Leçon 14 - Entrée en matière I
(C'est une merveilleuse matinée de printemps. Dans la cour de la Sorbonne, un jeune homme sourit à une jeune fille. Elle lui rend son sourire.)
Robert: Excusez-moi, Mademoiselle. Qu'est-ce qui se passe? De quoi s'agit-il? Qu'est-ce qu'ils crient? Pourquoi est-ce qu'ils manifestent?
Mireille: Je ne sais pas, mais ils ont sûrement raison.
Robert: Il fait vraiment beau, n'est-ce pas?
Mireille: Oui, c'est une belle matinée.
Robert: Vous êtes étudiante?
Mireille: Oui, je fais de l'histoire de l'art.
Robert: Moi, je viens des Etats-Unis.
Mireille: Ah, vous êtes américain!
Robert: Oui.
Mireille: Mais, vous n'avez pas d'accent du tout pour un Américain!
Robert: Vous êtes bien gentille de me dire ça, mais vous savez, je n'ai aucun mérite: ma mère est française.
Mireille: Ah, votre mère est française?
Robert: Oui. Quand j'étais enfant, je parlais toujours français avec elle.
Mireille: Il y a longtemps que vous êtes en France?
Robert: Non, depuis hier seulement. Je viens d'arriver.
Mireille: Et vous habitez où? À la Cité-U? La Cité Universitaire? La maison américaine?
Robert: Ah, non! J'habite dans un petit hôtel du Quartier, le Home Latin. Ce n'est pas luxueux, mais c'est propre et pas très cher.
Mireille: Et vous venez souvent en France?
Robert: Non, c'est la première fois. Ma mère est française, mais mon père n'aimait pas beaucoup la France. Quand j'étais petit, nous avions l'habitude de passer nos vacances aux Bermudes, ou en Amérique Latine, où mon père avait des intérêts.
Mireille: Vous passiez vos vacances en Amérique du Sud? Mais pourquoi dites-vous "mon père n'aimait pas—avait des intérêts?" Est-ce que votre père . . . ?
Robert: Ah, non, non, non. Mon père vit toujours. Il est même en excellente santé. Mais mes parents sont divorcés, et je ne vis plus avec eux. Ma mère est remariée avec un Argentin. Alors, les Bermudes, les vacances en famille, tout ça c'est le passé.
Mireille: Ah, je comprends. Et qu'est-ce qu'il faisait, votre père, quand vous étiez petit?
Robert: Il travaillait dans une banque. D'ailleurs, il travaille toujours dans la même banque depuis vingt-cinq ans.
Mireille: Ah oui? Et quel genre de travail fait-il? Il est caissier, gardien de nuit?
Robert: Il est vice-président.
Mireille: Ah! Il n'y a pas de sot métier, comme dit ma tante Georgette.
(Elle reste silencieuse quelques instants.)
Mireille: Excusez-moi, je dois rentrer chez moi.
Robert: C'est loin, chez vous? Est-ce que vous voudriez bien me permettre de vous accompagner?
Mireille: Non, ce n'est pas loin! C'est tout près d'ici, et je veux bien vous permettre de m'accompagner, comme vous dites si bien!
Robert: On ne dit pas ça?
Mireille: Si, si, mais vous avez l'air si cérémonieux!
Robert: C'est que, je ne veux pas vous ennuyer.
Mireille: Oh, vous ne m'ennuyez pas du tout! En fait, pour être franche, je vous trouve assez sympa—enfin, je veux dire sympathique. Tenez, si vous voulez, nous pouvons aller nous asseoir quelques minutes au Luxembourg. Ce n'est pas loin d'ici, et puis c'est tout près de chez moi.
(Ils entrent dans le jardin du Luxembourg. Mireille montre le Sénat.)
Mireille: Ça, là-bas, c'est le Sénat. C'est là que les sénateurs se réunissent. Et j'habite juste en face. Tiens, asseyons-nous ici. Oh—là là, j'oubliais! Je devais amener ma petite sœur à son cours de danse à 11 heures et demie! Quelle heure est-il, midi? Mais qu'est-ce que Maman va dire! Excusez-moi, je me sauve!
(Elle se lève et s'en va.)
(Le soir, Robert est assis à la terrasse d'un café, place Saint-Michel.)
Le garçon: Qu'est-ce que je vous sers?
Robert: Un café, s'il vous plaît.
Le garçon: Un express? Très bien.
(Robert commence à écrire une carte postale. "Ma chère Maman, Je suis à la terrasse d'un café, place Saint-Michel. Le soleil se couche. Le ciel est tout rouge derrière le Louvre. Il fait très doux. C'est une belle soirée. Les Parisiennes portent des pulls blancs et des jupes rouges. Elles sont très gentilles. Bons baisers, Robert." Il écrit l'adresse: "Señora Angèle Bellarosa de Gomina, 32 Calle de la Revolución, Resistencia, Argentine."
Robert appelle le garçon.)
Robert: S'il vous plaît! Vous avez des timbres?
Le garçon: Ah, non, il faut aller dans un bureau de poste ou un bureau de tabac.
Robert: Ah, bon! C'est combien?
Le garçon: 4 francs 50.
Robert: Où y a-t-il un bureau de poste?
Le garçon: Vous en avez un là-bas, de l'autre côté du pont, à droite.
Robert: D'accord!
(Il se lève et se dirige vers le pont. Il arrive devant le bureau de poste. Malheureusement, il est déjà fermé.)