×

Utilizziamo i cookies per contribuire a migliorare LingQ. Visitando il sito, acconsenti alla nostra politica dei cookie.


image

Bram Stoker - Dracula, Part (40)

Part (40)

Je me levai et m'inclinai, et il s'approcha de moi; un homme de corpulence moyenne, solidement bâti, avec les épaules en retrait sur un buste large et profond, et un cou fermement planté dans le tronc, comme la tête sur le cou. Le maintien de la tête désigne immédiatement un homme de savoir et de pouvoir; la tête est noble, bien proportionnée, avec un crâne large à l'arrière des oreilles. Le visage, rasé de près, montre un menton dur et carré, une grande bouche résolue et mobile, un nez d'une taille respectable, plutôt droit, mais avec des narines petites et sensibles, qui semblent s'agrandir lorsque les épais sourcils broussailleux se froncent et que la bouche se serre. Le front est large et beau, presque droit à sa naissance, puis fuyant par deux bosses parallèles, un front formé de telle façon que ses cheveux roux ne peuvent en aucun cas tomber sur lui, mais tombent naturellement en arrière ou sur les côtés. Il a de grands yeux d'un bleu sombre, très écartés, tour à tour vifs, tendres ou fermes, selon le cours de ses pensées. Il me dit : « Mrs Harker, je présume ? » Je m'inclinai pour acquiescer. « Vous étiez bien Mina Murray ? » Encore une fois, j'acquiescai. « C'est Mina Murray que je suis venu voir, l'amie de cette pauvre petite Lucy Westenra. Madame Mina, je viens de la part des morts. » •Sir, dis-je, vous ne pourriez avoir de meilleures recommandations auprès de moi que d'avoir été un ami et un protecteur de Lucy Westenra. » Et je lui tendis ma main. Il la prit et dit tendrement : « Oh, Madame Mina, je savais que je pouvais compter sur la bonté de l'amie de cette pauvre et pure jeune fille, mais je ne savais pas à quel point. » Il finit son discours par une révérence courtoise. Je lui demandai la raison de sa visite, si bien qu'il entra dans le vif du sujet : « J'ai lu vos lettres à Miss Lucy. Pardonnez-moi, mais je me devais de commencer mon enquête quelque part, et il n'y avait personne à qui poser des questions. Je sais que vous étiez auprès d'elle à Whitby. Elle a tenu, de loin en loin, un journal - n'ayez pas l'air surpris, Madame Mina - elle ne l'a commencé qu'après votre départ, en s'inspirant de votre exemple - et dans ce journal elle fait référence à une crise de somnambulisme au sujet de laquelle elle écrit que vous l'avez sauvée. C'est donc mû par une grande perplexité que je suis venu à vous, afin de vous demander si vous seriez assez bonne pour me dire tout ce dont vous pouvez vous souvenir à ce sujet. « « Oui, je crois pouvoir, Docteur Van Helsing, tout vous raconter à ce propos. » « Ah, alors cela signifie que vous avez une bonne mémoire des faits, des détails ? Ce n'est pas toujours le cas des jeunes femmes. » « Non, docteur, mais j'ai tout consigné par écrit. Je peux vous montrer, si vous le voulez. » « Oh, Madame Mina, je vous en serais très reconnaissant, vous me feriez un grand honneur. » Je ne résistai pas à la tentation de me moquer un peu de lui - je crois qu'il s'agit d'un reste de la saveur de la pomme originelle, qui reste dans nos bouches - et lui tendis donc les notes sténographiques. Il s'en saisit avec un salut reconnaissant, et dit : « Puis-je le lire ? » « SI vous le souhaitez », répondis-je aussi ingénument que possible. Il l'ouvrit, et pendant un instant son visage se défit. Puis il se leva, et s'inclina. « Oh, intelligente femme ! dit-il. Je savais depuis longtemps que M. Jonathan était un homme extrêmement prévoyant, mais, regardez, sa femme se révèle être son meilleur atout. Me feriez-vous l'honneur de m'aider à le lire ? Hélas, je ne connais pas la sténographie. » A cet instant ma petite plaisanterie était terminée, et j'en avais presque honte; aussi je pris la copie dactylographiée de mon panier à ouvrage et la lui tendis. « Pardonnez-moi, dis-je. Je n'ai pas pu m'en empêcher; mais je m'étais dit que vous veniez certainement me poser de questions au sujet de Lucy, et comme vous n'avez sans doute pas le temps d'attendre - je sais que votre temps doit être précieux - j'ai pris la précaution de le taper à la machine pour vous. » Il le prit et ses yeux scintillèrent. « Vous êtes si bonne », dit-il. « Puis-je le lire maintenant ? J'aurai sans doute des questions à vous poser quand j'aurai terminé ma lecture. » « J'insiste, dis-je, pour que vous le lisiez pendant que je commande le déjeuner, et alors vous pourrez me poser des questions tout en mangeant. » Il s'inclina et s'installa dans une chaise, afin d'avoir la lumière dans son dos, et s'absorba dans sa lecture, pendant que j'allais donner mes instructions pour le repas, dans le but principal de ne pas le déranger. Quand je revins, je le trouvai en train de faire les cent pas dans la pièce, son visage tout flambant d'excitation. Il se rua vers moi et prit mes deux mains dans les siennes. « Oh Madame Mina », dit-il. « Comment puis-je vous témoigner ma reconnaissance ? Ce papier est un rayon de soleil. Il m'ouvre une porte. Je suis étourdi, je suis ébloui de tant de lumière, malgré des nuages qui roulent derrière la lumière sans cesse. Mais cela, vous ne pouvez pas le comprendre. Oh, mais je vous suis infiniment reconnaissant, intelligente femme. Madame - il dit cela avec beaucoup de solennité - si jamais Abraham Van Helsing peut faire quelque chose pour vous ou pour les vôtres, j'espère que vous me le ferez savoir. Cela me sera un plaisir et un délice de vous servir en tant qu'ami; mais tout ce que j'ai appris, toutes mes compétences, seront utilisés pour vous et ceux que vous aimez. Il y a des ténèbres dans la vie, et il y a des lumières; vous êtes l'une des lumières. Vous aurez une vie heureuse et bonne, et votre mari sera béni à travers vous. » « Mais, docteur, voici des louanges très excessives - vous ne me connaissez pas ! » « Je ne vous connais pas ! Moi, qui suis vieux, et qui ai étudié les hommes et les femmes durant toute ma vie; moi, qui ai fait du cerveau, et de tout ce qui lui appartient, et de tout ce qui en découle, ma spécialité ! Moi qui ai lu votre journal que vous aviez si bien retranscrit à mon intention, et qui respire la vérité à chaque ligne… Moi, qui ai lu votre si douce lettre à Lucy, dans laquelle vous racontiez votre mariage et votre foi, je ne vous connais pas ! Oh, Madame Mina, les femmes bonnes dévoilent toute leur vie, à chaque jour, à chaque heure, à chaque minute, afin que les anges puissent la lire - et nous, hommes de

science, nous avons en quelque sorte les yeux des anges. Votre mari est d'une noble nature, et c'est également votre cas, car vous avez la foi, et la foi ne peut se trouver dans une nature méchante. Et votre mari - parlez-moi de lui. Va-t-il tout à fait bien ? Est-ce que sa fièvre est totalement tombée, est-il fort et plein de courage ? « Je vis là une ouverture pour parler de Jonathan, et je dis : « Il était presque rétabli, mais il a été bouleversé par la mort de Mister Hawkins. » Il m'interrompit : « Oh oui, je sais, je sais, j'ai lu vos deux dernières lettres ». Je continuai : « Je crois que c'est cela qui l'a perturbé, car quand nous étions en ville jeudi dernier, il a eu une sorte de crise. » « Une crise, si peu de temps après une fièvre cérébrale ! Cela n'est pas bon. De quelle sorte de crise s'agissait-il ? » « Il a cru voir quelqu'un qui lui rappelait quelque chose de terrible, cette chose justement qui l'a conduit à sa fièvre cérébrale. » Et alors, je me suis sentie submergée par tout cela - la compassion pour Jonathan, l'horreur de ce qu'il avait vécu, le mystère terrifiant de son journal, et la peur qui s'est abattue sur moi depuis, tout a fondu sur moi comme un tourbillon. J'ai dû me montrer hystérique, car je me suis jetée à genoux et l'ai entouré de mes bras, en le suppliant de soigner mon mari. Il me prit les mains et me releva, me fit asseoir sur le sofa, et s'assit à côté de moi ; et, tout en tenant ma main, il me dit avec une infinie gentillesse : « Mon existence est stérile et solitaire, et si chargée de travail que je n'ai guère eu le temps de cultiver des amitiés; mais depuis que j'ai été convoqué ici par mon ami John Seward, j'ai rencontré tant d'excellentes personnes et tant de noblesse que je ressens plus que jamais - et elle ne fait que croître avec l'âge - la solitude de ma vie. Croyez-moi, je viens ici plein de respect pour vous, et vous m'avez donné l'espoir - pas l'espoir d'aboutir dans mes recherches, mais l'espoir qu'il reste des femmes bonnes pour rendre la vie heureuse - des femmes bonnes, dont la vie et la vérité seront des leçons merveilleuses pour les enfants à naître. Je suis heureux, heureux, de pouvoir vous être utile, car si la souffrance qui afflige votre mari se trouve justement dans mon rayon d'études et d'expériences, je vous jure que je ferai, avec joie, TOUT ce qu'il m'est possible de faire pour rendre sa vie forte et virile, et la vôtre, heureuse. Maintenant vous devez déjeuner. Vous êtes surmenée et peut-être hyper-anxieuse. Votre époux Jonathan n'aimerait pas vous voir si pâle, et le contrarier dans son amour ne lui ferait pas de bien. Aussi, pour son bien, vous devez manger et sourire. Vous m'avez tout dit à propos de Lucy, aussi nous n'en parlerons plus, de peur de vous affliger. Je resterai à Exeter cette nuit, car je veux bien réfléchir à tout ce que vous m'avez communiqué, et quand j'aurai médité suffisamment, je vous poserai mes questions, si vous me le permettez. Et vous me direz également ce qu'il en est du trouble de Jonathan, mais pas encore. Pour le moment, vous devez manger. Après, vous me direz tout. Après le repas, quand nous revînmes au salon, il me dit : « Et maintenant, racontez-moi ce qui est arrivé à Jonathan. » Quand il s'agit de parler à ce grand érudit, je commençai à craindre qu'il ne me prît pour une pauvre idiote, et Jonathan, pour un fou - ce journal est tellement étrange - et j'hésitai à me lancer. Mais il était si attentionné et si bon, de plus, il avait promis de m'aider, et je lui faisais confiance, aussi je lui dis :

« Docteur Van Helsing, ce que j'ai à vous dire est si troublant que vous ne devez pas vous moquer de moi, ni de mon mari. J'ai été, depuis hier, dans une sorte de fièvre du doute; vous devez être indulgent, et ne pas me juger stupide pour avoir cru ne serait-ce que la moitié de certaines de ces choses très étranges. » Il me rassura par ses manières autant que par ses mots quand il dit : « Oh, ma chère, si vous saviez à quel point l'affaire qui m'amène ici est étrange, ce serait à vous de rire. J'ai appris à ne pas mépriser les croyances de quiconque, quelque étranges qu'elles puissent paraître. J'ai essayé de conserver un esprit ouvert; et ce n'est pas grâce aux choses ordinaires de la vie, mais aux choses étranges, extraordinaires, aux choses qui vous font douter de votre propre santé mentale. » « Merci, merci mille fois ! Vous m'avez ôté un fardeau de l'esprit. Si vous le voulez bien, je vais vous donner quelque chose à lire. C'est long, mais je l'ai dactylographié entièrement. Cela vous expliquera mon trouble et celui de Jonathan. Il s'agit de la copie de son journal de voyage, où il a consigné tout ce qui est arrivé. Je n'ose rien vous en dire; vous le lirez vous même et vous jugerez par vous-même. Alors, quand nous nous reverrons, peut-être, vous serez assez bon pour me donner votre avis.

Part (40) Anteil (40) Part (40) Część (40) Parte (40)

Je me levai et m'inclinai, et il s'approcha de moi; un homme de corpulence moyenne, solidement bâti, avec les épaules en retrait sur un buste large et profond, et un cou fermement planté dans le tronc, comme la tête sur le cou. Le maintien de la tête désigne immédiatement un homme de savoir et de pouvoir; la tête est noble, bien proportionnée, avec un crâne large à l'arrière des oreilles. Le visage, rasé de près, montre un menton dur et carré, une grande bouche résolue et mobile, un nez d'une taille respectable, plutôt droit, mais avec des narines petites et sensibles, qui semblent s'agrandir lorsque les épais sourcils broussailleux se froncent et que la bouche se serre. Le front est large et beau, presque droit à sa naissance, puis fuyant par deux bosses parallèles, un front formé de telle façon que ses cheveux roux ne peuvent en aucun cas tomber sur lui, mais tombent naturellement en arrière ou sur les côtés. Il a de grands yeux d'un bleu sombre, très écartés, tour à tour vifs, tendres ou fermes, selon le cours de ses pensées. Il me dit : « Mrs Harker, je présume ? » Je m'inclinai pour acquiescer. « Vous étiez bien Mina Murray ? » Encore une fois, j'acquiescai. « C'est Mina Murray que je suis venu voir, l'amie de cette pauvre petite Lucy Westenra. Madame Mina, je viens de la part des morts. » •Sir, dis-je, vous ne pourriez avoir de meilleures recommandations auprès de moi que d'avoir été un ami et un protecteur de Lucy Westenra. » Et je lui tendis ma main. Il la prit et dit tendrement : « Oh, Madame Mina, je savais que je pouvais compter sur la bonté de l'amie de cette pauvre et pure jeune fille, mais je ne savais pas à quel point. » Il finit son discours par une révérence courtoise. Je lui demandai la raison de sa visite, si bien qu'il entra dans le vif du sujet : « J'ai lu vos lettres à Miss Lucy. Pardonnez-moi, mais je me devais de commencer mon enquête quelque part, et il n'y avait personne à qui poser des questions. Je sais que vous étiez auprès d'elle à Whitby. Elle a tenu, de loin en loin, un journal - n'ayez pas l'air surpris, Madame Mina - elle ne l'a commencé qu'après votre départ, en s'inspirant de votre exemple - et dans ce journal elle fait référence à une crise de somnambulisme au sujet de laquelle elle écrit que vous l'avez sauvée. C'est donc mû par une grande perplexité que je suis venu à vous, afin de vous demander si vous seriez assez bonne pour me dire tout ce dont vous pouvez vous souvenir à ce sujet. « « Oui, je crois pouvoir, Docteur Van Helsing, tout vous raconter à ce propos. » « Ah, alors cela signifie que vous avez une bonne mémoire des faits, des détails ? Ce n'est pas toujours le cas des jeunes femmes. » « Non, docteur, mais j'ai tout consigné par écrit. Je peux vous montrer, si vous le voulez. » « Oh, Madame Mina, je vous en serais très reconnaissant, vous me feriez un grand honneur. » Je ne résistai pas à la tentation de me moquer un peu de lui - je crois qu'il s'agit d'un reste de la saveur de la pomme originelle, qui reste dans nos bouches - et lui tendis donc les notes sténographiques. Il s'en saisit avec un salut reconnaissant, et dit : « Puis-je le lire ? » « SI vous le souhaitez », répondis-je aussi ingénument que possible. Il l'ouvrit, et pendant un instant son visage se défit. Puis il se leva, et s'inclina. « Oh, intelligente femme ! dit-il. Je savais depuis longtemps que M. Jonathan était un homme extrêmement prévoyant, mais, regardez, sa femme se révèle être son meilleur atout. Me feriez-vous l'honneur de m'aider à le lire ? Hélas, je ne connais pas la sténographie. » A cet instant ma petite plaisanterie était terminée, et j'en avais presque honte; aussi je pris la copie dactylographiée de mon panier à ouvrage et la lui tendis. « Pardonnez-moi, dis-je. Je n'ai pas pu m'en empêcher; mais je m'étais dit que vous veniez certainement me poser de questions au sujet de Lucy, et comme vous n'avez sans doute pas le temps d'attendre - je sais que votre temps doit être précieux - j'ai pris la précaution de le taper à la machine pour vous. » Il le prit et ses yeux scintillèrent. « Vous êtes si bonne », dit-il. « Puis-je le lire maintenant ? J'aurai sans doute des questions à vous poser quand j'aurai terminé ma lecture. » « J'insiste, dis-je, pour que vous le lisiez pendant que je commande le déjeuner, et alors vous pourrez me poser des questions tout en mangeant. » Il s'inclina et s'installa dans une chaise, afin d'avoir la lumière dans son dos, et s'absorba dans sa lecture, pendant que j'allais donner mes instructions pour le repas, dans le but principal de ne pas le déranger. Quand je revins, je le trouvai en train de faire les cent pas dans la pièce, son visage tout flambant d'excitation. Il se rua vers moi et prit mes deux mains dans les siennes. « Oh Madame Mina », dit-il. « Comment puis-je vous témoigner ma reconnaissance ? Ce papier est un rayon de soleil. Il m'ouvre une porte. Je suis étourdi, je suis ébloui de tant de lumière, malgré des nuages qui roulent derrière la lumière sans cesse. Mais cela, vous ne pouvez pas le comprendre. Oh, mais je vous suis infiniment reconnaissant, intelligente femme. Madame - il dit cela avec beaucoup de solennité - si jamais Abraham Van Helsing peut faire quelque chose pour vous ou pour les vôtres, j'espère que vous me le ferez savoir. Cela me sera un plaisir et un délice de vous servir en tant qu'ami; mais tout ce que j'ai appris, toutes mes compétences, seront utilisés pour vous et ceux que vous aimez. Il y a des ténèbres dans la vie, et il y a des lumières; vous êtes l'une des lumières. Vous aurez une vie heureuse et bonne, et votre mari sera béni à travers vous. » « Mais, docteur, voici des louanges très excessives - vous ne me connaissez pas ! » « Je ne vous connais pas ! Moi, qui suis vieux, et qui ai étudié les hommes et les femmes durant toute ma vie; moi, qui ai fait du cerveau, et de tout ce qui lui appartient, et de tout ce qui en découle, ma spécialité ! Moi qui ai lu votre journal que vous aviez si bien retranscrit à mon intention, et qui respire la vérité à chaque ligne… Moi, qui ai lu votre si douce lettre à Lucy, dans laquelle vous racontiez votre mariage et votre foi, je ne vous connais pas ! Oh, Madame Mina, les femmes bonnes dévoilent toute leur vie, à chaque jour, à chaque heure, à chaque minute, afin que les anges puissent la lire - et nous, hommes de

science, nous avons en quelque sorte les yeux des anges. Votre mari est d'une noble nature, et c'est également votre cas, car vous avez la foi, et la foi ne peut se trouver dans une nature méchante. Et votre mari - parlez-moi de lui. Va-t-il tout à fait bien ? Est-ce que sa fièvre est totalement tombée, est-il fort et plein de courage ? « Je vis là une ouverture pour parler de Jonathan, et je dis : « Il était presque rétabli, mais il a été bouleversé par la mort de Mister Hawkins. » Il m'interrompit : « Oh oui, je sais, je sais, j'ai lu vos deux dernières lettres ». Je continuai : « Je crois que c'est cela qui l'a perturbé, car quand nous étions en ville jeudi dernier, il a eu une sorte de crise. » « Une crise, si peu de temps après une fièvre cérébrale ! Cela n'est pas bon. De quelle sorte de crise s'agissait-il ? » « Il a cru voir quelqu'un qui lui rappelait quelque chose de terrible, cette chose justement qui l'a conduit à sa fièvre cérébrale. » Et alors, je me suis sentie submergée par tout cela - la compassion pour Jonathan, l'horreur de ce qu'il avait vécu, le mystère terrifiant de son journal, et la peur qui s'est abattue sur moi depuis, tout a fondu sur moi comme un tourbillon. J'ai dû me montrer hystérique, car je me suis jetée à genoux et l'ai entouré de mes bras, en le suppliant de soigner mon mari. Il me prit les mains et me releva, me fit asseoir sur le sofa, et s'assit à côté de moi ; et, tout en tenant ma main, il me dit avec une infinie gentillesse : « Mon existence est stérile et solitaire, et si chargée de travail que je n'ai guère eu le temps de cultiver des amitiés; mais depuis que j'ai été convoqué ici par mon ami John Seward, j'ai rencontré tant d'excellentes personnes et tant de noblesse que je ressens plus que jamais - et elle ne fait que croître avec l'âge - la solitude de ma vie. Croyez-moi, je viens ici plein de respect pour vous, et vous m'avez donné l'espoir - pas l'espoir d'aboutir dans mes recherches, mais l'espoir qu'il reste des femmes bonnes pour rendre la vie heureuse - des femmes bonnes, dont la vie et la vérité seront des leçons merveilleuses pour les enfants à naître. Je suis heureux, heureux, de pouvoir vous être utile, car si la souffrance qui afflige votre mari se trouve justement dans mon rayon d'études et d'expériences, je vous jure que je ferai, avec joie, TOUT ce qu'il m'est possible de faire pour rendre sa vie forte et virile, et la vôtre, heureuse. Maintenant vous devez déjeuner. Vous êtes surmenée et peut-être hyper-anxieuse. Votre époux Jonathan n'aimerait pas vous voir si pâle, et le contrarier dans son amour ne lui ferait pas de bien. Aussi, pour son bien, vous devez manger et sourire. Vous m'avez tout dit à propos de Lucy, aussi nous n'en parlerons plus, de peur de vous affliger. Je resterai à Exeter cette nuit, car je veux bien réfléchir à tout ce que vous m'avez communiqué, et quand j'aurai médité suffisamment, je vous poserai mes questions, si vous me le permettez. Et vous me direz également ce qu'il en est du trouble de Jonathan, mais pas encore. Pour le moment, vous devez manger. Après, vous me direz tout. Après le repas, quand nous revînmes au salon, il me dit : « Et maintenant, racontez-moi ce qui est arrivé à Jonathan. » Quand il s'agit de parler à ce grand érudit, je commençai à craindre qu'il ne me prît pour une pauvre idiote, et Jonathan, pour un fou - ce journal est tellement étrange - et j'hésitai à me lancer. Mais il était si attentionné et si bon, de plus, il avait promis de m'aider, et je lui faisais confiance, aussi je lui dis :

« Docteur Van Helsing, ce que j'ai à vous dire est si troublant que vous ne devez pas vous moquer de moi, ni de mon mari. J'ai été, depuis hier, dans une sorte de fièvre du doute; vous devez être indulgent, et ne pas me juger stupide pour avoir cru ne serait-ce que la moitié de certaines de ces choses très étranges. » Il me rassura par ses manières autant que par ses mots quand il dit : « Oh, ma chère, si vous saviez à quel point l'affaire qui m'amène ici est étrange, ce serait à vous de rire. J'ai appris à ne pas mépriser les croyances de quiconque, quelque étranges qu'elles puissent paraître. J'ai essayé de conserver un esprit ouvert; et ce n'est pas grâce aux choses ordinaires de la vie, mais aux choses étranges, extraordinaires, aux choses qui vous font douter de votre propre santé mentale. » « Merci, merci mille fois ! Vous m'avez ôté un fardeau de l'esprit. Si vous le voulez bien, je vais vous donner quelque chose à lire. C'est long, mais je l'ai dactylographié entièrement. Cela vous expliquera mon trouble et celui de Jonathan. Il s'agit de la copie de son journal de voyage, où il a consigné tout ce qui est arrivé. Je n'ose rien vous en dire; vous le lirez vous même et vous jugerez par vous-même. Alors, quand nous nous reverrons, peut-être, vous serez assez bon pour me donner votre avis.