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Mappemonde - Le Monde, (#3) Que veut la Russie de Poutine ? (Mappemonde Ep. 3) - YouTube

(#3) Que veut la Russie de Poutine ? (Mappemonde Ep. 3) - YouTube

C'est l'histoire d'un conflit qui, pendant longtemps, a divisé le monde en deux...

…et d'un pays qui, après avoir mis un terme à cette guerre,

n'a peut-être pas dit son dernier mot.

30 ans après la fin de la guerre froide,

la Russie est de nouveau en guerre, mais cette fois-ci en Ukraine.

Entre 2014 et 2019,

au moins 13 000 personnes sont mortes dans l'est du pays,

et la Crimée n'est plus Ukrainienne,

mais Russe.

Depuis la fin de la guerre froide,

le fossé entre la Russie et l'Occident n'avait jamais été aussi grand.

La question est : comment en est-on arrivé là ?

Et la réponse est compliquée, mais commençons par ça :

l'Ukraine.

L'Ukraine, c'est très important pour les Russes.

C'est le berceau de la civilisation de la Rus' de Kiev,

autrement dit, un peu l'équivalent des Gaulois pour les Français.

Puis, pour beaucoup de Russes,

la Russie et l'Ukraine, c'est quasiment la même chose.

Il faut dire que depuis 200 ans,

les territoires russes et ukrainiens n'ont presque jamais été séparés,

sauf aujourd'hui.

Mais il y a un endroit en Ukraine auquel les Russes sont particulièrement attachés :

la Crimée.

La Crimée, c'est cette presqu'île au nord de la mer Noire.

Pendant la Seconde Guerre mondiale,

la péninsule et son port, Sébastopol, ont notamment eu un rôle stratégique

dans l'affrontement avec l'Allemagne.

Jusque dans les années 50,

elle appartenait encore entièrement à la Russie.

C'est alors qu'intervient Nikita Khrouchtchev.

En 1954, le dirigeant soviétique décide d'offrir la Crimée à l'Ukraine.

À l'époque, elle est présentée comme un cadeau

pour célébrer les 300 ans du Traité de Pereïaslav

qui unit pour la première fois l'Ukraine à la Russie.

Mais dans les faits, ça ne change rien,

puisque l'Ukraine n'est alors qu'une des républiques

de l'Union des républiques socialistes et soviétiques

et que ses frontières sont purement administratives.

La Crimée reste donc soviétique

et le port de Sébastopol continue même d'être administré directement par Moscou.

Sauf qu'en 1991, l'URSS s'effondre.

La Crimée appartient alors à l'Ukraine.

Le problème, c'est que pour beaucoup de Criméens, leur pays, c'est la Russie.

Huit habitants sur dix déclarent que le russe est leur langue maternelle.

Selon un sondage en mai 2013,

seulement 15 % des habitants se considéraient Ukrainiens,

contre 40 % Russes.

Lors d'un référendum sur le rattachement à la Russie lors de la crise ukrainienne,

le oui l'a emporté à 97 %.

Les conditions d'organisation de ce référendum posent problème à plein d'égards,

mais même avec un score moins élevé,

le oui l'aurait probablement emporté dans tous les cas.

Mais il y a deux autres raisons pour lesquelles l'Ukraine est si importante pour la Russie.

D'abord, l'accès à la mer chaude.

Car en Russie, il fait souvent froid.

Et quand il fait froid, la mer gèle.

À Saint-Pétersbourg, Vladivostok ou Kaliningrad, par exemple,

les ports gèlent en hiver.

Il y a bien des brise-glaces,

mais pas suffisamment pour pouvoir déplacer beaucoup de navires rapidement,

ce qui, en cas de guerre par exemple, n'est pas idéal.

La Russie n'a donc accès aux mers chaudes que par un endroit :

là, par la mer Noire, qui communique avec la mer Méditerranée,

qui elle-même communique avec les océans.

Or, le port historique de la Russie en mer Noire, c'est Sébastopol.

Puis, il y a tout le reste du territoire ukrainien.

Il est stratégique car il se trouve à un endroit vulnérable pour la Russie.

Historiquement, c'est de l'ouest que sont venues la plupart des agressions.

Pour garantir la sécurité de ses frontières occidentales,

Moscou s'est employée à construire une zone tampon d'influence et de protection.

Mais depuis quelques années, ce n'est plus tout à fait ce que c'était.

Alors qu'en 1989 la zone d'influence de Moscou allait jusqu'en Allemagne de l'Est,

en 2019 elle n'était plus réduite qu'à ça.

Ce qui nous amène à la deuxième raison de l'attitude russe :

la désillusion.

Revenons un peu en arrière.

Pendant la seconde moitié du XXe siècle,

la Russie, qui est alors l'URSS, c'est ça.

En dehors des États-Unis,

il n'y a tout simplement pas de pays plus puissant au monde.

Et puis…

Le 25 décembre 1991, l'URSS prend officiellement fin,

mais c'est aussi la fin de 45 années pendant lesquelles le monde a été séparé en deux,

et l'occasion ou jamais de reconstruire un monde plus uni.

Dès la fin des années 80,

le réformateur russe Mikhaïl Gorbatchev appelle à bâtir une maison commune européenne.

Quelques années plus tard, le secrétaire d'État américain, James Baker,

parle de fonder un système de sécurité incluant les États-Unis,

l'Europe et la Russie,

une alliance qui unirait le monde de Vancouver à Vladivostok.

Mais pour la Russie, tout cela ne peut se faire qu'à une condition :

qu'elle puisse conserver son influence en Europe de l'Est.

Au début des années 90,

elle crée la Communauté des États indépendants

dans le but de conserver des liens avec les anciennes républiques soviétiques.

Et les États-Unis font alors une promesse à la Russie.

En échange de la réunification des deux Allemagnes,

l'OTAN ne poursuivra pas son expansion dans l'ancien bloc de l'Est ;

oui, car l'OTAN, c'est une alliance militaire fondée en 1949

par les États-Unis et plusieurs pays d'Europe pour faire face à l'URSS.

Les termes exacts de cette promesse sont aujourd'hui contestés.

On ne sait pas très bien ce qui a été dit et comment,

mais ce qui est sûr, c'est que pour les Russes, elle a bel et bien existé

et, au début, elle est respectée.

Pendant plusieurs années, l'OTAN reste à l'écart de l'ex-bloc soviétique

jusqu'en 1999.

Cette année-là, l'OTAN invite la Pologne,

la République tchèque

et la Hongrie à la rejoindre.

Mais à part avec l'exclave russe de Kaliningrad,

ces pays n'ont pas vraiment de frontière commune avec la Russie.

Pour ménager Moscou,

l'OTAN s'engage même à ne pas stationner de forces de combat permanentes dans ces pays.

Elle déclare qu'elle n'a aucune intention,

aucun projet

et aucune raison de déployer des armes nucléaires

sur le territoire de nouveaux membres.

Les relations entre Russes et Américains demeurent alors plutôt bonnes.

Le 11 septembre 2001,

Vladimir Poutine est le premier chef d'État à présenter son soutien par téléphone

à George Bush.

Puis en 2004…

Sept anciens pays du bloc de l'Est,

dont surtout la Lettonie, l'Estonie et la Lituanie,

intègrent l'OTAN.

Pour la Russie, c'est une trahison

et la preuve des véritables intentions américaines :

l'encercler et la marginaliser sur le plan international.

Le résultat, c'est que la Russie renoue alors avec une vieille obsession :

son opposition avec l'Occident.

Dans les années 2000, des mouvements politiques pro-occidentaux

surgissent dans les anciennes républiques soviétiques.

Et la Russie intervient.

Puis en 2013…

Alors que la Russie et l'Europe se disputent l'intégration de l'Ukraine

à leur union économique respective,

un mouvement de protestation pro-européen explose à Kiev :

la révolte de Maïdan.

En quelques semaines,

la révolte provoque la démission du président pro-russe,

Viktor Ianoukovitch,

et l'Ukraine se rapproche dangereusement de l'Occident.

Pour Moscou, c'en est trop,

et la suite, désormais, on la connaît.

Depuis, d'un côté comme de l'autre,

les intentions pacifiques de la fin de la guerre froide

sont de plus en plus lointaines.

Ces dernières années,

l'OTAN construit en Europe un système de bouclier antimissile,

des missiles capables d'intercepter d'autres missiles.

Le premier site a été inauguré en 2016 en Roumanie

et un autre doit voir le jour en Pologne en 2020.

Selon les États-Unis, ces missiles ne visent pourtant pas la Russie,

mais l'Iran,

ce qui ne convainc pas tout à fait Vladimir Poutine.

Faisons le point.

En 30 ans, les relations entre la Russie et l'Occident ont basculé

pour atteindre en 2014 un point critique.

Mais pendant qu'à l'ouest les choses se tendent,

le regard de la Russie s'est progressivement tourné vers l'est,

et vers un pays en particulier, la Chine.

En 2008,

la Chine est devenue le premier partenaire commercial de la Russie.

Depuis, son poids ne cesse d'augmenter.

Pendant ce temps, celui de l'Europe est en baisse.

L'Union européenne est toujours la région vers laquelle la Russie exporte le plus,

mais pour la première fois, elle n'est plus son principal fournisseur.

En 2016, 40 % des importations russes venaient des pays membres de l'APEC,

la Coopération économique pour l'Asie-Pacifique,

contre 38 % de l'Union européenne.

Il faut dire que depuis le conflit en Ukraine,

d'importantes sanctions commerciales ont été imposées à la Russie,

notamment par les États-Unis,

le Japon,

et surtout tous les pays de l'Union européenne.

Pour la Russie,

trouver de nouveaux partenaires est donc nécessaire,

et ce qui illustre peut-être le mieux ce changement stratégique,

c'est le gaz.

Car le gaz russe, ça intéresse beaucoup de gens.

Avec plus d'un quart des réserves mondiales sur son territoire,

la Russie est l'un des principaux exportateurs mondiaux

et le premier fournisseur de l'Union européenne.

C'est tellement important pour son économie

que la Russie ne peut pas se passer d'en vendre à l'Union européenne

et que l'Union européenne ne peut pas se passer d'en acheter à la Russie.

Sauf que depuis quelques années,

la Russie s'est mise à chercher de nouveaux clients.

En 2014, Force de Sibérie,

un contrat de 400 milliards de dollars est signé entre la Chine et la Russie.

Il prévoit l'acheminement de 38 milliards de mètres cubes de gaz russe

vers la Chine en 30 ans

et la construction d'un gazoduc de 3000 kilomètres entre les deux pays.

Mais les relations entre les deux nations sont plus que commerciales.

Depuis 30 ans, elles se sont de nouveau rapprochées diplomatiquement.

Il faut dire que Russes et Chinois ont un point en commun :

ils n'aiment pas trop la domination des Américains.

Dès 2001, Pékin et Moscou fondent la coopération de Shanghai,

une alliance régionale militaire

qui regroupe désormais près de la moitié de la population mondiale.

Son objectif est clair :

œuvrer à la création d'un nouvel ordre mondial plus juste,

libéré de toute hégémonie.

Mais la coopération de Shanghai n'est pas la seule perspective de la Russie à l'Est.

Il en est une qui lui tient particulièrement à cœur :

l'Eurasie.

L'Eurasie, c'est à la fois l'Europe et l'Asie, conçues comme un même ensemble.

Et pour la Russie, dont le territoire s'étend sur les deux continents,

c'est bien naturel.

En 2015, elle crée l'Union économique eurasiatique.

Pour l'instant, c'est une union économique et douanière,

mais elle aspire à plus.

Depuis quelques années,

les ambitions eurasiatiques de la Russie résonnent avec un autre projet chinois.

Les « nouvelles routes de la soie »,

c'est un projet qui consiste à relier la Chine à l'Europe occidentale

par des routes commerciales

et à financer des infrastructures sur les points stratégiques de ces routes.

Or, entre la Chine et l'Europe, il y a l'Union économique eurasiatique.

Dès 2015, un accord a été signé pour coordonner les deux projets.

Pour la Chine,

c'est la garantie que la sécurité de cette route sera assurée par la Russie.

Pour la Russie et les pays d'Asie centrale,

ce sont des infrastructures financées par la Chine sur leur territoire.

Mais surtout, les « nouvelles routes de la soie » pourraient faire de l'Eurasie

le centre de toutes les attentions géopolitiques.

En 1997, dans « Le grand échiquier »,

Zbigniew Brzezinski, ancien conseiller du président Carter,

plaçait déjà l'Eurasie au centre du monde.

Selon lui, si une puissance rivale parvenait à s'imposer sur le continent eurasien,

elle serait en mesure de renverser l'hégémonie américaine.

Sans surprise,

Russes et Chinois ont été particulièrement attentifs à cette prophétie.

Le problème pour la Russie, c'est que pour l'heure,

elle n'est pas tout à fait la mieux placée des deux pour l'incarner,

mais ça, c'est une autre histoire.

Merci beaucoup d'avoir regardé cette vidéo.

Elle doit beaucoup à Tatiana Kastouéva-Jean,

qui est chercheuse à l'IFRI

et qui m'a très gentiment accordé du temps au moment où je l'écrivais.

Donc, encore merci à elle.

Sinon, il y aura bientôt un nouvel épisode de « Mappemonde ».

D'ici là, on attend vos retours sur cette vidéo, sur cet épisode,

et vos suggestions sur les suivants.


(#3) Que veut la Russie de Poutine ? (Mappemonde Ep. 3) - YouTube (#3) What does Putin's Russia want? (Mappemonde Ep. 3) - YouTube (#3) ¿Qué quiere la Rusia de Putin? (Mappemonde Ep. 3) - YouTube (شماره 3) روسیه از پوتین چه می خواهد؟ (World Map Ep. 3) - YouTube (#3)プーチンのロシアは何を望んでいるのか(Mappemonde Ep. 3) - YouTube (#3) 俄罗斯想从普京那里得到什么? (世界地图第 3 集)- YouTube

C'est l'histoire d'un conflit qui, pendant longtemps, a divisé le monde en deux... It is the story of a conflict that, for a long time, divided the world in two...

…et d'un pays qui, après avoir mis un terme à cette guerre, ...and a country which, after having put an end to this war,

n'a peut-être pas dit son dernier mot. may not have said its final word.

30 ans après la fin de la guerre froide, 30 years after the end of the Cold War,

la Russie est de nouveau en guerre, mais cette fois-ci en Ukraine. Russia is at war again, but this time with Ukraine.

Entre 2014 et 2019, Between 2014 and 2019,

au moins 13 000 personnes sont mortes dans l'est du pays, at least 13,000 people died on the eastern side of the country

et la Crimée n'est plus Ukrainienne, and Crimea is no longer Ukrainian,

mais Russe. but Russian.

Depuis la fin de la guerre froide, Since the end of the Cold War,

le fossé entre la Russie et l'Occident n'avait jamais été aussi grand. the gap between Russia and the West has never been wider.

La question est : comment en est-on arrivé là ? The question is: how did this happen?

Et la réponse est compliquée, mais commençons par ça : And the answer is complicated, but let's start with that:

l'Ukraine. Ukraine.

L'Ukraine, c'est très important pour les Russes. Ukraine is very important to the Russians.

C'est le berceau de la civilisation de la Rus' de Kiev, It is the cradle of the Kievan Rus civilisation,

autrement dit, un peu l'équivalent des Gaulois pour les Français. in other words, a bit like the Gauls for the French.

Puis, pour beaucoup de Russes, Then, for many Russians,

la Russie et l'Ukraine, c'est quasiment la même chose. Russia and Ukraine are almost the same thing.

Il faut dire que depuis 200 ans, For 200 years,

les territoires russes et ukrainiens n'ont presque jamais été séparés, the Russian and Ukrainian territories have almost never been separated,

sauf aujourd'hui. except today.

Mais il y a un endroit en Ukraine auquel les Russes sont particulièrement attachés : But there is one place in Ukraine to which the Russians are particularly attached:

la Crimée. Crimea.

La Crimée, c'est cette presqu'île au nord de la mer Noire. Crimea is this peninsula north of the Black Sea.

Pendant la Seconde Guerre mondiale, During the Second World War,

la péninsule et son port, Sébastopol, ont notamment eu un rôle stratégique the peninsula and its port, Sevastopol, played a strategic role

dans l'affrontement avec l'Allemagne. in the confrontation with Germany.

Jusque dans les années 50, Until the 1950s,

elle appartenait encore entièrement à la Russie. it was still entirely owned by Russia.

C'est alors qu'intervient Nikita Khrouchtchev. That's when Nikita Khrushchev came in.

En 1954, le dirigeant soviétique décide d'offrir la Crimée à l'Ukraine. In 1954, the Soviet leader decided to offer Crimea to Ukraine.

À l'époque, elle est présentée comme un cadeau At the time, it was presented as a gift

pour célébrer les 300 ans du Traité de Pereïaslav to celebrate the 300th anniversary of the Treaty of Pereïaslav,

qui unit pour la première fois l'Ukraine à la Russie. which united Ukraine and Russia for the first time.

Mais dans les faits, ça ne change rien, But in reality, this did not change anything,

puisque l'Ukraine n'est alors qu'une des républiques since Ukraine was then only one of the republics

de l'Union des républiques socialistes et soviétiques of the Union of Socialist Soviet Republics

et que ses frontières sont purement administratives. and its borders were purely administrative.

La Crimée reste donc soviétique Crimea thus remains Soviet

et le port de Sébastopol continue même d'être administré directement par Moscou. and the port of Sevastopol even continues to be administered directly by Moscow.

Sauf qu'en 1991, l'URSS s'effondre. Except that in 1991, the USSR collapsed.

La Crimée appartient alors à l'Ukraine. Crimea then belonged to Ukraine.

Le problème, c'est que pour beaucoup de Criméens, leur pays, c'est la Russie. The problem is that for many Crimeans, their country is Russia.

Huit habitants sur dix déclarent que le russe est leur langue maternelle. Eight out of ten inhabitants say that Russian is their mother tongue.

Selon un sondage en mai 2013, According to a survey in May 2013,

seulement 15 % des habitants se considéraient Ukrainiens, only 15% of the population considered themselves Ukrainians,

contre 40 % Russes. compared to 40% Russians.

Lors d'un référendum sur le rattachement à la Russie lors de la crise ukrainienne, In a referendum on joining Russia during the Ukrainian crisis,

le oui l'a emporté à 97 %. 97% of the votes were in favour.

Les conditions d'organisation de ce référendum posent problème à plein d'égards, The conditions for organising this referendum were problematic in many respects,

mais même avec un score moins élevé, but even with a lower score,

le oui l'aurait probablement emporté dans tous les cas. das hätte ja wohl auf jeden fall gewonnen. it is likely that the yes would have won in any case.

Mais il y a deux autres raisons pour lesquelles l'Ukraine est si importante pour la Russie. But there are two other reasons why Ukraine is so important to Russia.

D'abord, l'accès à la mer chaude. First, access to the warm sea.

Car en Russie, il fait souvent froid. Because in Russia, it is often cold.

Et quand il fait froid, la mer gèle. And when it's cold, the sea freezes.

À Saint-Pétersbourg, Vladivostok ou Kaliningrad, par exemple, In St Petersburg, Vladivostok or Kaliningrad, for example,

les ports gèlent en hiver. ports are frozen in winter.

Il y a bien des brise-glaces, There are icebreakers,

mais pas suffisamment pour pouvoir déplacer beaucoup de navires rapidement, but not enough to move many ships quickly,

ce qui, en cas de guerre par exemple, n'est pas idéal. which, in the event of war for example, is not ideal.

La Russie n'a donc accès aux mers chaudes que par un endroit : Russia therefore has access to warm seas only through one place:

là, par la mer Noire, qui communique avec la mer Méditerranée, there, through the Black Sea, which communicates with the Mediterranean Sea,

qui elle-même communique avec les océans. which itself communicates with the oceans.

Or, le port historique de la Russie en mer Noire, c'est Sébastopol. However, the historic port of Russia in the Black Sea is Sevastopol.

Puis, il y a tout le reste du territoire ukrainien. Then there is the rest of the Ukrainian territory.

Il est stratégique car il se trouve à un endroit vulnérable pour la Russie. It is strategic because it is located in a vulnerable location for Russia.

Historiquement, c'est de l'ouest que sont venues la plupart des agressions. Historically, it is from the west that most attacks have originated.

Pour garantir la sécurité de ses frontières occidentales, To ensure the security of its western borders,

Moscou s'est employée à construire une zone tampon d'influence et de protection. Moskau hat daran gearbeitet, eine Pufferzone des Einflusses und des Schutzes aufzubauen. Moscow has worked to build a buffer zone of influence and protection.

Mais depuis quelques années, ce n'est plus tout à fait ce que c'était. But in recent years, that's not quite what it used to be.

Alors qu'en 1989 la zone d'influence de Moscou allait jusqu'en Allemagne de l'Est, While in 1989 Moscow's area of influence extended as far as East Germany,

en 2019 elle n'était plus réduite qu'à ça. by 2019 it was reduced to this.

Ce qui nous amène à la deuxième raison de l'attitude russe : This brings us to the second reason for the Russian attitude:

la désillusion. disillusionment.

Revenons un peu en arrière. Let's go back a little bit.

Pendant la seconde moitié du XXe siècle, During the second half of the 20th century,

la Russie, qui est alors l'URSS, c'est ça. Russia, which was then the USSR, looked like that.

En dehors des États-Unis, Outside the United States,

il n'y a tout simplement pas de pays plus puissant au monde. there was simply no other country in the world that was more powerful.

Et puis… And then...

Le 25 décembre 1991, l'URSS prend officiellement fin, On 25 December 1991, the USSR officially ended,

mais c'est aussi la fin de 45 années pendant lesquelles le monde a été séparé en deux, but it was also the end of 45 years during which the world was divided in two,

et l'occasion ou jamais de reconstruire un monde plus uni. and the opportunity to rebuild a more united world.

Dès la fin des années 80, From the late 1980s,

le réformateur russe Mikhaïl Gorbatchev appelle à bâtir une maison commune européenne. the reformer Mikhail Gorbachev called for the construction of a common European house.

Quelques années plus tard, le secrétaire d'État américain, James Baker, A few years later, U.S. Secretary of State James Baker

parle de fonder un système de sécurité incluant les États-Unis, talked about creating a security system that would include the United States,

l'Europe et la Russie, Europe and Russia,

une alliance qui unirait le monde de Vancouver à Vladivostok. an alliance that would unite the world from Vancouver to Vladivostok.

Mais pour la Russie, tout cela ne peut se faire qu'à une condition : But for Russia, all this could only be done on one condition:

qu'elle puisse conserver son influence en Europe de l'Est. that it could maintain its influence in Eastern Europe.

Au début des années 90, In the early 1990s,

elle crée la Communauté des États indépendants it created the Commonwealth of Independent States

dans le but de conserver des liens avec les anciennes républiques soviétiques. with the aim of preserving relations with the former Soviet republics.

Et les États-Unis font alors une promesse à la Russie. And the United States then made a promise to Russia.

En échange de la réunification des deux Allemagnes, In exchange for the reunification of the two Germanies,

l'OTAN ne poursuivra pas son expansion dans l'ancien bloc de l'Est ; NATO will not continue its expansion into the former Eastern bloc;

oui, car l'OTAN, c'est une alliance militaire fondée en 1949 yes, because NATO is a military alliance founded in 1949

par les États-Unis et plusieurs pays d'Europe pour faire face à l'URSS. by the United States and several European countries to face the USSR.

Les termes exacts de cette promesse sont aujourd'hui contestés. The exact terms of this promise are now in dispute.

On ne sait pas très bien ce qui a été dit et comment, It is not clear what was said and how,

mais ce qui est sûr, c'est que pour les Russes, elle a bel et bien existé but what is certain is that for the Russians, it did exist

et, au début, elle est respectée. and, at the beginning, it was observed.

Pendant plusieurs années, l'OTAN reste à l'écart de l'ex-bloc soviétique For several years, NATO remained outside the former Soviet bloc

jusqu'en 1999. until 1999.

Cette année-là, l'OTAN invite la Pologne, That same year, NATO invited Poland,

la République tchèque the Czech Republic

et la Hongrie à la rejoindre. and Hungary to join it.

Mais à part avec l'exclave russe de Kaliningrad, But apart from the Russian exclave of Kaliningrad,

ces pays n'ont pas vraiment de frontière commune avec la Russie. these countries did not really have a common border with Russia.

Pour ménager Moscou, To spare Moscow,

l'OTAN s'engage même à ne pas stationner de forces de combat permanentes dans ces pays. NATO even undertook not to station standing combat forces in these countries.

Elle déclare qu'elle n'a aucune intention, It declared that it had no intention,

aucun projet no project

et aucune raison de déployer des armes nucléaires and no reason to deploy nuclear weapons

sur le territoire de nouveaux membres. on the territory of new members.

Les relations entre Russes et Américains demeurent alors plutôt bonnes. Relations between Russians and Americans remained rather good.

Le 11 septembre 2001, On September 11, 2001,

Vladimir Poutine est le premier chef d'État à présenter son soutien par téléphone Vladimir Putin was the first head of state to offer his support by phone

à George Bush. to George Bush.

Puis en 2004… Then in 2004....

Sept anciens pays du bloc de l'Est, Seven former Eastern Bloc countries,

dont surtout la Lettonie, l'Estonie et la Lituanie, mainly Latvia, Estonia and Lithuania,

intègrent l'OTAN. joined NATO.

Pour la Russie, c'est une trahison For Russia, this was a betrayal

et la preuve des véritables intentions américaines : and proof of the true American intentions:

l'encercler et la marginaliser sur le plan international. to surround and marginalise it internationally.

Le résultat, c'est que la Russie renoue alors avec une vieille obsession : The result is that Russia then returned to an old obsession:

son opposition avec l'Occident. its opposition to the West.

Dans les années 2000, des mouvements politiques pro-occidentaux In the 2000s, pro-Western political movements

surgissent dans les anciennes républiques soviétiques. emerged in the former Soviet republics.

Et la Russie intervient. And Russia intervened.

Puis en 2013… Then in 2013...

Alors que la Russie et l'Europe se disputent l'intégration de l'Ukraine While Russia and Europe were fighting over Ukraine's integration

à leur union économique respective, into their respective economic unions,

un mouvement de protestation pro-européen explose à Kiev : a pro-European protest movement exploded in Kiev:

la révolte de Maïdan. the Maidan Revolution.

En quelques semaines, Within a few weeks,

la révolte provoque la démission du président pro-russe, the revolt led to the resignation of pro-Russian President,

Viktor Ianoukovitch, Viktor Yanukovych,

et l'Ukraine se rapproche dangereusement de l'Occident. and Ukraine's dangerous rapprochement with the West.

Pour Moscou, c'en est trop, For Moscow, it was too much,

et la suite, désormais, on la connaît. and the rest, from now on, we know it.

Depuis, d'un côté comme de l'autre, Since then, on both sides,

les intentions pacifiques de la fin de la guerre froide the peaceful intentions of the end of the Cold War

sont de plus en plus lointaines. have become increasingly distant.

Ces dernières années, In recent years,

l'OTAN construit en Europe un système de bouclier antimissile, NATO has been building a missile defence system in Europe,

des missiles capables d'intercepter d'autres missiles. missiles capable of intercepting other missiles.

Le premier site a été inauguré en 2016 en Roumanie The first site was inaugurated in 2016 in Romania

et un autre doit voir le jour en Pologne en 2020. and another is due to be opened in Poland in 2020.

Selon les États-Unis, ces missiles ne visent pourtant pas la Russie, According to the United States, these missiles are not targeting Russia,

mais l'Iran, but Iran,

ce qui ne convainc pas tout à fait Vladimir Poutine. although this did not quite convince Vladimir Putin.

Faisons le point. Let's look at the situation.

En 30 ans, les relations entre la Russie et l'Occident ont basculé In 30 years, relations between Russia and the West have shifted

pour atteindre en 2014 un point critique. to reach a critical point in 2014.

Mais pendant qu'à l'ouest les choses se tendent, But as things got tense in the west,

le regard de la Russie s'est progressivement tourné vers l'est, Russia's focus gradually shifted to the east,

et vers un pays en particulier, la Chine. and to a particular country: China.

En 2008, In 2008,

la Chine est devenue le premier partenaire commercial de la Russie. China became Russia's largest trading partner.

Depuis, son poids ne cesse d'augmenter. Since then, its weight has increased steadily.

Pendant ce temps, celui de l'Europe est en baisse. Meanwhile, Europe's is in decline.

L'Union européenne est toujours la région vers laquelle la Russie exporte le plus, The European Union is still the region to which Russia exports the most,

mais pour la première fois, elle n'est plus son principal fournisseur. but for the first time, it is no longer its main supplier.

En 2016, 40 % des importations russes venaient des pays membres de l'APEC, In 2016, 40% of Russian imports came from APEC countries,

la Coopération économique pour l'Asie-Pacifique, the Asia-Pacific Economic Cooperation,

contre 38 % de l'Union européenne. compared to 38% from the European Union.

Il faut dire que depuis le conflit en Ukraine, Since the conflict in Ukraine,

d'importantes sanctions commerciales ont été imposées à la Russie, major trade sanctions have been imposed on Russia,

notamment par les États-Unis, particularly by the United States,

le Japon, Japan

et surtout tous les pays de l'Union européenne. and, above all, all the countries of the European Union.

Pour la Russie, For Russia,

trouver de nouveaux partenaires est donc nécessaire, finding new partners is therefore necessary,

et ce qui illustre peut-être le mieux ce changement stratégique, and perhaps the best illustration of this strategic change

c'est le gaz. is gas.

Car le gaz russe, ça intéresse beaucoup de gens. Because many people are interested in Russian gas.

Avec plus d'un quart des réserves mondiales sur son territoire, With more than a quarter of the world's reserves on its territory,

la Russie est l'un des principaux exportateurs mondiaux Russia is one of the world's main exporters

et le premier fournisseur de l'Union européenne. and the European Union's main supplier.

C'est tellement important pour son économie It is so important to its economy

que la Russie ne peut pas se passer d'en vendre à l'Union européenne that Russia cannot do without selling it to the European Union

et que l'Union européenne ne peut pas se passer d'en acheter à la Russie. and the European Union cannot do without buying it from Russia.

Sauf que depuis quelques années, Except that in recent years,

la Russie s'est mise à chercher de nouveaux clients. Russia has started to look for new customers.

En 2014, Force de Sibérie, In 2014, Power of Siberia,

un contrat de 400 milliards de dollars est signé entre la Chine et la Russie. a $400 billion contract is signed between China and Russia.

Il prévoit l'acheminement de 38 milliards de mètres cubes de gaz russe It involves transporting 38 billion cubic metres of Russian gas

vers la Chine en 30 ans to China in 30 years

et la construction d'un gazoduc de 3000 kilomètres entre les deux pays. and building a 3,000 kilometre gas pipeline between the two countries.

Mais les relations entre les deux nations sont plus que commerciales. But the relationship between the two nations is more than commercial.

Depuis 30 ans, elles se sont de nouveau rapprochées diplomatiquement. Over the past 30 years, they have once again forged diplomatic relations.

Il faut dire que Russes et Chinois ont un point en commun : It must be said that Russians and Chinese have one thing in common:

ils n'aiment pas trop la domination des Américains. they do not like American domination so much.

Dès 2001, Pékin et Moscou fondent la coopération de Shanghai, In 2001, Beijing and Moscow founded the Shanghai Cooperation,

une alliance régionale militaire a regional military alliance

qui regroupe désormais près de la moitié de la population mondiale. that now brings together nearly half of the world's population.

Son objectif est clair : Its objective is clear:

œuvrer à la création d'un nouvel ordre mondial plus juste, to work towards the creation of a new, more just world order,

libéré de toute hégémonie. free from hegemony.

Mais la coopération de Shanghai n'est pas la seule perspective de la Russie à l'Est. But Shanghai cooperation is not the only perspective of Russia in the East.

Il en est une qui lui tient particulièrement à cœur : There is one that is particularly close to its heart:

l'Eurasie. Eurasia.

L'Eurasie, c'est à la fois l'Europe et l'Asie, conçues comme un même ensemble. Eurasia is both Europe and Asia, seen as a single entity.

Et pour la Russie, dont le territoire s'étend sur les deux continents, And for Russia, whose territory extends over both continents,

c'est bien naturel. it is quite natural.

En 2015, elle crée l'Union économique eurasiatique. In 2015, it created the Eurasian Economic Union.

Pour l'instant, c'est une union économique et douanière, For now, it is an economic and customs union,

mais elle aspire à plus. but it aspires to more.

Depuis quelques années, In recent years,

les ambitions eurasiatiques de la Russie résonnent avec un autre projet chinois. Russia's Eurasian ambitions have resonated with another Chinese project.

Les « nouvelles routes de la soie », The "New Silk Roads"

c'est un projet qui consiste à relier la Chine à l'Europe occidentale is a project to link China to Western Europe

par des routes commerciales through trade routes

et à financer des infrastructures sur les points stratégiques de ces routes. and to finance infrastructure at strategic points on these routes.

Or, entre la Chine et l'Europe, il y a l'Union économique eurasiatique. However, between China and Europe, there is the Eurasian Economic Union.

Dès 2015, un accord a été signé pour coordonner les deux projets. In 2015, an agreement was signed to coordinate the two projects.

Pour la Chine, For China,

c'est la garantie que la sécurité de cette route sera assurée par la Russie. this is a guarantee that the safety of this road will be ensured by Russia.

Pour la Russie et les pays d'Asie centrale, For Russia and Central Asian countries,

ce sont des infrastructures financées par la Chine sur leur territoire. these are infrastructures financed by China on their territory

Mais surtout, les « nouvelles routes de la soie » pourraient faire de l'Eurasie But above all, the "new silk roads" could make Eurasia

le centre de toutes les attentions géopolitiques. the centre of all geopolitical attention.

En 1997, dans « Le grand échiquier », In 1997, in "The Grand Chessboard",

Zbigniew Brzezinski, ancien conseiller du président Carter, former adviser to President Carter

plaçait déjà l'Eurasie au centre du monde. already placed Eurasia at the centre of the world.

Selon lui, si une puissance rivale parvenait à s'imposer sur le continent eurasien, He said that if a rival power could succeed in establishing itself on the Eurasian continent,

elle serait en mesure de renverser l'hégémonie américaine. it would be able to overthrow American hegemony.

Sans surprise, Not surprisingly,

Russes et Chinois ont été particulièrement attentifs à cette prophétie. Russians and Chinese have been particularly attentive to this prophecy.

Le problème pour la Russie, c'est que pour l'heure, The problem for Russia is that for the time being,

elle n'est pas tout à fait la mieux placée des deux pour l'incarner, it is not really in the right position to embody it,

mais ça, c'est une autre histoire. but that is another story.

Merci beaucoup d'avoir regardé cette vidéo. Thank you very much for watching this video.

Elle doit beaucoup à Tatiana Kastouéva-Jean, It is due a lot to Tatiana Kastouéva-Jean,

qui est chercheuse à l'IFRI who is a researcher at IFRI

et qui m'a très gentiment accordé du temps au moment où je l'écrivais. and who very kindly allowed me some time when I was writing it.

Donc, encore merci à elle. So, thanks again to her.

Sinon, il y aura bientôt un nouvel épisode de « Mappemonde ». Otherwise, there will be a new episode of "Mappemonde" soon.

D'ici là, on attend vos retours sur cette vidéo, sur cet épisode, In the meantime, we are waiting for your feedback on this video, this episode,

et vos suggestions sur les suivants. and your suggestions on the following ones.