×

We use cookies to help make LingQ better. By visiting the site, you agree to our cookie policy.


image

Première & Dernière fois, Première & Dernière fois 08

Première & Dernière fois 08

Nous avons tous et toutes des premières et des dernières fois.

Et pour beaucoup, le cheminement entre les deux est une véritable aventure.

J'ai décidé de rencontrer des inconnus, ou presque inconnus, de partager avec elles

et eux ces confidences intimes, et de mesurer l'évolution de leurs désirs entre la première

et la dernière fois.

Pierre a 24 ans.

Il croit au destin.

Il est actuellement en fin d'études de droit à Lyon et passe l'examen des avocats en

septembre, ce qui doit être très impressionnant.

Il se définit comme gay, mais son chemin a duré plusieurs années avant d'arriver

à cette conclusion.

Bonjour Pierre.

Bonjour.

J'ai une première question, on se vouvoie ou on se tutoie ?

Tu peux me tutoyer.

Qu'est-ce que tu penses de cette présentation ? Est-ce que tu es d'accord ? Je ne me suis

pas trop trompée ?

Non, maman, ça va.

Tu as dit de très belles choses.

Merci, je te remercie.

On va parler de ton expérience tout au long de cette vie, de cette première fois, de

cette deuxième première fois dans ton histoire, et puis jusqu'à aujourd'hui, voir comment

tu avais évolué, voir où est-ce que tu en étais aujourd'hui, voir ce qu'est peut-être

ce profil pour le futur.

Alors Pierre, est-ce que tu te rappelles de ta première fois ?

Oui, je me rappelle très bien.

Paradoxalement, à mon sens, j'ai eu deux premières fois.

La première, elle se situe vers l'âge de 17 ans environ.

Je suis issu du milieu rural, de la campagne.

J'ai habité pendant 18 ans chez mes parents dans un petit village de 1000 habitants.

Et à cette époque, j'étais au lycée, dans un lycée privé catholique à la campagne,

dans une belle bâtisse avec un immense parc.

Tout allait très bien.

C'est à cette époque que j'ai rencontré Manon, une fille qui habitait dans le village

voisin de celui de mes parents.

Tout allait très bien.

La vie semblait paisible.

On avait une belle bande d'amis, que j'ai toujours d'ailleurs.

On passait toutes nos journées ensemble, nos week-ends ensemble, etc.

Je vais faire une petite coupure.

Mais là, tu me racontes le chemin idéal du jeune homme hétérosexuel de campagne

qui fait sa petite vie.

Sauf que je sais, puisque tu me l'as déjà raconté quand on a préparé cette émission,

que tu savais que tu n'étais pas hétérosexuel depuis ton enfance.

Oui, tout à fait.

Je pense que je l'ai enfoui au plus profond de moi-même dès le début.

Enfin, en tout cas, à partir du moment où je m'en suis réellement rendu compte.

Je m'en suis réellement rendu compte au collège,

lorsque on commence certainement tous à avoir des envies.

Je me suis très vite rendu compte que mes envies allaient vers des garçons

et non pas vers des filles.

Par simple souci de popularité ou même peut-être de normes établies

dans ce milieu-là, dans cet environnement-là.

J'ai choisi de fermer les yeux, de me rassurer,

de me dire que j'étais capable de sortir avec des filles.

Et à l'époque au collège, ça a aussi marqué ta découverte masturbatoire

ou tu as continué à part à avoir ce jardin secret ?

Alors, c'est très bizarre parce que j'ai fait une sorte de blackout de cette période.

Je pense qu'en fait, je me suis un peu obligé à l'oublier

parce que ce n'était pas forcément une période très plaisante pour moi.

Mais en tout cas, au niveau masturbatoire, je pense que déjà,

je pensais à des garçons.

Tu n'étais pas forcé à consommer les mêmes pornos que tes amis ?

Si, j'essayais vraiment de me persuader que j'étais hétérosexuel.

Tu as fait ta propre thérapie conversion.

Tu as essayé de faire ton petit chemin d'hétéro malgré toi.

Et tu te retrouves au lycée, dans cet univers très privilégié,

dans une famille aimante.

Tout à fait.

Une famille très aimante.

Une famille...

Donc, en fait, j'ai un frère et une soeur.

Mon frère est hétérosexuel, a un enfant, etc.

Et ma soeur est lesbienne.

Ma soeur a huit ans de plus que moi et mon frère en a sept.

Donc, à l'époque, en fait, lorsque ma soeur a fait son coming out,

elle avait 18 ans.

J'en avais donc à l'époque neuf.

Et je pense que ça a participé au fait que j'ai fermé les yeux sur mon homosexualité.

En tout cas, que j'ai essayé au maximum de fermer les yeux sur mon homosexualité.

Parce que tu te souviens comment ça s'est passé ce coming out ?

C'était un moment particulier, tout le monde s'est réuni.

Pas du tout.

J'en ai un bon souvenir.

Mon père était au travail.

Mon frère, ma mère et moi, nous étions autour de la table de la cuisine.

Ma soeur est descendue et en fait, ma soeur avait une gourmette au bras

et c'était la gourmette de sa copine.

À l'époque, une mode était que lorsqu'on portait la gourmette de telle personne,

ça signifiait qu'on était en couple avec.

Ma mère a tout de suite fait le rapprochement et de là,

des hurlements ont commencé.

Et puis, c'est un coming out qui s'est très mal passé.

Très mal passé, oui.

En fait, je pense de par le choc de la nouvelle.

Et puis ensuite, du coup, les répercussions ont été sur le long terme

puisque du coup, mon père n'était pas au courant et que du coup,

mon frère, ma mère et moi-même, on devait finalement dissimuler

ce secret de famille au détriment de ma soeur.

En plus, ça avait été quand même relativement délicat pour notre famille.

Et je pense que voilà, moi-même à cette période ou en tout cas,

deux années plus tard, alors que mon père était toujours pas au courant,

sachant que j'avais des attirances pour les garçons.

Tu t'étais dit, c'est un peu trop là.

Complètement.

Tu te retrouves au lycée avec ta bande de potes, donc ta famille,

le contexte particulier de ta famille quand même.

Cette fille, Manon, qui devient ta copine.

Et là, j'imagine que tu reproduis le schéma habituel

où on s'embrasse pour la première fois.

Complètement.

On sort ensemble.

Le schéma totalement hétéronormé, en tout cas celui qu'il y avait dans ma tête,

d'autant plus que c'était quelqu'un qui avait quand même

relativement de l'impact dans notre lycée.

Donc j'étais déjà très fier, très fier d'être à ses côtés.

Et au-delà de ça aussi, très fier d'être en couple avec une fille.

Je sais pas, j'avais vraiment le sentiment d'avoir gagné en popularité,

d'avoir gagné aussi en...

Enfin, je sais pas, j'avais le sentiment vraiment d'être le lycéen cool.

D'avoir trouvé ta place.

Complètement.

Et puis surtout aussi d'envisager mon avenir beaucoup plus simplement.

De me dire que maintenant, tout était acté finalement,

que j'avais ma copine, mon petit quotidien, mes amis

et que tout allait bien se passer.

Donc tu savais que tu allais faire ta première fois avec cette fille-là ?

Pour moi, il n'y avait aucun doute, ça allait être elle et personne d'autre.

Je me posais peut-être même la question d'ailleurs à l'époque,

s'il n'y aurait pas qu'elle finalement dans ma vie.

Ça a été organisé quand par rapport au moment où vous vous êtes mis ensemble ?

Ça a été assez rapide dans votre histoire ou ça a été quelque chose

que vous avez pris le temps de réfléchir ensemble ou de mettre en place ?

Pour elle comme pour moi, c'était donc notre première fois.

On a souhaité vraiment prendre le temps.

Moi, en tout cas, j'ai souhaité prendre le temps déjà par peur.

J'avais une peur immense de découvrir le corps d'une femme,

d'autant plus avec tous les questionnements que je traversais

inconsciemment à l'époque, parce que vraiment,

je pensais pas du tout à mon homosexualité.

Tout bêtement, j'avais peur de bander devant une fille.

J'avais peur de ne pas réussir à bander devant une fille.

Et rien que pour ça, finalement, déjà, il fallait que je tâte le terrain

et que je vois si mon corps n'allait pas lui même me tromper devant elle.

Et ça s'est organisé comment du coup ? Quand est-ce que tu t'es senti prêt ?

Et bien finalement, en fait, ça a été de fil en aiguille.

On a commencé à découvrir nos corps

lorsque les circonstances nous le permettaient.

J'ai eu ma maison libre pendant une semaine

puisque mes parents sont partis en vacances.

Donc Manon était venue passer la semaine avec moi dans cette maison.

On a passé plusieurs nuits ensemble sans que rien ne se passe.

Et puis un soir, voilà, tout s'est déclenché.

C'est à partir de ce moment-là, en fait, qu'on a couché ensemble.

Donc ça n'a pas été planifié ?

Ou tu savais que ça allait se passer cette semaine-là quand même ?

Alors moi, je voulais que ça se passe cette semaine-là.

Enfin, d'abord, pour ma fierté personnelle, c'est peut-être bête à dire,

mais à l'époque, vraiment, j'avais presque envie de m'en vanter.

Bon, finalement, aujourd'hui, avec du recul,

je trouve ça vraiment dégueulasse comme façon de raisonner,

mais je voulais vraiment que ça se produise.

Et puis, ça aurait été vraiment un réel échec pour moi si ça n'aurait pas eu lieu.

Donc, un de ces soirs où vous vous êtes couché ensemble,

comme les autres soirs précédemment, qu'est-ce qui s'est passé ?

Vous avez un peu plus avancé les préliminaires et vous êtes parti.

C'est ça, tout à fait.

Vous avez déjà mis les préservatifs dans la table de nuit, non ?

J'avais mis les préservatifs pas très loin, mais j'en avais du coup jamais mis un.

Et je me souviens que ça a été un petit moment de galère quand même.

Mais on s'en est sorti et voilà.

Qu'est-ce que tu as ressenti du coup devant ce corps de femme que tu appréhendais ?

Il y a eu des découvertes ou tu t'es dit au contraire, bon, en fait, c'est pas si...

Il n'y a pas eu de réelles découvertes.

En fait, très honnêtement, il n'y a pas de réels souvenirs.

C'est ça aussi qui m'a longtemps perturbé.

C'est que j'ai eu très peu de souvenirs de ça.

Finalement, j'ai même pas le sentiment d'avoir vraiment éprouvé du plaisir.

Tu te souviens avoir eu un orgasme ou pas du tout ?

Oui, je l'ai eu.

En tout cas, oui, j'y jouis.

Mais à mon sens, vraiment, c'était ensuite, au fil de mon histoire,

lorsque j'ai réellement connu ce que c'était le vrai orgasme.

Celui-ci, finalement, était fonctionnel.

C'est ça.

Tu as essayé de lui donner du plaisir.

Tu étais engagé là dedans. Tu t'es dit.

Oui, par contre, j'ai toujours eu le souci, le souci de l'autre.

Je voulais vraiment, en fait, penser à elle avant de penser à moi.

D'autant plus pour elle.

Enfin, je considérais vraiment qu'une première fois pour une fille

devait être certainement beaucoup plus difficile à appréhender qu'un garçon.

Et j'ai toujours eu beaucoup de respect pour elle et pour les filles en général.

Et ça me tenait vraiment à coeur de la considérer énormément ce soir là.

C'est quoi le sentiment après ?

Tu t'es senti différent ou au contraire, tu t'es dit.

Ben voilà, c'est la suite de ma vie.

Je me suis senti différent.

Je me suis senti beaucoup plus grand, beaucoup plus mature, plus adulte.

C'était pour moi, en fait, la suite logique de tout ce qui devait se passer.

Et puis, ça me permettait de fermer encore plus les yeux sur mes envies.

Donc, ça ne t'a pas.

Tu t'es pas retrouvé à te prendre en pleine tête le fait

que c'était vraiment pas un truc pour toi.

Tu t'es dit. Pas du tout.

À ce moment là, pas du tout.

C'était pour moi tout tracé.

Je continue mon chemin.

Et du coup, vous avez continué.

Vous êtes resté en couple.

C'est ça. On est resté en couple pendant à peu près un an et demi.

En fait, la rupture s'est apparue au moment de l'enseignement supérieur.

On a tous les deux obtenu notre bac.

On est parti de notre confort de campagne.

On avait eu notre permis de conduire.

On a eu nos appartements.

Et c'est à ce moment là, finalement, que la relation a commencé à se dégrader.

Ben certainement, en fait, pour la simple et bonne raison que je lui apportais,

c'était parce qu'elle cherchait réellement à savoir l'amour.

Enfin, j'ai cru l'aimer.

J'ai pensé l'aimer.

En tout cas, je me suis battu pour.

Mais je me suis ensuite rendu compte que ce n'était pas pour moi.

Tu penses qu'elle l'a senti?

Je pense que je l'ai fait fuir.

Je pense que sans en être réellement conscient, encore une fois,

j'ai fait en sorte qu'elle parte.

Le temps où tu as été avec Manon, tu t'es concentré sur cette partie hétérosexuelle

de ta vie.

Tu t'es jamais permis d'avoir des fantasmes masculins,

d'avoir des masturbations tournées vers les hommes.

Ça a été quelque chose que tu as vraiment mis sous le tapis

pendant ces années là, ou quand même il y a eu des trucs?

Je l'ai mis sous le tapis, mais c'est une certitude qu'il y a eu quand même

quelques quelques trucs.

J'ai aucun souvenir très précis, mais c'est certain que la masturbation,

parfois, ma masturbation, parfois, était en pensant à des garçons.

C'est sûr. Ou en regardant des films pornographiques.

Quand est ce que tu t'es tourné vers les hommes?

Eh ben, je me suis tourné vers les hommes, du coup, à cette période là.

Après ma rupture, voilà, je suis arrivé dans le milieu urbain.

Je me suis pris un raz de marée de nouveautés dans la gueule.

Et puis, c'est là que je me suis dit bon, en fait, c'est peut être le moment

de faire tes découvertes.

Au départ, j'ai eu le souci d'être très, très, très discret.

Voilà, j'avais peur que quelqu'un s'aperçoive,

que je pouvais fréquenter des garçons.

En plus, je vivais en colocation avec deux de mes meilleurs amis.

Donc, tu essayais de te cacher de tes meilleurs amis,

potentiellement de gens qui auraient pu te connaître dans la ville,

de tes collègues de travail, de trucs de tout ça?

Tout le monde.

T'en parlais à qui à l'époque?

À personne.

J'en parlais à moi-même le soir avant de dormir.

Ça doit être la seule personne à qui j'en parlais.

Mais voilà.

Et puis, en fait, du coup, je me suis dit que

le seul moyen de rencontre, mon seul moyen de rencontre,

allait être celui,

enfin, allait être le virtuel finalement.

Parce que pour moi, derrière un écran, c'était beaucoup plus simple

de pouvoir faire des rencontres que physiquement.

D'abord, physiquement, où aller?

Et puis ensuite, quand y aller?

Comment y aller?

T'as pas été dans un club gay?

À cette époque là, c'était inconcevable pour moi.

Et puis au-delà de ça, je me disais, si jamais je rencontre

quelqu'un de mon entourage, comment j'aurais pu justifier cet acte?

Alors, il y a eu une seconde première fois?

À cette période là, du coup, donc, j'étais sur des sites de rencontres.

C'est là que j'ai rencontré Robin, virtuellement d'abord.

On a discuté pendant trois mois ensemble.

Ces trois mois ont été assez lambe d'oeufs.

Finalement, on parlait de la pluie et du beau temps

et on se permettait de se masturber, etc.

En mettant la webcam, en fait, tout simplement, tous les deux.

Pour lui, comme pour moi, rien n'était assumé par rapport à ça.

Tu savais qu'il était gay quand même?

Tu l'avais trouvé comme ça ou pas du tout?

À l'époque, lui comme moi, on se considérait plutôt hétéro curieux.

Un terme qui, aujourd'hui, me ferait vraiment beaucoup sourire.

Mais à l'époque, c'était en tout cas, voilà, comme ça qu'on se définissait.

Finalement, au bout de ces trois mois de relations virtuelles,

Robin, du coup, partait en Australie.

Mon cerveau, sans consulter mon coeur, a décidé de rapidement l'oublier.

En fait, voilà, je suis parti à Saint-Étienne.

J'ai commencé mes études de droit et j'ai continué ma vie.

À cette période là, pendant encore plus d'un an et demi,

j'ai continué à fréquenter des filles,

simplement pour essayer de rester dans la norme établie.

Et au delà de ça, en parallèle, par contre,

je commençais à réellement rencontrer physiquement des garçons.

Il se passait des simples caresses, c'était de la simple masturbation, etc.

Je ne voulais pas aller plus loin parce qu'en fait, à chaque fois

que j'éjaculais, un énorme sentiment de dégoût apparaissait vraiment chez moi,

comme si je devais très rapidement partir, partir de l'endroit où j'étais.

C'était souvent du coucher chez l'autre garçon

et puis tirer un train net sur tout ce qui venait de se passer

et l'oublier très rapidement.

Donc, en parallèle de tes histoires, parfois même en étant en couple avec des femmes ?

Complètement.

Dans leur dos, du coup ?

Complètement.

Par contre, tu ne considères pas que ces échanges sexuels avec des hommes,

qui étaient vraiment des échanges, même non pénétratifs,

étaient comme une première fois ?

Alors non, parce que c'est vrai que pour moi, le terme première fois a un réel sens.

Et pour moi, la première fois, c'est vraiment lorsque le sentiment de l'amour est là.

Et à ces moments-là, je ne ressentais ni le besoin d'être aimé,

ni le besoin d'aimer quelqu'un.

Non, je ne considère pas que tous ces moments-là ont été des premières fois.

Cette période-là a duré un temps.

Donc toi, en couple avec des femmes que tu as présentées,

j'imagine, à tes camarades de fac ou à ta famille, non ?

Si, si, si, tout à fait.

Sexuellement, à cette période-là, tu continues de coucher avec des femmes.

Est-ce que ta sexualité est restée comme elle l'était dans cette première fois

avec Manon ou est-ce qu'au fur et à mesure, tu as commencé à prendre du plaisir

ou à faire des choses qui te donnaient du plaisir avec des femmes ?

Non, toutes ces relations sexuelles restaient, encore une fois, très lambda.

Pour moi, c'était presque qu'une simple finalité,

en fait, qu'un simple acte qu'il fallait faire, que les choses continuent.

Mais on confirmait le couple.

Tout à fait.

Il y a eu une suite à l'histoire avec Robin qui avait donc disparu.

Il est revenu ?

C'est ça.

En fait, lors de ma dernière relation avec mon ex-copine,

on décide de se séparer d'un commun accord.

Il n'y a pas eu de réels soucis,

puisqu'aujourd'hui, c'est l'une de mes meilleures amies pour le coup.

Et en fait, le lendemain matin, je me réveille, je regarde mon téléphone

comme tous les matins en ouvrant les yeux et je me rends compte

que j'ai une demande d'amis Facebook de ce fameux Robin.

Donc là, une montagne de questions m'arrivent en pleine face.

Je me demande d'abord pourquoi il fait ce geste là envers moi.

Et puis, et puis ensuite, je me dis, je commence à avoir peur

à douter aussi de sa sincérité et de son honnêteté.

Et du coup, je commence à avoir peur vraiment de sa démarche.

Au final, je me permets quand même de lui répondre.

Et voilà, je lui écris simplement.

Salut, pourquoi tu m'ajoutes sur sur Facebook d'une telle manière ?

Deux ans après, qu'est ce qui s'est passé ?

Je commence à me répondre naturellement que Facebook l'a mis dans ses suggestions d'amis.

Voilà, je trouve, je trouve ça un peu formidable.

Finalement, c'est vrai qu'on a tendance à cracher sur la gueule

de tous les réseaux sociaux.

On remercie les intelligences artificielles quand même.

Voilà, ça aussi du bon.

Non, dans un sens, du coup, c'est ça qui m'a permis de renouer les liens avec Robin.

Puis voilà. Et puis en fait, à partir de ce moment là,

on a commencé à vachement discuter ensemble.

Encore une fois, virtuellement, on a très vite réinstallé l'application Skype

pour nous permettre de nous revoir.

Et puis du coup aussi, forcément, de passer des moments intimes ensemble.

Encore une fois, virtuellement.

J'imagine qu'à un moment, il y a une rencontre.

À un moment donné, Robin décide de me rencontrer.

À ce moment là, j'étais extrêmement peur, finalement, de le rencontrer.

Je n'osais pas forcément lui permettre de venir chez moi.

Je n'avais jamais permis à personne de venir chez moi dans cette démarche là.

Là, je savais que du coup, il allait falloir le faire

puisque lui habitait sur Lyon et que je ne voulais absolument pas aller à Lyon

pour le rejoindre de toute façon.

De fil en aiguille, Robin me propose une date.

On confirme lors du rendez-vous.

Puis voilà, cette journée arrive.

Et c'est vrai que cette journée a été extrêmement difficile pour moi.

J'ai fabulé pendant bien longtemps.

J'ai eu peur, j'ai été excité.

J'ai vraiment traversé beaucoup d'émotions.

À l'heure du rendez-vous, finalement, je décide d'envoyer un message à Robin

et je lui dis pas ce soir.

Je suis désolé, je peux pas.

Donc lui, il est à Saint-Étienne avec son petit sac.

Exactement. Et comment il réagit ? Mal, logiquement.

Il vient de faire 45 minutes de route pour au final ne pas me voir.

J'imagine à ce moment là que c'est le point final de ce début d'idile virtuel.

Finalement, je commence à culpabiliser.

Du coup, je lui renvoie très rapidement un message pour lui dire

écoute, finalement, on va le faire.

On va se voir, mais ce sera ce sera demain.

Il me faut encore du temps pour y réfléchir.

On refixe lors du rendez-vous.

Et puis voilà, je m'endors assez calmement.

Le lendemain, Robin m'écrie et donc est en bas de mon appartement.

Du coup, je bombarde mon corps et mon appartement de déodorant

et puis je lui ouvre la porte.

À ce moment là, du coup, nos regards se croisent.

Et puis c'est parti pour la rencontre.

On a bu une bière sur mon canapé et puis on a discuté.

J'ai le souvenir qu'il y avait le film X-Men qui passait à la télé.

Je sais pas pourquoi, mais j'ai ce souvenir là en tête.

Et puis, au bout de dix minutes à peu près, Robin décide finalement

de faire le premier pas.

Il tourne mon visage dans sa direction et puis il m'embrasse.

Ça a été, je pense, la première fois de ma vie que j'ai ressenti un réel

sentiment d'amour et d'épanouissement

lors d'un baiser.

Ça a été vraiment quelque chose de très marquant pour moi.

Il m'en reste encore quelques souvenirs en tête

puisque ça a été vraiment très, très marquant.

Et puis voilà, tout se passait très bien.

On découvrait petit à petit nos corps.

On discutait, on essayait d'en apprendre un peu plus sur nous à l'autre.

Tout se passait très bien jusqu'au moment où du coup, je décide de

terminer notre entrevue et que Robin rentre à Lyon.

Alors vous avez fait quoi à ce moment là ?

Tu l'arrêtes en pleine action.

C'est ça, je l'arrête en pleine action.

Je regarde mon téléphone.

Je vois qu'il est tard et je lui dis qu'il est temps de se quitter

et qu'on aura encore beaucoup de temps à l'avenir pour apprendre à se connaître

et partager du temps ensemble.

Mais qu'aujourd'hui, je suis pas prêt à dormir avec un garçon

pour la première fois de ma vie.

C'est de la peur. C'est de la peur.

Et c'est surtout être conscient qu'à partir du moment

où j'aurais dormi avec un garçon, ce sera réellement dans ma tête,

en tout cas, mettre des actes,

mettre des gestes sur le fait que je suis homosexuel.

Alors justement, avant d'entrer dans le vif du sujet,

je vais te poser quelques petites questions

qui vont nous permettre de faire une petite pause d'anticipation.

C'est basé sur le jeu à boire Je N'ai Jamais.

Et donc, je t'invite à me répondre au tac au tac.

Donc, soit tu me dis si tu n'as jamais, si tu as et à fortiori,

si tu as une petite anecdote sur le sujet, c'est encore meilleur.

J'ai déjà éjaculé, du coup, j'imagine que oui.

J'ai déjà, oui.

J'ai déjà eu du souci avec du matériel.

Je n'ai jamais.

J'ai déjà pensé à ma liste de courses pendant le sexe ou un cours de droit.

Un cours de droit, si.

Un cours de droit, oui.

Pourquoi spécifiquement ?

Parce que j'étais dans le stress de mes partiels et je me faisais un peu chier

et que du coup, je me suis dit bon, OK, bah, essayons de mêler l'utile à l'agréable.

Ça a marché ?

J'ai eu des plutôt bonnes notes au partiel, donc peut être que oui.

J'ai déjà pensé à quelqu'un d'autre.

Oui, un ex, en l'occurrence Robin,

avec du coup un autre de mes ex.

Je me suis déjà masturbé dans des endroits pas prévus pour.

Ça peut être lieu public, fac.

J'ai déjà, j'ai déjà.

Où ça ?

Une cage d'escalier de mon immeuble.

T'avais pas le temps de rentrer chez toi ?

C'est ça, l'ambiance est trop présente.

Ça se tient, écoute.

Une masturbation avec quelqu'un ?

Oh, c'était une masturbation avec l'un de mes ex en entrée de soirée.

Certainement, l'alcool a joué un peu et je sais pas.

On n'a pas eu la clé dans la porte.

C'est ça, on n'a pas eu envie de...

C'est le cas de le dire.

On n'a pas eu envie d'ouvrir, d'ouvrir la porte.

C'était bien plus excitant dans le couloir.

C'était bien.

Ouais, c'était sympa.

Alors, on va continuer par les drobins.

Cette espèce de première fois avortée

où tu sais qu'il y a toute cette pression

et que ça représente vraiment un tournant dans ta vie.

Il le sait, lui, il s'en rend compte que c'est dur pour toi.

Est-ce que c'est le même questionnement chez lui ?

Vous en parlez ?

Robin le sait, c'est certain.

Je lui avais tout dit.

Je lui avais tout raconté.

C'était important pour moi, en tout cas, d'être transparent

vers lui par rapport à tout ça.

Chose qu'il a relativement bien compris.

Il n'a jamais été trop envahissant par rapport à ça.

Il a toujours respecté mes choix.

Quand est-ce que tu dis c'est bon, maintenant, c'est le moment ?

Tu laisses passer quelques jours ?

J'y laisse passer quelques jours,

mais je laisse surtout passer plusieurs rencontres.

Il est venu plusieurs fois à Saint-Etienne me voir

et il est rentré plusieurs fois en pleine nuit.

Bredouille.

Bredouille à Lyon.

Quand est-ce que tu dis que tu en as vraiment tellement envie qu'il faut le faire ?

Eh bien, en fait, il n'y en a pas.

C'est lui, finalement, qui va choisir ce moment-là.

En fait, un soir, il vient à Saint-Etienne

et sans me prévenir cette fois-ci, avec des affaires pour dormir.

C'est un peu un ultimatum, parce que si tu le renvoies de chez lui,

ça veut un peu dire...

Tout à fait.

Et en même temps, je pense qu'il avait bien fait de faire cette démarche,

parce que sinon, les choses auraient avancé vraiment au ralenti.

Mon lit était en mezzanine à l'époque, donc je déploie l'échelle

pour monter dans mon lit.

Il me suit, on commence à mettre une série sur Netflix.

Et puis, en fait, on commence du coup, voilà, des préliminaires.

Jusqu'au moment où je sens tout mon corps se réduire.

Je commence à m'effondrer en larmes sans que...

Sans même que je ne puisse respirer et parler.

Une crise d'angoisse ou quelque chose comme ça ?

Oui, une réelle crise d'angoisse.

À ce moment-là, j'étais complètement paralysé dans le lit.

Je pouvais plus rien dire.

Et Robin commençait un peu à paniquer en voyant mon état.

La seule chose que j'ai réussi à dire, c'est part.

Et il est reparti ?

Il est reparti.

Il n'a pas forcément cherché à discuter avec moi.

De toute façon, je pense qu'il avait très bien compris

qu'il n'y arriverait pas, que je ne m'apaiserais pas en fait en sa présence.

Les au revoir étaient déchirants.

Mais voilà, on se serre une dernière fois dans nos bras.

On s'embrasse et puis il part et on ne se dit rien.

Sur la route de son retour, il m'écrit un message et me dit

je comprends ce que tu traverses.

Je l'ai déjà vécu une première fois il y a de ça un an à peu près.

Voilà, il comprenait ce que je vivais en tout cas à ce moment-là.

Il m'a dit de prendre mon temps et qu'il attendrait.

Chose que j'ai faite, j'ai eu beaucoup de mal à me canaliser ce soir-là, à me calmer.

J'ai appelé une de mes meilleures amies pour essayer d'extérioriser tout ça

et de lui en parler.

Je n'ai pas réussi.

J'ai tourné, elle ne comprenait pas réellement mon état,

mais j'ai essayé du coup de le légitimer en parlant

de petits soucis personnels que j'avais à ce moment-là.

Oui, tu as failli faire un coming out et c'est pareil, là, ça s'est dégonflé.

Complètement. Les choses continuent et puis en fait,

on décide avec Robin de prendre le temps et de se laisser un mois de réflexion

sans se revoir, etc.

pour que les choses avancent, mais doucement.

J'ai terminé mes examens et puis du coup, on avait convenu avec Robin

qu'on se retrouverait cette fois-ci à Lyon, chez sa mère,

puisqu'il vivait chez sa mère et que sa mère était en déplacement pour le travail.

Donc je pouvais y aller.

On décide du coup de se retrouver après mes examens.

J'arrive du coup dans sa rue après m'être tapé deux heures de bouchon.

Je découvre finalement son environnement.

Voilà un environnement tout neuf.

Je m'imagine, enfin je l'imagine en tout cas, traverser cette rue tous les matins, etc.

Et puis, voilà, je monte, je monte chez lui.

Il m'ouvre la porte et puis là, vraiment un sentiment d'épanouissement

vraiment total resurgit.

Le même que lorsqu'on s'était quitté finalement.

On se retrouve et puis à partir de ce moment-là, c'est une évidence.

Une évidence pour lui comme pour moi.

Maintenant, on fera la route ensemble.

C'est là qu'elle a eu lieu cette première fois.

C'est là qu'elle a eu lieu cette première fois.

Ça y est, ça s'est passé comment ?

Tout bêtement, il m'a fait visiter son appartement.

On arrive dans sa chambre.

Il a un lit, une place.

Je le regarde du coin de l'oeil en lui disant que ce ne sera pas très simple

du coup pour m'accueillir chez lui à l'avenir ou en tout cas pour dormir.

Enfin que moi, je voulais dormir dans un lit de place et pas à l'une place.

Le regard était complice et on a tous les deux été sur son lit.

Et puis c'était parti.

Il y a eu beaucoup de dialogues, en fait, parce que lui, comme moi,

c'était quand même relativement nouveau.

Personne ne savait si l'autre était passif, était actif.

Vous n'en aviez jamais parlé ?

Absolument pas.

Et du coup, vous vous êtes mis d'accord très vite ?

On s'est mis d'accord très vite dans le sens où je lui ai dit je ne serais pas passif.

Donc c'était très vite choisi.

Finalement, il a accepté.

Et voilà, ça a été ma réelle première fois à mon sens.

Tu as trouvé les gestes facilement ou tu penses que tu as tâtonné ?

Ou comment ça s'est passé ?

Je pense avoir trouvé les gestes facilement.

Le lit de place ne m'a pas aidé.

C'est une certitude.

Je pense avoir trouvé les gestes assez facilement et lui aussi.

Il y a eu beaucoup d'écoute, beaucoup de partage, beaucoup de désir

au vu des circonstances.

Et je pense que ça nous a vachement aidé.

À l'issue de cette première fois, tu as le sentiment que ça y est,

tu as trouvé ta voix, que tu as plus kiffé que toute ton histoire sexuelle précédente ?

Complètement.

J'ai l'impression de réellement commencer ma vie sexuelle à partir de ce moment là.

C'est une certitude.

C'est à ce moment là que je comprends.

OK, j'aime les garçons, je suis gay.

C'est sûr.

C'est pas bisexuel, c'est sûr.

Là, tu sais qu'en fait, tu as mis derrière toi toutes ces histoires de filles.

Exactement.

Ça va avec une façon de vivre aussi, c'est à dire que quand tu fais ce pas

de la première fois avec Robin, tu décides que tu ne feras plus semblant

ou c'est encore un autre chemin qui te reste à faire ?

C'est un autre chemin.

C'est un autre chemin complètement différent.

Sur lequel je ferme les yeux encore.

Je sais que je vais vivre caché avec Robin.

C'est une certitude.

On va vivre caché.

De son côté comme du mien, personne n'est au courant et personne ne le sera.

Ça dure combien de temps cette histoire ?

Cette histoire dure un peu près huit mois.

Avec de la distance, il est parti en voyage durant un mois et demi.

Puis ensuite, on a quand même eu le souci de beaucoup partager.

Bon partager, je m'entends.

À ce moment là, partager pour nous, c'était se retrouver soit chez moi, soit chez lui.

On ne se permettait pas de sortir dans la rue.

On ne se permettait pas de sortir tout bêtement.

Pas de ciné, pas de resto.

Jamais.

Pas peur de croiser quelqu'un ?

Exactement.

Pas peur de croiser soit mon entourage, soit le sien.

Voilà, on vivait dans des cages finalement, la mienne et la sienne,

qu'on partageait de temps en temps.

Le virtuel, j'imagine aussi.

Parfois, rarement, parce qu'on essayait quand même de se voir toutes les semaines, plusieurs fois.

J'ai le souvenir aussi qu'un soir, je devais aller dormir chez lui.

Et en fait, sa mère est arrivée.

Erreur de timing.

Donc, je me retrouvais à Lyon, sans logement,

avec l'envie de le voir.

Au final, on a du coup, enfin, on avait du coup pris la décision de louer un Airbnb

pour quand même pouvoir se voir et partager un moment ensemble.

À ce moment là, quand même, j'étais relativement énervé.

Je me suis dit, putain, qui loue un Airbnb qui dépense 80 balles

pour une nuit avec son copain ?

Vraiment, pour le coup, cet acte là, le fait de simplement louer une chambre

pour se cacher, parce que vous ne pouviez pas vous voir à l'extérieur.

M'a rendu malade.

À ce moment là, ça a changé quelque chose dans toi quand même.

Tu as commencé à te poser des questions, en tout cas, même sur le côté de vivre caché.

Peut être à te dire que ça n'allait pas pouvoir durer éternellement.

Complètement.

Moi, j'étais vraiment dans la démarche de me dire,

ce garçon est fait pour moi et je ferai ma vie avec.

Enfin, j'étais vraiment éperdument amoureux.

Selon moi, j'aurais été prêt à ce moment là, à commencer à en parler autour de moi

pour me permettre de mélanger mon quotidien.

C'est comme ça que j'appelais finalement ma vie avec mes amis et ma famille.

Lorsqu'il n'était pas là, donc mélanger ce quotidien avec ma vie, avec lui.

Et ça ne s'est pas fait. Ça ne s'est pas fait.

Quand votre histoire, elle s'arrête.

Qu'est ce que tu décides de faire?

Tu décides de rester ce que tu es devenu, c'est à dire totalement homosexuel

et tu ne retournes pas en arrière avec des femmes.

Alors non, je ne retourne pas en arrière avec des femmes.

En fait, c'est du coup Robin qui décide de rompre

pour la simple et bonne raison que lui n'était pas dans la voie

de s'assumer ou en tout cas de s'accepter.

Et puis, je ne sais pas.

Je pense qu'il a toujours vu une forme d'échéance à notre relation.

Chose que moi, du coup, je ne voyais pas.

J'étais en week-end au ski avec mes meilleurs amis lorsque du coup,

il m'a annoncé ça par message et qui m'a dit qu'il ne me permettrait pas

ni de me voir, ni qu'on s'appelle ou quoi que ce soit.

C'est une chance définitive à distance.

Voilà. À ce moment là, tu décides d'en parler à tes amis ou pas du tout?

Je me rappelle de m'être effondré au chalet avec tous mes amis.

Mais encore une fois, j'ai été incapable d'en parler.

Donc, tous mes amis se demandaient pourquoi j'étais dans un tel état.

Mais personne n'avait pu réellement savoir la vérité à ce moment là.

Qu'est ce qui a été un déclencheur finalement à ce coming out?

Parce qu'aujourd'hui, t'es out.

Oui. Comment ça s'est passé?

Et bien, c'est finalement cette rupture.

Je suis rentré à Saint-Etienne.

Je me suis dit bon, ben en fait, maintenant, ton seul rempart,

ta seule épaule sur laquelle tu pouvais te reposer à ce moment là,

sur ce sujet là, est partie.

T'es tout seul.

Donc, il est temps de te battre.

Il est temps surtout de comprendre ce que tu es, ce que tu veux avoir dans ta vie.

J'ai eu pas mal d'idées noires à ce moment là quand même.

J'ai vraiment concrétisé le suicide un bon nombre de fois.

Je me suis vachement renfermé sur moi même.

J'ai plus forcément parlé avec ma famille et mes amis, mais

j'ai toujours eu l'espoir de me dire que j'y arriverais.

De fil en aiguille, je commence à me rendre compte que je peux me battre,

d'autant plus en fait, avec l'aide d'une de mes amies.

J'ai une de mes amies de Saint-Etienne qui était venue à mon appartement un soir

en se rendant compte que j'allais pas très bien et que j'allais plus beaucoup en cours.

Elle vient chez moi et elle m'annonce son homosexualité.

À ce moment là, je me suis dit bon, en fait, je suis pas seul

et peut être que je devrais me battre.

C'est elle d'ailleurs qui m'a finalement suggéré l'idée d'aller voir une psychologue.

Dès le lendemain matin, j'ai appelé toutes les psy de Saint-Etienne

pour avoir un rendez vous en urgence.

T'as trouvé quelqu'un avec qui parler de ça du coup ?

J'ai eu la chance, j'ai eu une chance immense de tomber sur quelqu'un de super bienveillant.

À cette époque, j'étais donc encore étudiant.

Financièrement, j'avais la vie étudiante, donc voilà.

Mais je suis tombé sur une psychologue qui était vraiment super,

qui m'a permis, qui m'a même fait un prix sur mes séances

pour pouvoir vraiment faire ce travail là avec moi.

Elle l'a consacré la première fois que je suis allé la voir.

Du coup, ce jour là, elle a consacré à peu près deux heures et demie,

trois heures de son temps après sa journée de travail

pour discuter avec moi sur cette thématique là.

Et t'as tout de suite su le parler ?

Parce que comme t'en avais jamais parlé avec personne, ça a quand même réussi à sortir.

C'est ça.

Oui, je m'en souviens très bien.

Enfin, c'est sorti, mais au bout de bien 30, 45 minutes de pleurs, je pense.

Et en fait, finalement, avant de faire ton coming out,

il a fallu que tu fasses ton propre coming out personnel.

Parce que tu t'étais jamais dit que voilà, c'est ce que t'étais et que ça allait aller.

Il était temps que je voie la vérité en face.

C'était le moment.

Ça a duré combien de temps, cette thérapie ?

Ou peut-être que ça continue encore d'ailleurs.

Cette thérapie a duré juste le temps que j'étais sur Saint-Étienne.

Donc vu que c'était ma troisième année, en fait, il ne me restait que quelques mois.

J'ai dû faire à peu près six séances environ et ça a duré cinq mois environ.

Tu as le sentiment que ça t'a lancé pour faire ton coming out, du coup,

pour en parler à d'autres gens ?

Totalement. Déjà, ça m'a permis de me comprendre moi-même.

Ce que tu disais tout à l'heure, finalement, j'ai fait d'abord mon coming out personnel.

Rien que ça, en fait, ça m'a lancé.

Ça m'a totalement lancé dans la démarche d'ensuite pouvoir en parler et le vivre pleinement.

À ce moment-là où tu allais très mal, t'as arrêté de voir des gens

ou tu as quand même essayé de draguer un peu, même virtuellement ?

Non, non.

T'étais vraiment refermé.

À ce moment-là, j'ai arrêté de voir des gens, mais pire encore,

je ne voyais presque plus ma famille et mes amis.

Ça les inquiétait ?

Il y a eu à ce moment-là une recherche de dialogue

ou d'essayer de comprendre pourquoi tu n'allais pas bien ou pas trop ?

Je fuyais ces discussions-là.

Avec mes parents, j'ai été très difficile.

J'ai été presque méchant, je pense.

Et avec mes amis, en fait, mes meilleurs amis qui habitent du couvert chez mes parents

ou qui vivaient sur Lyon pour leur vie étudiante,

en fait, je leur disais que j'ai resté à Saint-Étienne avec mes amis de Saint-Étienne.

J'avais pas mal d'alibi, finalement.

Pour te cacher un petit peu plus.

Tout à fait.

On va faire une petite pause, on va se poser d'autres questions,

on va apprendre à se connaître un petit peu mieux.

J'ai envie de parler des oeuvres qui ont accompagné ton imaginaire

sexuel, sensoriel, sensuel.

OK.

Alors, du coup, c'est une série de questions sur différents modèles culturels.

Quel est le livre qui t'excite ?

Il n'y a pas réellement de livre qui m'excite.

Je dirais que le livre qui, par contre, a réveillé beaucoup d'émotions chez moi

et a eu vraiment une réelle importance, c'est le livre

Arrête avec tes mensonges de Philippe Besson.

Voilà, Philippe Besson, à travers ce livre, aborde la thématique de l'amour secret,

de l'homosexualité, du coming out.

L'amour secret et la campagne en plus.

C'est ça, du clivage entre le milieu urbain et le milieu rural.

C'est à la période où je n'allais pas bien que j'ai découvert ce livre.

C'est un livre très court et très introspectif sur lequel l'auteur fait

vraiment un chemin à travers son enfance et son adolescence.

C'est le moment où il s'est construit.

J'imagine qu'effectivement, en tant que jeune qui est en train d'essayer

de lutter contre soi-même et en plus, il parle de deux personnages

qui ont deux chemins très différents.

Ça a dû être un choc.

C'est ça, vraiment le sentiment de se retrouver,

en fait, finalement, à travers le personnage principal.

Je pense qu'il a vraiment...

Enfin, je pèse mes mots, mais je pense qu'il m'a un peu sauvé la vie, ce livre.

Philippe Besson a finalement eu un peu la même histoire que moi.

En tout cas, j'ai eu ce sentiment là, à ce moment là.

Même si chaque histoire est différente et non, c'est un réel échappatoire.

Surtout que comme il aborde le fait qu'il y a un vrai aspect tragique à son histoire.

Ça ne cache pas le fait que vivre au cachet toute sa vie

est source d'une souffrance qui peut mener à des extrémités vraiment dramatiques.

Donc, voilà, c'est un livre comme un couperet presque.

C'est vraiment très, très court.

Et pour ceux qui ne le connaissent pas, c'est vraiment un livre à découvrir.

Le film qui me fait vibrer ?

Alors, le film qui me fait vibrer, je pense que c'est Seule la Terre.

Donc, c'est un film britannique pas très connu qui, en fait, aborde encore une fois,

du coup, puisqu'on est dans le thème, j'y vais jusqu'au bout,

la thématique de l'homosexualité, mais cette fois-ci, du coup, dans le milieu rural

et en particulier à travers le monde agricole.

Je m'y retrouvais bien aussi, puisque du coup, mes parents sont agriculteurs

et il y a une scène, il y a une scène de sexe

entre deux hommes dans une grange, dans la boue,

extrêmement charnelle que j'ai trouvé dingue.

C'est un film que tu as découvert comment ?

Par le biais de ma coloc à l'époque,

qui est l'une de mes meilleures amies, qui m'a dit

j'irais bien voir un film d'arrêt essai au cinéma de Lyon.

Je lui ai dit d'accord, ok, j'y vais.

Et puis du coup, en fait, je suis tombé sur ce film totalement par hasard.

L'image qui te donne des frissons de plaisir ?

Je n'ai pas réellement d'image qui va me donner des frissons de plaisir.

En fait, je suis passionné de photos.

J'en fais beaucoup maintenant.

Je ne saurais pas dire vraiment une photographie en particulier,

mais je considère vraiment...

Moi, je fais beaucoup de portraits et je considère que vraiment le portrait,

c'est la manière finalement de faire ressortir les émotions

et le passé d'une personne sur photo.

La musique qui me met le mieux dans l'ambiance ?

Celle qui m'a mis le mieux dans l'ambiance.

Encore une fois, je vais rester quand même dans la thématique du coming out.

Celle qui me met le plus dans l'ambiance, c'est vraiment grave,

de Hedy Depredor.

Qui a beaucoup parlé, en effet,

vraiment avec beaucoup de délicatesse et de force

du fait d'être gay et de l'assumer, même dans des milieux où ce n'était pas

forcément évident.

J'imagine que ça a beaucoup parlé à beaucoup de jeunes gays

quand l'album est sorti.

C'est ça, tous ces textes.

Je pense qu'en même temps, il y a une énergie de dingue quand il est sur scène

et du coup, c'est extrêmement sensuel.

C'est quelqu'un qui est vraiment une sorte de violence comme ça,

de violence sensuelle.

C'est ça. Je suis allé le voir en concert en plus à Lyon.

Il est génial en concert.

Il est génial.

Le parfum qui réveille mes sens ?

Je dirais Hadzaro.

Et c'est tout simplement parce que Robin le portait.

C'est une très bonne notion.

Je saurais le sentir à des kilomètres à la ronde.

Et ça ne t'a pas dégoûté dans le sens où si tu le sens sur quelqu'un d'autre,

ça te bloque ?

Ah non, au contraire.

Ça me rappelle du coup des passages très agréables que j'ai vécu.

À noter pour tes prochains Mac, du coup.

C'est le bon plan.

C'est la bonne info.

Ta relation avec Robin, très passionnée au long cours

et qui accompagne ton chemin personnel sur ce coming out et sur ton identité,

s'arrête.

Tu finis par travailler seul,

en compagnie quand même du coup d'une psy et d'une amie.

Quand est-ce que ça s'arrange ?

Quand est-ce que tu dis, c'est bon, j'ai assez avancé ?

Qu'est-ce qui se passe ? T'es un autre homme ?

C'est ça.

Du coup, j'ai réussi à en parler à l'une de mes amies.

Plus encore, de fil en aiguille, j'ai réussi à en parler

à l'une de mes tantes maternelles de qui je suis très, très proche,

qui m'a d'ailleurs permis d'avoir un accès à la culture assez dingue.

Je dois beaucoup à ma tante maternelle qui est célibataire

et qui est vraiment extraordinaire.

Et donc voilà, j'arrive sur Lyon,

je termine ma licence de droit à Saint-Etienne,

je rentre en master, j'ai un nouvel appartement.

Tout a l'air très cool finalement.

Et du coup, je me dis, voilà, même ta vie privée, elle est cool.

Et il n'y a pas de raison que tu n'y arrives pas.

Donc, continue à te battre.

Et continue surtout à comprendre ce que tu es,

ce que tu souhaites avoir.

Et puis, tout se passera bien.

Tu rencontres Hugo.

Alors, du coup, je décide de me mettre sur des applications de rencontres.

Donc après les applications de rencontres gays connues de tous,

en tout cas de ceux qui fréquentent ce milieu là.

Grindr.

Grindr, Tinder.

Donc je découvre Grindr et je découvre aussi ce milieu complètement nouveau pour moi.

Je découvre surtout que finalement,

il y a beaucoup de diversité au sein de cette application.

Je me rends compte surtout aussi qu'il y a beaucoup de personnes cachées

qui cherchent des relations souvent, du coup,

uniquement des relations sexuelles très discrètes.

Je me rends compte qu'il y a des personnes souvent mariées ou en couple.

Je me rends compte que voilà, il y a des personnes de toute religion, de tout milieu.

Je suis quand même assez perplexe.

Assez perplexe de la crédibilité de ces applications

et surtout aussi de la finalité en fait.

Je me rends compte que sur Grindr par exemple,

j'ai vraiment le sentiment qu'il y a une finalité qui est uniquement sexuelle.

Moi, j'arrive en me disant bon, je vais bavarder avec un peu n'importe qui.

Bon, je comprends très vite que finalement, c'est pas dans cette direction là.

C'est plutôt cash quand même les conversations sur Grindr.

On est sur quelque chose de plutôt cash, ouais.

Après, il y a des exceptions à tout, mais voilà.

Et tu pratiques, t'essayes un peu le plan cul Grindr en dix minutes ?

Tu t'essayes ?

J'ai eu à essayer et finalement après, personnellement en tout cas,

je me suis rendu compte que c'était pas quelque chose qui me convenait,

mais j'ai essayé, bien sûr.

De toute façon, j'ai essayé beaucoup de choses finalement

parce que je me devais d'expérimenter,

de connaître ce monde qui était complètement nouveau pour moi.

Je me suis vraiment rendu compte que finalement,

t'arrives dans le milieu gay, mais en fait, tu ne connais rien.

L'éducation sexuelle que tu as eu au collège,

on ne te parle même pas d'homosexualité.

Au-delà de ça, même par rapport aux maladies sexuellement transmissibles,

j'ai pas le souvenir qu'on nous en ait parlé.

Je ne savais même pas à l'époque que la fellation

pouvait être un moyen de transmission pour certaines MST.

Même un jargon du coup, homosexuel, qu'il faut apprendre.

Comme quoi ?

Barbec' par exemple.

Bon, une pratique que je ne pratique pas pour le coup, mais...

Qui est le sang capote.

Voilà, qui est le sang capote.

Qui, je me permets de le dire, que je trouve réellement dangereuse,

mais qui est vraiment une pratique que chacun est libre de faire ce qu'il souhaite.

Donc voilà, moi maintenant, je ne me la permets pas.

Puis après, il y avait ça.

Il y avait du coup après le terme actif, passif, mais bon,

qui s'apprend vite quoi.

On comprend vite ce que c'est.

Donc actif, c'est ceux qui sodomisent,

et passif, c'est ceux qui reçoivent la sodomie.

Exactement.

On va préciser pour ceux qui ne savent pas.

Tout à fait.

Donc tu débarques dans ce milieu-là, tu n'y connais rien,

mais tu apprends sur le tas.

Voilà.

Et c'est là que tu rencontres Hugo ?

C'est là que je rencontre Hugo du coup, sur l'application.

Je trouve ça assez marrant parce qu'en fait,

c'est une personne qui travaille pas très loin de chez mes parents.

Voilà, je trouve la situation cool.

Ça m'a l'air d'être quelqu'un assez sain.

Je me permets de discuter avec lui et je me permets de lui proposer qu'on se rencontre.

On se rencontre quelques jours plus tard chez lui.

Encore une fois chez sa mère.

Je ne sais pas ce que j'ai eu à ce moment-là, mais c'était chez sa mère.

Bien sûr, on n'était que tous les deux.

Et donc pareil, lui, pour lui, de son côté, personne ne le savait.

Ça m'arrangeait bien quand même.

Et puis, on a discuté sur son canapé pendant quelques heures.

Et puis ensuite, on a essayé de se faire comprendre qu'on se plaisait,

qu'on avait envie de l'autre.

Et puis, on a pris la direction de sa chambre.

On a couché ensemble encore une fois.

Toi, toujours actif ?

Toujours actif.

Tout s'est bien passé en soi.

Je n'ai pas eu le sentiment d'être très performant

parce qu'en fait, tout était encore nouveau pour moi.

Je n'avais jamais rencontré quelqu'un.

Je n'avais jamais parlé deux heures avec une personne et puis directement couché avec.

Je n'étais pas amoureux.

Je ne connaissais même pas l'environnement, cet endroit où j'étais.

À l'époque, j'étais encore vraiment novice, entre guillemets.

C'est vrai que ça fait bizarre.

On ne sait pas trop ce qu'on fout là.

Tu ne te regrettes pas ?

Je ne regrette pas.

Vous vous êtes mis en couple ou pas du tout ?

Du coup, puisque de son côté, ce n'était pas du tout assumé,

que moi du mien, ça l'était, mais partiellement.

En fait, on n'a pas décidé de se mettre en couple.

Enfin, je n'ai rien décidé du tout d'ailleurs.

Moi, tout de suite après, en fait, cette rencontre,

pour vous dire à quel point j'étais vraiment un peu dans le standard du

« on se rencontre, on couche ensemble, ok, on se met ensemble ».

Moi, directement après, on a rediscuté après l'acte tout de suite.

Et puis moi, je vais directement proposer qu'on se mette ensemble.

Et il a éclaté de rire ?

Pas loin, mais non, ça va, il va un peu plus respecter.

Mais en tout cas, il a bifurqué.

Il n'a pas répondu à cette question et il l'a évité.

Mais vous avez quand même eu une forme de relation dans le sens où il t'a un peu accompagné.

On a eu une forme de relation, c'est certain,

dans le sens où ça a été le premier avec qui j'ai partagé.

Ça a été le premier avec qui je suis sorti au cinéma.

Ça a été le premier avec qui je suis allé au restaurant.

On a quand même réussi un peu à se sortir de notre confort,

même si on allait au cinéma qui était à l'opposé de Lyon.

Et genre à 11h le soir, en pleine nuit, personne ne te voit.

Non, on allait vraiment...

Par exemple, nous, on habite plutôt à l'ouest.

On allait complètement à l'est de Lyon pour ne croiser personne.

Mais comment tu te sentais après toutes ces premières fois ?

Comment on se sent ? On est content ?

On fait un high five à soi-même et on se dit « ouais, je l'ai fait ».

On est content et en même temps, non.

En fait, je pense qu'on est surtout déçu de se dire qu'on fait extrêmement attention

à l'environnement qu'on a autour de nous.

C'était il y a combien de temps ?

C'était il y a deux ans et demi.

Donc 2016-2017.

Et on est encore en train de dire que tu as quand même eu un cap

où tu as eu peur d'aller au restaurant ou peur d'aller au ciné.

Complètement, complètement.

Après, Hugo avait une carrure, il mesure 1m93

et il a une carrure relativement musclée.

Donc je ne me faisais pas trop de soucis par rapport aux autres.

Mais c'était surtout plus est-ce que quelqu'un de mon entourage

qui n'est pas au courant va arriver ou du sien ?

Et puis, on ne se permettait pas de toute façon.

Je pense que tous les gens autour de nous pensaient qu'on était de simples amis,

je pense, parce qu'on ne se donnait jamais la main, on ne s'embrassait jamais.

J'ai le souvenir que lorsqu'on s'embrassait, c'est parce qu'on en mordait d'envie

et qu'on arrivait au garage souterrain de la ville pour aller chercher notre voiture

et qu'on le faisait dans la voiture.

Après, voilà.

Non, tout a continué jusqu'au moment où finalement,

on s'est rendu compte que la relation n'avançait pas.

Je me suis surtout rendu compte que lui

continuait à parler avec d'autres garçons sur les applications.

Tu t'es dit on va arrêter là les frais et on va chercher quelqu'un d'autre.

Je me suis dit que du coup, c'était pas forcément quelqu'un fait pour moi.

Et puis qu'au-delà de ça, les efforts unilatérals, ça va cinq minutes.

J'en avais déjà fait l'expérience avant, donc je ne voulais pas refaire la même erreur.

Qu'est-ce que tu as fait ensuite ?

J'ai continué à croire en l'amour.

J'ai rencontré beaucoup de garçons.

Pour être honnête,

j'ai vraiment eu le besoin d'aller à la rencontre de ces personnes

et de savoir aussi qu'est-ce que moi, je voulais finalement.

En fait, j'ai bu beaucoup de verre avec beaucoup de gens.

Ça a toujours été des moments très cool.

Bon, on connaît tous la situation un peu malaisante du date qui ne matche pas trop

et où là, du coup, on essaye d'être expéditif.

Mais j'ai quand même rencontré de très belles personnes.

J'ai finalement très peu été célibataire, en fait,

pendant toutes ces années jusqu'à aujourd'hui.

Oui, donc dans tout chemin où tu as rencontré plein de gens,

ça nous amène aujourd'hui.

C'est ça.

Et alors, c'était quand cette dernière fois ?

Et bien, cette dernière fois, elle était lundi.

C'était comment ? C'était avec qui ?

C'était avec un garçon avec qui je parle depuis quelques mois

et avec qui je m'entends bien.

L'enjeu, absolument pas de se mettre en couple de son côté comme du mien.

Mais voilà, on s'apprécie beaucoup et il est passé chez moi.

On peut appeler ça un plan cul.

C'était bien ? C'était cool.

T'es toujours exclusivement actif ou il y a un petit peu de changement de ce côté là ?

Alors, je me suis permis d'essayer d'être passif, mais c'est pareil.

Ça imposait beaucoup de questionnements pour moi, même des trucs cons,

mais même au niveau de l'anatomie, etc.

Je voulais vraiment comprendre tout ce qui se passait.

Et au final, j'ai essayé.

Pour l'instant, je ne ressens pas l'envie ni le besoin.

Ça n'a jamais été quelque chose qui m'a réellement procuré du plaisir.

Donc pour l'instant, je suis plus actif que passif.

Après, voilà, je veux dire, j'ai une vie entière pour changer la vie

ou pour découvrir de nouvelles choses.

Donc tu es dans une phase de célibat,

mais encore récemment, tu as été en couple longue durée avec quelqu'un.

J'ai été en couple pendant sept mois et avec une personne cette fois-ci

qui, du coup, avait fait son coming out auprès de tout son entourage.

Moi, du coup, aujourd'hui, c'est le cas aussi.

Tout mon entourage familial, amical, tout le monde est au courant.

Donc on a pu réellement vivre notre relation.

En tout cas, moi, pour la première fois de ma vie, j'ai pu vivre une relation

pleinement épanouie et surtout sans secret.

Ça a été vraiment sept mois de bonheur.

Tout a été trop cool. On a fait plein de choses.

J'ai pu partir au ski avec lui et mes amis.

J'ai pu partir au ski avec lui et ses amis.

J'ai rencontré sa famille et ça a été vraiment des super moments.

Ça m'a prouvé finalement que la simplicité pouvait encore exister et pouvait exister,

même dans le milieu homosexuel, dans le milieu gay.

Maintenant, je dirais qu'il y a toujours une forme un peu de spontanéité

qui n'existe pas, malheureusement.

Et ça me tient à coeur de témoigner de ça.

Avec mon dernier copain, on a toujours fait attention

et prêté attention au regard des autres dans la rue

ou lorsqu'on se donnait la main à Lyon, etc.

On fait toujours attention avant de se donner la main ou de s'embrasser,

de regarder tout autour de nous si l'environnement nous paraît propice à un tel acte.

Voilà, on est confronté dans les médias à beaucoup d'agressions homophobes.

Les choses avancent, mais peut-être pas assez vite.

La question est même, est-ce que finalement les choses avancent ?

Mais voilà, ça nous enlève de la spontanéité.

Ça nous enlève. Tout est calculé.

Finalement, tous ces gestes de tendresse qui devraient être naturels ne le sont plus.

Et ça, par contre, je trouve que c'est vraiment bâché, en fait.

C'est un truc qui est encore difficile pour toi.

Oui, par contre, du coup, le couple au grand jour, c'est un truc auquel t'aspires,

auquel tu veux.

Et puis, au-delà de ça, je me permettais de lui donner la main.

Je me permettais de l'embrasser et je me le permettrais toujours.

Ça fait du bien, cette liberté ?

Complètement.

Et puis, je me réduirais jamais à la violence

qui peut être faite par les personnes homophobes.

Comment tu vois aujourd'hui ton parcours ces dernières années ?

Du coup, de ta période hétéro, entre guillemets, à aujourd'hui ?

J'ai du mal à croire que c'est moi.

J'ai du mal à croire que c'est ma vie et j'ai du mal à croire

que j'ai réussi à faire tout ça.

Ça m'a pris énormément de temps, énormément de force aussi.

Il y a eu quand même beaucoup de fois où j'ai eu envie de baisser les bras

ou alors, en tout cas, où j'ai été assez triste.

Mais je reviendrai toujours à la conclusion que je suis tellement heureux

dans ma vie maintenant et que je referais exactement les mêmes choses

si je devais les refaire.

C'est une belle conclusion.

J'aime bien.

En plus, ça veut dire que ta vie commence aujourd'hui presque, tu vois ?

C'est une renaissance.

Je le dis des fois.

Je dis que j'ai commencé à vivre finalement depuis peu.

20, 21 ans.

C'est beau.

J'aime beaucoup ça. On va garder ça comme conclusion.

Merci. Merci.

C'était Première Dernière Fois.

Si ce podcast vous a plu, n'hésitez pas à lui mettre cinq étoiles

et à nous laisser un commentaire.

Tous les autres épisodes de Première Dernière Fois

sont à retrouver sur Slate.fr et sur votre application de podcast préféré.

Merci à toutes et à tous et à très bientôt.

Sous-titrage ST' 501


Première & Dernière fois 08 Erstes & letztes Mal 08 First & Last 08 Primera y última vez 08 Primeira e última vez 08

Nous avons tous et toutes des premières et des dernières fois.

Et pour beaucoup, le cheminement entre les deux est une véritable aventure.

J'ai décidé de rencontrer des inconnus, ou presque inconnus, de partager avec elles

et eux ces confidences intimes, et de mesurer l'évolution de leurs désirs entre la première

et la dernière fois.

Pierre a 24 ans.

Il croit au destin.

Il est actuellement en fin d'études de droit à Lyon et passe l'examen des avocats en

septembre, ce qui doit être très impressionnant.

Il se définit comme gay, mais son chemin a duré plusieurs années avant d'arriver

à cette conclusion.

Bonjour Pierre.

Bonjour.

J'ai une première question, on se vouvoie ou on se tutoie ?

Tu peux me tutoyer.

Qu'est-ce que tu penses de cette présentation ? Est-ce que tu es d'accord ? Je ne me suis

pas trop trompée ?

Non, maman, ça va.

Tu as dit de très belles choses.

Merci, je te remercie.

On va parler de ton expérience tout au long de cette vie, de cette première fois, de

cette deuxième première fois dans ton histoire, et puis jusqu'à aujourd'hui, voir comment

tu avais évolué, voir où est-ce que tu en étais aujourd'hui, voir ce qu'est peut-être

ce profil pour le futur.

Alors Pierre, est-ce que tu te rappelles de ta première fois ?

Oui, je me rappelle très bien.

Paradoxalement, à mon sens, j'ai eu deux premières fois.

La première, elle se situe vers l'âge de 17 ans environ.

Je suis issu du milieu rural, de la campagne.

J'ai habité pendant 18 ans chez mes parents dans un petit village de 1000 habitants.

Et à cette époque, j'étais au lycée, dans un lycée privé catholique à la campagne,

dans une belle bâtisse avec un immense parc.

Tout allait très bien.

C'est à cette époque que j'ai rencontré Manon, une fille qui habitait dans le village

voisin de celui de mes parents.

Tout allait très bien.

La vie semblait paisible.

On avait une belle bande d'amis, que j'ai toujours d'ailleurs.

On passait toutes nos journées ensemble, nos week-ends ensemble, etc.

Je vais faire une petite coupure.

Mais là, tu me racontes le chemin idéal du jeune homme hétérosexuel de campagne

qui fait sa petite vie.

Sauf que je sais, puisque tu me l'as déjà raconté quand on a préparé cette émission,

que tu savais que tu n'étais pas hétérosexuel depuis ton enfance.

Oui, tout à fait.

Je pense que je l'ai enfoui au plus profond de moi-même dès le début.

Enfin, en tout cas, à partir du moment où je m'en suis réellement rendu compte.

Je m'en suis réellement rendu compte au collège,

lorsque on commence certainement tous à avoir des envies.

Je me suis très vite rendu compte que mes envies allaient vers des garçons

et non pas vers des filles.

Par simple souci de popularité ou même peut-être de normes établies

dans ce milieu-là, dans cet environnement-là.

J'ai choisi de fermer les yeux, de me rassurer,

de me dire que j'étais capable de sortir avec des filles.

Et à l'époque au collège, ça a aussi marqué ta découverte masturbatoire

ou tu as continué à part à avoir ce jardin secret ?

Alors, c'est très bizarre parce que j'ai fait une sorte de blackout de cette période.

Je pense qu'en fait, je me suis un peu obligé à l'oublier

parce que ce n'était pas forcément une période très plaisante pour moi.

Mais en tout cas, au niveau masturbatoire, je pense que déjà,

je pensais à des garçons.

Tu n'étais pas forcé à consommer les mêmes pornos que tes amis ?

Si, j'essayais vraiment de me persuader que j'étais hétérosexuel.

Tu as fait ta propre thérapie conversion.

Tu as essayé de faire ton petit chemin d'hétéro malgré toi.

Et tu te retrouves au lycée, dans cet univers très privilégié,

dans une famille aimante.

Tout à fait.

Une famille très aimante.

Une famille...

Donc, en fait, j'ai un frère et une soeur.

Mon frère est hétérosexuel, a un enfant, etc.

Et ma soeur est lesbienne.

Ma soeur a huit ans de plus que moi et mon frère en a sept.

Donc, à l'époque, en fait, lorsque ma soeur a fait son coming out,

elle avait 18 ans.

J'en avais donc à l'époque neuf.

Et je pense que ça a participé au fait que j'ai fermé les yeux sur mon homosexualité.

En tout cas, que j'ai essayé au maximum de fermer les yeux sur mon homosexualité.

Parce que tu te souviens comment ça s'est passé ce coming out ?

C'était un moment particulier, tout le monde s'est réuni.

Pas du tout.

J'en ai un bon souvenir.

Mon père était au travail.

Mon frère, ma mère et moi, nous étions autour de la table de la cuisine.

Ma soeur est descendue et en fait, ma soeur avait une gourmette au bras

et c'était la gourmette de sa copine.

À l'époque, une mode était que lorsqu'on portait la gourmette de telle personne,

ça signifiait qu'on était en couple avec.

Ma mère a tout de suite fait le rapprochement et de là,

des hurlements ont commencé.

Et puis, c'est un coming out qui s'est très mal passé.

Très mal passé, oui.

En fait, je pense de par le choc de la nouvelle.

Et puis ensuite, du coup, les répercussions ont été sur le long terme

puisque du coup, mon père n'était pas au courant et que du coup,

mon frère, ma mère et moi-même, on devait finalement dissimuler

ce secret de famille au détriment de ma soeur.

En plus, ça avait été quand même relativement délicat pour notre famille.

Et je pense que voilà, moi-même à cette période ou en tout cas,

deux années plus tard, alors que mon père était toujours pas au courant,

sachant que j'avais des attirances pour les garçons.

Tu t'étais dit, c'est un peu trop là.

Complètement.

Tu te retrouves au lycée avec ta bande de potes, donc ta famille,

le contexte particulier de ta famille quand même.

Cette fille, Manon, qui devient ta copine.

Et là, j'imagine que tu reproduis le schéma habituel

où on s'embrasse pour la première fois.

Complètement.

On sort ensemble.

Le schéma totalement hétéronormé, en tout cas celui qu'il y avait dans ma tête,

d'autant plus que c'était quelqu'un qui avait quand même

relativement de l'impact dans notre lycée.

Donc j'étais déjà très fier, très fier d'être à ses côtés.

Et au-delà de ça aussi, très fier d'être en couple avec une fille.

Je sais pas, j'avais vraiment le sentiment d'avoir gagné en popularité,

d'avoir gagné aussi en...

Enfin, je sais pas, j'avais le sentiment vraiment d'être le lycéen cool.

D'avoir trouvé ta place.

Complètement.

Et puis surtout aussi d'envisager mon avenir beaucoup plus simplement.

De me dire que maintenant, tout était acté finalement,

que j'avais ma copine, mon petit quotidien, mes amis

et que tout allait bien se passer.

Donc tu savais que tu allais faire ta première fois avec cette fille-là ?

Pour moi, il n'y avait aucun doute, ça allait être elle et personne d'autre.

Je me posais peut-être même la question d'ailleurs à l'époque,

s'il n'y aurait pas qu'elle finalement dans ma vie.

Ça a été organisé quand par rapport au moment où vous vous êtes mis ensemble ?

Ça a été assez rapide dans votre histoire ou ça a été quelque chose

que vous avez pris le temps de réfléchir ensemble ou de mettre en place ?

Pour elle comme pour moi, c'était donc notre première fois.

On a souhaité vraiment prendre le temps.

Moi, en tout cas, j'ai souhaité prendre le temps déjà par peur.

J'avais une peur immense de découvrir le corps d'une femme,

d'autant plus avec tous les questionnements que je traversais

inconsciemment à l'époque, parce que vraiment,

je pensais pas du tout à mon homosexualité.

Tout bêtement, j'avais peur de bander devant une fille.

J'avais peur de ne pas réussir à bander devant une fille.

Et rien que pour ça, finalement, déjà, il fallait que je tâte le terrain

et que je vois si mon corps n'allait pas lui même me tromper devant elle.

Et ça s'est organisé comment du coup ? Quand est-ce que tu t'es senti prêt ?

Et bien finalement, en fait, ça a été de fil en aiguille.

On a commencé à découvrir nos corps

lorsque les circonstances nous le permettaient.

J'ai eu ma maison libre pendant une semaine

puisque mes parents sont partis en vacances.

Donc Manon était venue passer la semaine avec moi dans cette maison.

On a passé plusieurs nuits ensemble sans que rien ne se passe.

Et puis un soir, voilà, tout s'est déclenché.

C'est à partir de ce moment-là, en fait, qu'on a couché ensemble.

Donc ça n'a pas été planifié ?

Ou tu savais que ça allait se passer cette semaine-là quand même ?

Alors moi, je voulais que ça se passe cette semaine-là.

Enfin, d'abord, pour ma fierté personnelle, c'est peut-être bête à dire,

mais à l'époque, vraiment, j'avais presque envie de m'en vanter.

Bon, finalement, aujourd'hui, avec du recul,

je trouve ça vraiment dégueulasse comme façon de raisonner,

mais je voulais vraiment que ça se produise.

Et puis, ça aurait été vraiment un réel échec pour moi si ça n'aurait pas eu lieu.

Donc, un de ces soirs où vous vous êtes couché ensemble,

comme les autres soirs précédemment, qu'est-ce qui s'est passé ?

Vous avez un peu plus avancé les préliminaires et vous êtes parti.

C'est ça, tout à fait.

Vous avez déjà mis les préservatifs dans la table de nuit, non ?

J'avais mis les préservatifs pas très loin, mais j'en avais du coup jamais mis un.

Et je me souviens que ça a été un petit moment de galère quand même.

Mais on s'en est sorti et voilà.

Qu'est-ce que tu as ressenti du coup devant ce corps de femme que tu appréhendais ?

Il y a eu des découvertes ou tu t'es dit au contraire, bon, en fait, c'est pas si...

Il n'y a pas eu de réelles découvertes.

En fait, très honnêtement, il n'y a pas de réels souvenirs.

C'est ça aussi qui m'a longtemps perturbé.

C'est que j'ai eu très peu de souvenirs de ça.

Finalement, j'ai même pas le sentiment d'avoir vraiment éprouvé du plaisir.

Tu te souviens avoir eu un orgasme ou pas du tout ?

Oui, je l'ai eu.

En tout cas, oui, j'y jouis.

Mais à mon sens, vraiment, c'était ensuite, au fil de mon histoire,

lorsque j'ai réellement connu ce que c'était le vrai orgasme.

Celui-ci, finalement, était fonctionnel.

C'est ça.

Tu as essayé de lui donner du plaisir.

Tu étais engagé là dedans. Tu t'es dit.

Oui, par contre, j'ai toujours eu le souci, le souci de l'autre.

Je voulais vraiment, en fait, penser à elle avant de penser à moi.

D'autant plus pour elle.

Enfin, je considérais vraiment qu'une première fois pour une fille

devait être certainement beaucoup plus difficile à appréhender qu'un garçon.

Et j'ai toujours eu beaucoup de respect pour elle et pour les filles en général.

Et ça me tenait vraiment à coeur de la considérer énormément ce soir là.

C'est quoi le sentiment après ?

Tu t'es senti différent ou au contraire, tu t'es dit.

Ben voilà, c'est la suite de ma vie.

Je me suis senti différent.

Je me suis senti beaucoup plus grand, beaucoup plus mature, plus adulte.

C'était pour moi, en fait, la suite logique de tout ce qui devait se passer.

Et puis, ça me permettait de fermer encore plus les yeux sur mes envies.

Donc, ça ne t'a pas.

Tu t'es pas retrouvé à te prendre en pleine tête le fait

que c'était vraiment pas un truc pour toi.

Tu t'es dit. Pas du tout.

À ce moment là, pas du tout.

C'était pour moi tout tracé.

Je continue mon chemin.

Et du coup, vous avez continué.

Vous êtes resté en couple.

C'est ça. On est resté en couple pendant à peu près un an et demi.

En fait, la rupture s'est apparue au moment de l'enseignement supérieur.

On a tous les deux obtenu notre bac.

On est parti de notre confort de campagne.

On avait eu notre permis de conduire.

On a eu nos appartements.

Et c'est à ce moment là, finalement, que la relation a commencé à se dégrader.

Ben certainement, en fait, pour la simple et bonne raison que je lui apportais,

c'était parce qu'elle cherchait réellement à savoir l'amour.

Enfin, j'ai cru l'aimer.

J'ai pensé l'aimer.

En tout cas, je me suis battu pour.

Mais je me suis ensuite rendu compte que ce n'était pas pour moi.

Tu penses qu'elle l'a senti?

Je pense que je l'ai fait fuir.

Je pense que sans en être réellement conscient, encore une fois,

j'ai fait en sorte qu'elle parte.

Le temps où tu as été avec Manon, tu t'es concentré sur cette partie hétérosexuelle

de ta vie.

Tu t'es jamais permis d'avoir des fantasmes masculins,

d'avoir des masturbations tournées vers les hommes.

Ça a été quelque chose que tu as vraiment mis sous le tapis

pendant ces années là, ou quand même il y a eu des trucs?

Je l'ai mis sous le tapis, mais c'est une certitude qu'il y a eu quand même

quelques quelques trucs.

J'ai aucun souvenir très précis, mais c'est certain que la masturbation,

parfois, ma masturbation, parfois, était en pensant à des garçons.

C'est sûr. Ou en regardant des films pornographiques.

Quand est ce que tu t'es tourné vers les hommes?

Eh ben, je me suis tourné vers les hommes, du coup, à cette période là.

Après ma rupture, voilà, je suis arrivé dans le milieu urbain.

Je me suis pris un raz de marée de nouveautés dans la gueule.

Et puis, c'est là que je me suis dit bon, en fait, c'est peut être le moment

de faire tes découvertes.

Au départ, j'ai eu le souci d'être très, très, très discret.

Voilà, j'avais peur que quelqu'un s'aperçoive,

que je pouvais fréquenter des garçons.

En plus, je vivais en colocation avec deux de mes meilleurs amis.

Donc, tu essayais de te cacher de tes meilleurs amis,

potentiellement de gens qui auraient pu te connaître dans la ville,

de tes collègues de travail, de trucs de tout ça?

Tout le monde.

T'en parlais à qui à l'époque?

À personne.

J'en parlais à moi-même le soir avant de dormir.

Ça doit être la seule personne à qui j'en parlais.

Mais voilà.

Et puis, en fait, du coup, je me suis dit que

le seul moyen de rencontre, mon seul moyen de rencontre,

allait être celui,

enfin, allait être le virtuel finalement.

Parce que pour moi, derrière un écran, c'était beaucoup plus simple

de pouvoir faire des rencontres que physiquement.

D'abord, physiquement, où aller?

Et puis ensuite, quand y aller?

Comment y aller?

T'as pas été dans un club gay?

À cette époque là, c'était inconcevable pour moi.

Et puis au-delà de ça, je me disais, si jamais je rencontre

quelqu'un de mon entourage, comment j'aurais pu justifier cet acte?

Alors, il y a eu une seconde première fois?

À cette période là, du coup, donc, j'étais sur des sites de rencontres.

C'est là que j'ai rencontré Robin, virtuellement d'abord.

On a discuté pendant trois mois ensemble.

Ces trois mois ont été assez lambe d'oeufs.

Finalement, on parlait de la pluie et du beau temps

et on se permettait de se masturber, etc.

En mettant la webcam, en fait, tout simplement, tous les deux.

Pour lui, comme pour moi, rien n'était assumé par rapport à ça.

Tu savais qu'il était gay quand même?

Tu l'avais trouvé comme ça ou pas du tout?

À l'époque, lui comme moi, on se considérait plutôt hétéro curieux.

Un terme qui, aujourd'hui, me ferait vraiment beaucoup sourire.

Mais à l'époque, c'était en tout cas, voilà, comme ça qu'on se définissait.

Finalement, au bout de ces trois mois de relations virtuelles,

Robin, du coup, partait en Australie.

Mon cerveau, sans consulter mon coeur, a décidé de rapidement l'oublier.

En fait, voilà, je suis parti à Saint-Étienne.

J'ai commencé mes études de droit et j'ai continué ma vie.

À cette période là, pendant encore plus d'un an et demi,

j'ai continué à fréquenter des filles,

simplement pour essayer de rester dans la norme établie.

Et au delà de ça, en parallèle, par contre,

je commençais à réellement rencontrer physiquement des garçons.

Il se passait des simples caresses, c'était de la simple masturbation, etc.

Je ne voulais pas aller plus loin parce qu'en fait, à chaque fois

que j'éjaculais, un énorme sentiment de dégoût apparaissait vraiment chez moi,

comme si je devais très rapidement partir, partir de l'endroit où j'étais.

C'était souvent du coucher chez l'autre garçon

et puis tirer un train net sur tout ce qui venait de se passer

et l'oublier très rapidement.

Donc, en parallèle de tes histoires, parfois même en étant en couple avec des femmes ?

Complètement.

Dans leur dos, du coup ?

Complètement.

Par contre, tu ne considères pas que ces échanges sexuels avec des hommes,

qui étaient vraiment des échanges, même non pénétratifs,

étaient comme une première fois ?

Alors non, parce que c'est vrai que pour moi, le terme première fois a un réel sens.

Et pour moi, la première fois, c'est vraiment lorsque le sentiment de l'amour est là.

Et à ces moments-là, je ne ressentais ni le besoin d'être aimé,

ni le besoin d'aimer quelqu'un.

Non, je ne considère pas que tous ces moments-là ont été des premières fois.

Cette période-là a duré un temps.

Donc toi, en couple avec des femmes que tu as présentées,

j'imagine, à tes camarades de fac ou à ta famille, non ?

Si, si, si, tout à fait.

Sexuellement, à cette période-là, tu continues de coucher avec des femmes.

Est-ce que ta sexualité est restée comme elle l'était dans cette première fois

avec Manon ou est-ce qu'au fur et à mesure, tu as commencé à prendre du plaisir

ou à faire des choses qui te donnaient du plaisir avec des femmes ?

Non, toutes ces relations sexuelles restaient, encore une fois, très lambda.

Pour moi, c'était presque qu'une simple finalité,

en fait, qu'un simple acte qu'il fallait faire, que les choses continuent.

Mais on confirmait le couple.

Tout à fait.

Il y a eu une suite à l'histoire avec Robin qui avait donc disparu.

Il est revenu ?

C'est ça.

En fait, lors de ma dernière relation avec mon ex-copine,

on décide de se séparer d'un commun accord.

Il n'y a pas eu de réels soucis,

puisqu'aujourd'hui, c'est l'une de mes meilleures amies pour le coup.

Et en fait, le lendemain matin, je me réveille, je regarde mon téléphone

comme tous les matins en ouvrant les yeux et je me rends compte

que j'ai une demande d'amis Facebook de ce fameux Robin.

Donc là, une montagne de questions m'arrivent en pleine face.

Je me demande d'abord pourquoi il fait ce geste là envers moi.

Et puis, et puis ensuite, je me dis, je commence à avoir peur

à douter aussi de sa sincérité et de son honnêteté.

Et du coup, je commence à avoir peur vraiment de sa démarche.

Au final, je me permets quand même de lui répondre.

Et voilà, je lui écris simplement.

Salut, pourquoi tu m'ajoutes sur sur Facebook d'une telle manière ?

Deux ans après, qu'est ce qui s'est passé ?

Je commence à me répondre naturellement que Facebook l'a mis dans ses suggestions d'amis.

Voilà, je trouve, je trouve ça un peu formidable.

Finalement, c'est vrai qu'on a tendance à cracher sur la gueule

de tous les réseaux sociaux.

On remercie les intelligences artificielles quand même.

Voilà, ça aussi du bon.

Non, dans un sens, du coup, c'est ça qui m'a permis de renouer les liens avec Robin.

Puis voilà. Et puis en fait, à partir de ce moment là,

on a commencé à vachement discuter ensemble.

Encore une fois, virtuellement, on a très vite réinstallé l'application Skype

pour nous permettre de nous revoir.

Et puis du coup aussi, forcément, de passer des moments intimes ensemble.

Encore une fois, virtuellement.

J'imagine qu'à un moment, il y a une rencontre.

À un moment donné, Robin décide de me rencontrer.

À ce moment là, j'étais extrêmement peur, finalement, de le rencontrer.

Je n'osais pas forcément lui permettre de venir chez moi.

Je n'avais jamais permis à personne de venir chez moi dans cette démarche là.

Là, je savais que du coup, il allait falloir le faire

puisque lui habitait sur Lyon et que je ne voulais absolument pas aller à Lyon

pour le rejoindre de toute façon.

De fil en aiguille, Robin me propose une date.

On confirme lors du rendez-vous.

Puis voilà, cette journée arrive.

Et c'est vrai que cette journée a été extrêmement difficile pour moi.

J'ai fabulé pendant bien longtemps.

J'ai eu peur, j'ai été excité.

J'ai vraiment traversé beaucoup d'émotions.

À l'heure du rendez-vous, finalement, je décide d'envoyer un message à Robin

et je lui dis pas ce soir.

Je suis désolé, je peux pas.

Donc lui, il est à Saint-Étienne avec son petit sac.

Exactement. Et comment il réagit ? Mal, logiquement.

Il vient de faire 45 minutes de route pour au final ne pas me voir.

J'imagine à ce moment là que c'est le point final de ce début d'idile virtuel.

Finalement, je commence à culpabiliser.

Du coup, je lui renvoie très rapidement un message pour lui dire

écoute, finalement, on va le faire.

On va se voir, mais ce sera ce sera demain.

Il me faut encore du temps pour y réfléchir.

On refixe lors du rendez-vous.

Et puis voilà, je m'endors assez calmement.

Le lendemain, Robin m'écrie et donc est en bas de mon appartement.

Du coup, je bombarde mon corps et mon appartement de déodorant

et puis je lui ouvre la porte.

À ce moment là, du coup, nos regards se croisent.

Et puis c'est parti pour la rencontre.

On a bu une bière sur mon canapé et puis on a discuté.

J'ai le souvenir qu'il y avait le film X-Men qui passait à la télé.

Je sais pas pourquoi, mais j'ai ce souvenir là en tête.

Et puis, au bout de dix minutes à peu près, Robin décide finalement

de faire le premier pas.

Il tourne mon visage dans sa direction et puis il m'embrasse.

Ça a été, je pense, la première fois de ma vie que j'ai ressenti un réel

sentiment d'amour et d'épanouissement

lors d'un baiser.

Ça a été vraiment quelque chose de très marquant pour moi.

Il m'en reste encore quelques souvenirs en tête

puisque ça a été vraiment très, très marquant.

Et puis voilà, tout se passait très bien.

On découvrait petit à petit nos corps.

On discutait, on essayait d'en apprendre un peu plus sur nous à l'autre.

Tout se passait très bien jusqu'au moment où du coup, je décide de

terminer notre entrevue et que Robin rentre à Lyon.

Alors vous avez fait quoi à ce moment là ?

Tu l'arrêtes en pleine action.

C'est ça, je l'arrête en pleine action.

Je regarde mon téléphone.

Je vois qu'il est tard et je lui dis qu'il est temps de se quitter

et qu'on aura encore beaucoup de temps à l'avenir pour apprendre à se connaître

et partager du temps ensemble.

Mais qu'aujourd'hui, je suis pas prêt à dormir avec un garçon

pour la première fois de ma vie.

C'est de la peur. C'est de la peur.

Et c'est surtout être conscient qu'à partir du moment

où j'aurais dormi avec un garçon, ce sera réellement dans ma tête,

en tout cas, mettre des actes,

mettre des gestes sur le fait que je suis homosexuel.

Alors justement, avant d'entrer dans le vif du sujet,

je vais te poser quelques petites questions

qui vont nous permettre de faire une petite pause d'anticipation.

C'est basé sur le jeu à boire Je N'ai Jamais.

Et donc, je t'invite à me répondre au tac au tac.

Donc, soit tu me dis si tu n'as jamais, si tu as et à fortiori,

si tu as une petite anecdote sur le sujet, c'est encore meilleur.

J'ai déjà éjaculé, du coup, j'imagine que oui.

J'ai déjà, oui.

J'ai déjà eu du souci avec du matériel.

Je n'ai jamais.

J'ai déjà pensé à ma liste de courses pendant le sexe ou un cours de droit.

Un cours de droit, si.

Un cours de droit, oui.

Pourquoi spécifiquement ?

Parce que j'étais dans le stress de mes partiels et je me faisais un peu chier

et que du coup, je me suis dit bon, OK, bah, essayons de mêler l'utile à l'agréable.

Ça a marché ?

J'ai eu des plutôt bonnes notes au partiel, donc peut être que oui.

J'ai déjà pensé à quelqu'un d'autre.

Oui, un ex, en l'occurrence Robin,

avec du coup un autre de mes ex.

Je me suis déjà masturbé dans des endroits pas prévus pour.

Ça peut être lieu public, fac.

J'ai déjà, j'ai déjà.

Où ça ?

Une cage d'escalier de mon immeuble.

T'avais pas le temps de rentrer chez toi ?

C'est ça, l'ambiance est trop présente.

Ça se tient, écoute.

Une masturbation avec quelqu'un ?

Oh, c'était une masturbation avec l'un de mes ex en entrée de soirée.

Certainement, l'alcool a joué un peu et je sais pas.

On n'a pas eu la clé dans la porte.

C'est ça, on n'a pas eu envie de...

C'est le cas de le dire.

On n'a pas eu envie d'ouvrir, d'ouvrir la porte.

C'était bien plus excitant dans le couloir.

C'était bien.

Ouais, c'était sympa.

Alors, on va continuer par les drobins.

Cette espèce de première fois avortée

où tu sais qu'il y a toute cette pression

et que ça représente vraiment un tournant dans ta vie.

Il le sait, lui, il s'en rend compte que c'est dur pour toi.

Est-ce que c'est le même questionnement chez lui ?

Vous en parlez ?

Robin le sait, c'est certain.

Je lui avais tout dit.

Je lui avais tout raconté.

C'était important pour moi, en tout cas, d'être transparent

vers lui par rapport à tout ça.

Chose qu'il a relativement bien compris.

Il n'a jamais été trop envahissant par rapport à ça.

Il a toujours respecté mes choix.

Quand est-ce que tu dis c'est bon, maintenant, c'est le moment ?

Tu laisses passer quelques jours ?

J'y laisse passer quelques jours,

mais je laisse surtout passer plusieurs rencontres.

Il est venu plusieurs fois à Saint-Etienne me voir

et il est rentré plusieurs fois en pleine nuit.

Bredouille.

Bredouille à Lyon.

Quand est-ce que tu dis que tu en as vraiment tellement envie qu'il faut le faire ?

Eh bien, en fait, il n'y en a pas.

C'est lui, finalement, qui va choisir ce moment-là.

En fait, un soir, il vient à Saint-Etienne

et sans me prévenir cette fois-ci, avec des affaires pour dormir.

C'est un peu un ultimatum, parce que si tu le renvoies de chez lui,

ça veut un peu dire...

Tout à fait.

Et en même temps, je pense qu'il avait bien fait de faire cette démarche,

parce que sinon, les choses auraient avancé vraiment au ralenti.

Mon lit était en mezzanine à l'époque, donc je déploie l'échelle

pour monter dans mon lit.

Il me suit, on commence à mettre une série sur Netflix.

Et puis, en fait, on commence du coup, voilà, des préliminaires.

Jusqu'au moment où je sens tout mon corps se réduire.

Je commence à m'effondrer en larmes sans que...

Sans même que je ne puisse respirer et parler.

Une crise d'angoisse ou quelque chose comme ça ?

Oui, une réelle crise d'angoisse.

À ce moment-là, j'étais complètement paralysé dans le lit.

Je pouvais plus rien dire.

Et Robin commençait un peu à paniquer en voyant mon état.

La seule chose que j'ai réussi à dire, c'est part.

Et il est reparti ?

Il est reparti.

Il n'a pas forcément cherché à discuter avec moi.

De toute façon, je pense qu'il avait très bien compris

qu'il n'y arriverait pas, que je ne m'apaiserais pas en fait en sa présence.

Les au revoir étaient déchirants.

Mais voilà, on se serre une dernière fois dans nos bras.

On s'embrasse et puis il part et on ne se dit rien.

Sur la route de son retour, il m'écrit un message et me dit

je comprends ce que tu traverses.

Je l'ai déjà vécu une première fois il y a de ça un an à peu près.

Voilà, il comprenait ce que je vivais en tout cas à ce moment-là.

Il m'a dit de prendre mon temps et qu'il attendrait.

Chose que j'ai faite, j'ai eu beaucoup de mal à me canaliser ce soir-là, à me calmer.

J'ai appelé une de mes meilleures amies pour essayer d'extérioriser tout ça

et de lui en parler.

Je n'ai pas réussi.

J'ai tourné, elle ne comprenait pas réellement mon état,

mais j'ai essayé du coup de le légitimer en parlant

de petits soucis personnels que j'avais à ce moment-là.

Oui, tu as failli faire un coming out et c'est pareil, là, ça s'est dégonflé.

Complètement. Les choses continuent et puis en fait,

on décide avec Robin de prendre le temps et de se laisser un mois de réflexion

sans se revoir, etc.

pour que les choses avancent, mais doucement.

J'ai terminé mes examens et puis du coup, on avait convenu avec Robin

qu'on se retrouverait cette fois-ci à Lyon, chez sa mère,

puisqu'il vivait chez sa mère et que sa mère était en déplacement pour le travail.

Donc je pouvais y aller.

On décide du coup de se retrouver après mes examens.

J'arrive du coup dans sa rue après m'être tapé deux heures de bouchon.

Je découvre finalement son environnement.

Voilà un environnement tout neuf.

Je m'imagine, enfin je l'imagine en tout cas, traverser cette rue tous les matins, etc.

Et puis, voilà, je monte, je monte chez lui.

Il m'ouvre la porte et puis là, vraiment un sentiment d'épanouissement

vraiment total resurgit.

Le même que lorsqu'on s'était quitté finalement.

On se retrouve et puis à partir de ce moment-là, c'est une évidence.

Une évidence pour lui comme pour moi.

Maintenant, on fera la route ensemble.

C'est là qu'elle a eu lieu cette première fois.

C'est là qu'elle a eu lieu cette première fois.

Ça y est, ça s'est passé comment ?

Tout bêtement, il m'a fait visiter son appartement.

On arrive dans sa chambre.

Il a un lit, une place.

Je le regarde du coin de l'oeil en lui disant que ce ne sera pas très simple

du coup pour m'accueillir chez lui à l'avenir ou en tout cas pour dormir.

Enfin que moi, je voulais dormir dans un lit de place et pas à l'une place.

Le regard était complice et on a tous les deux été sur son lit.

Et puis c'était parti.

Il y a eu beaucoup de dialogues, en fait, parce que lui, comme moi,

c'était quand même relativement nouveau.

Personne ne savait si l'autre était passif, était actif.

Vous n'en aviez jamais parlé ?

Absolument pas.

Et du coup, vous vous êtes mis d'accord très vite ?

On s'est mis d'accord très vite dans le sens où je lui ai dit je ne serais pas passif.

Donc c'était très vite choisi.

Finalement, il a accepté.

Et voilà, ça a été ma réelle première fois à mon sens.

Tu as trouvé les gestes facilement ou tu penses que tu as tâtonné ?

Ou comment ça s'est passé ?

Je pense avoir trouvé les gestes facilement.

Le lit de place ne m'a pas aidé.

C'est une certitude.

Je pense avoir trouvé les gestes assez facilement et lui aussi.

Il y a eu beaucoup d'écoute, beaucoup de partage, beaucoup de désir

au vu des circonstances.

Et je pense que ça nous a vachement aidé.

À l'issue de cette première fois, tu as le sentiment que ça y est,

tu as trouvé ta voix, que tu as plus kiffé que toute ton histoire sexuelle précédente ?

Complètement.

J'ai l'impression de réellement commencer ma vie sexuelle à partir de ce moment là.

C'est une certitude.

C'est à ce moment là que je comprends.

OK, j'aime les garçons, je suis gay.

C'est sûr.

C'est pas bisexuel, c'est sûr.

Là, tu sais qu'en fait, tu as mis derrière toi toutes ces histoires de filles.

Exactement.

Ça va avec une façon de vivre aussi, c'est à dire que quand tu fais ce pas

de la première fois avec Robin, tu décides que tu ne feras plus semblant

ou c'est encore un autre chemin qui te reste à faire ?

C'est un autre chemin.

C'est un autre chemin complètement différent.

Sur lequel je ferme les yeux encore.

Je sais que je vais vivre caché avec Robin.

C'est une certitude.

On va vivre caché.

De son côté comme du mien, personne n'est au courant et personne ne le sera.

Ça dure combien de temps cette histoire ?

Cette histoire dure un peu près huit mois.

Avec de la distance, il est parti en voyage durant un mois et demi.

Puis ensuite, on a quand même eu le souci de beaucoup partager.

Bon partager, je m'entends.

À ce moment là, partager pour nous, c'était se retrouver soit chez moi, soit chez lui.

On ne se permettait pas de sortir dans la rue.

On ne se permettait pas de sortir tout bêtement.

Pas de ciné, pas de resto.

Jamais.

Pas peur de croiser quelqu'un ?

Exactement.

Pas peur de croiser soit mon entourage, soit le sien.

Voilà, on vivait dans des cages finalement, la mienne et la sienne,

qu'on partageait de temps en temps.

Le virtuel, j'imagine aussi.

Parfois, rarement, parce qu'on essayait quand même de se voir toutes les semaines, plusieurs fois.

J'ai le souvenir aussi qu'un soir, je devais aller dormir chez lui.

Et en fait, sa mère est arrivée.

Erreur de timing.

Donc, je me retrouvais à Lyon, sans logement,

avec l'envie de le voir.

Au final, on a du coup, enfin, on avait du coup pris la décision de louer un Airbnb

pour quand même pouvoir se voir et partager un moment ensemble.

À ce moment là, quand même, j'étais relativement énervé.

Je me suis dit, putain, qui loue un Airbnb qui dépense 80 balles

pour une nuit avec son copain ?

Vraiment, pour le coup, cet acte là, le fait de simplement louer une chambre

pour se cacher, parce que vous ne pouviez pas vous voir à l'extérieur.

M'a rendu malade.

À ce moment là, ça a changé quelque chose dans toi quand même.

Tu as commencé à te poser des questions, en tout cas, même sur le côté de vivre caché.

Peut être à te dire que ça n'allait pas pouvoir durer éternellement.

Complètement.

Moi, j'étais vraiment dans la démarche de me dire,

ce garçon est fait pour moi et je ferai ma vie avec.

Enfin, j'étais vraiment éperdument amoureux.

Selon moi, j'aurais été prêt à ce moment là, à commencer à en parler autour de moi

pour me permettre de mélanger mon quotidien.

C'est comme ça que j'appelais finalement ma vie avec mes amis et ma famille.

Lorsqu'il n'était pas là, donc mélanger ce quotidien avec ma vie, avec lui.

Et ça ne s'est pas fait. Ça ne s'est pas fait.

Quand votre histoire, elle s'arrête.

Qu'est ce que tu décides de faire?

Tu décides de rester ce que tu es devenu, c'est à dire totalement homosexuel

et tu ne retournes pas en arrière avec des femmes.

Alors non, je ne retourne pas en arrière avec des femmes.

En fait, c'est du coup Robin qui décide de rompre

pour la simple et bonne raison que lui n'était pas dans la voie

de s'assumer ou en tout cas de s'accepter.

Et puis, je ne sais pas.

Je pense qu'il a toujours vu une forme d'échéance à notre relation.

Chose que moi, du coup, je ne voyais pas.

J'étais en week-end au ski avec mes meilleurs amis lorsque du coup,

il m'a annoncé ça par message et qui m'a dit qu'il ne me permettrait pas

ni de me voir, ni qu'on s'appelle ou quoi que ce soit.

C'est une chance définitive à distance.

Voilà. À ce moment là, tu décides d'en parler à tes amis ou pas du tout?

Je me rappelle de m'être effondré au chalet avec tous mes amis.

Mais encore une fois, j'ai été incapable d'en parler.

Donc, tous mes amis se demandaient pourquoi j'étais dans un tel état.

Mais personne n'avait pu réellement savoir la vérité à ce moment là.

Qu'est ce qui a été un déclencheur finalement à ce coming out?

Parce qu'aujourd'hui, t'es out.

Oui. Comment ça s'est passé?

Et bien, c'est finalement cette rupture.

Je suis rentré à Saint-Etienne.

Je me suis dit bon, ben en fait, maintenant, ton seul rempart,

ta seule épaule sur laquelle tu pouvais te reposer à ce moment là,

sur ce sujet là, est partie.

T'es tout seul.

Donc, il est temps de te battre.

Il est temps surtout de comprendre ce que tu es, ce que tu veux avoir dans ta vie.

J'ai eu pas mal d'idées noires à ce moment là quand même.

J'ai vraiment concrétisé le suicide un bon nombre de fois.

Je me suis vachement renfermé sur moi même.

J'ai plus forcément parlé avec ma famille et mes amis, mais

j'ai toujours eu l'espoir de me dire que j'y arriverais.

De fil en aiguille, je commence à me rendre compte que je peux me battre,

d'autant plus en fait, avec l'aide d'une de mes amies.

J'ai une de mes amies de Saint-Etienne qui était venue à mon appartement un soir

en se rendant compte que j'allais pas très bien et que j'allais plus beaucoup en cours.

Elle vient chez moi et elle m'annonce son homosexualité.

À ce moment là, je me suis dit bon, en fait, je suis pas seul

et peut être que je devrais me battre.

C'est elle d'ailleurs qui m'a finalement suggéré l'idée d'aller voir une psychologue.

Dès le lendemain matin, j'ai appelé toutes les psy de Saint-Etienne

pour avoir un rendez vous en urgence.

T'as trouvé quelqu'un avec qui parler de ça du coup ?

J'ai eu la chance, j'ai eu une chance immense de tomber sur quelqu'un de super bienveillant.

À cette époque, j'étais donc encore étudiant.

Financièrement, j'avais la vie étudiante, donc voilà.

Mais je suis tombé sur une psychologue qui était vraiment super,

qui m'a permis, qui m'a même fait un prix sur mes séances

pour pouvoir vraiment faire ce travail là avec moi.

Elle l'a consacré la première fois que je suis allé la voir.

Du coup, ce jour là, elle a consacré à peu près deux heures et demie,

trois heures de son temps après sa journée de travail

pour discuter avec moi sur cette thématique là.

Et t'as tout de suite su le parler ?

Parce que comme t'en avais jamais parlé avec personne, ça a quand même réussi à sortir.

C'est ça.

Oui, je m'en souviens très bien.

Enfin, c'est sorti, mais au bout de bien 30, 45 minutes de pleurs, je pense.

Et en fait, finalement, avant de faire ton coming out,

il a fallu que tu fasses ton propre coming out personnel.

Parce que tu t'étais jamais dit que voilà, c'est ce que t'étais et que ça allait aller.

Il était temps que je voie la vérité en face.

C'était le moment.

Ça a duré combien de temps, cette thérapie ?

Ou peut-être que ça continue encore d'ailleurs.

Cette thérapie a duré juste le temps que j'étais sur Saint-Étienne.

Donc vu que c'était ma troisième année, en fait, il ne me restait que quelques mois.

J'ai dû faire à peu près six séances environ et ça a duré cinq mois environ.

Tu as le sentiment que ça t'a lancé pour faire ton coming out, du coup,

pour en parler à d'autres gens ?

Totalement. Déjà, ça m'a permis de me comprendre moi-même.

Ce que tu disais tout à l'heure, finalement, j'ai fait d'abord mon coming out personnel.

Rien que ça, en fait, ça m'a lancé.

Ça m'a totalement lancé dans la démarche d'ensuite pouvoir en parler et le vivre pleinement.

À ce moment-là où tu allais très mal, t'as arrêté de voir des gens

ou tu as quand même essayé de draguer un peu, même virtuellement ?

Non, non.

T'étais vraiment refermé.

À ce moment-là, j'ai arrêté de voir des gens, mais pire encore,

je ne voyais presque plus ma famille et mes amis.

Ça les inquiétait ?

Il y a eu à ce moment-là une recherche de dialogue

ou d'essayer de comprendre pourquoi tu n'allais pas bien ou pas trop ?

Je fuyais ces discussions-là.

Avec mes parents, j'ai été très difficile.

J'ai été presque méchant, je pense.

Et avec mes amis, en fait, mes meilleurs amis qui habitent du couvert chez mes parents

ou qui vivaient sur Lyon pour leur vie étudiante,

en fait, je leur disais que j'ai resté à Saint-Étienne avec mes amis de Saint-Étienne.

J'avais pas mal d'alibi, finalement.

Pour te cacher un petit peu plus.

Tout à fait.

On va faire une petite pause, on va se poser d'autres questions,

on va apprendre à se connaître un petit peu mieux.

J'ai envie de parler des oeuvres qui ont accompagné ton imaginaire

sexuel, sensoriel, sensuel.

OK.

Alors, du coup, c'est une série de questions sur différents modèles culturels.

Quel est le livre qui t'excite ?

Il n'y a pas réellement de livre qui m'excite.

Je dirais que le livre qui, par contre, a réveillé beaucoup d'émotions chez moi

et a eu vraiment une réelle importance, c'est le livre

Arrête avec tes mensonges de Philippe Besson.

Voilà, Philippe Besson, à travers ce livre, aborde la thématique de l'amour secret,

de l'homosexualité, du coming out.

L'amour secret et la campagne en plus.

C'est ça, du clivage entre le milieu urbain et le milieu rural.

C'est à la période où je n'allais pas bien que j'ai découvert ce livre.

C'est un livre très court et très introspectif sur lequel l'auteur fait

vraiment un chemin à travers son enfance et son adolescence.

C'est le moment où il s'est construit.

J'imagine qu'effectivement, en tant que jeune qui est en train d'essayer

de lutter contre soi-même et en plus, il parle de deux personnages

qui ont deux chemins très différents.

Ça a dû être un choc.

C'est ça, vraiment le sentiment de se retrouver,

en fait, finalement, à travers le personnage principal.

Je pense qu'il a vraiment...

Enfin, je pèse mes mots, mais je pense qu'il m'a un peu sauvé la vie, ce livre.

Philippe Besson a finalement eu un peu la même histoire que moi.

En tout cas, j'ai eu ce sentiment là, à ce moment là.

Même si chaque histoire est différente et non, c'est un réel échappatoire.

Surtout que comme il aborde le fait qu'il y a un vrai aspect tragique à son histoire.

Ça ne cache pas le fait que vivre au cachet toute sa vie

est source d'une souffrance qui peut mener à des extrémités vraiment dramatiques.

Donc, voilà, c'est un livre comme un couperet presque.

C'est vraiment très, très court.

Et pour ceux qui ne le connaissent pas, c'est vraiment un livre à découvrir.

Le film qui me fait vibrer ?

Alors, le film qui me fait vibrer, je pense que c'est Seule la Terre.

Donc, c'est un film britannique pas très connu qui, en fait, aborde encore une fois,

du coup, puisqu'on est dans le thème, j'y vais jusqu'au bout,

la thématique de l'homosexualité, mais cette fois-ci, du coup, dans le milieu rural

et en particulier à travers le monde agricole.

Je m'y retrouvais bien aussi, puisque du coup, mes parents sont agriculteurs

et il y a une scène, il y a une scène de sexe

entre deux hommes dans une grange, dans la boue,

extrêmement charnelle que j'ai trouvé dingue.

C'est un film que tu as découvert comment ?

Par le biais de ma coloc à l'époque,

qui est l'une de mes meilleures amies, qui m'a dit

j'irais bien voir un film d'arrêt essai au cinéma de Lyon.

Je lui ai dit d'accord, ok, j'y vais.

Et puis du coup, en fait, je suis tombé sur ce film totalement par hasard.

L'image qui te donne des frissons de plaisir ?

Je n'ai pas réellement d'image qui va me donner des frissons de plaisir.

En fait, je suis passionné de photos.

J'en fais beaucoup maintenant.

Je ne saurais pas dire vraiment une photographie en particulier,

mais je considère vraiment...

Moi, je fais beaucoup de portraits et je considère que vraiment le portrait,

c'est la manière finalement de faire ressortir les émotions

et le passé d'une personne sur photo.

La musique qui me met le mieux dans l'ambiance ?

Celle qui m'a mis le mieux dans l'ambiance.

Encore une fois, je vais rester quand même dans la thématique du coming out.

Celle qui me met le plus dans l'ambiance, c'est vraiment grave,

de Hedy Depredor.

Qui a beaucoup parlé, en effet,

vraiment avec beaucoup de délicatesse et de force

du fait d'être gay et de l'assumer, même dans des milieux où ce n'était pas

forcément évident.

J'imagine que ça a beaucoup parlé à beaucoup de jeunes gays

quand l'album est sorti.

C'est ça, tous ces textes.

Je pense qu'en même temps, il y a une énergie de dingue quand il est sur scène

et du coup, c'est extrêmement sensuel.

C'est quelqu'un qui est vraiment une sorte de violence comme ça,

de violence sensuelle.

C'est ça. Je suis allé le voir en concert en plus à Lyon.

Il est génial en concert.

Il est génial.

Le parfum qui réveille mes sens ?

Je dirais Hadzaro.

Et c'est tout simplement parce que Robin le portait.

C'est une très bonne notion.

Je saurais le sentir à des kilomètres à la ronde.

Et ça ne t'a pas dégoûté dans le sens où si tu le sens sur quelqu'un d'autre,

ça te bloque ?

Ah non, au contraire.

Ça me rappelle du coup des passages très agréables que j'ai vécu.

À noter pour tes prochains Mac, du coup.

C'est le bon plan.

C'est la bonne info.

Ta relation avec Robin, très passionnée au long cours

et qui accompagne ton chemin personnel sur ce coming out et sur ton identité,

s'arrête.

Tu finis par travailler seul,

en compagnie quand même du coup d'une psy et d'une amie.

Quand est-ce que ça s'arrange ?

Quand est-ce que tu dis, c'est bon, j'ai assez avancé ?

Qu'est-ce qui se passe ? T'es un autre homme ?

C'est ça.

Du coup, j'ai réussi à en parler à l'une de mes amies.

Plus encore, de fil en aiguille, j'ai réussi à en parler

à l'une de mes tantes maternelles de qui je suis très, très proche,

qui m'a d'ailleurs permis d'avoir un accès à la culture assez dingue.

Je dois beaucoup à ma tante maternelle qui est célibataire

et qui est vraiment extraordinaire.

Et donc voilà, j'arrive sur Lyon,

je termine ma licence de droit à Saint-Etienne,

je rentre en master, j'ai un nouvel appartement.

Tout a l'air très cool finalement.

Et du coup, je me dis, voilà, même ta vie privée, elle est cool.

Et il n'y a pas de raison que tu n'y arrives pas.

Donc, continue à te battre.

Et continue surtout à comprendre ce que tu es,

ce que tu souhaites avoir.

Et puis, tout se passera bien.

Tu rencontres Hugo.

Alors, du coup, je décide de me mettre sur des applications de rencontres.

Donc après les applications de rencontres gays connues de tous,

en tout cas de ceux qui fréquentent ce milieu là.

Grindr.

Grindr, Tinder.

Donc je découvre Grindr et je découvre aussi ce milieu complètement nouveau pour moi.

Je découvre surtout que finalement,

il y a beaucoup de diversité au sein de cette application.

Je me rends compte surtout aussi qu'il y a beaucoup de personnes cachées

qui cherchent des relations souvent, du coup,

uniquement des relations sexuelles très discrètes.

Je me rends compte qu'il y a des personnes souvent mariées ou en couple.

Je me rends compte que voilà, il y a des personnes de toute religion, de tout milieu.

Je suis quand même assez perplexe.

Assez perplexe de la crédibilité de ces applications

et surtout aussi de la finalité en fait.

Je me rends compte que sur Grindr par exemple,

j'ai vraiment le sentiment qu'il y a une finalité qui est uniquement sexuelle.

Moi, j'arrive en me disant bon, je vais bavarder avec un peu n'importe qui.

Bon, je comprends très vite que finalement, c'est pas dans cette direction là.

C'est plutôt cash quand même les conversations sur Grindr.

On est sur quelque chose de plutôt cash, ouais.

Après, il y a des exceptions à tout, mais voilà.

Et tu pratiques, t'essayes un peu le plan cul Grindr en dix minutes ?

Tu t'essayes ?

J'ai eu à essayer et finalement après, personnellement en tout cas,

je me suis rendu compte que c'était pas quelque chose qui me convenait,

mais j'ai essayé, bien sûr.

De toute façon, j'ai essayé beaucoup de choses finalement

parce que je me devais d'expérimenter,

de connaître ce monde qui était complètement nouveau pour moi.

Je me suis vraiment rendu compte que finalement,

t'arrives dans le milieu gay, mais en fait, tu ne connais rien.

L'éducation sexuelle que tu as eu au collège,

on ne te parle même pas d'homosexualité.

Au-delà de ça, même par rapport aux maladies sexuellement transmissibles,

j'ai pas le souvenir qu'on nous en ait parlé.

Je ne savais même pas à l'époque que la fellation

pouvait être un moyen de transmission pour certaines MST.

Même un jargon du coup, homosexuel, qu'il faut apprendre.

Comme quoi ?

Barbec' par exemple.

Bon, une pratique que je ne pratique pas pour le coup, mais...

Qui est le sang capote.

Voilà, qui est le sang capote.

Qui, je me permets de le dire, que je trouve réellement dangereuse,

mais qui est vraiment une pratique que chacun est libre de faire ce qu'il souhaite.

Donc voilà, moi maintenant, je ne me la permets pas.

Puis après, il y avait ça.

Il y avait du coup après le terme actif, passif, mais bon,

qui s'apprend vite quoi.

On comprend vite ce que c'est.

Donc actif, c'est ceux qui sodomisent,

et passif, c'est ceux qui reçoivent la sodomie.

Exactement.

On va préciser pour ceux qui ne savent pas.

Tout à fait.

Donc tu débarques dans ce milieu-là, tu n'y connais rien,

mais tu apprends sur le tas.

Voilà.

Et c'est là que tu rencontres Hugo ?

C'est là que je rencontre Hugo du coup, sur l'application.

Je trouve ça assez marrant parce qu'en fait,

c'est une personne qui travaille pas très loin de chez mes parents.

Voilà, je trouve la situation cool.

Ça m'a l'air d'être quelqu'un assez sain.

Je me permets de discuter avec lui et je me permets de lui proposer qu'on se rencontre.

On se rencontre quelques jours plus tard chez lui.

Encore une fois chez sa mère.

Je ne sais pas ce que j'ai eu à ce moment-là, mais c'était chez sa mère.

Bien sûr, on n'était que tous les deux.

Et donc pareil, lui, pour lui, de son côté, personne ne le savait.

Ça m'arrangeait bien quand même.

Et puis, on a discuté sur son canapé pendant quelques heures.

Et puis ensuite, on a essayé de se faire comprendre qu'on se plaisait,

qu'on avait envie de l'autre.

Et puis, on a pris la direction de sa chambre.

On a couché ensemble encore une fois.

Toi, toujours actif ?

Toujours actif.

Tout s'est bien passé en soi.

Je n'ai pas eu le sentiment d'être très performant

parce qu'en fait, tout était encore nouveau pour moi.

Je n'avais jamais rencontré quelqu'un.

Je n'avais jamais parlé deux heures avec une personne et puis directement couché avec.

Je n'étais pas amoureux.

Je ne connaissais même pas l'environnement, cet endroit où j'étais.

À l'époque, j'étais encore vraiment novice, entre guillemets.

C'est vrai que ça fait bizarre.

On ne sait pas trop ce qu'on fout là.

Tu ne te regrettes pas ?

Je ne regrette pas.

Vous vous êtes mis en couple ou pas du tout ?

Du coup, puisque de son côté, ce n'était pas du tout assumé,

que moi du mien, ça l'était, mais partiellement.

En fait, on n'a pas décidé de se mettre en couple.

Enfin, je n'ai rien décidé du tout d'ailleurs.

Moi, tout de suite après, en fait, cette rencontre,

pour vous dire à quel point j'étais vraiment un peu dans le standard du

« on se rencontre, on couche ensemble, ok, on se met ensemble ».

Moi, directement après, on a rediscuté après l'acte tout de suite.

Et puis moi, je vais directement proposer qu'on se mette ensemble.

Et il a éclaté de rire ?

Pas loin, mais non, ça va, il va un peu plus respecter.

Mais en tout cas, il a bifurqué.

Il n'a pas répondu à cette question et il l'a évité.

Mais vous avez quand même eu une forme de relation dans le sens où il t'a un peu accompagné.

On a eu une forme de relation, c'est certain,

dans le sens où ça a été le premier avec qui j'ai partagé.

Ça a été le premier avec qui je suis sorti au cinéma.

Ça a été le premier avec qui je suis allé au restaurant.

On a quand même réussi un peu à se sortir de notre confort,

même si on allait au cinéma qui était à l'opposé de Lyon.

Et genre à 11h le soir, en pleine nuit, personne ne te voit.

Non, on allait vraiment...

Par exemple, nous, on habite plutôt à l'ouest.

On allait complètement à l'est de Lyon pour ne croiser personne.

Mais comment tu te sentais après toutes ces premières fois ?

Comment on se sent ? On est content ?

On fait un high five à soi-même et on se dit « ouais, je l'ai fait ».

On est content et en même temps, non.

En fait, je pense qu'on est surtout déçu de se dire qu'on fait extrêmement attention

à l'environnement qu'on a autour de nous.

C'était il y a combien de temps ?

C'était il y a deux ans et demi.

Donc 2016-2017.

Et on est encore en train de dire que tu as quand même eu un cap

où tu as eu peur d'aller au restaurant ou peur d'aller au ciné.

Complètement, complètement.

Après, Hugo avait une carrure, il mesure 1m93

et il a une carrure relativement musclée.

Donc je ne me faisais pas trop de soucis par rapport aux autres.

Mais c'était surtout plus est-ce que quelqu'un de mon entourage

qui n'est pas au courant va arriver ou du sien ?

Et puis, on ne se permettait pas de toute façon.

Je pense que tous les gens autour de nous pensaient qu'on était de simples amis,

je pense, parce qu'on ne se donnait jamais la main, on ne s'embrassait jamais.

J'ai le souvenir que lorsqu'on s'embrassait, c'est parce qu'on en mordait d'envie

et qu'on arrivait au garage souterrain de la ville pour aller chercher notre voiture

et qu'on le faisait dans la voiture.

Après, voilà.

Non, tout a continué jusqu'au moment où finalement,

on s'est rendu compte que la relation n'avançait pas.

Je me suis surtout rendu compte que lui

continuait à parler avec d'autres garçons sur les applications.

Tu t'es dit on va arrêter là les frais et on va chercher quelqu'un d'autre.

Je me suis dit que du coup, c'était pas forcément quelqu'un fait pour moi.

Et puis qu'au-delà de ça, les efforts unilatérals, ça va cinq minutes.

J'en avais déjà fait l'expérience avant, donc je ne voulais pas refaire la même erreur.

Qu'est-ce que tu as fait ensuite ?

J'ai continué à croire en l'amour.

J'ai rencontré beaucoup de garçons.

Pour être honnête,

j'ai vraiment eu le besoin d'aller à la rencontre de ces personnes

et de savoir aussi qu'est-ce que moi, je voulais finalement.

En fait, j'ai bu beaucoup de verre avec beaucoup de gens.

Ça a toujours été des moments très cool.

Bon, on connaît tous la situation un peu malaisante du date qui ne matche pas trop

et où là, du coup, on essaye d'être expéditif.

Mais j'ai quand même rencontré de très belles personnes.

J'ai finalement très peu été célibataire, en fait,

pendant toutes ces années jusqu'à aujourd'hui.

Oui, donc dans tout chemin où tu as rencontré plein de gens,

ça nous amène aujourd'hui.

C'est ça.

Et alors, c'était quand cette dernière fois ?

Et bien, cette dernière fois, elle était lundi.

C'était comment ? C'était avec qui ?

C'était avec un garçon avec qui je parle depuis quelques mois

et avec qui je m'entends bien.

L'enjeu, absolument pas de se mettre en couple de son côté comme du mien.

Mais voilà, on s'apprécie beaucoup et il est passé chez moi.

On peut appeler ça un plan cul.

C'était bien ? C'était cool.

T'es toujours exclusivement actif ou il y a un petit peu de changement de ce côté là ?

Alors, je me suis permis d'essayer d'être passif, mais c'est pareil.

Ça imposait beaucoup de questionnements pour moi, même des trucs cons,

mais même au niveau de l'anatomie, etc.

Je voulais vraiment comprendre tout ce qui se passait.

Et au final, j'ai essayé.

Pour l'instant, je ne ressens pas l'envie ni le besoin.

Ça n'a jamais été quelque chose qui m'a réellement procuré du plaisir.

Donc pour l'instant, je suis plus actif que passif.

Après, voilà, je veux dire, j'ai une vie entière pour changer la vie

ou pour découvrir de nouvelles choses.

Donc tu es dans une phase de célibat,

mais encore récemment, tu as été en couple longue durée avec quelqu'un.

J'ai été en couple pendant sept mois et avec une personne cette fois-ci

qui, du coup, avait fait son coming out auprès de tout son entourage.

Moi, du coup, aujourd'hui, c'est le cas aussi.

Tout mon entourage familial, amical, tout le monde est au courant.

Donc on a pu réellement vivre notre relation.

En tout cas, moi, pour la première fois de ma vie, j'ai pu vivre une relation

pleinement épanouie et surtout sans secret.

Ça a été vraiment sept mois de bonheur.

Tout a été trop cool. On a fait plein de choses.

J'ai pu partir au ski avec lui et mes amis.

J'ai pu partir au ski avec lui et ses amis.

J'ai rencontré sa famille et ça a été vraiment des super moments.

Ça m'a prouvé finalement que la simplicité pouvait encore exister et pouvait exister,

même dans le milieu homosexuel, dans le milieu gay.

Maintenant, je dirais qu'il y a toujours une forme un peu de spontanéité

qui n'existe pas, malheureusement.

Et ça me tient à coeur de témoigner de ça.

Avec mon dernier copain, on a toujours fait attention

et prêté attention au regard des autres dans la rue

ou lorsqu'on se donnait la main à Lyon, etc.

On fait toujours attention avant de se donner la main ou de s'embrasser,

de regarder tout autour de nous si l'environnement nous paraît propice à un tel acte.

Voilà, on est confronté dans les médias à beaucoup d'agressions homophobes.

Les choses avancent, mais peut-être pas assez vite.

La question est même, est-ce que finalement les choses avancent ?

Mais voilà, ça nous enlève de la spontanéité.

Ça nous enlève. Tout est calculé.

Finalement, tous ces gestes de tendresse qui devraient être naturels ne le sont plus.

Et ça, par contre, je trouve que c'est vraiment bâché, en fait.

C'est un truc qui est encore difficile pour toi.

Oui, par contre, du coup, le couple au grand jour, c'est un truc auquel t'aspires,

auquel tu veux.

Et puis, au-delà de ça, je me permettais de lui donner la main.

Je me permettais de l'embrasser et je me le permettrais toujours.

Ça fait du bien, cette liberté ?

Complètement.

Et puis, je me réduirais jamais à la violence

qui peut être faite par les personnes homophobes.

Comment tu vois aujourd'hui ton parcours ces dernières années ?

Du coup, de ta période hétéro, entre guillemets, à aujourd'hui ?

J'ai du mal à croire que c'est moi.

J'ai du mal à croire que c'est ma vie et j'ai du mal à croire

que j'ai réussi à faire tout ça.

Ça m'a pris énormément de temps, énormément de force aussi.

Il y a eu quand même beaucoup de fois où j'ai eu envie de baisser les bras

ou alors, en tout cas, où j'ai été assez triste.

Mais je reviendrai toujours à la conclusion que je suis tellement heureux

dans ma vie maintenant et que je referais exactement les mêmes choses

si je devais les refaire.

C'est une belle conclusion.

J'aime bien.

En plus, ça veut dire que ta vie commence aujourd'hui presque, tu vois ?

C'est une renaissance.

Je le dis des fois.

Je dis que j'ai commencé à vivre finalement depuis peu.

20, 21 ans.

C'est beau.

J'aime beaucoup ça. On va garder ça comme conclusion.

Merci. Merci.

C'était Première Dernière Fois.

Si ce podcast vous a plu, n'hésitez pas à lui mettre cinq étoiles

et à nous laisser un commentaire.

Tous les autres épisodes de Première Dernière Fois

sont à retrouver sur Slate.fr et sur votre application de podcast préféré.

Merci à toutes et à tous et à très bientôt.

Sous-titrage ST' 501