102 - Faire sa vie à l'étranger (2)
Hugo: Et comment on dit « courgette » en espagnol ? Parce que je ne sais pas.
Ingrid: Bah du coup, en Espagne, ils disent « calabacín ». Mais au Pérou. Au Pérou, en fait, ils disent « zucchini », le mot italien. Ou alors ils disent « zapallo italiano ». Donc, en fait, ils ont pas. Il n'y en a pas beaucoup là-bas, donc. Et souvent, c'est comme ça, j'imagine que pour quand on va dans un pays anglophone, il y a aussi le problème, voilà, de la culture. Donc, si on regarde un dictionnaire qui nous qui nous donne les mots d'Espagne, ça fonctionne pas toujours. Donc voilà.
Hugo: C'est vrai… Tu vois en polonais, c'est « cukinia ». Donc finalement, ça se comprend. Et c'est plus le mot français qui est bizarre, finalement… Parce que COURGETTE. Ingrid: « Courgette », d'où ça sort ça ? Hugo: Je pense… Ouais. Je pense que parmi les auditeurs, bon, maintenant on l'a traduit dans 3 langues donc vous savez ce que c'est. Mais quand Ingrid l'a dit pour la première fois, j'imagine que beaucoup d'entre vous connaissaient pas ce mot, surtout si vous vivez pas dans un pays francophone. Ingrid: Comment dire en anglais ? Tu sais ?
Hugo: « Zucchini ».
Ah aussi ?
Hugo: Ouais, je crois. Ou « Zucchini ». Je sais plus. Je mélange.
Ingrid: J'aurais dû savoir. J'aurais pu… Mais je ne savais pas le dire. Ni en anglais, ni en italien.
Hugo: Courgette. Donc ça, c'était plutôt sur la partie linguistique. Et après, au niveau des chocs culturels, ça, je sais que c'est un sujet qui passionne les auditeurs. Toi, est-ce que tu as eu des chocs culturels au Pérou ou alors en Espagne ?
Ingrid: Ouais, plein. Donc je ne vais pas tout dire, ce qu'on pourrait faire… Je pourrais faire un épisode entier d'une heure en parlant des différences entre les Français et les Péruviens ou les Latinos en général. Il y a beaucoup de choses qui sont communes à toute l'Amérique latine et je pense, après être allée en Andalousie, que ‘est importé… Enfin, il y a beaucoup de choses. Par exemple, les horaires et les rendez-vous en général. Moi, j'ai toujours été habituée en France, surtout à Paris, à avoir un emploi du temps hyper chargé et à dire à mes amis, à ma famille on se voit tel jour et prévoir des semaines à l'avance. En, j'avais… J'imagine que pour toi, à Paris, c'était pareil. Tu sais que tu vas dîner avec qui, lundi, mardi, jusqu'au vendredi, tu pars en week-end, etc. etc. Au Pérou, bah en fait, quand tu dis « ouais, je t'appelle mardi. Ah mardi, on va au ciné. » Ça ne veut pas du tout dire que mardi, on va au ciné. Ça veut dire J'ai envie de socialiser avec toi, donc… (Sociabiliser ? Socialiser ?) Donc je voilà, je te dis que j'aimerais bien sortir avec toi, mais je ne vais pas du tout m'en rappeler. Je vais pas du tout le noter. Et voilà. Et pareil sur les heures, si tu dis rendez-vous à 12 heures, ça veut dire que à 12 heures, la personne va t'appeler pour savoir si ça tient toujours. Donc, faut surtout pas…
Hugo: Qu'est-ce que ça veut dire ? Cette expression, elle est pas mal : « si ça tient toujours ».
Ingrid: Si ça tient toujours, c'est si c'est toujours bon, si le plan est toujours prévu et si on est toujours d'accord sur ce plan. Donc voilà, il faut… Après, j'ai appris, je me suis adaptée. Et ça fonctionne plutôt bien pour moi, finalement, cette façon de faire. Mais c'est vrai que ça a été une adaptation énorme quoi. De pas arriver à l'heure qu'on avait dit, de pas penser qu'un « je t'appelle », ça voulait dire « je t'appelle pour de vrai » et ça évite des frustrations une fois qu'on s'habitue. Ça a été un gros truc. Et toi… Ouais ?
Hugo: J'ai entendu une anecdote similaire sur les Brésiliens, notamment à Rio. Et apparemment, une des phrases qui se disent souvent en partant, c'est « ah ! on se voit à la plage ! ».
La plage à Rio fait des kilomètres et des kilomètres et voilà, ils donnent pas d'heure particulière. Donc bon, c'est quasiment impossible de retrouver quelqu'un à la plage, mais c'est plus, voilà une formule de politesse. Ou alors, ils se disent que peut-être qu'ils vont se retrouver à la plage par hasard. Mais c'est vrai qu'en France, on est un peu plus formel au niveau des rendez-vous, des horaires, etc. On n'est pas toujours très, très ponctuels, notamment dans les grandes villes, j'ai plusieurs amis qui sont des spécialistes de la demi-heure de retard quand on a rendez-vous. Ingrid: Alors demi-heure… Ouais.
Hugo: Toujours à cause du métro, etc. Bon, c'est vrai qu'à Paris, il peut y avoir quand même, même si la ville n'est pas très grande, on peut souvent se retrouver avec un métro en panne ou quelque chose comme ça. Mais…
Ingrid: Mais alors, eux, tu vois, tu as une heure de retard, t'es toujours dans… T'es toujours à l'heure quoi. Donc…
Hugo: Ouais non, en France, 5-10 minutes, c'est acceptable et il y a pas de problème. Mais plus de 10 minutes…
Ingrid: Et on se prévient en général.
Hugo: Ouais on se prévient.
Ingrid: On s'écrit… Tu vois. « J'arrive dans… » Et c'est normal. C'est vrai que le quart d'heure de politesse, déjà, quand tu es invité chez quelqu'un en France, il faut arriver quand même un peu en retard au cas où la personne ne soit pas complètement prête. Mais voilà, mais je pense dans toutes les cultures, voilà. La France, c'est un peu un entre deux entre l'extrême latino et peut-être je crois qu'en Suisse ou en Allemagne, ils sont un peu plus ponctuels. Hugo: Ils sont très ponctuels ouais.
Ingrid: Et en Pologne ?
Hugo: En Pologne, ils sont assez ponctuels aussi. Mais je me souviens qu'à Londres, pendant mes mes études, on devait trouver un stage et on avait eu une formatrice anglaise qui nous avait aidés à préparer nos CV, etc. Et une des premières choses qu'elle nous avait dites, c'est ‘Quand vous avez un entretien, venez 10 ou 15 minutes avant, mais vraiment n'arrivez pas à l'heure. Arrivez 10, 15 minutes avant. Si vous avez ne serait-ce qu'une minute de retard, c'est très, très mal vu en Angleterre ». Donc voilà.
C'était peut-être aussi une question de parce que c'était dans le cadre professionnel. C'est vrai qu'en France, arriver en retard à un entretien d'embauche ou un entretien pour un stage, ça fait plutôt mauvaise impression, mais ça m'avait marqué en fait. Elle avait dit que c'était vraiment important d'être en avance et que les Français avaient tendance à arriver pile à l'heure ou avec une ou deux minutes de retard et que ça s'était pas acceptable en Angleterre. Ingrid: Oui, c'est ça. En France. 5 minutes de retard, c'est toujours l'heure, alors qu'en Angleterre, c'est… Il faut être là avant. Hugo: Ouais, ouais,
Ingrid: T'as eu d'autres chocs culturels ? Enfin voilà. Moi, c'était mon exemple, on fera… Je pourrais en donner d'autres, mais on va pas rester là-dessus. Mais toi, est-ce que t'as un ou deux exemples de chocs culturels avec la Pologne ? Hugo: Bah, en fait, pas tant que ça. Et il y a beaucoup de choses auxquelles je me suis habitué. Et maintenant, ça me choque. Au contraire, quand je rentre en France, par exemple, dans les rest… En Pologne, on peut manger à toute heure dans les restaurants, ils sont ouverts de 11 heures. Le soir, ils ferment assez tôt, vers 22 23 heures. Mais entre l'heure d'ouverture et l'heure de fermeture, peu importe quand vous arrivez, vous pouvez commander à manger, alors qu'en France, il y a vraiment ces services. Donc si on arrive à 15h dans un restaurant, on ne peut plus manger parce que la cuisine est fermée. Mais ça, maintenant, je me suis tellement habitué à la facilité, en fait, en Pologne, où on n'a pas besoin de réserver de table, on arrive, on mange quand on veut, etc. Que quand je rentre en France, il faut que je sois un peu mieux organisé et que je retrouve tous tous ces réflexes de réserver avant, etc. C'est pas vraiment un choc culturel. C'est plus une question d'organisation, peut-être. Ingrid: Non, mais si, si. Moi, je trouve que c'est un choc culturel. J'ai la même chose. Je pense qu'il y a… La France, c'est plutôt une rareté à mon avis dans le monde. Et c'est vrai que c'est « relou« . « Re-lou », je sais pas si vous connaissez le mot, mais c'est l'inverse de « lourd », donc ça veut dire c'est embêtant, ça pose problème. Hugo: Ouais. J'ai un ami qui était à Paris là récemment, mon ami polonais, justement, et il m'a appelé au moins 3 fois pour se plaindre de Paris en 2 jours, notamment quand il est rentré dans un restaurant à 14h, il a demandé s'il pouvait commander et où la serveuse l'a regardé comme s'il était complètement abruti, et elle lui a dit « Mais non, il est 14h heures, la cuisine est fermée ». Il a demandé s'il pouvait avoir un café : « bah non, on vient de nettoyer la machine à café, c'est pas possible ». Enfin…
Ingrid: La politesse.
Hugo: La politesse. Bon c'est vrai que ce n'est plus le cas à Paris. En Province, c'est un peu moins comme ça, mais on a souvent l'impression d'embêter les gens, les restaurateurs. Ils n'ont pas envie d'avoir de clients, finalement, ils sont ouverts, mais ce n'est pas pour servir les clients. C'est juste voilà, pour être ouverts. Ingrid: Je pense qu'on aurait de quoi aussi faire beaucoup de… « des choses qu'on ne supporte plus en France ». Mais bon…
Hugo: C'est vrai. Et souvent, les étrangers ont l'impression que c'est parce qu'ils parlent pas bien français ou parce qu'il y a quelque chose qu'ils n'ont pas compris etc. Mais en fait, il faut savoir que les Français sont traités exactement de la même manière. Donc, ce n'est pas du tout une question. Ingrid: Ah oui oui complètement. La différence, peut-être, c'est que nous, on répond. Enfin voilà, on est habitué. Donc moi, parfois, il faut voir comme je leur parle quand ils me parlent mal. Alors, est-ce que tu voulais dire quelque chose d'autre sur les chocs culturels, peut-être ? Hugo: Non. Peut-être que…
Ingrid: On va continuer sur…?
Hugo: Effectivement, on pourrait faire tout un épisode sur ça donc je ne sais pas, si jamais ça vous intéresse, dites-le nous et on pourra faire un épisode sur les chocs culturels.
Ingrid: Grave. Ouais, ouais, ouais, ouais. Euh, du coup, est-ce qu'on pourrait parler, pour terminer sur l'installation, de comment trouver du travail ? Peut-être rapidement ? Toi, tu as eu au moins une expérience de travail à l'étranger, n'est-ce pas ? Hugo: Ouais, bah j'avais ce stage à Londres que j'ai fait dans un label de musique. Et là aussi, on avait reçu en bons conseils de cette formatrice qui nous avait dit « Il faut envoyer une centaine de CV ». Ça peut sembler énorme, et en plus, c'était pour un stage. La plupart du temps, les stages, je ne sais pas si c'est le cas partout au Royaume-Uni, mais à Londres, les stages ne sont pas rémunérés, ne sont pas payés. Mais malgré ça, c'est vraiment la loi du nombre. Donc si vous voulez être sûr d'avoir un stage, il faut envoyer une centaine de candidatures, ce qui peut sembler énorme, mais c'est la même chose partout en fait. Donc, si vous voulez mettre toutes les chances de votre côté, il faut envoyer un maximum de candidatures, tout simplement.
Ingrid: Ouais. Ben moi, je dirais. Alors pour le coup, quand j'ai travaillé à l'étranger, j'ai eu de la chance… Non, mais… J'ai bossé au Pérou comme prof. Et puis à Séville, j'ai été guide touristique. Et du coup, moi, mon conseil, encore une fois, ça se rapproche de ce que je disais par rapport aux visas. C'est bien se renseigner sur les conditions de travail, ce qui est autorisé, etc. Parce que, par exemple, même quand on est dans l'espace Schengen, on n'a pas le droit de… On a le droit de rester autant qu'on veut dans un pays, un autre pays que le sien. Ça ne veut pas dire que le permis de travail est automatique, par exemple. Donc voilà, moi j'ai eu… Ça a été finalement le plus difficile pour moi, c'est de réussir à convaincre que c'était bon, je pouvais bosser parce que j'ai mon entreprise ou parce que ce visa-là est possible, etc. Mais voilà, après, sinon, je retiens aussi : même conseil, le CV, et bien adapter son CV à la culture locale. Les CV sont pas toujours les mêmes. Voilà, on pourra éventuellement vous dire comment faire si vous venez en France, mais s'adapter et voilà. Et avoir beaucoup de courage.
Hugo: C'est vrai. On réfléchit peut-être à faire un cours sur le travail en France, donc comment préparer sa candidature, son CV, quelle plateforme utiliser, etc. On ne va pas vous en dire plus dans cet épisode. Ça serait trop long.
Ingrid: Encore une fois ouais.
Hugo: Mais pareil, si c'est un sujet qui vous intéresse? N'hésitez pas à nous le dire dans les commentaires. Maintenant, on va plutôt s'intéresser à l'aspect social de l'intégration, les relations humaines. Et pour ça, on va écouter ou lire un message ?
Ingrid: Lire. Ouais, on a fini avec les écoutes, donc ça sera maintenant des lectures. Si vous voyez… Si tu veux je le dis. Donc, on a une question de Tom. Donc Tom, qui nous dit qu'il est anglais, qu'il habite avec sa fiancée française en France. Ah non : qu'il va probablement habiter plus tard en France avec sa fiancée. Et donc, il est un peu inquiet parce qu'il voudrait vraiment se sentir chez lui. S'intégrer au maximum. Et il a peur que son accent soit toujours un problème ou voire son caractère. Donc voilà, c'est un peu à partir de la question de Tom, on va parler de nos expériences, peut-être si ça peut vous inspirer. Voilà comment on fait pour s'intégrer, pour parler la langue, pour adapter son caractère, éventuellement. Voilà. Donc peut-être la première chose, la plus importante, c'est les amis, se faire des amis. Hugo, est-ce que tu t'es déjà senti seul quand était loin de ton pays ? Hugo: Ouais, surtout au début en Pologne, parce que j'avais seulement mon meilleur ami. Et on a mis un peu de temps avant de se faire un réseau. Donc se faire en réseau, ça veut dire rencontrer des personnes. Le réseau en général, c'est l'ensemble des personnes que vous connaissez. On l'utilise plutôt dans le domaine professionnel mais bon, là, je parle de manière générale. Donc, il y a eu quelques moments effectivement de solitude au début. Et puis après, j'ai rencontré ma copine. Donc là, ça a été plus facile. Mais c'est vrai que la meilleure façon, à mon avis, de rencontrer des gens naturellement, c'est de faire des activités, notamment du sport. Moi, là aussi, je n'ai pas pris la bonne décision parce que je vais à la salle de sport, donc ce n'est pas le meilleur endroit pour se faire des amis. Mais j'ai des amis ici qui jouent dans des clubs de rugby, par exemple, dans des clubs de foot qui jouent au basket aussi avec des Polonais. Donc c'est une très bonne façon de s'intégrer, de rencontrer des gens, parce que sinon, c'est vrai que ça peut être un peu compliqué. Voilà, vous n'allez pas écrire à des gens que vous connaissez pas. Et quand on a une excuse ou un prétexte, donc une activité à faire ensemble, c'est plus facile de créer des liens, je pense. Et toi, comment t'a fait au Pérou ? Ingrid: Alors ben pour le coup, si moi j'ai écrit des gens, mais plutôt dans des contextes des groupes Facebook de Français, par exemple. Après, j'ai pris des cours d'espagnol plus tard, une fois que je parlais déjà bien espagnol, des cours avancés pour perfectionner. Et j'avoue que quand j'ai fait ces cours, c'était pour avoir déjà une routine et pour me faire des amis, ce qui a bien fonctionné. J'ai rencontré des personnes super de tous les pays. Après, j'ai eu de la chance au travers de mon copain, mais c'est vrai que ce n'est pas la même chose, quoi. Quand c'est les amis de ton copain, la famille, ma belle-soeur, etc. Donc je conseille effectivement de faire des activités. Si vous n'êtes pas trop sport, ce qui est mon cas, il y a plein de cours qui peuvent être sympas. Voilà de langue, de peinture, etc. Et il n'y a pas mal d'applications maintenant. C'est vrai qu'on pense aux applications de rencontres amoureuses, donc déjà ça peut être effectivement un bon moyen de rencontrer des personnes et de pratiquer la langue. Mais il y a aussi des applications de rencontres amicales, des applications même de voyageurs, par exemple, qui vont faire des visites. Ah oui, d'ailleurs, j'ai fait des… Je me suis fait des amis comme ça aussi en faisant des visites touristiques, en partant un peu de la ville. Et puis là, c'est quand même assez facile de parler aux gens. Donc ouais, je pense qu'il faut tendre ses filets et beaucoup de filets, faire beaucoup d'activités et envoyer des messages sur les… « Qui veut aller boire un verre ce soir ? » Et il suffit de trouver une ou deux personnes pour se sentir moins seul.
Hugo: Et aussi… Parce que moi, au début, j'avais un peu… J'évitais les Français. Je n'avais pas envie d'être seulement avec les expatriés français, donc je snobais les Français, on peut dire. Mais finalement, ce n'était pas une bonne idée parce que c'est toujours plus facile quand même de s'entendre avec des gens qui viennent du même pays que nous et qui sont en train de vivre la même chose parce qu'ils sont expatriés eux aussi. Et à travers ces gens, on peut rencontrer des locaux. Ben oui. Donc, voilà, s'il y a des expatriés de votre pays, c'est plus facile de s'intégrer à leur communauté. Et à travers eux, vous allez rencontrer des francophones.
Ingrid: Bah par exemple, je pense à Tom qui nous pose la question. C'est sûr que s'il va rencontrer d'autres Anglais qui sont en France, la bonne moitié sera en couple avec des Français… souvent, il y a voilà… ou auront des amis français, donc au final, on finit par rencontrer des locaux et des personnes de toutes les nationalités parce que souvent, les étrangers, ça fait des groupes souvent internationaux. Et il y a beaucoup de locaux qui ont un lien avec ces personnes là à un moment donné.
Hugo: Mais je trouvais que le message de Tom était un peu triste parce qu'il disait notamment à la fin « je veux que mes futurs enfants soient fiers de leurs deux parents et être complètement à l'aise dans la société ». Donc, en fait, c'est un peu comme s'il avait honte d'être anglais et qu'ils voulaient le cacher pour vraiment, pour que les gens croient qu'il est français, tout simplement. Mais…
Ingrid: Il ne faut pas.
Hugo: Je pense pas. Ça fait partie de notre identité, le pays d'où on vient, et on peut être très bien intégrés en France, même si on est anglais, si on a un accent, etc. Et je ne pense pas que ça doive être un objectif d'essayer de cacher à tout prix son identité, ses origines pour être 100% français. Ingrid: Non, vraiment pas. En plus, par rapport aux futurs enfants, je suis sûre qu'ils seront au contraire très fiers d'avoir des parents qui ont un accent différent, qui ont des cultures différentes. C'est quelque chose en général qui plait. Enfin, je ne sais pas, moi, je sais que quand j'étais petite, en France surtout, il y a beaucoup de diversité, je rêvais d'avoir des origines étrangères. C'était… C'est trop cool ! Hugo: C'est vrai. De parler deux langues à la maison, surtout bon, avec l'anglais, c'est un énorme avantage. Ingrid: Mais ouais. C'est super cool. Les enfants, je pense vraiment qu'ils seront super fiers déjà d'avoir deux origines. Hugo: C'est sûr. Donc Tom, moi, je te dirais plutôt d'essayer de toi, te sentir bien en France en rencontrant des gens, en faisant des choses, des activités qui te plaisent, etc. Et que… Et d'être patient parce que tout simplement, avec le temps, avec la pratique, ça va devenir de plus en plus facile pour toi de communiquer. Et même si tu gardes un accent, ce n'est pas grave en fait. Et ça fait partie de… Voilà de ton identité. Moi, je parle anglais couramment depuis des années, mais j'ai toujours mon accent français que je perdrai jamais. Ingrid: Mais c'est bien l'accent français en anglais. Il paraît que ça plaît donc…
Ouais, en plus il a plutôt une bonne… Bon, j'essaye au maximum quand même de… Ingrid: Mais l'accent britannique en français aussi a vraiment… Il a ses fans… Donc ne le perds surtout pas. Hugo: Ouais c'est vrai. On aime bien le petit accent des anglophones, effectivement. Donc voilà, ne t'inquiète pas, Tom, je suis sûr que tes enfants seront fiers de leurs deux parents. Et voilà, sois patient et fais tout ce que tu peux pour te sentir bien en France, t'intégrer, te faire des amis et le reste, ça viendra naturellement. Ingrid: Alors donc maintenant, on va passer à une dernière partie où on devrait parler du fait de se sentir chez soi une fois qu'on a fait un peu tout ce qu'on a dit pour s'intégrer. À quel moment est-ce qu'on a vraiment l'impression d'être comme à la maison ? Et est-ce qu'on est transformé d'une certaine manière quand on vit à l'étranger ? Alors on avait une question de Célia. Hugo, est-ce que tu veux la lire ?
Hugo: Oui, alors. Célia nous avait écrit : « J'aimerais savoir si vous, Hugo et Ingrid, trouvez que l'expérience d'être expatriés a changé vos idées en ce qui concerne certaines particularités françaises. Est-ce que la distance vous a permis de voir différemment les coutumes et le mode de vie en France ? La vie dans un autre pays vous a-t-elle fait changer d'avis en ce qui concerne les immigrés ? Êtes-vous devenus plus patients, plus compréhensifs ? » Alors pas mal de questions intéressantes.
Ingrid: Alors oui, je suis devenue beaucoup plus patiente. Oui, beaucoup plus patiente.
Hugo: Pourquoi tu es devenue plus patiente ?
Ingrid: Parce qu'il faut toujours attendre au Pérou. Donc maintenant, je peux arriver à un rendez-vous, la personne n'est pas là, au lieu de m'énerver, j'attends. Il n'y a pas de problème. Hugo: Et je pense que là, elle voulait aussi dire : est-ce que de manière générale, on est plus… on a plus d'empathie avec les étrangers qui vivent en France ? Parce que nous, on a vécu cette expérience d'être étrangers. Donc moi, je pense que j'étais déjà… J'avais pas mal d'empathie déjà, à la base. J'étais assez patient. J'étais toujours content de rencontrer des étrangers, de parler avec eux. Donc je pense pas que ça ait changé particulièrement. Mais c'est vrai que je me suis rendu compte à quel point c'est difficile et aussi à quel point c'est difficile d'apprendre la langue, notamment en donnant des cours de français. Parce que c'est vrai qu'en France, on a cette tendance… Enfin, on a beaucoup d'exemples d'étrangers qui ont appris parfaitement le français et du coup, on se dit que c'est seulement une question de bonne volonté et que si quelqu'un veut vraiment apprendre le français, eh bien il peut le faire en deux ou trois ans sans problème. Et c'est loin d'être si facile. Donc moi, je m'en suis rendu compte, notamment avec le Polonais. Il faut être patient et même si quelqu'un parle en faisant des erreurs, ça ne veut pas dire qu'il ne met pas de bonne volonté pour apprendre la langue, mais simplement que c'est un processus qui prend du temps. Ingrid: Moi, je pense que j'ai toujours été bon, de toute façon, plutôt pro-immigrés, etc. Mais sans m'identifier. Un peu par nature : voilà, c'est mes valeurs, j'essaye d'être ouverte avec tout le monde, mais sans avoir spécialement de l'empathie, en me disant que c'était difficile. À part au niveau, évidemment, j'avais conscience que certains souffraient de racisme, mais là, on parle un peu plus, même au-delà de ça, qui peut aussi arriver entre deux personnes qui viennent du même pays. En fait, il y a un dicton, un dicton un peu un peu bateau, un peu cliché, mais que j'ai compris. C'est « un accent est un signe de courage ». En fait, c'est au contraire quand je… Maintenant, quand j'entends quelqu'un avec un accent… Avant, c'était plutôt neutre pour moi. Cette personne, elle a un accent. Maintenant, je me dis « ouais, dis donc, il parle super bien assez. Ça se voit que c'est pas sa langue maternelle. Et c'est trop bien ». Et voilà. Et j'ai appris à être fière de mon accent. Je sais que j'aurai toujours un accent en espagnol et donc par rebond je trouve que ceux qui parlent en français avec un accent ont vachement de mérite. Hugo: C'est vrai, c'est vrai. Et concernant les coutumes et le mode de vie en France, à part cette histoire de restaurant, est-ce que tu t'es rendu compte de choses dont tu n'avais pas vraiment conscience avant ton expatriation ? Ingrid: Alors, il y a quelque chose de très important et plutôt positif pour la France, pour pas seulement descendre la France. Je me suis rendu compte à quel point on avait des droits sociaux et à quel point on a une mentalité de chercher ses droits, de se battre, etc. C'est vrai que j'ai souvent été, quand j'étais avec des étrangers, la grande gueule, celle qui ne veut pas laisser passer les choses, celle qui dit « non, on va leur dire », « il faut appeler », « il faut… ». Alors qu'en France, tout le monde est comme ça. Enfin tout le monde… En tout cas, je suis jamais sortie du lot plus que ça. Mais c'est vrai que finalement, je me suis rendu compte, bah, c'est vrai qu'on a une mentalité différente et c'est plutôt pour moi une bonne chose. Donc voilà.
Et puis évidemment, après, tu parlais des restos. Encore une fois, il y a plein de petits détails qui sont plutôt du côté négatif. Voilà. Que les Français soient aussi stricts sur les horaires des choses comme ça. Mais mais voilà. Et toi, du coup, t'as d'autres exemples de choses qui t'ont fait voir différemment la France ? Hugo: Ouais, ben en fait, moi, il y a eu. Mais bon, c'est lié à un changement qui est arrivé dans ma vie. Mais le fait que je sois devenu vegan, ça m'a fait prendre conscience d'à quel point la cuisine française est accro à la viande, aux produits laitiers, aux matières grasses et c'est vrai qu'on ne peut pas cuisiner quoi que ce soit en France sans qu'il y ait de la viande, du beurre et c'est très, très difficile d'être vegan en France. C'est en train de changer. Mais c'est vrai qu'il y a des cuisines qui se prêtent ou qui s'adaptent mieux au véganisme que la cuisine française. Donc j'ai vraiment pris conscience de ça ces dernières années. Il y avait autre chose. Ce n'est pas vraiment un choc culturel mais c'est quelque chose qui est assez bizarre, c'est quand je pars en vacances à l'étranger que je rentre en Pologne et que rentrer en Pologne, en fait, c'est ma maison. C'est toujours une expérience un peu bizarre. Ingrid: Ah ouais ?
Hugo: Tu vois ? De me dire
Ingrid: Ah que c'est chez toi. Que c'est pas un autre voyage quoi. C'est la maison. Hugo: Exactement. Exactement que je pars en vacances, je sais pas. Ou même je vais voir des amis en Allemagne. Et quand je rentre chez moi, bah chez moi, c'est Varsovie. C'est pas la France. Ingrid: Ah oui.
Hugo: Mais après, quand je rentre en France, voir ma famille, c'est aussi chez moi. Donc ça, c'est toujours une expérience un peu un peu bizarre. Ingrid: Ah oui, tu as deux chez toi maintenant.
Hugo: Ouais, ouais ouais ouais. Les premières années, c'était un peu… Parfois, c'était c'était un peu déprimant, surtout quand je rentrais en Pologne et que c'était l'hiver et Varsovie peut être un peu déprimante en hiver. Et là, la France me manquait. Mais maintenant, j'ai vraiment. Quand je rentre à Varsovie après les vacances, c'est chez moi et je suis content d'être à Varsovie. Ingrid: C'était vrai, c'est un peu ça qu'on… Attends, je voudrais juste dire un truc parce que… Là, ce que t'as dit à la fin sur le véganisme, ça m'a fait penser à quelque chose que je voulais dire à un moment donné et que je n'ai pas dit et qui va peut être te décevoir. Hugo: Ok !
Ingrid: Alors que je suis partie au Pérou, j'étais végétarienne depuis au moins deux ans et je n'ai pas tenu. Je n'ai pas tenu… Bah un peu par manque de volonté en étant isolée, parce que je pense que quand vraiment vraiment tu veux, tu peux. Mais là-bas, en fait le mot pour dire viande, qui est la traduction de viande. Si tu dis que tu n'en veux pas, tu ne veux pas de « carne », ils te donnent du poulet. Voilà, par exemple. Donc, surtout au moment où j'y suis allée, donc, c'était il y a déjà quatre ans. Maintenant, peut-être que ça commence à se développer, petit à petit, mais dans les restaurants, il n'y a pas d'option végétarienne, à la maison quand tu es avec la famille, si tu demandes sans viande, ils ont… Ça les gêne parce qu'ils ont l'impression de pas assez bien te servir, etc. Et donc, petit à petit, j'ai fait des exceptions et l'exception est devenue arrêter complètement. Hugo: La règle.
Ingrid: Je suis une croyante non pratiquante en matière de végétarisme, même de véganisme. Je trouve que voilà c'est ce qu'on devrait tous faire. Mais le fait de vivre à l'étranger et de vouloir m'adapter et ne pas me compliquer la vie, bah j'ai arrêté. Donc voilà, c'était un détail que comme ça, je te l'avoue. Hugo: Il faut venir en Pologne ! En Pologne, c'est très facile donc… Ingrid: Ben voilà, bah je ferais ça peut-être. Qui sait ? Peut-être que… Parce que là, je suis retournée en France, tu parlais d'être, de se sentir chez soi. Moi, je sais pas, je me sens… Le Pérou, c'est ma maison, vraiment, c'est ma maison. En plus, c'est là où j'ai vécu longtemps, où il y a ma belle-famille, etc. Mais ce n'est pas l'endroit où je veux vivre toute ma vie. Et là, je suis rentrée en France et ce n'est pas l'endroit où je veux vivre toute ma vie non plus. Donc, qui sait, peut-être, peut-être un jour, un autre pays qui soit plus vegan friendly. Mais voilà. Toi, tu disais que tu te sens comme à la maison, mais en même temps, tu nous a dit au début que tu n'étais pas sûr d'y rester tout le temps. Comment tu te situes par rapport à ça ?
Hugo: Ouais, c'est vrai. Simplement… Bon, depuis quelques années, j'ai envie d'être plus proche de ma famille et de mes amis et je me considère toujours quand même 100% Français. Et bon ça fait déjà quelques années qu'on en parle avec ma copine, mais je pense qu'on va finir par rentrer en France. Enfin, moi, je vais rentrer en France et elle, elle va déménager en France. Mais le problème, c'est que si on rentre en France, la plupart de mes amis sont à Paris. Ma famille habite pas très loin de Paris, donc ce serait un peu le choix logique. Mais je n'ai pas du tout envie de recommencer à vivre à Paris pour plein de raisons, mais notamment les raisons matérielles, etc. Donc, si on rentre en France, je ne sais pas où on s'installerait. Ingrid: Venez à Toulouse !
Hugo: Peut-être à Toulouse effectivement.
Ingrid: Comme ça on ouvre des bureaux à Toulouse.
Hugo: C'est ça, on ouvre une école à Toulouse. Ingrid: Moi je serais peut-être partie d'ici là. Hugo: Non mais j'ai pas mal, j'ai des amis français qui ont trouvé une bonne solution maintenant. C'est qu'ils passent l'hiver à Tenerife ou dans les îles Canaries, etc. Donc comme ça.. Parce que l'été en Pologne, c'est assez sympa. Il fait beau, mais il ne fait pas non plus excessivement chaud. Mais c'est vrai que l'hiver est assez difficile et déprimant parfois. Donc, eux, ils passent l'hiver au chaud et l'été au frais. Ingrid: Ah oui.
C'est vrai que moi, je pourrais faire l'été au Pérou et l'été en France parce que comme les saisons sont inversées… Hugo: Par exemple. Donc c'est peut-être ça la solution, d'être tout le temps entre deux pays, mais je pense que là, on a le risque de devenir schizophrène. Ingrid: Ouais, c'est vrai. Et puis ça dépend qui est dans notre vie aussi après, donc, il y a plein de questions qui se posent. Mais en tout cas, on peut se sentir chez soi quelque part, sans vouloir y rester. On peut s'expatrier et rentrer un moment. Et repartir. Enfin, il n'y a pas de règle. Et tout ce qu'on a dit avant, ça s'applique, que ce soit pour six mois, un an ou une durée illimitée. Hugo: Exactement. Je pense que ça va être la conclusion de cet épisode. Cette note optimiste. Merci à tous de nous avoir écoutés. On espère que ça vous a plu. Comme d'habitude, n'hésitez pas à laisser un commentaire, à aller sur le site pour lire la transcription également, à nous poser vos questions, faire vos remarques, suggestions, etc. Et on se retrouve bientôt pour le prochain épisode.
Ingrid: Salut !
Hugo: Ciao !