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Little women ''Les quatre filles du docteur Marsch'', Confidences XX

Confidences XX

XX

Confidences

Je n'essaierai pas de raconter la réunion de Mme Marsch et de ses filles ; des heures semblables sont belles à vivre, mais très difficiles à décrire. Ainsi je laisserai à l'imagination de mes lecteurs et de mes lectrices de se représenter la rentrée de cette mère dans sa maison. Je dirai seulement qu'il avait suffi d'une heure pour que la tristesse qui l'avait remplie se fût changée en bonheur.

L'espérance de Meg s'était réalisée, car, lorsque Beth était sortie de son long sommeil, sa vue s'était portée tout d'abord sur sa mère et sur la petite rose de son rosier. L'enfant était trop faible pour s'étonner de rien. Elle sourit en retenant sa mère sur son coeur quand elle se pencha sur elle pour l'embrasser. Elle sentit vaguement que son plus grand désir était enfin satisfait, et elle se rendormit en gardant tendrement la main de Mme Marsch dans la sienne.

Les deux soeurs furent obligées de donner la becquée à leur mère, qui ne voulait pas retirer sa main à Beth de peur d'interrompre son sommeil. Elles lui servirent le déjeuner le plus magnifique du monde. Hannah avait trouvé impossible de ne pas manifester sa joie de cette manière. Leur mère leur raconta à voix basse l'état de leur père ; la promesse que M. Brooke avait faite de rester aussi longtemps qu'il aurait besoin de ses soins ; les retards qu'une très violente bourrasque de neige avait apportés à son voyage, et l'inexprimable soulagement que la vue de la figure de Laurie lui avait donné quand elle était arrivée, harassée de fatigue, d'anxiété et de froid.

Combien la journée paraissait agréable et nouvelle aux habitants de la maison Marsch ! À l'extérieur, tout était gai et bruyant ; tout le monde célébrait la fête de la première neige, mais, au dedans, quel calme ! Tous les habitants, épuisés par les dernières veilles, dormaient encore profondément pendant que Hannah montait la garde à la porte.

Meg et Jo fermèrent leurs yeux fatigués avec le sentiment d'un allégement inespéré au fardeau de leurs peines. Elles se reposèrent comme des barques battues par l'orage, qui viennent enfin de trouver un abri sûr dans une baie tranquille. M me Marsch ne voulut pas quitter sa Beth d'une minute ; elle dormit dans le grand fauteuil, s'éveillant souvent pour regarder sa fille comme un avare qui a retrouvé son trésor.

Pendant ce temps, Laurie fut envoyé à Amy, et il lui parla si bien que tante Marsch eut une larme dans les yeux et ne gronda pas une seule fois.

Amy se montra forte dans sa grande joie. Évidemment les bonnes pensées de sa petite retraite commençaient déjà à porter ses fruits : elle sécha vite ses larmes, ne montra pas son impatience de voir sa mère et ne pensa pas une seule fois à la bague, quand Laurie, ayant trouvé qu'elle se conduisait comme une brave petite femme, la tante Marsch répondit qu'elle était tout à fait de son avis. Polly lui-même semblait impressionné, et il lui dit : « Dieu vous bénisse ! » de son ton le plus affable.

Amy serait très volontiers sortie pour jouir du beau temps d'hiver ; mais, devinant que Laurie mourait de sommeil malgré les efforts héroïques qu'il faisait pour le cacher, elle l'engagea à se reposer sur le sofa, pendant qu'elle allait écrire à sa mère. Elle resta longtemps, et, quand elle revint, elle trouva son jeune ami dormant encore d'un sommeil réparateur. Tante Marsch avait eu un accès extraordinaire d'amabilité : elle avait baissé les rideaux afin de mieux le laisser reposer.

Au bout de quelque temps, elles commencèrent à penser que Laurie dormirait jusqu'au soir, et je ne suis pas bien sûr que cela ne fût pas arrivé s'il n'eût été réveillé par un cri de joie qu'Amy poussa en voyant entrer sa mère. Il y avait probablement au monde beaucoup de petites filles heureuses ce jour-là ; mais mon opinion particulière est qu'Amy était la plus heureuse de toutes, lorsque, assise sur les genoux de sa mère, elle raconta ses peines et reçut des consolations et des compensations sous forme de sourires et de caresses. Elle conduisit sa mère dans sa petite retraite, et lui expliqua son but en lui demandant si elle n'avait pas d'objections à y faire.

« Au contraire ; j'aime beaucoup votre idée, chérie, dit Mme Marsch en examinant le petit livre de prières à la couverture usée et le beau tableau entouré d'une guirlande de houx. C'est une excellente idée que d'avoir un endroit dans lequel on puisse se réfugier lorsqu'on est affligé. Il y a bien des moments difficiles dans la vie, mais nous pouvons toujours les rendre supportables si nous cherchons de l'aide du bon côté. Je pense que ma petite Amy commence à l'apprendre.

– Oui, mère, et j'ai l'ambition, lorsque je reviendrai, d'arranger un petit coin du grand cabinet et d'y mettre mes livres et la copie que j'ai essayé de faire de ce tableau. La figure de la mère n'est pas réussie ; elle est trop belle pour que je puisse la copier convenablement, mais l'enfant est mieux, et je l'aime beaucoup. »

Comme Amy montrait du doigt l'enfant Jésus souriant sur les genoux de sa mère, M me Marsch vit, sur la main levée, quelque chose qui la fit sourire. Elle ne dit rien, cependant, mais Amy comprit son sourire et dit gravement au bout d'une minute de silence :

« Je voulais vous en parler, mais j'ai oublié. Tante m'a donné aujourd'hui cette bague ; elle m'a appelée vers elle, m'a embrassée et me l'a passée au doigt en me disant qu'elle m'aimait beaucoup et qu'elle désirerait me garder toujours. Elle a mis de la soie autour pour la faire tenir parce qu'elle est trop grande. Puis-je la mettre, mère ?

– Elle est très jolie, mais je vous trouve un peu jeune pour des ornements semblables, Amy, dit Mme Marsch, en regardant la petite main qui portait au doigt du milieu une grosse bague formée d'une rangée de turquoises.

– J'essayerai de ne pas en être orgueilleuse, reprit Amy ; je ne crois pas que je l'aime seulement à cause de sa beauté, mais aussi parce que je voudrais la mettre comme la petite fille de l'histoire mettait son bracelet, pour me rappeler...

– Tante Marsch ? demanda sa mère en riant.

– Non ; pour me rappeler de ne pas être égoïste. »

Amy paraissait si sérieuse que sa mère cessa de rire et écouta respectueusement son petit projet.

« J'ai beaucoup pensé dernièrement à mes défauts, et j'ai trouvé que l'égoïsme en forme la plus grosse part ; aussi je vais faire tous mes efforts pour m'en corriger, si je peux. Beth n'est pas égoïste, et c'est pourquoi tout le monde l'aime et a eu tant de chagrin à la pensée de la perdre. On n'aurait pas la moitié autant de chagrin pour moi si j'étais malade, et je ne le mérite pas non plus ; mais, comme je voudrais être aimée et regrettée, je vais tâcher de faire comme Beth. J'oublie facilement mes résolutions ; mais, si j'avais toujours quelque chose sur moi pour me rappeler celle-ci. Il me semble que j'avancerais plus. Puis-je essayer de cette manière ?

– Oui ; mais j'ai plus de confiance dans la retraite du grand cabinet. Gardez votre bague, chérie, et faites tous vos efforts. Je pense que vous réussirez, car le désir sincère d'être bonne est la moitié du succès. Ne vous découragez pas, petite Amy, nous vous reprendrons bientôt à la maison, vos soeurs seront si heureuses de vous revoir. »

Le soir de ce jour-là, quand Meg écrivit à son père pour lui annoncer l'heureuse arrivée de sa mère, Jo se glissa dans la chambre de Beth, et, trouvant sa mère dans sa position habituelle, resta à tortiller ses cheveux d'un air troublé et indécis.

– Qu'est-ce que c'est, chère Jo ? demanda Mme Marsch en lui tendant la main d'un air qui invitait aux confidences.

– Je veux vous dire quelque chose, mère.

– À propos de Meg ?

– Comme vous devinez vite ! Oui, c'est sur elle, et quoique ce ne soit pas grand-chose, cela me trouble.

– Beth est endormie, parlez bas et racontez-moi tout. »

Jo s'assit sur le parquet, aux pieds de sa mère.

« L'été dernier, dit-elle, Meg a laissé une paire de gants chez M. Laurentz, et on ne lui en a rendu qu'un. Nous avions complètement oublié ce gant perdu, lorsque Laurie m'a dit l'autre jour que M. Brooke l'avait. Il le garde dans la poche de son habit et l'a laissé tomber une fois ; Laurie l'a vu et M. Brooke ne lui a pas caché que Meg lui plaisait. Il a sans doute ajouté qu'elle était si jeune et lui si pauvre qu'il n'oserait jamais le déclarer ; mais c'est égal, c'est terrible ! »

Décidément, Jo ne pouvait pas se mettre dans la tête que Meg elle-même et ses soeurs seraient jamais en âge de se marier, et que cela pourrait bien leur arriver comme à tant d'autres.

« Pensez-vous donc que Meg ait remarqué M. Brooke plus que toute autre ? demanda Mme Marsch.

– Miséricorde ! Je ne connais rien à toutes ces bêtises-là, s'écria Jo avec un mélange d'intérêt et de mépris. Dans les romans que j'ai lus chez ma tante, les jeunes filles tressaillent, rougissent, s'évanouissent, maigrissent et agissent comme des folles. Maintenant, Meg ne fait rien de tout cela : elle mange, boit et dort comme une personne raisonnable ; elle me regarde en face quand je parle de notre ami M. Brooke, et rougit seulement un peu quand Laurie fait des plaisanteries. Je le lui défends bien, mais il ne m'écoute pas toujours comme il le devrait. Laurie me donne quelquefois bien du mal. Cependant on prétend que je suis la seule qui puisse venir à bout de lui, quand il est pris par ses entêtements. »

Mme Marsch sourit de cet incident dans la conversation de Jo, mais, la ramenant au sujet principal :

« Alors vous imaginez que Meg ne s'intéresse pas à John ?

– À qui ? demanda Jo en regardant sa mère avec étonnement.

– M. Brooke. Votre père et moi l'appelons John maintenant, comme nous avons fini par dire ici Laurie tout court, pour répondre au dévouement qu'il nous montrait ; nous en avons pris l'habitude à Washington, au chevet de votre père, qu'il ne quittait guère, le brave jeune homme.

– Oh ! mon Dieu ! Vous allez prendre son parti ! Il a été très bien pour père, et, je le sais, à cause de cela vous ne le renverrez pas ; vous le laisserez épouser Meg, si elle y consent. Que c'est mal à lui d'être allé près de papa pour vous forcer à l'aimer ! »

Et Jo se passa la main dans les cheveux d'un air désespéré.

« Ne vous troublez pas, ma chérie. Tout cela est une suite naturelle des circonstances où nous nous sommes trouvés. M. Brooke est, vous le savez, venu avec moi, à la demande de M. Laurentz. Il a été si parfait pour votre pauvre père que nous n'avons pu nous empêcher d'en être touchés et de beaucoup l'aimer. Ma pauvre Jo, si vous l'aviez vu veiller nuit et jour votre père mourant, admirable de soins et d'une bonté qui ne se dément jamais, vous l'auriez aimé plus que nous, car ce qui est bien vous touche peut-être encore plus vivement. Il a été, en ce qui concerne Meg, très honorable et très sincère. Il nous a dit qu'il serait bien heureux de pouvoir un jour devenir notre fils, mais qu'il voulait être sûr de pouvoir offrir à sa compagne une existence exempte de soucis avant de lui demander de l'épouser. Il veut seulement que nous lui permettions de travailler pour Meg et de tâcher de se rendre digne de son affection. C'est un jeune homme véritablement excellent, d'un grand coeur et d'un grand sens. Il eût été dur et il n'eût pas été sage de lui fermer l'avenir. Mais il comprend à merveille que Meg est encore trop jeune pour que nous lui permettions de s'engager.

– Certes, ce serait le comble de la déraison ! s'écria Jo. Tenez, mère, je savais qu'il y avait pour moi une nouvelle épreuve sous cloche ; je le sentais, et maintenant, c'est pire que je ne pensais. Je voudrais pouvoir moi-même épouser Meg et la conserver ainsi à sa famille. »

Cet arrangement bizarre arracha un sourire à Mme Marsch, mais elle dit gravement. :

« Jo, j'ai confiance en vous et je désire que ceci reste absolument entre nous. Lorsque John reviendra, je pourrai juger des dispositions de votre soeur à son égard.

– Elle finira par deviner les siennes, et alors ce sera fini d'elle. Elle a un coeur tellement tendre que, si votre nouvel ami la regarde comme il est capable de le faire, le coeur de Meg se fondra comme du beurre au soleil. Elle relisait les billets qu'il envoyait aussi souvent que vos lettres, et me pinçait lorsque je le lui faisais remarquer. Un autre que Brooke eût fait ce qu'il a fait pour père, que cela ne l'aurait pas autant touchée. Croiriez- vous, mère, qu'elle ne trouve pas que Brooke soit un vilain nom ? Ah ! tenez, elle va penser bientôt à nous quitter, et ce sera fini de notre paix et de notre bonheur : je le vois bien, Meg sera absorbée et ne sera plus bonne à rien. Brooke ira chercher fortune quelque part et viendra un beau jour pour emmener notre Meg et faire un vide affreux dans la famille ; mon coeur sera brisé et tout me paraîtra abominablement détestable. Oh ! mon Dieu ! Pourquoi ne sommes-nous pas toutes des garçons ! Il n'y aurait pas de sots ennuis de ce genre à redouter. »

Jo appuya son menton sur ses genoux, de l'air d'une personne qui n'a plus rien à attendre de ce monde, et montra le poing à l'invisible John, auquel elle pensait. Mme Marsch soupira, et, tout de suite, Jo, qui avait remarqué ce soupir, releva la tête d'un air de soulagement.

« Cela ne vous plaît pas non plus, mère, de penser que Meg pourrait un jour nous quitter ? Oh ! que je suis contente ! Renvoyez ce monsieur à ses affaires et ne dites rien à Meg, afin que nous soyons toutes heureuses comme autrefois.

– J'ai eu tort de soupirer, Jo ; il est très naturel que vous ayez toutes un jour un intérieur à vous ; mais je voudrais garder mes filles le plus longtemps possible, et je suis fâchée que cette question se soit présentée si tôt, car Meg a à peine dix-sept ans, et quelques années devront s'écouler avant que John puisse lui construire un foyer. Votre père et moi avons décidé qu'elle ne s'engagerait d'aucune façon et ne se marierait pas avant d'avoir vingt ans. Si elle et John s'aiment, ils auront le temps d'éprouver leur affection. Laissez-moi espérer, Jo, que Meg méritera d'être heureuse !

– Mais n'aimeriez-vous pas mieux qu'elle fit un riche mariage ? demanda Jo, qui avait remarqué que la voix de sa mère tremblait un peu ; Meg aime tant les choses élégantes...

– L'argent est une chose bonne et utile, Jo, et j'espère que mes enfants n'en sentiront jamais trop amèrement la privation. J'aimerais à savoir John employé dans quelque bonne affaire qui puisse lui donner un revenu suffisant pour que Meg soit à son aise ; mais je n'ambitionne pas pour mes filles une grande fortune, une position mondaine et un grand nom. Si le rang et l'argent peuvent se rencontrer pour l'une ou l'autre de vous avec toutes les conditions morales qui peuvent assurer le bonheur, je les accepterai avec reconnaissance et serai enchantée de votre bonne fortune ; mais je ne sais par expérience combien on peut être heureux dans une maison simple et petite où l'on gagne le pain quotidien et où quelques privations donnent de la douceur aux plaisirs. Je suis contente de voir Meg commencer humblement, car, si je ne me trompe, elle serait, le cas échéant, en devenant la femme de M. Brooke, riche par la possession du coeur d'un homme intelligent, bon et sage, ce qui est moins fragile que la fortune.

– Je comprends, mère, et je suis tout à fait de votre avis ; mais Meg m'a toute désappointée, car j'aurais voulu qu'elle épousât Laurie plus tard et qu'elle passât ses jours dans le luxe. Ne serait-ce pas mieux ? C'était mon rêve pour elle.

– Votre rêve n'est pas réalisable, Jo. Laurie est plus jeune que Meg.

– Oh ! cela ne fait rien, interrompit Jo. Il est grand et avancé en tout pour son âge ; il a déjà un peu de barbe, et, quand il le veut, il peut avoir des manières de grand garçon. Puis il est riche, généreux, bon et instruit. Il nous aime tous, et je dis que c'est dommage que mon plan soit détruit.

– Je craindrais en outre, dit Mme Marsch, qu'un homme du caractère de Laurie, qui pourtant a de grandes qualités, ne fût pas toujours assez sérieux pour Meg. Laurie est trop changeant encore pour que, tant que l'âge ne l'aura pas mûri, on puisse faire tout à fait fond sur lui. Je ne parle pas pour Meg, mais en général, car, quant à Meg, la question d'âge est un obstacle sérieux, ma petite. Ne faites donc pas de plans, Jo ; laissez le temps et leurs propres coeurs marier vos amis ; ne vous mêlez pas de choses semblables, et éloignez de votre esprit tout projet romanesque pour d'autres et, au besoin, pour vous-même.

– Vous avez raison, mère, je ne le ferai plus ; mais je déteste voir les choses aller de travers quand un petit coup par-ci et par-là les arrangerait si bien. Je voudrais qu'on puisse porter des plaques de fer sur sa tête pour s'empêcher de grandir ; mais les boutons veulent devenir des roses et les poussins des poulets.

– Qu'est-ce que vous dites de plaques de fer et de poulets ? demanda Meg en entrant dans la chambre, sa lettre finie à la main.

– Je ne le sais seulement plus, répondit Jo. Venez, Meggy, je vais me coucher.

– C'est très bien et parfaitement écrit. Voulez- vous ajouter que j'envoie mes amitiés à M. Brooke, à John, dit Mme Marsch en jetant un coup d'oeil sur la lettre de Meg et la lui rendant.

– L'appelez-vous John ? demanda Meg en souriant et regardant innocemment sa mère.

– Oui ; il a été pour nous comme un fils, et nous l'aimons beaucoup, dit Mme Marsch, en lui jetant sans affectation un coup l'oeil scrutateur.

– J'en suis contente ; il est si seul au monde ! Cela doit lui être doux. Bonsoir, chère mère ; il m'est impossible de vous dire combien c'est fortifiant de vous sentir ici », répondit tranquillement Meg.

Le baiser que sa mère lui donna était très tendre et, quand elle s'en alla, Mme Marsch se dit, avec un mélange de satisfaction et de regret :

« Meg n'aime pas encore John, mais qui sait si elle n'apprendra pas bientôt à l'aimer ? »


Confidences XX Confidences XX Confidências XX

XX

Confidences

Je n'essaierai pas de raconter la réunion de Mme Marsch et de ses filles ; des heures semblables sont belles à vivre, mais très difficiles à décrire. I won't try to recount the reunion of Mrs. Marsch and her daughters; such hours are beautiful to experience, but very difficult to describe. Ainsi je laisserai à l'imagination de mes lecteurs et de mes lectrices de se représenter la rentrée de cette mère dans sa maison. So I'll leave it to the imagination of my readers to picture this mother's return to her home. Je dirai seulement qu'il avait suffi d'une heure pour que la tristesse qui l'avait remplie se fût changée en bonheur. I'll just say that it only took an hour for the sadness that had filled her to turn to happiness.

L'espérance de Meg s'était réalisée, car, lorsque Beth était sortie de son long sommeil, sa vue s'était portée tout d'abord sur sa mère et sur la petite rose de son rosier. Meg's hope had been fulfilled, for when Beth had awakened from her long sleep, her first sight had been of her mother and the little rose in her rosebush. L'enfant était trop faible pour s'étonner de rien. The child was too weak to be surprised by anything. Elle sourit en retenant sa mère sur son coeur quand elle se pencha sur elle pour l'embrasser. She smiled, holding her mother to her heart as she leaned over to kiss her. Elle sentit vaguement que son plus grand désir était enfin satisfait, et elle se rendormit en gardant tendrement la main de Mme Marsch dans la sienne. She vaguely sensed that her greatest desire was at last satisfied, and went back to sleep, tenderly holding Mrs. Marsch's hand in her own.

Les deux soeurs furent obligées de donner la becquée à leur mère, qui ne voulait pas retirer sa main à Beth de peur d'interrompre son sommeil. The two sisters were forced to feed their mother, who wouldn't take her hand away from Beth for fear of interrupting her sleep. Las dos hermanas se vieron obligadas a alimentar a su madre, que no quería apartar la mano de Beth por miedo a interrumpir su sueño. Elles lui servirent le déjeuner le plus magnifique du monde. They served him the most magnificent lunch in the world. Hannah avait trouvé impossible de ne pas manifester sa joie de cette manière. Hannah had found it impossible not to show her joy in this way. Leur mère leur raconta à voix basse l'état de leur père ; la promesse que M. Brooke avait faite de rester aussi longtemps qu'il aurait besoin de ses soins ; les retards qu'une très violente bourrasque de neige avait apportés à son voyage, et l'inexprimable soulagement que la vue de la figure de Laurie lui avait donné quand elle était arrivée, harassée de fatigue, d'anxiété et de froid. Their mother told them in hushed tones of their father's condition; of Mr. Brooke's promise to stay as long as he needed her care; of the delays that a very violent snow squall had brought to his journey, and of the inexpressible relief that the sight of Laurie's face had given her when she arrived, exhausted with fatigue, anxiety and cold.

Combien la journée paraissait agréable et nouvelle aux habitants de la maison Marsch ! How pleasant and new the day seemed to the inhabitants of the Marsch house! À l'extérieur, tout était gai et bruyant ; tout le monde célébrait la fête de la première neige, mais, au dedans, quel calme ! On the outside, everything was cheerful and noisy; everyone was celebrating the feast of the first snowfall, but inside, it was so quiet! Fuera, todo era alegría y ruido; todo el mundo celebraba la primera nevada, pero dentro, ¡había tanto silencio! Tous les habitants, épuisés par les dernières veilles, dormaient encore profondément pendant que Hannah montait la garde à la porte. All the inhabitants, exhausted by their recent vigils, were still fast asleep while Hannah stood guard at the door.

Meg et Jo fermèrent leurs yeux fatigués avec le sentiment d'un allégement inespéré au fardeau de leurs peines. Meg and Jo closed their tired eyes with a feeling of unexpected relief from the burden of their sorrows. Elles se reposèrent comme des barques battues par l'orage, qui viennent enfin de trouver un abri sûr dans une baie tranquille. They rested like storm-beaten boats that have finally found safe shelter in a quiet bay. M me Marsch ne voulut pas quitter sa Beth d'une minute ; elle dormit dans le grand fauteuil, s'éveillant souvent pour regarder sa fille comme un avare qui a retrouvé son trésor. Mrs. Marsch didn't want to leave her Beth for a minute; she slept in the big armchair, waking often to look at her daughter like a miser who has found his treasure.

Pendant ce temps, Laurie fut envoyé à Amy, et il lui parla si bien que tante Marsch eut une larme dans les yeux et ne gronda pas une seule fois. Meanwhile, Laurie was sent to Amy, and he spoke to her so well that Aunt Marsch got a tear in her eye and didn't scold once. Mientras tanto, Laurie fue enviado con Amy, y le habló tan bien que a la tía Marsch se le llenaron los ojos de lágrimas y no la regañó ni una sola vez.

Amy se montra forte dans sa grande joie. Amy showed herself to be strong in her great joy. Évidemment les bonnes pensées de sa petite retraite commençaient déjà à porter ses fruits : elle sécha vite ses larmes, ne montra pas son impatience de voir sa mère et ne pensa pas une seule fois à la bague, quand Laurie, ayant trouvé qu'elle se conduisait comme une brave petite femme, la tante Marsch répondit qu'elle était tout à fait de son avis. Evidently the good thoughts of her little retreat were already beginning to bear fruit: she quickly dried her tears, showed no impatience to see her mother, and never once thought of the ring, when Laurie, having found that she was behaving like a brave little woman, Aunt Marsch replied that she was quite of her opinion. Evidentemente, los buenos pensamientos de su pequeña retirada empezaban ya a dar fruto: pronto se secó las lágrimas, no mostró impaciencia por ver a su madre, y ni una sola vez pensó en el anillo, cuando Laurie, al verla comportarse como una buena mujercita, la tía Marsch le contestó que era totalmente de su opinión. Polly lui-même semblait impressionné, et il lui dit : « Dieu vous bénisse ! Polly himself seemed impressed, and said, "God bless you! » de son ton le plus affable. "in his most affable tone.

Amy serait très volontiers sortie pour jouir du beau temps d'hiver ; mais, devinant que Laurie mourait de sommeil malgré les efforts héroïques qu'il faisait pour le cacher, elle l'engagea à se reposer sur le sofa, pendant qu'elle allait écrire à sa mère. Amy would gladly have gone out to enjoy the beautiful winter weather; but, guessing that Laurie was dying of sleep despite his heroic efforts to hide it, she urged him to rest on the sofa, while she went to write to his mother. Elle resta longtemps, et, quand elle revint, elle trouva son jeune ami dormant encore d'un sommeil réparateur. She stayed a long time, and when she returned, she found her young friend still sleeping a refreshing sleep. Tante Marsch avait eu un accès extraordinaire d'amabilité : elle avait baissé les rideaux afin de mieux le laisser reposer. Aunt Marsch had had an extraordinary outburst of kindness: she had lowered the curtains to let him rest better.

Au bout de quelque temps, elles commencèrent à penser que Laurie dormirait jusqu'au soir, et je ne suis pas bien sûr que cela ne fût pas arrivé s'il n'eût été réveillé par un cri de joie qu'Amy poussa en voyant entrer sa mère. After a while, they began to think that Laurie would sleep until evening, and I'm not so sure that this wouldn't have happened if he hadn't been awakened by a cry of joy from Amy when she saw her mother come in. Il y avait probablement au monde beaucoup de petites filles heureuses ce jour-là ; mais mon opinion particulière est qu'Amy était la plus heureuse de toutes, lorsque, assise sur les genoux de sa mère, elle raconta ses peines et reçut des consolations et des compensations sous forme de sourires et de caresses. There were probably many happy little girls in the world that day; but my particular opinion is that Amy was the happiest of them all, when, sitting on her mother's lap, she told of her sorrows and received consolation and compensation in the form of smiles and caresses. Elle conduisit sa mère dans sa petite retraite, et lui expliqua son but en lui demandant si elle n'avait pas d'objections à y faire. She led her mother into her little retreat, explained her purpose and asked if she had any objections.

« Au contraire ; j'aime beaucoup votre idée, chérie, dit Mme Marsch en examinant le petit livre de prières à la couverture usée et le beau tableau entouré d'une guirlande de houx. "On the contrary; I like your idea very much, darling," said Mrs. Marsch, examining the little prayer book with its worn cover and the beautiful picture surrounded by a holly garland. C'est une excellente idée que d'avoir un endroit dans lequel on puisse se réfugier lorsqu'on est affligé. It's a great idea to have a place where you can take refuge when you're distressed. Il y a bien des moments difficiles dans la vie, mais nous pouvons toujours les rendre supportables si nous cherchons de l'aide du bon côté. There are many difficult moments in life, but we can always make them bearable if we look for help on the right side. Je pense que ma petite Amy commence à l'apprendre. I think my little Amy is starting to learn.

– Oui, mère, et j'ai l'ambition, lorsque je reviendrai, d'arranger un petit coin du grand cabinet et d'y mettre mes livres et la copie que j'ai essayé de faire de ce tableau. - Yes, Mother, and it's my ambition, when I come back, to arrange a small corner of the big cabinet and put my books and the copy I've been trying to make of this painting there. La figure de la mère n'est pas réussie ; elle est trop belle pour que je puisse la copier convenablement, mais l'enfant est mieux, et je l'aime beaucoup. The mother's figure isn't very good; she's too beautiful for me to copy properly, but the child is better, and I like her a lot. »

Comme Amy montrait du doigt l'enfant Jésus souriant sur les genoux de sa mère, M me Marsch vit, sur la main levée, quelque chose qui la fit sourire. As Amy pointed to the smiling baby Jesus on her mother's lap, Mrs. Marsch saw something on the raised hand that made her smile. Cuando Amy señaló al sonriente niño Jesús en el regazo de su madre, la señora Marsch vio algo en la mano levantada que la hizo sonreír. Elle ne dit rien, cependant, mais Amy comprit son sourire et dit gravement au bout d'une minute de silence : She said nothing, however, but Amy understood her smile and said gravely after a minute's silence:

« Je voulais vous en parler, mais j'ai oublié. "I meant to tell you, but I forgot. Tante m'a donné aujourd'hui cette bague ; elle m'a appelée vers elle, m'a embrassée et me l'a passée au doigt en me disant qu'elle m'aimait beaucoup et qu'elle désirerait me garder toujours. Auntie gave me this ring today; she called me to her, kissed me and put it on my finger, telling me she loved me very much and would like to keep me always. La tía me ha regalado hoy este anillo; me ha llamado, me ha besado y me lo ha puesto en el dedo, diciéndome que me quería mucho y que quería tenerme siempre. Elle a mis de la soie autour pour la faire tenir parce qu'elle est trop grande. She put silk around it to hold it in place because it's too big. Le ha puesto seda alrededor para sujetarlo porque es demasiado grande. Puis-je la mettre, mère ? Can I put it on, Mother? ¿Puedo ponérmelo, madre?

– Elle est très jolie, mais je vous trouve un peu jeune pour des ornements semblables, Amy, dit Mme Marsch, en regardant la petite main qui portait au doigt du milieu une grosse bague formée d'une rangée de turquoises. - It's very pretty, but I think you're a little young for such ornaments, Amy," said Mrs. Marsch, looking at the little hand that bore a large ring of turquoise on the middle finger. - Es muy bonito, pero creo que eres un poco joven para esos adornos, Amy -dijo la señora Marsch, mirando la manita que llevaba un gran anillo de turquesa en el dedo corazón-.

– J'essayerai de ne pas en être orgueilleuse, reprit Amy ; je ne crois pas que je l'aime seulement à cause de sa beauté, mais aussi parce que je voudrais la mettre comme la petite fille de l'histoire mettait son bracelet, pour me rappeler... - I'll try not to be proud of it," Amy continued; "I don't think I like it only because of its beauty, but also because I'd like to wear it like the little girl in the story wore her bracelet, to remind me... - No creo que me guste sólo porque sea tan bonita, sino también porque quiero llevarla como la niña del cuento llevaba su pulsera, para que me recuerde...

– Tante Marsch ? demanda sa mère en riant. preguntó su madre, riendo.

– Non ; pour me rappeler de ne pas être égoïste. - No; to remind me not to be selfish. »

Amy paraissait si sérieuse que sa mère cessa de rire et écouta respectueusement son petit projet. Amy looked so serious that her mother stopped laughing and listened respectfully to her little project.

« J'ai beaucoup pensé dernièrement à mes défauts, et j'ai trouvé que l'égoïsme en forme la plus grosse part ; aussi je vais faire tous mes efforts pour m'en corriger, si je peux. "I've been thinking a lot lately about my faults, and I've found that selfishness forms the biggest part of them; so I'm going to make every effort to correct myself, if I can. Beth n'est pas égoïste, et c'est pourquoi tout le monde l'aime et a eu tant de chagrin à la pensée de la perdre. Beth isn't selfish, and that's why everyone loves her and grieved so much at the thought of losing her. On n'aurait pas la moitié autant de chagrin pour moi si j'étais malade, et je ne le mérite pas non plus ; mais, comme je voudrais être aimée et regrettée, je vais tâcher de faire comme Beth. They wouldn't have half so much grief for me if I were sick, nor do I deserve it; but, as I would be loved and missed, I will try to do as Beth does. J'oublie facilement mes résolutions ; mais, si j'avais toujours quelque chose sur moi pour me rappeler celle-ci. I easily forget my resolutions; but, if I always had something on me to remind me of this one. Il me semble que j'avancerais plus. It seems to me that I'd be making more progress. Puis-je essayer de cette manière ? Can I try it this way?

– Oui ; mais j'ai plus de confiance dans la retraite du grand cabinet. - Yes; but I have more confidence in the retreat of the large cabinet. Gardez votre bague, chérie, et faites tous vos efforts. Keep your ring, honey, and make every effort. Je pense que vous réussirez, car le désir sincère d'être bonne est la moitié du succès. I think you'll succeed, because a sincere desire to be good is half the battle. Ne vous découragez pas, petite Amy, nous vous reprendrons bientôt à la maison, vos soeurs seront si heureuses de vous revoir. Don't be discouraged, little Amy, we'll soon take you home again, your sisters will be so happy to see you. »

Le soir de ce jour-là, quand Meg écrivit à son père pour lui annoncer l'heureuse arrivée de sa mère, Jo se glissa dans la chambre de Beth, et, trouvant sa mère dans sa position habituelle, resta à tortiller ses cheveux d'un air troublé et indécis. On the evening of that day, when Meg wrote to her father to tell him of her mother's happy arrival, Jo slipped into Beth's room, and, finding her mother in her usual position, stood twirling her hair with a troubled, indecisive air. Al anochecer de aquel día, cuando Meg escribió a su padre para comunicarle la feliz llegada de su madre, Jo se deslizó hasta la habitación de Beth y, al encontrar a su madre en su posición habitual, se quedó revolviéndose el pelo confundida e indecisa.

– Qu'est-ce que c'est, chère Jo ? - What is it, dear Jo? demanda Mme Marsch en lui tendant la main d'un air qui invitait aux confidences. asked Madame Marsch, holding out her hand with an air that invited confidences.

– Je veux vous dire quelque chose, mère. - I want to tell you something, mother.

– À propos de Meg ?

– Comme vous devinez vite ! - How quickly you guess! Oui, c'est sur elle, et quoique ce ne soit pas grand-chose, cela me trouble. Yes, it's about her, and although it's not much, it troubles me.

– Beth est endormie, parlez bas et racontez-moi tout. - Beth is asleep, keep your voice down and tell me all about it. »

Jo s'assit sur le parquet, aux pieds de sa mère. Jo sat on the floor at her mother's feet.

« L'été dernier, dit-elle, Meg a laissé une paire de gants chez M. Laurentz, et on ne lui en a rendu qu'un. "Last summer," she said, "Meg left a pair of gloves at Mr. Laurentz's house, and only one was returned. Nous avions complètement oublié ce gant perdu, lorsque Laurie m'a dit l'autre jour que M. Brooke l'avait. We had completely forgotten about this lost glove, when Laurie told me the other day that Mr. Brooke had it. Il le garde dans la poche de son habit et l'a laissé tomber une fois ; Laurie l'a vu et M. Brooke ne lui a pas caché que Meg lui plaisait. He keeps it in his suit pocket and dropped it once; Laurie saw it and Mr. Brooke made no secret of the fact that he liked Meg. Lo guarda en el bolsillo del traje y se le cayó una vez; Laurie lo vio y el señor Brooke no ocultó que le gustaba Meg. Il a sans doute ajouté qu'elle était si jeune et lui si pauvre qu'il n'oserait jamais le déclarer ; mais c'est égal, c'est terrible ! He probably added that she was so young and he so poor that he would never dare declare it; but that's all the same, it's terrible! »

Décidément, Jo ne pouvait pas se mettre dans la tête que Meg elle-même et ses soeurs seraient jamais en âge de se marier, et que cela pourrait bien leur arriver comme à tant d'autres. Decidedly, Jo couldn't get it into her head that Meg herself and her sisters would ever be old enough to marry, and that it might well happen to them as it had to so many others.

« Pensez-vous donc que Meg ait remarqué M. Brooke plus que toute autre ? "So do you think Meg noticed Mr. Brooke more than anyone else? "¿Crees que Meg se fijó en el Sr. Brooke más que nadie? demanda Mme Marsch. asked Mrs Marsch.

– Miséricorde ! Je ne connais rien à toutes ces bêtises-là, s'écria Jo avec un mélange d'intérêt et de mépris. I don't know anything about such nonsense," Jo exclaimed with a mixture of interest and contempt. No sé nada de esas tonterías -exclamó Jo con una mezcla de interés y desprecio-. Dans les romans que j'ai lus chez ma tante, les jeunes filles tressaillent, rougissent, s'évanouissent, maigrissent et agissent comme des folles. In the novels I read at my aunt's house, the young girls twitch, blush, faint, lose weight and act crazy. En las novelas que leía en casa de mi tía, las jóvenes se crispan, se ruborizan, se desmayan, adelgazan y actúan como lunáticas. Maintenant, Meg ne fait rien de tout cela : elle mange, boit et dort comme une personne raisonnable ; elle me regarde en face quand je parle de notre ami M. Brooke, et rougit seulement un peu quand Laurie fait des plaisanteries. Now Meg doesn't do any of that: she eats, drinks and sleeps like a reasonable person; she looks me in the face when I talk about our friend Mr. Brooke, and blushes only a little when Laurie makes jokes. Je le lui défends bien, mais il ne m'écoute pas toujours comme il le devrait. I defend him well, but he doesn't always listen to me as he should. Laurie me donne quelquefois bien du mal. Laurie sometimes gives me a hard time. Cependant on prétend que je suis la seule qui puisse venir à bout de lui, quand il est pris par ses entêtements. But they say I'm the only one who can get the better of him, when he's caught up in his own stubbornness. Pero dicen que soy el único que puede sacarle lo mejor, cuando se deja llevar por su propia terquedad. »

Mme Marsch sourit de cet incident dans la conversation de Jo, mais, la ramenant au sujet principal : Mrs. Marsch smiled at this incident in Jo's conversation, but, bringing her back to the main topic: La señora Marsch sonrió ante este incidente en la conversación de Jo, pero, volviendo al tema principal:

« Alors vous imaginez que Meg ne s'intéresse pas à John ? "So you imagine that Meg is not interested in John?

– À qui ? demanda Jo en regardant sa mère avec étonnement. Jo asked, looking at her mother with astonishment.

– M. Brooke. Votre père et moi l'appelons John maintenant, comme nous avons fini par dire ici Laurie tout court, pour répondre au dévouement qu'il nous montrait ; nous en avons pris l'habitude à Washington, au chevet de votre père, qu'il ne quittait guère, le brave jeune homme. Your father and I call him John now, as we've come to say Laurie for short, in response to the devotion he showed us; we got into the habit in Washington, at your father's bedside, which he hardly ever left, the brave young man.

– Oh ! mon Dieu ! Vous allez prendre son parti ! You're going to take his side! ¡Vas a ponerte de su parte! Il a été très bien pour père, et, je le sais, à cause de cela vous ne le renverrez pas ; vous le laisserez épouser Meg, si elle y consent. He's been very good to father, and, I know, because of that you won't send him away; you'll let him marry Meg, if she agrees. Se ha portado muy bien con padre y, lo sé, por eso no le echarás; dejarás que se case con Meg, si ella está de acuerdo. Que c'est mal à lui d'être allé près de papa pour vous forcer à l'aimer ! How wrong of him to have gone near Dad to force you to love him! ¡Qué mal por su parte haber acudido a papá para obligarte a quererle! »

Et Jo se passa la main dans les cheveux d'un air désespéré. And Jo ran her hand through her hair in despair.

« Ne vous troublez pas, ma chérie. "Don't be troubled, my darling. Tout cela est une suite naturelle des circonstances où nous nous sommes trouvés. All this is a natural consequence of the circumstances in which we found ourselves. M. Brooke est, vous le savez, venu avec moi, à la demande de M. Laurentz. Mr Brooke has, as you know, come with me, at Mr Laurentz's request. Il a été si parfait pour votre pauvre père que nous n'avons pu nous empêcher d'en être touchés et de beaucoup l'aimer. He was so perfect for your poor father that we could not help but be touched and love him very much. Ma pauvre Jo, si vous l'aviez vu veiller nuit et jour votre père mourant, admirable de soins et d'une bonté qui ne se dément jamais, vous l'auriez aimé plus que nous, car ce qui est bien vous touche peut-être encore plus vivement. My poor Jo, if you'd seen him watching over your dying father night and day, admirable in his care and unfailing in his kindness, you would have loved him more than we do, for what is good touches you perhaps even more deeply. Il a été, en ce qui concerne Meg, très honorable et très sincère. He was, as far as Meg was concerned, very honorable and very sincere. Il nous a dit qu'il serait bien heureux de pouvoir un jour devenir notre fils, mais qu'il voulait être sûr de pouvoir offrir à sa compagne une existence exempte de soucis avant de lui demander de l'épouser. He told us he'd be happy to become our son one day, but wanted to make sure he could offer his companion a carefree existence before asking her to marry him. Il veut seulement que nous lui permettions de travailler pour Meg et de tâcher de se rendre digne de son affection. He only wants us to allow him to work for Meg and try to make himself worthy of his affection. C'est un jeune homme véritablement excellent, d'un grand coeur et d'un grand sens. He's a truly excellent young man, with a big heart and great sense. Il eût été dur et il n'eût pas été sage de lui fermer l'avenir. It would have been harsh and unwise to close the future to him. Habría sido duro e imprudente cerrarle el futuro. Mais il comprend à merveille que Meg est encore trop jeune pour que nous lui permettions de s'engager. But he understands perfectly well that Meg is still too young for us to allow her to commit. Pero entiende perfectamente que Meg aún es demasiado joven para que le permitamos comprometerse.

– Certes, ce serait le comble de la déraison ! - Of course, that would be the height of folly! s'écria Jo. Tenez, mère, je savais qu'il y avait pour moi une nouvelle épreuve sous cloche ; je le sentais, et maintenant, c'est pire que je ne pensais. Here, Mother, I knew there was a new test for me under the bell; I felt it, and now it's worse than I thought. Verás, madre, sabía que había una nueva prueba para mí bajo la campana; la sentí, y ahora es peor de lo que pensaba. Je voudrais pouvoir moi-même épouser Meg et la conserver ainsi à sa famille. I wish I could marry Meg myself and keep her in the family. »

Cet arrangement bizarre arracha un sourire à Mme Marsch, mais elle dit gravement. This bizarre arrangement drew a smile from Mrs. Marsch, but she said gravely. :

« Jo, j'ai confiance en vous et je désire que ceci reste absolument entre nous. "Jo, I trust you and want this to remain absolutely between us. Lorsque John reviendra, je pourrai juger des dispositions de votre soeur à son égard. When John returns, I'll be able to judge your sister's attitude towards him. Cuando John vuelva, podré juzgar la actitud de tu hermana hacia él.

– Elle finira par deviner les siennes, et alors ce sera fini d'elle. - Eventually, she'll figure out her own, and then she'll be done for. - Acabará adivinando la suya, y entonces estará acabada. Elle a un coeur tellement tendre que, si votre nouvel ami la regarde comme il est capable de le faire, le coeur de Meg se fondra comme du beurre au soleil. She has such a tender heart that, if your new friend looks at her the way he's capable of doing, Meg's heart will melt like butter in the sun. Elle relisait les billets qu'il envoyait aussi souvent que vos lettres, et me pinçait lorsque je le lui faisais remarquer. She reread the bills he sent as often as your letters, and pinched me when I pointed it out. Releía las notas que enviaba tan a menudo como tus cartas, y me pellizcaba cuando se lo señalaba. Un autre que Brooke eût fait ce qu'il a fait pour père, que cela ne l'aurait pas autant touchée. If anyone other than Brooke had done what he did for Father, it wouldn't have touched her as much. Si alguien que no fuera Brooke hubiera hecho lo que él hizo por su padre, no le habría afectado tanto. Croiriez- vous, mère, qu'elle ne trouve pas que Brooke soit un vilain nom ? Do you think, Mother, that she doesn't find Brooke an ugly name? ¿Crees, madre, que no piensa que Brooke es un nombre feo? Ah ! tenez, elle va penser bientôt à nous quitter, et ce sera fini de notre paix et de notre bonheur : je le vois bien, Meg sera absorbée et ne sera plus bonne à rien. You see, she'll soon be thinking of leaving us, and that'll be the end of our peace and happiness: I can see it now, Meg will be absorbed and good for nothing. Brooke ira chercher fortune quelque part et viendra un beau jour pour emmener notre Meg et faire un vide affreux dans la famille ; mon coeur sera brisé et tout me paraîtra abominablement détestable. Brooke will seek her fortune somewhere and come one fine day to take away our Meg and make a dreadful vacuum in the family; my heart will be broken and everything will seem abominably detestable. Oh ! mon Dieu ! Pourquoi ne sommes-nous pas toutes des garçons ! Why aren't we all boys! Il n'y aurait pas de sots ennuis de ce genre à redouter. There would be no such foolish trouble to worry about. No habría problemas tontos de los que preocuparse. »

Jo appuya son menton sur ses genoux, de l'air d'une personne qui n'a plus rien à attendre de ce monde, et montra le poing à l'invisible John, auquel elle pensait. Jo rested her chin on her knees, with the air of someone who no longer had anything to look forward to in this world, and showed her fist to the invisible John she'd been thinking about. Jo apoyó la barbilla en las rodillas, con el aire de quien ya no tiene nada que esperar de este mundo, y sacudió el puño ante el John invisible en el que había estado pensando. Mme Marsch soupira, et, tout de suite, Jo, qui avait remarqué ce soupir, releva la tête d'un air de soulagement. Mrs Marsch sighed, and immediately Jo, who had noticed the sigh, raised her head in relief. La señora Marsch suspiró, e inmediatamente Jo, que había notado el suspiro, levantó la cabeza aliviada.

« Cela ne vous plaît pas non plus, mère, de penser que Meg pourrait un jour nous quitter ? "It doesn't please you either, Mother, to think that Meg might one day leave us? Oh ! que je suis contente ! I'm so happy! Renvoyez ce monsieur à ses affaires et ne dites rien à Meg, afin que nous soyons toutes heureuses comme autrefois. Send the gentleman on his way and don't say a word to Meg, so we can all be as happy as ever.

– J'ai eu tort de soupirer, Jo ; il est très naturel que vous ayez toutes un jour un intérieur à vous ; mais je voudrais garder mes filles le plus longtemps possible, et je suis fâchée que cette question se soit présentée si tôt, car Meg a à peine dix-sept ans, et quelques années devront s'écouler avant que John puisse lui construire un foyer. - I was wrong to sigh, Jo; it's very natural that you should all have a home of your own one day; but I'd like to keep my girls for as long as possible, and I'm sorry the matter has arisen so soon, for Meg is barely seventeen, and it will be some years before John can build her a home. - Fue un error por mi parte suspirar, Jo, es natural que todas tengáis un hogar propio, pero me gustaría conservar a mis hijas el mayor tiempo posible, y lamento que el asunto haya surgido tan pronto, pues Meg sólo tiene diecisiete años, y pasarán algunos antes de que John pueda construirle un hogar. Votre père et moi avons décidé qu'elle ne s'engagerait d'aucune façon et ne se marierait pas avant d'avoir vingt ans. Your father and I decided that she would not commit herself in any way and would not marry until she was twenty. Si elle et John s'aiment, ils auront le temps d'éprouver leur affection. If she and John love each other, they'll have time to test their affection. Laissez-moi espérer, Jo, que Meg méritera d'être heureuse ! Let me hope, Jo, that Meg will deserve to be happy!

– Mais n'aimeriez-vous pas mieux qu'elle fit un riche mariage ? - But wouldn't you rather she had a rich wedding? - ¿Pero no preferirías que tuviera una boda rica? demanda Jo, qui avait remarqué que la voix de sa mère tremblait un peu ; Meg aime tant les choses élégantes... asked Jo, who had noticed that her mother's voice was trembling a little; Meg likes elegant things so much...

– L'argent est une chose bonne et utile, Jo, et j'espère que mes enfants n'en sentiront jamais trop amèrement la privation. - Money is a good and useful thing, Jo, and I hope my children will never feel too bitterly deprived of it. J'aimerais à savoir John employé dans quelque bonne affaire qui puisse lui donner un revenu suffisant pour que Meg soit à son aise ; mais je n'ambitionne pas pour mes filles une grande fortune, une position mondaine et un grand nom. I'd like to see John employed in some good business that might give him enough income for Meg to be comfortable; but I don't aspire for my daughters to great wealth, a worldly position and a big name. Si le rang et l'argent peuvent se rencontrer pour l'une ou l'autre de vous avec toutes les conditions morales qui peuvent assurer le bonheur, je les accepterai avec reconnaissance et serai enchantée de votre bonne fortune ; mais je ne sais par expérience combien on peut être heureux dans une maison simple et petite où l'on gagne le pain quotidien et où quelques privations donnent de la douceur aux plaisirs. If rank and money can be matched for either of you with all the moral conditions that can ensure happiness, I'll accept them with gratitude and be delighted with your good fortune; but I don't know from experience how happy one can be in a small, simple home where one earns one's daily bread and where a few privations give sweetness to pleasures. Je suis contente de voir Meg commencer humblement, car, si je ne me trompe, elle serait, le cas échéant, en devenant la femme de M. Brooke, riche par la possession du coeur d'un homme intelligent, bon et sage, ce qui est moins fragile que la fortune. I'm glad to see Meg start humbly, for, if I'm not mistaken, she would, if necessary, by becoming Mr. Brooke's wife, be rich by possession of the heart of an intelligent, good and wise man, which is less fragile than fortune.

– Je comprends, mère, et je suis tout à fait de votre avis ; mais Meg m'a toute désappointée, car j'aurais voulu qu'elle épousât Laurie plus tard et qu'elle passât ses jours dans le luxe. - I understand, Mother, and I quite agree with you; but Meg has disappointed me, for I would have liked her to marry Laurie later and spend her days in luxury. Ne serait-ce pas mieux ? Wouldn't that be better? C'était mon rêve pour elle. It was my dream for her.

– Votre rêve n'est pas réalisable, Jo. Laurie est plus jeune que Meg. Laurie is younger than Meg.

– Oh ! cela ne fait rien, interrompit Jo. It doesn't matter," interrupted Jo. Il est grand et avancé en tout pour son âge ; il a déjà un peu de barbe, et, quand il le veut, il peut avoir des manières de grand garçon. He's tall and advanced in everything for his age; he's already got a bit of a beard, and, when he wants to, he can have big-boy manners. Puis il est riche, généreux, bon et instruit. Il nous aime tous, et je dis que c'est dommage que mon plan soit détruit. He loves us all, and I say it's a shame my plan is destroyed.

– Je craindrais en outre, dit Mme Marsch, qu'un homme du caractère de Laurie, qui pourtant a de grandes qualités, ne fût pas toujours assez sérieux pour Meg. - Besides, I'd be afraid," says Mrs. Marsch, "that a man of Laurie's character, although he has great qualities, wouldn't always be serious enough for Meg. - Me temo -dijo la señora Marsch- que un hombre del carácter de Laurie, aunque tenga grandes cualidades, no siempre sería lo bastante serio para Meg. Laurie est trop changeant encore pour que, tant que l'âge ne l'aura pas mûri, on puisse faire tout à fait fond sur lui. Laurie is still too changeable to be completely relied on until age matures him. Laurie sigue siendo demasiado cambiante para confiar plenamente en él hasta que madure. Je ne parle pas pour Meg, mais en général, car, quant à Meg, la question d'âge est un obstacle sérieux, ma petite. I'm not speaking for Meg, but in general, because, as for Meg, the question of age is a serious obstacle, my little one. Ne faites donc pas de plans, Jo ; laissez le temps et leurs propres coeurs marier vos amis ; ne vous mêlez pas de choses semblables, et éloignez de votre esprit tout projet romanesque pour d'autres et, au besoin, pour vous-même. So don't make plans, Jo; let time and their own hearts marry your friends; don't meddle with such things, and put away from your mind all romantic plans for others and, if need be, for yourself. Así que no hagas planes, Jo; deja que el tiempo y sus propios corazones casen a tus amigos; no te metas en esas cosas, y aparta de tu mente todos los planes románticos para los demás y, si es necesario, para ti misma.

– Vous avez raison, mère, je ne le ferai plus ; mais je déteste voir les choses aller de travers quand un petit coup par-ci et par-là les arrangerait si bien. - You're right, Mother, I won't do it again; but I hate to see things go wrong when a little nudge here and there would fix them up so nicely. - Tienes razón, madre, no lo volveré a hacer, pero odio ver que las cosas van mal cuando un empujoncito aquí y allá las arreglaría tan bien. Je voudrais qu'on puisse porter des plaques de fer sur sa tête pour s'empêcher de grandir ; mais les boutons veulent devenir des roses et les poussins des poulets. I wish you could wear iron plates on your head to stop yourself growing; but buds want to become roses and chicks chickens. Ojalá pudiéramos llevar planchas de hierro en la cabeza para impedir que crezcamos; pero los capullos quieren convertirse en rosas y los pollitos en gallinas.

– Qu'est-ce que vous dites de plaques de fer et de poulets ? - How about iron plates and chickens? demanda Meg en entrant dans la chambre, sa lettre finie à la main. Meg asked as she entered the room, her finished letter in hand. preguntó Meg al entrar en la habitación, con la carta terminada en la mano.

– Je ne le sais seulement plus, répondit Jo. - I just don't know anymore," said Jo. Venez, Meggy, je vais me coucher. Come on, Meggy, I'm going to bed.

– C'est très bien et parfaitement écrit. - It's very good and perfectly written. Voulez- vous ajouter que j'envoie mes amitiés à M. Brooke, à John, dit Mme Marsch en jetant un coup d'oeil sur la lettre de Meg et la lui rendant. Would you add that I send my regards to Mr. Brooke, to John," said Mrs. Marsch, glancing at Meg's letter and handing it back to her. Añade que mando recuerdos al señor Brooke, a John -dijo la señora Marsch, echando un vistazo a la carta de Meg y devolviéndosela.

– L'appelez-vous John ? - Do you call him John? demanda Meg en souriant et regardant innocemment sa mère. Meg asked, smiling and looking innocently at her mother.

– Oui ; il a été pour nous comme un fils, et nous l'aimons beaucoup, dit Mme Marsch, en lui jetant sans affectation un coup l'oeil scrutateur. - Yes; he has been like a son to us, and we love him very much," said Mrs. Marsch, glancing at him unaffectedly.

– J'en suis contente ; il est si seul au monde ! - I'm glad; he's so alone in the world! - Me alegro; ¡está tan solo en el mundo! Cela doit lui être doux. It must be sweet for him. Bonsoir, chère mère ; il m'est impossible de vous dire combien c'est fortifiant de vous sentir ici », répondit tranquillement Meg. Good evening, dear mother; I can't tell you how invigorating it is to feel you here," replied Meg quietly.

Le baiser que sa mère lui donna était très tendre et, quand elle s'en alla, Mme Marsch se dit, avec un mélange de satisfaction et de regret : The kiss her mother gave her was very tender, and as she left, Mrs. Marsch said to herself, with a mixture of satisfaction and regret: El beso que le dio su madre fue muy tierno y, al marcharse, la señora Marsch se dijo, con una mezcla de satisfacción y pesar:

« Meg n'aime pas encore John, mais qui sait si elle n'apprendra pas bientôt à l'aimer ? "Meg doesn't love John yet, but who knows if she won't soon learn to love him?" »