, il maigrit, sa vie s'en va.

Pauvre ballon ! "If I'm not mistaken," said Kennedy, "here are the mountains on the horizon you were talking about, Samuel."

—Si je ne me trompe, dit Kennedy, voici à l'horizon les montagnes dont tu parlais, Samuel. "They are indeed," said the doctor, after examining them with his telescope; they seem very high to me, we will have trouble crossing them.

—Ce sont bien elles, dit le docteur après les avoir examinées avec sa lunette ; elles me paraissent fort élevées, nous aurons du mal à les franchir. “Couldn't we avoid them?

—Ne pourrait-on les éviter ? “I don't think so, Dick; see the huge space they occupy: almost half the horizon!

—Je ne pense pas, Dick ; vois l'immense espace qu elles occupent : près de la moitié de l'horizon ! "They even seem to be tightening around us," said Joe; they win on the right and on the left.

—Elles ont même l'air de se resserrer autour de nous, dit Joe ; elles gagnent sur la droite et sur la gauche.

—Il faut absolument passer par-dessus. These so dangerous obstacles seemed to approach with extreme rapidity, or, to put it better, the very strong wind precipitated the Victoria towards sharp peaks.

» Ces obstacles si dangereux paraissaient approcher avec une rapidité extrême, ou, pour mieux dire, le vent très fort précipitait le  Victoria vers des pics aigus. It was necessary to rise at any cost, under penalty of striking them. Il fallait s'élever à tout prix, sous peine de les heurter. "Let's empty our water tank," said Fergusson; only reserve the necessary for one day.

« Vidons notre caisse à eau, dit Fergusson ; ne réservons que le nécessaire pour un jour.

—Voilà !

dit Joe —Le ballon se relève-t-il ? “Does the balloon rise? demanda Kennedy.

—Un peu, d'une cinquantaine de pieds, répondit le docteur, qui ne quittait pas le baromètre des yeux. "A little over fifty feet," replied the doctor, who did not take his eyes off the barometer.

Mais ce n'est pas assez. » En effet, les hautes cimes arrivaient sur les voyageurs à faire croire qu'elles se précipitaient sur eux ; ils étaient loin de les dominer ; il s'en fallait de plus de cinq cents pieds encore. In fact, the high peaks arrived on travelers to make them believe that they were rushing on them; they were far from dominating them; more than five hundred feet were needed. La provision d'eau du chalumeau fut également jetée au dehors ; on n'en conserva que quelques pintes ; mais cela fut encore insuffisant. The supply of water from the blowtorch was also thrown outside; only a few pints were kept; but this was still insufficient.

« Il faut pourtant passer, dit le docteur. "We must pass, however," said the doctor.

—Jetons les caisses, puisque nous les avons vidées, dit Kennedy. "Let's throw the boxes away, since we've emptied them," said Kennedy.

—Jetez-les.

—Voilà ! fit Joe. C'est triste de s'en aller morceau par morceau.

—Pour toi, Joe, ne va pas renouveler ton dévouement de l'autre jour ! It's sad to go away piece by piece.

Quoi qu il arrive, jure-moi de ne pas nous quitter. "For you, Joe, don't renew your devotion the other day!"

—Soyez tranquille, mon maître, nous ne nous quitterons pas. Whatever happens, swear not to leave us.

» Le  Victoria avait regagné en hauteur une vingtaine de toises, mais la crête de la montagne le dominait toujours. "Do not worry, my master, we will not leave each other." C'était une arête assez droite qui terminait une véritable muraille coupée à pic. The Victoria had regained some twenty toises in height, but the crest of the mountain still dominated it. Elle s'élevait encore de plus de deux cents pieds au-dessus des voyageurs. It was a fairly straight ridge that ended a real wall cut at a steep angle.

« Dans dix minutes, se dit le docteur, notre nacelle sera brisée contre ces roches, si nous ne parvenons pas à les dépasser ! It still rose more than two hundred feet above the travelers.

—Eh bien, Monsieur Samuel ? "In ten minutes," said the doctor to himself, "our basket will be broken against these rocks, if we cannot get past them!"

fit Joe. —Ne conserve que notre provision de pemmican, et jette toute cette viande qui pèse. » Le ballon fut encore délesté d'une cinquantaine de livres ; il s'éleva très sensiblement, mais peu importait, s'il n'arrivait pas au-dessus de la ligne des montagnes. La situation était effrayante ; le  Victoria courait avec une grande rapidité ; on sentait qu'il allait se mettre en pièces ; le choc serait terrible en effet. “Keep only our supply of pemmican, and throw away all the heavy meat.

Le docteur regarda autour de lui dans la nacelle. The balloon was further relieved of fifty pounds; it rose very appreciably, but little matter, if it did not arrive above the line of the mountains.

Elle était presque vide. The situation was frightening; the Victoria ran with great speed; we felt that he was going to tear to pieces; the shock would be terrible indeed.

« S'il le faut, Dicks, tu te tiendras prêt à sacrifier tes armes. The doctor looked around in the basket.

—Sacrifier mes armes ! It was almost empty.

répondit le chasseur avec émotion. "If necessary, Dicks, you will be ready to sacrifice your weapons."

—Mon ami, si je te le demande, c'est que ce sera nécessaire.

—Samuel !

Samuel ! —Tes armes, tes provisions de plomb et de poudre peuvent nous coûter la vie. "My friend, if I ask you, it will be necessary." —Nous approchons !

s'écria Joe, nous approchons ! » Dix toises! “Your weapons, your supplies of lead and powder can cost us our lives. La montagne dépassait le  Victoria de dix toises encore. “We are approaching!

Joe prit les couvertures et les précipita au dehors. cried Joe, "we're coming!"

Sans en rien dire à Kennedy, il lança également plusieurs sacs de balles et de plomb. Ten toises!

Le ballon remonta, il dépassa la cime dangereuse, et son pôle supérieur s'éclaira des rayons du soleil. The mountain still exceeded the Victoria by ten toises.

Mais la nacelle se trouvait encore un peu au-dessous des quartiers de rocs, contre lesquels elle allait inévitablement se briser. Joe took the blankets and threw them out.

« Kennedy ! Without saying anything to Kennedy, he also threw several bags of bullets and lead.

Kennedy! The balloon went up, it passed the dangerous summit, and its upper pole lit up with the rays of the sun. s'écria le docteur, jette tes armes, ou nous sommes perdus. But the basket was still a little below the rocky quarters, against which it would inevitably break.

—Attendez, Monsieur Dick !

fit Joe, attendez ! » Et Kennedy, se retournant, le vit disparaître au dehors de la nacelle. cried the doctor, "throw down your arms, or we are lost." « Joe ! "Joe!

Joe! cria-t-il. And Kennedy, turning around, saw him disappear outside the basket.

—Le malheureux ! "Joe!

» fit le docteur.

La crête de la montagne pouvait avoir en cet endroit une vingtaine de pieds de largeur, et de l'autre côté, la pente présentait une moindre déclivité. cried he.

La nacelle arriva juste au niveau de ce plateau assez uni ; elle glissa sur un sol composé de cailloux aigus qui criaient sous son passage, -The unfortunate !

« Nous passons ! Said the doctor.

nous passons ! The crest of the mountain could have been about twenty feet wide in this place, and on the other side, the slope showed a less incline. nous sommes passés ! The basket arrived just at the level of this fairly flat plateau; she slipped on a ground made up of sharp stones which cried under her passage, » cria une voix qui fit bondir le coeur de Fergusson.

L'intrépide garçon se soutenait par les mains au bord inférieur de la nacelle ; il courait à pied sur la crête, délestant ainsi le ballon de la totalité de son poids ; il était même obligé de le retenir fortement, car il tendait à lui échapper.

Lorsqu'il fut arrivé au versant opposé, et que l'abîme se présenta devant lui, Joe, par un vigoureux effort du poignet, se releva, et s'accrochant aux cordages, il remonta auprès de ses compagnons.

« Pas plus difficile que cela, fit-il.

—Mon brave Joe ! The intrepid boy supported himself by the hands at the lower edge of the basket; he was running on the crest on foot, shedding the entire weight of the balloon; he was even obliged to hold him tight, because he tended to elude him.

mon ami ! When he had arrived at the opposite slope, and the abyss appeared before him, Joe, with a vigorous effort from the wrist, rose, and clinging to the ropes, he went up to his companions. dit le docteur avec effusion. "No more difficult than that," he said.

—Oh ! “My brave Joe!

ce que j'en ai fait ; répondit celui-ci, ce n'est pas pour vous ; c'est pour la carabine de M. Dick ! my friend ! Je lui devais bien cela depuis l'affaire de l'Arabe ! said the doctor effusively. J'aime à payer mes dettes, et maintenant nous sommes quittes, ajouta-t-il en présentant au chasseur son arme de prédilection. -Oh ! J'aurais eu trop de peine à vous voir vous en séparer. what I did with it; replied the latter, "it is not for you; it's for Mr. Dick's rifle! » Kennedy lui serra vigoureusement la main sans pouvoir dire un mot. I owed him that since the Arab affair! Le  Victoria n'avait plus qu'à descendre ; cela lui était facile ; il se retrouva bientôt à deux cents pieds du sol, et fut alors en équilibre. I like to pay my debts, and now we are quits, he added, presenting to the hunter his weapon of choice.

Le terrain semblait convulsionné ; il présentait de nombreux accidents fort difficiles à éviter pendant la nuit avec un ballon qui n'obéissait plus. I would have had too much trouble seeing you part with it. Le soir arrivait rapidement, et, malgré ses répugnances, le docteur dut se résoudre à faire halte jusqu'au lendemain. Kennedy squeezed his hand vigorously without being able to say a word.

« Nous allons chercher un lieu favorable pour nous arrêter, dit-il. The Victoria had only to descend; it was easy for him; he soon found himself two hundred feet from the ground, and was then in equilibrium.

—Ah ! The terrain seemed convulsed; he presented numerous accidents very difficult to avoid during the night with a balloon which no longer obeyed.

répondit Kennedy, tu te décides enfin ? Evening was coming quickly, and, despite his reluctance, the doctor had to make up his mind to stop overnight.

—Oui, j'ai médité longuement un projet que nous allons mettre à exécution ; il n'est encore que six heures du soir, nous aurons le temps. "We are going to look for a favorable place to stop," he said.

Jette les ancres, Joe. » Joe obéit, et les deux ancres pendirent au-dessous de la nacelle. replied Kennedy, you finally decide? « J'aperçois de vastes forêts, dit le docteur ; nous allons courir au-dessus de leurs cimes, et nous nous accrocherons à quelque arbre. “Yes, I have meditated at length on a project which we are going to carry out; it is still only six o'clock in the evening, we will have time.

Pour rien au monde, je ne consentirais à passer la nuit à terre. Drop the anchor, Joe.

—Pourrons-nous descendre ? Joe obeyed, and the two anchors hung below the basket.

demanda Kennedy. —A quoi bon ? "I see vast forests," said the doctor; we will run over their peaks, and we will hang on to some tree. Je vous répète qu il serait dangereux de nous séparer. For nothing in the world, I would not agree to spend the night on land. D'ailleurs, je réclame votre aide pour un travail difficile. "Can we go down?" » Le  Victoria , qui rasait le sommet de forêts immenses, ne tarda pas à s'arrêter brusquement ; ses ancres étaient prises ; le vent tomba avec le soir, et il demeura presque immobile au-dessus de ce vaste champ de verdure formé par la cime d'une forêt de sycomores. asked Kennedy.