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Le Comte de Monte-Cristo, Alexandre Dumas, Tome 1, 3. Les Catalans

3. Les Catalans

À cent pas de l'endroit où les deux amis, les regards à l'horizon et l'oreille au guet, sablaient le vin pétillant de La Malgue, s'élevait, derrière une butte nue et rongée par le soleil et le mistral, le village des Catalans.

Un jour, une colonie mystérieuse partit de l'Espagne et vint aborder à la langue de terre où elle est encore aujourd'hui.

Elle arrivait on ne savait d'où et parlait une langue inconnue. Un des chefs, qui entendait le provençal, demanda à la commune de Marseille de leur donner ce promontoire nu et aride, sur lequel ils venaient, comme les matelots antiques, de tirer leurs bâtiments. La demande lui fut accordée, et trois mois après, autour des douze ou quinze bâtiments qui avaient amené ces bohémiens de la mer, un petit village s'élevait. Ce village construit d'une façon bizarre et pittoresque, moitié maure, moitié espagnol, est celui que l'on voit aujourd'hui habité par des descendants de ces hommes, qui parlent la langue de leurs pères.

Depuis trois ou quatre siècles, ils sont encore demeurés fidèles à ce petit promontoire, sur lequel ils s'étaient abattus, pareils à une bande d'oiseaux de mer, sans se mêler en rien à la population marseillaise, se mariant entre eux, et ayant conservé les mœurs et le costume de leur mère patrie, comme ils en ont conservé le langage. Il faut que nos lecteurs nous suivent à travers l'unique rue de ce petit village, et entrent avec nous dans une de ces maisons auxquelles le soleil a donné, au-dehors, cette belle couleur feuille morte particulière aux monuments du pays, et, au-dedans, une couche de badigeon, cette teinte blanche qui forme le seul ornement des posadas espagnoles.

Une belle jeune fille aux cheveux noirs comme le jais, aux yeux veloutés comme ceux de la gazelle, tenait debout, adossée à une cloison, et froissait entre ses doigts effilés et d'un dessin antique une bruyère innocente dont elle arrachait les fleurs, et dont les débris jonchaient déjà le sol; en outre, ses bras nus jusqu'au coude, ses bras brunis, mais qui semblaient modelés sur ceux de la Vénus d'Arles, frémissaient d'une sorte d'impatience fébrile, et elle frappait la terre de son pied souple et cambré, de sorte que l'on entrevoyait la forme pure, fière et hardie de sa jambe, emprisonnée dans un bas de coton rouge à coins gris et bleus.

À trois pas d'elle, assis sur une chaise qu'il balançait d'un mouvement saccadé, appuyant son coude à un vieux meuble vermoulu, un grand garçon de vingt à vingt-deux ans la regardait d'un air où se combattaient l'inquiétude et le dépit; ses yeux interrogeaient, mais le regard ferme et fixe de la jeune fille dominait son interlocuteur.

«Voyons, Mercédès, disait le jeune homme, voici Pâques qui va revenir, c'est le moment de faire une noce, répondez-moi!

—Je vous ai répondu cent fois, Fernand, et il faut en vérité que vous soyez bien ennemi de vous-même pour m'interroger encore!

—Eh bien, répétez-le encore, je vous en supplie, répétez-le encore pour que j'arrive à le croire.

Dites-moi pour la centième fois que vous refusez mon amour, qu'approuvait votre mère; faites-moi bien comprendre que vous vous jouez de mon bonheur, que ma vie et ma mort ne sont rien pour vous. Ah!

mon Dieu, mon Dieu! avoir rêvé dix ans d'être votre époux, Mercédès, et perdre cet espoir qui était le seul but de ma vie! —Ce n'est pas moi du moins qui vous ai jamais encouragé dans cet espoir, Fernand, répondit Mercédès; vous n'avez pas une seule coquetterie à me reprocher à votre égard.

Je vous ai toujours dit: «Je vous aime comme un frère, mais n'exigez jamais de moi autre chose que cette amitié fraternelle, car mon cœur est à un autre.» Vous ai-je toujours dit cela, Fernand? —Oui, je le sais bien, Mercédès, répondit le jeune homme; oui, vous vous êtes donné, vis-à-vis de moi, le cruel mérite de la franchise; mais oubliez-vous que c'est parmi les Catalans une loi sacrée de se marier entre eux?

—Vous vous trompez, Fernand, ce n'est pas une loi, c'est une habitude, voilà tout; et, croyez-moi, n'invoquez pas cette habitude en votre faveur.

Vous êtes tombé à la conscription, Fernand; la liberté qu'on vous laisse, c'est une simple tolérance; d'un moment à l'autre vous pouvez être appelé sous les drapeaux. Une fois soldat, que ferez-vous de moi, c'est-à-dire d'une pauvre fille orpheline, triste, sans fortune, possédant pour tout bien une cabane presque en ruine, où pendent quelques filets usés, misérable héritage laissé par mon père à ma mère et par ma mère à moi? Depuis un an qu'elle est morte, songez donc, Fernand, que je vis presque de la charité publique! Quelquefois vous feignez que je vous suis utile, et cela pour avoir le droit de partager votre poche avec moi; et j'accepte, Fernand, parce que vous êtes le fils d'un frère de mon père, parce que nous avons été élevés ensemble et plus encore parce que, par-dessus tout, cela vous ferait trop de peine si je vous refusais. Mais je sens bien que ce poisson que je vais vendre et dont je tire l'argent avec lequel j'achète le chanvre que je file, je sens bien, Fernand, que c'est une charité. —Et qu'importe, Mercédès, si, pauvre et isolée que vous êtes, vous me convenez ainsi mieux que la fille du plus fier armateur ou du plus riche banquier de Marseille!

À nous autres, que nous faut-il? Une honnête femme et une bonne ménagère. Où trouverais-je mieux que vous sous ces deux rapports? —Fernand, répondit Mercédès en secouant la tête, on devient mauvaise ménagère et on ne peut répondre de rester honnête femme lorsqu'on aime un autre homme que son mari.

Contentez-vous de mon amitié, car, je vous le répète, c'est tout ce que je puis vous promettre, et je ne promets que ce que je suis sûre de pouvoir donner. —Oui, je comprends, dit Fernand; vous supportez patiemment votre misère, mais vous avez peur de la mienne.

Eh bien, Mercédès, aimé de vous, je tenterai la fortune; vous me porterez bonheur, et je deviendrai riche: je puis étendre mon état de pêcheur; je puis entrer comme commis dans un comptoir; je puis moi-même devenir marchand! —Vous ne pouvez rien tenter de tout cela, Fernand; vous êtes soldat, et si vous restez aux Catalans, c'est parce qu'il n'y a pas de guerre.

Demeurez donc pêcheur; ne faites point de rêves qui vous feraient paraître la réalité plus terrible encore, et contentez-vous de mon amitié, puisque je ne puis vous donner autre chose. —Eh bien, vous avez raison, Mercédès, je serai marin; j'aurai, au lieu du costume de nos pères que vous méprisez, un chapeau verni, une chemise rayée et une veste bleue avec des ancres sur les boutons.

N'est-ce point ainsi qu'il faut être habillé pour vous plaire? —Que voulez-vous dire?

demanda Mercédès en lançant un regard impérieux, que voulez-vous dire? Je ne vous comprends pas. —Je veux dire, Mercédès, que vous n'êtes si dure et si cruelle pour moi que parce que vous attendez quelqu'un qui est ainsi vêtu.

Mais celui que vous attendez est inconstant peut-être, et, s'il ne l'est pas, la mer l'est pour lui. —Fernand, s'écria Mercédès, je vous croyais bon et je me trompais!

Fernand, vous êtes un mauvais cœur d'appeler à l'aide de votre jalousie les colères de Dieu! Eh bien, oui, je ne m'en cache pas, j'attends et j'aime celui que vous dites, et s'il ne revient pas, au lieu d'accuser cette inconstance que vous invoquez, vous, je dirai qu'il est mort en m'aimant.» Le jeune Catalan fit un geste de rage.

«Je vous comprends, Fernand: vous vous en prendrez à lui de ce que je ne vous aime pas; vous croiserez votre couteau catalan contre son poignard!

À quoi cela vous avancera-t-il? À perdre mon amitié si vous êtes vaincu, à voir mon amitié se changer en haine si vous êtes vainqueur. Croyez-moi, chercher querelle à un homme est un mauvais moyen de plaire à la femme qui aime cet homme. Non, Fernand, vous ne vous laisserez point aller ainsi à vos mauvaises pensées. Ne pouvant m'avoir pour femme, vous vous contenterez de m'avoir pour amie et pour sœur; et d'ailleurs, ajouta-t-elle, les yeux troublés et mouillés de larmes, attendez, attendez, Fernand: vous l'avez dit tout à l'heure, la mer est perfide, et il y a déjà quatre mois qu'il est parti; depuis quatre mois j'ai compté bien des tempêtes!» Fernand demeura impassible; il ne chercha pas à essuyer les larmes qui roulaient sur les joues de Mercédès; et cependant, pour chacune de ces larmes, il eût donné un verre de son sang; mais ces larmes coulaient pour un autre.

Il se leva, fit un tour dans la cabane et revint, s'arrêta devant Mercédès, l'œil sombre et les poings crispés.

«Voyons, Mercédès, dit-il, encore une fois répondez: est-ce bien résolu?

—J'aime Edmond Dantès, dit froidement la jeune fille, et nul autre qu'Edmond ne sera mon époux.

—Et vous l'aimerez toujours?

—Tant que je vivrai.»

Fernand baissa la tête comme un homme découragé, poussa un soupir qui ressemblait à un gémissement; puis tout à coup relevant le front, les dents serrées et les narines entrouvertes:

«Mais s'il est mort?

—S'il est mort, je mourrai.

—Mais s'il vous oublie?

—Mercédès!

cria une voix joyeuse au-dehors de la maison, Mercédès! —Ah!

s'écria la jeune fille en rougissant de joie et en bondissant d'amour, tu vois bien qu'il ne m'a pas oubliée, puisque le voilà!» Et elle s'élança vers la porte, qu'elle ouvrit en s'écriant:

«À moi, Edmond!

me voici.» Fernand, pâle et frémissant, recula en arrière comme fait un voyageur à la vue d'un serpent, et rencontrant sa chaise, il y retomba assis.

Edmond et Mercédès étaient dans les bras l'un de l'autre.

Le soleil ardent de Marseille, qui pénétrait à travers l'ouverture de la porte, les inondait d'un flot de lumière. D'abord ils ne virent rien de ce qui les entourait. Un immense bonheur les isolait du monde, et ils ne parlaient que par ces mots entrecoupés qui sont les élans d'une joie si vive qu'ils semblent l'expression de la douleur. Tout à coup Edmond aperçut la figure sombre de Fernand, qui se dessinait dans l'ombre, pâle et menaçante; par un mouvement dont il ne se rendit pas compte lui-même, le jeune Catalan tenait la main sur le couteau passé à sa ceinture.

«Ah!

pardon, dit Dantès en fronçant le sourcil à son tour, je n'avais pas remarqué que nous étions trois.» Puis, se tournant vers Mercédès:

«Qui est ce monsieur?

demanda-t-il. —Monsieur sera votre meilleur ami, Dantès, car c'est mon ami à moi, c'est mon cousin, c'est mon frère; c'est Fernand; c'est-à-dire l'homme qu'après vous, Edmond, j'aime le plus au monde; ne le reconnaissez-vous pas?

—Ah!

si fait», dit Edmond. Et, sans abandonner Mercédès, dont il tenait la main serrée dans une des siennes, il tendit avec un mouvement de cordialité son autre main au Catalan.

Mais Fernand, loin de répondre à ce geste amical, resta muet et immobile comme une statue.

Alors Edmond promena son regard investigateur de Mercédès, émue et tremblante, à Fernand, sombre et menaçant.

Ce seul regard lui apprit tout.

La colère monta à son front.

«Je ne savais pas venir avec tant de hâte chez vous Mercédès, pour y trouver un ennemi.

—Un ennemi!

s'écria Mercédès avec un regard de courroux à l'adresse de son cousin; un ennemi chez moi, dis-tu, Edmond! Si je croyais cela, je te prendrais sous le bras et je m'en irais à Marseille, quittant la maison pour n'y plus jamais rentrer.» L'œil de Fernand lança un éclair.

«Et s'il t'arrivait malheur, mon Edmond, continua-t-elle avec ce même flegme implacable qui prouvait à Fernand que la jeune fille avait lu jusqu'au plus profond de sa sinistre pensée, s'il t'arrivait malheur, je monterais sur le cap de Morgion, et je me jetterais sur les rochers la tête la première.»

Fernand devint affreusement pâle.

«Mais tu t'es trompé, Edmond, poursuivit-elle, tu n'as point d'ennemi ici; il n'y a que Fernand, mon frère, qui va te serrer la main comme à un ami dévoué.»

Et à ces mots, la jeune fille fixa son visage impérieux sur le Catalan, qui, comme s'il eût été fasciné par ce regard, s'approcha lentement d'Edmond et tendit la main.

Sa haine, pareille à une vague impuissante, quoique furieuse, venait se briser contre l'ascendant que cette femme exerçait sur lui.

Mais à peine eut-il touché la main d'Edmond, qu'il sentit qu'il avait fait tout ce qu'il pouvait faire, et qu'il s'élança hors de la maison.

«Oh!

s'écriait-il en courant comme un insensé en noyant ses mains dans ses cheveux, oh! qui me délivrera donc de cet homme? Malheur à moi! malheur à moi! —Eh!

le Catalan! eh! Fernand! où cours-tu?» dit une voix. Le jeune homme s'arrêta tout court, regarda autour de lui, et aperçut Caderousse attablé avec Danglars sous un berceau de feuillage.

«Eh!

dit Caderousse, pourquoi ne viens-tu pas? Es-tu donc si pressé que tu n'aies pas le temps de dire bonjour aux amis? —Surtout quand ils ont encore une bouteille presque pleine devant eux», ajouta Danglars.

Fernand regarda les deux hommes d'un air hébété, et ne répondit rien.

«Il semble tout penaud, dit Danglars, poussant du genou Caderousse: est-ce que nous nous serions trompés, et qu'au contraire de ce que nous avions prévu, Dantès triompherait?

—Dame!

il faut voir», dit Caderousse. Et se retournant vers le jeune homme:

«Eh bien, voyons, le Catalan, te décides-tu?» dit-il.

Fernand essuya la sueur qui ruisselait de son front et entra lentement sous la tonnelle, dont l'ombrage sembla rendre un peu de calme à ses sens et la fraîcheur un peu de bien-être à son corps épuisé.

«Bonjour, dit-il, vous m'avez appelé, n'est-ce pas?»

Et il tomba plutôt qu'il ne s'assit sur un des sièges qui entouraient la table.

«Je t'ai appelé parce que tu courais comme un fou, et que j'ai eu peur que tu n'allasses te jeter à la mer, dit en riant Caderousse.

Que diable, quand on a des amis, c'est non seulement pour leur offrir un verre de vin, mais encore pour les empêcher de boire trois ou quatre pintes d'eau.» Fernand poussa un gémissement qui ressemblait à un sanglot et laissa tomber sa tête sur ses deux poignets, posés en croix sur la table.

«Eh bien, veux-tu que je te dise, Fernand, reprit Caderousse, entamant l'entretien avec cette brutalité grossière des gens du peuple auxquels la curiosité fait oublier toute diplomatie; eh bien, tu as l'air d'un amant déconfit!»

Et il accompagna cette plaisanterie d'un gros rire.

«Bah!

répondit Danglars, un garçon taillé comme celui-là n'est pas fait pour être malheureux en amour; tu te moques, Caderousse. —Non pas, reprit celui-ci; écoute plutôt comme il soupire.

Allons, allons, Fernand, dit Caderousse, lève le nez et réponds-nous: ce n'est pas aimable de ne pas répondre aux amis qui nous demandent des nouvelles de notre santé. —Ma santé va bien, dit Fernand crispant ses poings mais sans lever la tête.

—Ah!

vois-tu Danglars, dit Caderousse en faisant signe de l'œil à son ami, voici la chose: Fernand, que tu vois, et qui est un bon et brave Catalan, un des meilleurs pêcheurs de Marseille, est amoureux d'une belle fille qu'on appelle Mercédès; mais malheureusement il paraît que la belle fille, de son coté, est amoureuse du second du Pharaon ; et, comme le Pharaon est entré aujourd'hui même dans le port, tu comprends? —Non, je ne comprends pas, dit Danglars.

—Le pauvre Fernand aura reçu son congé, continua Caderousse.

—Eh bien, après?

dit Fernand relevant la tête et regardant Caderousse, en homme qui cherche quelqu'un sur qui faire tomber sa colère; Mercédès ne dépend de personne? n'est-ce pas? et elle est bien libre d'aimer qui elle veut. —Ah!

si tu le prends ainsi, dit Caderousse, c'est autre chose! Moi, je te croyais un Catalan; et l'on m'avait dit que les Catalans n'étaient pas hommes à se laisser supplanter par un rival; on avait même ajouté que Fernand surtout était terrible dans sa vengeance.» Fernand sourit avec pitié.

«Un amoureux n'est jamais terrible, dit-il.

—Le pauvre garçon!

reprit Danglars feignant de plaindre le jeune homme du plus profond de son cœur. Que veux-tu? il ne s'attendait pas à voir revenir ainsi Dantès tout à coup; il le croyait peut-être mort, infidèle, qui sait? Ces choses-là sont d'autant plus sensibles qu'elles nous arrivent tout à coup. —Ah!

ma foi, dans tous les cas, dit Caderousse qui buvait tout en parlant et sur lequel le vin fumeux de La Malgue commençait à faire son effet, dans tous les cas, Fernand n'est pas le seul que l'heureuse arrivée de Dantès contrarie, n'est-ce pas, Danglars? —Non, tu dis vrai, et j'oserais presque dire que cela lui portera malheur.

—Mais n'importe, reprit Caderousse en versant un verre de vin à Fernand, et en remplissant pour la huitième ou dixième fois son propre verre tandis que Danglars avait à peine effleuré le sien; n'importe, en attendant il épouse Mercédès, la belle Mercédès; il revient pour cela, du moins.»

Pendant ce temps, Danglars enveloppait d'un regard perçant le jeune homme, sur le cœur duquel les paroles de Caderousse tombaient comme du plomb fondu.

«Et à quand la noce?

demanda-t-il. —Oh!

elle n'est pas encore faite! murmura Fernand. —Non, mais elle se fera, dit Caderousse, aussi vrai que Dantès sera le capitaine du Pharaon , n'est-ce pas, Danglars?»

Danglars tressaillit à cette atteinte inattendue, et se retourna vers Caderousse, dont à son tour il étudia le visage pour voir si le coup était prémédité; mais il ne lut rien que l'envie sur ce visage déjà presque hébété par l'ivresse.

«Eh bien, dit-il en remplissant les verres, buvons donc au capitaine Edmond Dantès, mari de la belle Catalane!»

Caderousse porta son verre à sa bouche d'une main alourdie et l'avala d'un trait.

Fernand prit le sien et le brisa contre terre. «Eh!

eh! eh! dit Caderousse, qu'aperçois-je donc là-bas, au haut de la butte, dans la direction des Catalans? Regarde donc, Fernand, tu as meilleure vue que moi; je crois que je commence à voir trouble, et, tu le sais, le vin est un traître: on dirait deux amants qui marchent côte à côte et la main dans la main. Dieu me pardonne! ils ne se doutent pas que nous les voyons, et les voilà qui s'embrassent!» Danglars ne perdait pas une des angoisses de Fernand, dont le visage se décomposait à vue d'œil.

«Les connaissez-vous, monsieur Fernand?

dit-il.

—Oui, répondit celui-ci d'une voix sourde, c'est M. Edmond et Mlle Mercédès.

—Ah!

voyez-vous! dit Caderousse, et moi qui ne les reconnaissais pas! Ohé! Dantès! ohé! la belle fille! venez par ici un peu, et dites-nous à quand la noce, car voici M. Fernand qui est si entêté qu'il ne veut pas nous le dire. —Veux-tu te taire!

dit Danglars, affectant de retenir Caderousse, qui, avec la ténacité des ivrognes, penchait hors du berceau; tâche de te tenir debout et laisse les amoureux s'aimer tranquillement. Tiens, regarde M. Fernand, et prends exemple: il est raisonnable, lui.» Peut-être Fernand, poussé à bout, aiguillonné par Danglars comme le taureau par les banderilleros, allait-il enfin s'élancer, car il s'était déjà levé et semblait se ramasser sur lui-même pour bondir sur son rival; mais Mercédès, riante et droite, leva sa belle tête et fit rayonner son clair regard; alors Fernand se rappela la menace qu'elle avait faite, de mourir si Edmond mourait, et il retomba tout découragé sur son siège.

Danglars regarda successivement ces deux hommes: l'un abruti par l'ivresse, l'autre dominé par l'amour.

«Je ne tirerai rien de ces niais-là, murmura-t-il, et j'ai grand-peur d'être ici entre un ivrogne et un poltron: voici un envieux qui se grise avec du vin, tandis qu'il devrait s'enivrer de fiel; voici un grand imbécile à qui on vient de prendre sa maîtresse sous son nez et qui se contente de pleurer et de se plaindre comme un enfant.

Et cependant, cela vous a des yeux flamboyants comme ces Espagnols, ces Siciliens et ces Calabrais, qui se vengent si bien; cela vous a des poings à écraser une tête de bœuf aussi sûrement que le ferait la masse d'un boucher. Décidément, le destin d'Edmond l'emporte; il épousera la belle fille, il sera capitaine et se moquera de nous; à moins que... un sourire livide se dessina sur les lèvres de Danglars—à moins que je ne m'en mêle, ajouta-t-il. —Holà!

continuait de crier Caderousse à moitié levé et les poings sur la table, holà! Edmond!

tu ne vois donc pas les amis, ou est-ce que tu es déjà trop fier pour leur parler? —Non, mon cher Caderousse, répondit Dantès, je ne suis pas fier, mais je suis heureux, et le bonheur aveugle, je crois, encore plus que la fierté.

—À la bonne heure!

voilà une explication, dit Caderousse. Eh!

bonjour, madame Dantès.» Mercédès salua gravement.

«Ce n'est pas encore mon nom, dit-elle, et dans mon pays cela porte malheur, assure-t-on, d'appeler les filles du nom de leur fiancé avant que ce fiancé soit leur mari; appelez-moi donc Mercédès, je vous prie.

—Il faut lui pardonner, à ce bon voisin Caderousse, dit Dantès, il se trompe de si peu de chose!

—Ainsi, la noce va avoir lieu incessamment monsieur Dantès?

dit Danglars en saluant les deux jeunes gens. —Le plus tôt possible, monsieur Danglars; aujourd'hui tous les accords chez le papa Dantès, et demain ou après-demain, au plus tard, le dîner des fiançailles, ici, à la Réserve.

Les amis y seront, je l'espère; c'est vous dire que vous êtes invité, monsieur Danglars; c'est te dire que tu en es, Caderousse. —Et Fernand, dit Caderousse en riant d'un rire pâteux, Fernand en est-il aussi?

—Le frère de ma femme est mon frère, dit Edmond, et nous le verrions avec un profond regret, Mercédès et moi, s'écarter de nous dans un pareil moment.»

Fernand ouvrit la bouche pour répondre; mais la voix expira dans sa gorge, et il ne put articuler un seul mot.

«Aujourd'hui les accords, demain ou après-demain les fiançailles... diable!

vous êtes bien pressé, capitaine. —Danglars, reprit Edmond en souriant, je vous dirai comme Mercédès disait tout à l'heure à Caderousse: ne me donnez pas le titre qui ne me convient pas encore, cela me porterait malheur.

—Pardon, répondit Danglars; je disais donc simplement que vous paraissiez bien pressé; que diable!

nous avons le temps: le Pharaon ne se remettra guère en mer avant trois mois. —On est toujours pressé d'être heureux, monsieur Danglars, car lorsqu'on a souffert longtemps on a grand-peine à croire au bonheur.

Mais ce n'est pas l'égoïsme seul qui me fait agir: il faut que j'aille à Paris. —Ah!

vraiment! à Paris: et c'est la première fois que vous y allez, Dantès? —Oui.

—Vous y avez affaire?

—Pas pour mon compte: une dernière commission de notre pauvre capitaine Leclère à remplir; vous comprenez, Danglars, c'est sacré.

D'ailleurs soyez tranquille, je ne prendrai que le temps d'aller et revenir. —Oui, oui, je comprends», dit tout haut Danglars.

Puis tout bas:

«À Paris, pour remettre à son adresse sans doute la lettre que le grand maréchal lui a donnée.

Pardieu! cette lettre me fait pousser une idée, une excellente idée! Ah!

Dantès, mon ami, tu n'es pas encore couché au registre du Pharaon sous le numéro 1.» Puis se retournant vers Edmond, qui s'éloignait déjà:

«Bon voyage!

lui cria-t-il. —Merci», répondit Edmond en retournant la tête et en accompagnant ce mouvement d'un geste amical.

Puis les deux amants continuèrent leur route, calmes et joyeux comme deux élus qui montent au ciel.

3. Les Catalans 3. Die Katalanen 3. The Catalans 3. Los catalanes 3. De Catalanen 3. Katalończycy 3. Os catalães 3. Katalanerna

À cent pas de l’endroit où les deux amis, les regards à l’horizon et l’oreille au guet, sablaient le vin pétillant de La Malgue, s’élevait, derrière une butte nue et rongée par le soleil et le mistral, le village des Catalans. A hundred paces from where the two friends, the glances on the horizon and the watchful ear, sizzled the sparkling wine of La Malgue, rose, behind a bare hillock and eaten away by the sun and the mistral, the village of Catalans. В ста шагах от того места, где двое друзей, взгляды на горизонте и бдительное ухо, испепеляли игристое вино Ла Малги, поднялись за голым холмом и съели солнце и мистраль, деревня каталонцев.

Un jour, une colonie mystérieuse partit de l’Espagne et vint aborder à la langue de terre où elle est encore aujourd’hui. One day, a mysterious colony left Spain and approached the land where it is still today.

Elle arrivait on ne savait d’où et parlait une langue inconnue. She came in from where and spoke an unknown language. Она вошла откуда и говорила на незнакомом языке. Un des chefs, qui entendait le provençal, demanda à la commune de Marseille de leur donner ce promontoire nu et aride, sur lequel ils venaient, comme les matelots antiques, de tirer leurs bâtiments. One of the chiefs, who heard the Provencal, asked the commune of Marseilles to give them that bare and arid promontory on which they came, like the old sailors, to draw their buildings. Один из начальников, которые услышали провансаль, попросил коммуну Марселя дать им тот голый и сухой ясень, на котором они пришли, как и старые моряки, чтобы нарисовать свои здания. La demande lui fut accordée, et trois mois après, autour des douze ou quinze bâtiments qui avaient amené ces bohémiens de la mer, un petit village s’élevait. The request was granted to him, and three months later, around the twelve or fifteen buildings which had brought these gypsies from the sea, a small village was raised. Запрос был предоставлен ему, а три месяца спустя, вокруг двенадцати или пятнадцати зданий, которые привели этих цыган с моря, была поднята небольшая деревня. Ce village construit d’une façon bizarre et pittoresque, moitié maure, moitié espagnol, est celui que l’on voit aujourd’hui habité par des descendants de ces hommes, qui parlent la langue de leurs pères. This village, built in a bizarre and picturesque way, half Moorish, half Spanish, is the one that we see today inhabited by descendants of these men, who speak the language of their fathers.

Depuis trois ou quatre siècles, ils sont encore demeurés fidèles à ce petit promontoire, sur lequel ils s’étaient abattus, pareils à une bande d’oiseaux de mer, sans se mêler en rien à la population marseillaise, se mariant entre eux, et ayant conservé les mœurs et le costume de leur mère patrie, comme ils en ont conservé le langage. For three or four centuries they have remained faithful to this little promontory, on which they had fallen, like a band of sea-birds, without interfering with the people of Marseilles, marrying each other, and having preserved the manners and the costume of their mother country, as they have preserved their language. Il faut que nos lecteurs nous suivent à travers l’unique rue de ce petit village, et entrent avec nous dans une de ces maisons auxquelles le soleil a donné, au-dehors, cette belle couleur feuille morte particulière aux monuments du pays, et, au-dedans, une couche de badigeon, cette teinte blanche qui forme le seul ornement des posadas espagnoles. Our readers must follow us through the only street of this little village, and enter with us into one of those houses to which the sun has given, outside, this beautiful dead leaf color peculiar to the monuments of the country, and, inside, a layer of whitewash, the white hue that forms the only ornament of Spanish posadas.

Une belle jeune fille aux cheveux noirs comme le jais, aux yeux veloutés comme ceux de la gazelle, tenait debout, adossée à une cloison, et froissait entre ses doigts effilés et d’un dessin antique une bruyère innocente dont elle arrachait les fleurs, et dont les débris jonchaient déjà le sol; en outre, ses bras nus jusqu’au coude, ses bras brunis, mais qui semblaient modelés sur ceux de la Vénus d’Arles, frémissaient d’une sorte d’impatience fébrile, et elle frappait la terre de son pied souple et cambré, de sorte que l’on entrevoyait la forme pure, fière et hardie de sa jambe, emprisonnée dans un bas de coton rouge à coins gris et bleus. A beautiful girl with black hair like jet, with velvety eyes like those of the gazelle, stood upright, leaning against a partition, and crumpled between her tapered fingers and an antique drawing an innocent heath from which she tore the flowers, and whose debris was already strewing the ground; besides, her arms naked to the elbow, her arms burnished, but which seemed to be modeled on those of the Venus of Arles, quivered with a kind of feverish impatience, and she struck the earth with her supple and arched foot, so that one could glimpse the pure, proud and bold form of his leg, trapped in a red cotton stocking with gray and blue corners.

À trois pas d’elle, assis sur une chaise qu’il balançait d’un mouvement saccadé, appuyant son coude à un vieux meuble vermoulu, un grand garçon de vingt à vingt-deux ans la regardait d’un air où se combattaient l’inquiétude et le dépit; ses yeux interrogeaient, mais le regard ferme et fixe de la jeune fille dominait son interlocuteur. Three steps away from her, seated on a chair that he rocked with a jerky motion, resting his elbow on an old rotten piece of furniture, a tall boy of twenty to twenty-two years of age was looking at her with an air where worry and spite; her eyes were questioning, but the girl's firm, steady gaze dominated her interlocutor.

«Voyons, Mercédès, disait le jeune homme, voici Pâques qui va revenir, c’est le moment de faire une noce, répondez-moi! "Come, Mercedes," said the young man, "Easter is coming, it's time to make a wedding, answer me!

—Je vous ai répondu cent fois, Fernand, et il faut en vérité que vous soyez bien ennemi de vous-même pour m’interroger encore! "I have answered you a hundred times, Fernand, and you must really be an enemy of yourself to interrogate me again!

—Eh bien, répétez-le encore, je vous en supplie, répétez-le encore pour que j’arrive à le croire. -Well, repeat it again, I beg you, repeat it again so that I can believe it.

Dites-moi pour la centième fois que vous refusez mon amour, qu’approuvait votre mère; faites-moi bien comprendre que vous vous jouez de mon bonheur, que ma vie et ma mort ne sont rien pour vous. Tell me for the hundredth time that you refuse my love, which your mother approved; make me understand that you are playing with my happiness, that my life and my death are nothing for you. Ah!

mon Dieu, mon Dieu! my God, my God! avoir rêvé dix ans d’être votre époux, Mercédès, et perdre cet espoir qui était le seul but de ma vie! having dreamed ten years of being your husband, Mercedes, and losing that hope which was the only goal of my life! —Ce n’est pas moi du moins qui vous ai jamais encouragé dans cet espoir, Fernand, répondit Mercédès; vous n’avez pas une seule coquetterie à me reprocher à votre égard. "It was not me at least who ever encouraged you in this hope, Fernand," replied Mercedes; you do not have a single coquetry to reproach me for you.

Je vous ai toujours dit: «Je vous aime comme un frère, mais n’exigez jamais de moi autre chose que cette amitié fraternelle, car mon cœur est à un autre.» Vous ai-je toujours dit cela, Fernand? I have always said to you: "I love you like a brother, but never demand of me anything other than this fraternal friendship, because my heart belongs to another." Have I always told you that, Fernand? —Oui, je le sais bien, Mercédès, répondit le jeune homme; oui, vous vous êtes donné, vis-à-vis de moi, le cruel mérite de la franchise; mais oubliez-vous que c’est parmi les Catalans une loi sacrée de se marier entre eux? "Yes, I know it well, Mercedes," replied the young man; yes, you have given yourself, to me, the cruel merit of frankness; but do you forget that it is among the Catalans a sacred law to marry each other?

—Vous vous trompez, Fernand, ce n’est pas une loi, c’est une habitude, voilà tout; et, croyez-moi, n’invoquez pas cette habitude en votre faveur. "You are mistaken, Fernand, it is not a law, it is a habit, that is all; and, believe me, do not invoke this habit in your favor.

Vous êtes tombé à la conscription, Fernand; la liberté qu’on vous laisse, c’est une simple tolérance; d’un moment à l’autre vous pouvez être appelé sous les drapeaux. You have fallen to conscription, Fernand; the liberty they leave you is a mere tolerance; from one moment to the next you can be called to the flag. Ты упал на воинскую повинность, Фернанд; свобода, которую они оставляют за вами, - это простая толерантность; с одного момента на другой вы можете вызвать флаг. Une fois soldat, que ferez-vous de moi, c’est-à-dire d’une pauvre fille orpheline, triste, sans fortune, possédant pour tout bien une cabane presque en ruine, où pendent quelques filets usés, misérable héritage laissé par mon père à ma mère et par ma mère à moi? Once a soldier, what will you do with me, that is to say, of a poor orphaned girl, sad, without fortune, possessing for all good a hut almost in ruins, where hang some worn nets, miserable inheritance left by my father to my mother and my mother to me? Depuis un an qu’elle est morte, songez donc, Fernand, que je vis presque de la charité publique! For a year since she died, think, Fernand, that I live almost from public charity! Quelquefois vous feignez que je vous suis utile, et cela pour avoir le droit de partager votre poche avec moi; et j’accepte, Fernand, parce que vous êtes le fils d’un frère de mon père, parce que nous avons été élevés ensemble et plus encore parce que, par-dessus tout, cela vous ferait trop de peine si je vous refusais. Sometimes you pretend that I am useful to you, and that to have the right to share your pocket with me; and I accept, Fernand, because you are the son of a brother of my father, because we were brought up together, and still more because, above all, it would be too painful for me if I refused you. Mais je sens bien que ce poisson que je vais vendre et dont je tire l’argent avec lequel j’achète le chanvre que je file, je sens bien, Fernand, que c’est une charité. But I feel that this fish that I'm going to sell and from which I draw the money with which I buy the hemp that I run, I feel, Fernand, that it is a charity. —Et qu’importe, Mercédès, si, pauvre et isolée que vous êtes, vous me convenez ainsi mieux que la fille du plus fier armateur ou du plus riche banquier de Marseille! "And what does it matter, Mercedes, if, poor and isolated, you are better than the daughter of the proudest shipowner or the richest banker in Marseilles! «И какое это имеет значение, Мерседес, если, бедный и изолированный, вы лучше, чем дочь самого гордого судовладельца или богатейшего банкира в Марселе!

À nous autres, que nous faut-il? To us, what do we need? Для нас, что нам нужно? Une honnête femme et une bonne ménagère. An honest woman and a good housewife. Où trouverais-je mieux que vous sous ces deux rapports? Where would I find better than you in these two respects? —Fernand, répondit Mercédès en secouant la tête, on devient mauvaise ménagère et on ne peut répondre de rester honnête femme lorsqu’on aime un autre homme que son mari. "Fernande," said Mercedes, shaking her head, "we become a bad housekeeper, and we can not answer to remain an honest wife when we love another man than her husband."

Contentez-vous de mon amitié, car, je vous le répète, c’est tout ce que je puis vous promettre, et je ne promets que ce que je suis sûre de pouvoir donner. Be satisfied with my friendship, for, I repeat it to you, it is all that I can promise you, and I promise only what I am sure I can give. —Oui, je comprends, dit Fernand; vous supportez patiemment votre misère, mais vous avez peur de la mienne. "Yes, I understand," said Fernand; you patiently endure your misery, but you are afraid of mine.

Eh bien, Mercédès, aimé de vous, je tenterai la fortune; vous me porterez bonheur, et je deviendrai riche: je puis étendre mon état de pêcheur; je puis entrer comme commis dans un comptoir; je puis moi-même devenir marchand! Well, Mercedes, beloved of you, I will try fortune; you will bring me happiness, and I will become rich: I can extend my state of fisherman; I can enter as a clerk in a counter; I can become a merchant myself! —Vous ne pouvez rien tenter de tout cela, Fernand; vous êtes soldat, et si vous restez aux Catalans, c’est parce qu’il n’y a pas de guerre. "You can not try anything, Fernand; you are a soldier, and if you stay with the Catalans, it is because there is no war.

Demeurez donc pêcheur; ne faites point de rêves qui vous feraient paraître la réalité plus terrible encore, et contentez-vous de mon amitié, puisque je ne puis vous donner autre chose. Stay then fisherman; do not make dreams that would make you look even more terrible, and be content with my friendship, since I can not give you anything else. —Eh bien, vous avez raison, Mercédès, je serai marin; j’aurai, au lieu du costume de nos pères que vous méprisez, un chapeau verni, une chemise rayée et une veste bleue avec des ancres sur les boutons. "Well, you are right, Mercedes, I will be a sailor; I will have, instead of the costume of our fathers whom you despise, a varnished hat, a striped shirt, and a blue jacket with anchors on the buttons.

N’est-ce point ainsi qu’il faut être habillé pour vous plaire? Is it not so that one must be dressed to please you? —Que voulez-vous dire? -What do you mean?

demanda Mercédès en lançant un regard impérieux, que voulez-vous dire? asked Mercedes, casting a compelling glance, what do you mean? Je ne vous comprends pas. I do not understand you. —Je veux dire, Mercédès, que vous n’êtes si dure et si cruelle pour moi que parce que vous attendez quelqu’un qui est ainsi vêtu. "I mean, Mercedes, that you are so hard and cruel to me only because you are waiting for someone who is so clothed. «Я имею в виду, Мерседес, что ты так жесток и жесток ко мне, потому что ты ждёшь того, кто так одет.

Mais celui que vous attendez est inconstant peut-être, et, s’il ne l’est pas, la mer l’est pour lui. But the one you expect is inconstant perhaps, and if it is not, the sea is for him. Но тот, которого вы ожидаете, непостоянный, возможно, и если это не так, море для него. —Fernand, s’écria Mercédès, je vous croyais bon et je me trompais! "Fernande," exclaimed Mercedes, "I thought you were good and I was wrong!

Fernand, vous êtes un mauvais cœur d’appeler à l’aide de votre jalousie les colères de Dieu! Fernand, you have a bad heart to call on the anger of God for the help of your jealousy! Фернан, ты плохое сердце, чтобы называть гнев Бога на помощь своей ревности! Eh bien, oui, je ne m’en cache pas, j’attends et j’aime celui que vous dites, et s’il ne revient pas, au lieu d’accuser cette inconstance que vous invoquez, vous, je dirai qu’il est mort en m’aimant.» Well, yes, I do not hide it, I wait and I love the one you say, and if he does not come back, instead of accusing this inconstancy that you invoke, you, I will say that he died while loving me. " Le jeune Catalan fit un geste de rage. The young Catalan made a gesture of rage.

«Je vous comprends, Fernand: vous vous en prendrez à lui de ce que je ne vous aime pas; vous croiserez votre couteau catalan contre son poignard! "I understand you, Fernand: you will take it upon himself that I do not love you; you will meet your Catalan knife against his dagger! «Я тебя понимаю, Фернанд: ты будешь считать, что я не люблю тебя; вы встретите свой каталонский нож против его кинжала!

À quoi cela vous avancera-t-il? What will it bring you? Что это принесет вам? À perdre mon amitié si vous êtes vaincu, à voir mon amitié se changer en haine si vous êtes vainqueur. To lose my friendship if you are defeated, to see my friendship turn into hate if you win. Croyez-moi, chercher querelle à un homme est un mauvais moyen de plaire à la femme qui aime cet homme. Believe me, quarreling with a man is a bad way to please the woman who loves this man. Поверьте мне, ссориться с мужчиной - это плохой способ угодить женщине, которая любит этого человека. Non, Fernand, vous ne vous laisserez point aller ainsi à vos mauvaises pensées. No, Fernand, you will not let yourself go to your bad thoughts. Ne pouvant m’avoir pour femme, vous vous contenterez de m’avoir pour amie et pour sœur; et d’ailleurs, ajouta-t-elle, les yeux troublés et mouillés de larmes, attendez, attendez, Fernand: vous l’avez dit tout à l’heure, la mer est perfide, et il y a déjà quatre mois qu’il est parti; depuis quatre mois j’ai compté bien des tempêtes!» Not being able to have me for my wife, you will content yourself with having me as a friend and a sister; and besides, "she added, her eyes troubled and wet with tears," wait, wait, Fernand. As you said just now, the sea is treacherous, and it has been four months since he left; for four months I've had a lot of storms! " Fernand demeura impassible; il ne chercha pas à essuyer les larmes qui roulaient sur les joues de Mercédès; et cependant, pour chacune de ces larmes, il eût donné un verre de son sang; mais ces larmes coulaient pour un autre. Fernand remained impassive; he did not try to wipe away the tears which rolled on the cheeks of Mercedes; and yet, for each of these tears, he would have given a glass of his blood; but these tears flowed for another. Фернан остался безразличным; он не пытался вытереть слезы, которые катились по щекам Мерседеса; и все же, за каждую из этих слез, он дал бы стакан своей крови; но эти слезы текли по другому.

Il se leva, fit un tour dans la cabane et revint, s’arrêta devant Mercédès, l’œil sombre et les poings crispés. He got up, went around the cabin and came back, stopped in front of Mercedes, his eyes dark and his fists clenched.

«Voyons, Mercédès, dit-il, encore une fois répondez: est-ce bien résolu? "Come, Mercedes," he said, "answer once more: is this solved?

—J’aime Edmond Dantès, dit froidement la jeune fille, et nul autre qu’Edmond ne sera mon époux. "I love Edmond Dantes," said the girl coldly, "and no one but Edmond will be my husband."

—Et vous l’aimerez toujours? "And you will always love him?"

—Tant que je vivrai.» -As long as I live. "

Fernand baissa la tête comme un homme découragé, poussa un soupir qui ressemblait à un gémissement; puis tout à coup relevant le front, les dents serrées et les narines entrouvertes: Fernand lowered his head like a discouraged man, uttered a sigh that resembled a groan; then suddenly raising the forehead, the clenched teeth and the half-opened nostrils:

«Mais s’il est mort? "But what if he's dead?"

—S’il est mort, je mourrai. “If he's dead, I'll die.

—Mais s’il vous oublie? "But if he forgets you?"

—Mercédès! -Mercédès!

cria une voix joyeuse au-dehors de la maison, Mercédès! shouted a happy voice from outside the house, Mercédès! —Ah! -Ah!

s’écria la jeune fille en rougissant de joie et en bondissant d’amour, tu vois bien qu’il ne m’a pas oubliée, puisque le voilà!» exclaimed the young girl, blushing with joy and leaping with love, "you see that he has not forgotten me, since he is here!" - воскликнула молодая девушка, краснея от радости и прыгая с любовью. - Видишь, он не забыл меня, так как он здесь! Et elle s’élança vers la porte, qu’elle ouvrit en s’écriant: And she rushed towards the door, which she opened, exclaiming:

«À moi, Edmond! "To me, Edmond!"

me voici.» Here I am." Fernand, pâle et frémissant, recula en arrière comme fait un voyageur à la vue d’un serpent, et rencontrant sa chaise, il y retomba assis. Fernand, pale and quivering, recoiled backward like a traveler at the sight of a snake, and meeting his chair, he fell back seated.

Edmond et Mercédès étaient dans les bras l’un de l’autre. Edmond and Mercedes were in each other's arms.

Le soleil ardent de Marseille, qui pénétrait à travers l’ouverture de la porte, les inondait d’un flot de lumière. The burning sun of Marseilles, which penetrated through the opening of the door, flooded them with a flood of light. D’abord ils ne virent rien de ce qui les entourait. At first they saw nothing of what surrounded them. Un immense bonheur les isolait du monde, et ils ne parlaient que par ces mots entrecoupés qui sont les élans d’une joie si vive qu’ils semblent l’expression de la douleur. An immense happiness isolated them from the world, and they spoke only through those broken words which are the impetuses of a joy so strong that they seem the expression of pain. Tout à coup Edmond aperçut la figure sombre de Fernand, qui se dessinait dans l’ombre, pâle et menaçante; par un mouvement dont il ne se rendit pas compte lui-même, le jeune Catalan tenait la main sur le couteau passé à sa ceinture. Suddenly Edmond perceived Fernand's dark face, which was outlined in the shadow, pale and menacing; by a movement of which he himself did not realize himself, the young Catalan held his hand on the knife he had put on his belt.

«Ah! "Ah!

pardon, dit Dantès en fronçant le sourcil à son tour, je n’avais pas remarqué que nous étions trois.» I'm sorry, "said Dantes, frowning in turn," I did not notice there were three of us. " Puis, se tournant vers Mercédès: Then, turning to Mercédès:

«Qui est ce monsieur? "Who is this man?

demanda-t-il. he asked. —Monsieur sera votre meilleur ami, Dantès, car c’est mon ami à moi, c’est mon cousin, c’est mon frère; c’est Fernand; c’est-à-dire l’homme qu’après vous, Edmond, j’aime le plus au monde; ne le reconnaissez-vous pas? "Monsieur will be your best friend, Dantes, for he is my friend, he is my cousin, he is my brother; it's Fernand; that is to say, the man whom, after you, Edmond, I love most in the world; do not you recognize it?

—Ah! “Ah!

si fait», dit Edmond. yes, ”said Edmond. Et, sans abandonner Mercédès, dont il tenait la main serrée dans une des siennes, il tendit avec un mouvement de cordialité son autre main au Catalan. And, without abandoning Mercedes, whose hand he held tightly in one of his, he extended his other hand with a cordial gesture to the Catalan.

Mais Fernand, loin de répondre à ce geste amical, resta muet et immobile comme une statue. But Fernand, far from answering this friendly gesture, remained silent and motionless like a statue.

Alors Edmond promena son regard investigateur de Mercédès, émue et tremblante, à Fernand, sombre et menaçant. Then Edmond turned his searching gaze from Mercedes, moved and trembling, to Fernand, dark and menacing.

Ce seul regard lui apprit tout. This single look taught him everything.

La colère monta à son front. Anger rose to his forehead.

«Je ne savais pas venir avec tant de hâte chez vous Mercédès, pour y trouver un ennemi. "I did not know how to come with such haste to see you, Mercedes, to find an enemy.

—Un ennemi! -An enemy!

s’écria Mercédès avec un regard de courroux à l’adresse de son cousin; un ennemi chez moi, dis-tu, Edmond! exclaimed Mercedes with a look of anger at her cousin's address; an enemy at home, you say, Edmond! Si je croyais cela, je te prendrais sous le bras et je m’en irais à Marseille, quittant la maison pour n’y plus jamais rentrer.» If I thought that, I would take you under my arm and I would go to Marseille, leaving the house never to return. " L’œil de Fernand lança un éclair. Fernand's eye flashed.

«Et s’il t’arrivait malheur, mon Edmond, continua-t-elle avec ce même flegme implacable qui prouvait à Fernand que la jeune fille avait lu jusqu’au plus profond de sa sinistre pensée, s’il t’arrivait malheur, je monterais sur le cap de Morgion, et je me jetterais sur les rochers la tête la première.» "And if misfortune befall you, my Edmond," she continued, with the same implacable phlegm which proved to Fernand that the girl had read to the depths of her sinister thought, if misfortune should happen to you I would go up on the cape of Morgion, and I would throw myself on the rocks, head first. "

Fernand devint affreusement pâle. Fernand became terribly pale.

«Mais tu t’es trompé, Edmond, poursuivit-elle, tu n’as point d’ennemi ici; il n’y a que Fernand, mon frère, qui va te serrer la main comme à un ami dévoué.» "But you are mistaken, Edmond," she went on, "you have no enemy here; only Fernand, my brother, will shake your hand like a devoted friend. "

Et à ces mots, la jeune fille fixa son visage impérieux sur le Catalan, qui, comme s’il eût été fasciné par ce regard, s’approcha lentement d’Edmond et tendit la main. And at these words, the girl fixed her imperious face on the Catalan, who, as if fascinated by this look, slowly approached Edmond and held out his hand.

Sa haine, pareille à une vague impuissante, quoique furieuse, venait se briser contre l’ascendant que cette femme exerçait sur lui. Her hatred, like a helpless wave, though furious, was breaking against her ascendancy over him. Ее ненависть, как беспомощная волна, хотя и яростная, нарушала ее господство над ним.

Mais à peine eut-il touché la main d’Edmond, qu’il sentit qu’il avait fait tout ce qu’il pouvait faire, et qu’il s’élança hors de la maison. But scarcely had he touched Edmond's hand than he felt that he had done all he could, and that he sprang out of the house.

«Oh!

s’écriait-il en courant comme un insensé en noyant ses mains dans ses cheveux, oh! he cried, running like a madman, drowning his hands in his hair, oh! - крикнул он, как дурак, и тонул руки в волосах, о! qui me délivrera donc de cet homme? Who will deliver me from this man? Malheur à moi! Woe to me! malheur à moi! woe to me! —Eh! -Hey!

le Catalan! the Catalan! eh! eh! Fernand! Fernand! où cours-tu?» dit une voix. where are you running? "said a voice. Le jeune homme s’arrêta tout court, regarda autour de lui, et aperçut Caderousse attablé avec Danglars sous un berceau de feuillage. The young man stopped short, looked around him, and saw Caderousse sitting with Danglars under a cradle of foliage.

«Eh!

dit Caderousse, pourquoi ne viens-tu pas? said Caderousse, why don't you come? Es-tu donc si pressé que tu n’aies pas le temps de dire bonjour aux amis? Are you so in a hurry that you do not have time to say hello to friends? —Surtout quand ils ont encore une bouteille presque pleine devant eux», ajouta Danglars. "Especially when they still have a bottle full in front of them," Danglars added.

Fernand regarda les deux hommes d’un air hébété, et ne répondit rien. Fernand looked at the two men dazedly, and made no reply.

«Il semble tout penaud, dit Danglars, poussant du genou Caderousse: est-ce que nous nous serions trompés, et qu’au contraire de ce que nous avions prévu, Dantès triompherait? "He looks sheepish," said Danglars, pushing Caderousse's knee: "would we have been mistaken, and, contrary to what we had foreseen, Dantes would triumph?

—Dame! -Lady!

il faut voir», dit Caderousse. you must see, "says Caderousse. Et se retournant vers le jeune homme: And turning to the young man:

«Eh bien, voyons, le Catalan, te décides-tu?» dit-il. "Well, let's see, Catalan, do you decide?" He said.

Fernand essuya la sueur qui ruisselait de son front et entra lentement sous la tonnelle, dont l’ombrage sembla rendre un peu de calme à ses sens et la fraîcheur un peu de bien-être à son corps épuisé. Fernand wiped the sweat from his forehead and slowly entered the arbor, whose shading seemed to calm his senses and the freshness and well-being of his exhausted body.

«Bonjour, dit-il, vous m’avez appelé, n’est-ce pas?» "Hello," he said, "you called me, didn't you?"

Et il tomba plutôt qu’il ne s’assit sur un des sièges qui entouraient la table. And he fell rather than sat on one of the seats around the table.

«Je t’ai appelé parce que tu courais comme un fou, et que j’ai eu peur que tu n’allasses te jeter à la mer, dit en riant Caderousse. "I called you because you were running like crazy, and I was afraid you would go to the sea," said Caderousse, laughing. «Я позвонил тебе, потому что ты бежал, как сумасшедший, и я боялся, что ты пойдешь в море», смеясь, сказал Кадрусс.

Que diable, quand on a des amis, c’est non seulement pour leur offrir un verre de vin, mais encore pour les empêcher de boire trois ou quatre pintes d’eau.» What the hell, when we have friends, it's not just to give them a glass of wine, but to keep them from drinking three or four pints of water. " Какого черта, когда у нас есть друзья, это не только дать им бокал вина, но и не дать им выпить три или четыре пинты воды ». Fernand poussa un gémissement qui ressemblait à un sanglot et laissa tomber sa tête sur ses deux poignets, posés en croix sur la table. Fernand let out a moan that sounded like a sob and let his head fall on his two wrists, which were placed crosswise on the table.

«Eh bien, veux-tu que je te dise, Fernand, reprit Caderousse, entamant l’entretien avec cette brutalité grossière des gens du peuple auxquels la curiosité fait oublier toute diplomatie; eh bien, tu as l’air d’un amant déconfit!» "Well, do you want me to tell you, Fernand," said Caderousse, beginning the interview with that crude brutality of the people of the people, whose curiosity makes diplomacy forget; Well, you look like a deceitful lover! " «Хорошо, вы хотите, чтобы я сказал вам, Фернанд, - сказал Кадрусс, начиная интервью с грубой жестокостью людей народа, чье любопытство заставляет дипломатию забыть; Ну, ты похож на обманчивого любовника!

Et il accompagna cette plaisanterie d’un gros rire. And he accompanied this joke with a loud laugh.

«Bah! “Bah!

répondit Danglars, un garçon taillé comme celui-là n’est pas fait pour être malheureux en amour; tu te moques, Caderousse. replied Danglars, "a boy cut like that is not made to be unhappy in love; you are making fun, Caderousse. —Non pas, reprit celui-ci; écoute plutôt comme il soupire. "No not," resumed the latter; rather listen as he sighs. «Нет, - сказал он. слушайте, как он вздыхает.

Allons, allons, Fernand, dit Caderousse, lève le nez et réponds-nous: ce n’est pas aimable de ne pas répondre aux amis qui nous demandent des nouvelles de notre santé. Come, come, Fernand, said Caderousse, look up and answer us: it is not nice not to answer the friends who ask us news of our health. —Ma santé va bien, dit Fernand crispant ses poings mais sans lever la tête. "My health is fine," said Fernand, clenching his fists, but without lifting his head.

—Ah!

vois-tu Danglars, dit Caderousse en faisant signe de l’œil à son ami, voici la chose: Fernand, que tu vois, et qui est un bon et brave Catalan, un des meilleurs pêcheurs de Marseille, est amoureux d’une belle fille qu’on appelle Mercédès; mais malheureusement il paraît que la belle fille, de son coté, est amoureuse du second du  Pharaon ; et, comme le  Pharaon  est entré aujourd’hui même dans le port, tu comprends? do you see Danglars, "said Caderousse, beckoning to his friend," here is the thing: Fernand, whom you see, and who is a good and brave Catalan, one of the best fishermen of Marseilles, is in love with a pretty a girl called Mercedes; but unfortunately it seems that the beautiful girl, on her side, is in love with the second of the Pharaoh; and as Pharaoh entered the harbor today, do you understand? вы видите Данглара, - сказал Кадрусс, поманив своего друга, - вот что: Фернанд, которого вы видите, и кто хороший и храбрый каталонский, один из лучших рыбаков Марселя, влюблен в симпатичную девушка по имени Мерседес; но, к сожалению, кажется, что красивая девушка, на ее стороне, влюблена в помощника фараона; и как фараон сегодня вошел в гавань, вы понимаете? —Non, je ne comprends pas, dit Danglars. “No, I don't understand,” said Danglars.

—Le pauvre Fernand aura reçu son congé, continua Caderousse. "Poor Fernand will have received his leave," continued Caderousse.

—Eh bien, après? “Well, then?

dit Fernand relevant la tête et regardant Caderousse, en homme qui cherche quelqu’un sur qui faire tomber sa colère; Mercédès ne dépend de personne? said Fernand, raising his head, and looking at Caderousse, as a man who seeks someone upon whom to make his anger fall; Mercedes does not depend on anyone? - сказал Фернанд, поднимая голову и глядя на Кадрусса, как человека, который ищет кого-то, на кого выпадет гнев. Мерседес не зависит ни от кого? n’est-ce pas? is not it? et elle est bien libre d’aimer qui elle veut. and she is free to love who she wants. —Ah!

si tu le prends ainsi, dit Caderousse, c’est autre chose! if you take it thus, says Caderousse, it is something else! Moi, je te croyais un Catalan; et l’on m’avait dit que les Catalans n’étaient pas hommes à se laisser supplanter par un rival; on avait même ajouté que Fernand surtout était terrible dans sa vengeance.» I thought you were a Catalan; and I had been told that the Catalans were not men to be supplanted by a rival; it had even been added that Fernand especially was terrible in his revenge. " Я думал, что ты каталонский; и мне сказали, что каталонцы не должны быть заменены соперником; было даже добавлено, что Фернанду особенно было страшно в его мщении ». Fernand sourit avec pitié. Fernand smiled pityingly.

«Un amoureux n’est jamais terrible, dit-il. "A lover is never terrible," he says.

—Le pauvre garçon! “The poor boy!

reprit Danglars feignant de plaindre le jeune homme du plus profond de son cœur. said Danglars, pretending to pity the young man from the depths of his heart. Que veux-tu? What do you want? il ne s’attendait pas à voir revenir ainsi Dantès tout à coup; il le croyait peut-être mort, infidèle, qui sait? he did not expect to see Dantes come back suddenly; he thought he might be dead, unfaithful, who knows? Ces choses-là sont d’autant plus sensibles qu’elles nous arrivent tout à coup. These things are all the more sensitive as they suddenly arrive. —Ah! Ah!

ma foi, dans tous les cas, dit Caderousse qui buvait tout en parlant et sur lequel le vin fumeux de La Malgue commençait à faire son effet, dans tous les cas, Fernand n’est pas le seul que l’heureuse arrivée de Dantès contrarie, n’est-ce pas, Danglars? "In any case," said Caderousse, who was drinking while talking, and on whom the smoky wine of La Malgue was beginning to make an impression, "in any case, Fernand is not the only one whom the happy arrival of Dantes has been annoying. do not you, Danglars? —Non, tu dis vrai, et j’oserais presque dire que cela lui portera malheur. "No, you're telling the truth, and I would almost dare say that it will bring him bad luck."

—Mais n’importe, reprit Caderousse en versant un verre de vin à Fernand, et en remplissant pour la huitième ou dixième fois son propre verre tandis que Danglars avait à peine effleuré le sien; n’importe, en attendant il épouse Mercédès, la belle Mercédès; il revient pour cela, du moins.» "No matter," said Caderousse, pouring a glass of wine to Fernand, and filling his own glass for the eighth or tenth time, while Danglars had scarcely touched his own; no matter, meanwhile he marries Mercédès, the beautiful Mercedes; he returns for that, at least. " «Неважно, - сказал Кадрусс, наливая бокал вина Фернанду и наполняя свой стакан в восьмой или десятый раз, а Данглар едва ли коснулся его собственного; неважно, между тем он женится на Мерседе, прекрасном Мерседесе; он вернется для этого, по крайней мере.

Pendant ce temps, Danglars enveloppait d’un regard perçant le jeune homme, sur le cœur duquel les paroles de Caderousse tombaient comme du plomb fondu. Meanwhile, Danglars enveloped the young man with piercing eyes, on whose heart Caderousse's words fell like molten lead.

«Et à quand la noce? "And when is the wedding?

demanda-t-il. he asked. —Oh! -Oh!

elle n’est pas encore faite! it is not done yet! это еще не сделано! murmura Fernand. whispered Fernand. —Non, mais elle se fera, dit Caderousse, aussi vrai que Dantès sera le capitaine du  Pharaon , n’est-ce pas, Danglars?» "No, but it will be done," said Caderousse, "as true as Dantes will be Pharaoh's captain, is it not, Danglars?" «Нет, но это будет сделано, - сказал Кадрусс, - так верно, что Дантес станет капитаном фараона, не так ли, Данглар?»

Danglars tressaillit à cette atteinte inattendue, et se retourna vers Caderousse, dont à son tour il étudia le visage pour voir si le coup était prémédité; mais il ne lut rien que l’envie sur ce visage déjà presque hébété par l’ivresse. Danglars flinched at this unexpected attack, and turned to Caderousse, whose face he studied to see if the blow was premeditated; but he read nothing but envy on that face, already almost dazed by drunkenness.

«Eh bien, dit-il en remplissant les verres, buvons donc au capitaine Edmond Dantès, mari de la belle Catalane!» "Well," he said, filling the glasses, "let's drink to Captain Edmond Dantes, husband of the beautiful Catalan!"

Caderousse porta son verre à sa bouche d’une main alourdie et l’avala d’un trait. Caderousse raised his glass to his mouth with a heavy hand and swallowed it in one gulp.

Fernand prit le sien et le brisa contre terre. Fernand took his and broke it to the ground. «Eh!

eh! eh! dit Caderousse, qu’aperçois-je donc là-bas, au haut de la butte, dans la direction des Catalans? said Caderousse, "what can I see there, at the top of the hillock, in the direction of the Catalans? Regarde donc, Fernand, tu as meilleure vue que moi; je crois que je commence à voir trouble, et, tu le sais, le vin est un traître: on dirait deux amants qui marchent côte à côte et la main dans la main. Look, Fernand, you have a better view than me; I believe that I am beginning to be troubled, and, you know, wine is a traitor: it looks like two lovers walking side by side and hand in hand. Послушай, Фернан, у тебя лучше вид, чем у меня; Я думаю, что я начинаю беспокоиться, и, знаете, вино - предатель: это похоже на двух влюбленных, которые идут бок о бок и рука об руку. Dieu me pardonne! God forgive me! ils ne se doutent pas que nous les voyons, et les voilà qui s’embrassent!» they do not suspect that we see them, and here they are kissing! " они не подозревают, что мы их видим, и здесь они целуются! " Danglars ne perdait pas une des angoisses de Fernand, dont le visage se décomposait à vue d’œil. Danglars did not lose one of Fernand's anxieties, whose face was visibly decomposing. Данглар не потерял ни одной из опасений Фернанда, чье лицо явно разлагалось.

«Les connaissez-vous, monsieur Fernand? "Do you know them, Mr. Fernand?

dit-il. he said.

—Oui, répondit celui-ci d’une voix sourde, c’est M. Edmond et Mlle Mercédès. "Yes," replied the latter in a muffled voice, "it is M. Edmond and Miss Mercedes. «Да», ответил он глухим голосом, «это Эдмонд и мисс Мерседес.

—Ah!

voyez-vous! do you see! dit Caderousse, et moi qui ne les reconnaissais pas! said Caderousse, and I who did not recognize them! Ohé! Dantès! Dantès! ohé! la belle fille! the beautiful girl! venez par ici un peu, et dites-nous à quand la noce, car voici M. Fernand qui est si entêté qu’il ne veut pas nous le dire. Come here a little, and tell us when the wedding, because here is Mr. Fernand who is so stubborn that he does not want to tell us. Подойди сюда немного, и скажи нам, когда свадьба, потому что здесь мистер Фернанд, который так упрям, что он не хочет нам рассказывать. —Veux-tu te taire! -Do you keep quiet!

dit Danglars, affectant de retenir Caderousse, qui, avec la ténacité des ivrognes, penchait hors du berceau; tâche de te tenir debout et laisse les amoureux s’aimer tranquillement. said Danglars, affecting to retain Caderousse, who, with the tenacity of the drunkards, was bending out of the cradle; try to stand up and let the lovers love each other quietly. - сказал Данглар, чувствуя, что удерживает Кадрусса, который с упорством пьяниц выгибался из колыбели; постарайтесь удержать вас и позволить любителям любовно любить друг друга. Tiens, regarde M. Fernand, et prends exemple: il est raisonnable, lui.» Here, look at M. Fernand, and take the example: he is reasonable. " Peut-être Fernand, poussé à bout, aiguillonné par Danglars comme le taureau par les banderilleros, allait-il enfin s’élancer, car il s’était déjà levé et semblait se ramasser sur lui-même pour bondir sur son rival; mais Mercédès, riante et droite, leva sa belle tête et fit rayonner son clair regard; alors Fernand se rappela la menace qu’elle avait faite, de mourir si Edmond mourait, et il retomba tout découragé sur son siège. Perhaps Fernand, driven to extremity, goaded by Danglars like the bull by the banderilleros, would he at last set off, for he had already risen and seemed to be gathering on himself to leap upon his rival; but Mercedes, smiling and upright, lifted her fair head and made her clear look shine; then Fernand remembered the threat she had made, to die if Edmond died, and he fell back discouraged in his seat. Возможно, Фернанд, доведенный до конечности, подталкивал Дангларса, как бык к бандериллерам, он, наконец, бросился вперед, потому что он уже встал и, казалось, собирался на себя, чтобы прыгнуть на своего соперника; но Мерседес, улыбаясь и в вертикальном положении, поднял свою светлую голову и ясно показал блеск; затем Фернан вспомнил об угрозе, которую она совершила, чтобы умереть, если Эдмонд умер, и он упал, разочаровавшись на своем месте.

Danglars regarda successivement ces deux hommes: l’un abruti par l’ivresse, l’autre dominé par l’amour. Danglars looked at these two men successively: one stupefied by drunkenness, the other dominated by love.

«Je ne tirerai rien de ces niais-là, murmura-t-il, et j’ai grand-peur d’être ici entre un ivrogne et un poltron: voici un envieux qui se grise avec du vin, tandis qu’il devrait s’enivrer de fiel; voici un grand imbécile à qui on vient de prendre sa maîtresse sous son nez et qui se contente de pleurer et de se plaindre comme un enfant. "I will not draw anything from these silly people," he murmured, "and I am very much afraid of being here between a drunkard and a coward: here is an envious man who gets intoxicated with wine, while he should get drunk with gall; here is a great imbecile who has just been taken by his mistress under his nose and who is satisfied with crying and complaining like a child. «Я ничего не сделаю от этих глупых людей, - пробормотал он, - и я очень боюсь быть здесь между пьяницей и трусом: вот завистник, который опьяняет вино, а он должен напиться желчью; вот великий идиот, который только что был взят под нос его любовницей, и который доволен криком и жаловаться, как ребенок.

Et cependant, cela vous a des yeux flamboyants comme ces Espagnols, ces Siciliens et ces Calabrais, qui se vengent si bien; cela vous a des poings à écraser une tête de bœuf aussi sûrement que le ferait la masse d’un boucher. And yet, it has flaming eyes like those Spaniards, Sicilians, and Calabrians, who revenge themselves so well; it has fists to crush an ox head as surely as a butcher's mass would do. И все же у него есть пылающие глаза, как у испанцев, сицилийцев и калабрийцев, которые так хорошо мстит; у него есть кулаки, чтобы сокрушить голову волка так же точно, как и масса мясника. Décidément, le destin d’Edmond l’emporte; il épousera la belle fille, il sera capitaine et se moquera de nous; à moins que... un sourire livide se dessina sur les lèvres de Danglars—à moins que je ne m’en mêle, ajouta-t-il. Decidedly, the fate of Edmond prevails; he will marry the beautiful girl, he will be captain and make fun of us; unless ... a livid smile appeared on Danglars' lips-unless I interfere, he added. Решительно, судьба Эдмонда превалирует; он женится на красивой девушке, он будет капитаном и высмеивает нас; если ... губы Данглара не появятся, если я не вмешаюсь в это, добавил он. —Holà! - Hello!

continuait de crier Caderousse à moitié levé et les poings sur la table, holà! continued Caderousse, half-raised, and his fists on the table, "hello! Edmond!

tu ne vois donc pas les amis, ou est-ce que tu es déjà trop fier pour leur parler? you do not see friends, or are you already too proud to talk to them? —Non, mon cher Caderousse, répondit Dantès, je ne suis pas fier, mais je suis heureux, et le bonheur aveugle, je crois, encore plus que la fierté. "No, my dear Caderousse," replied Dantes, "I am not proud, but I am happy, and blind happiness, I believe, even more than pride.

—À la bonne heure! -All in good time!

voilà une explication, dit Caderousse. here is an explanation, said Caderousse. Eh!

bonjour, madame Dantès.» Good morning, Madame Dantès." Mercédès salua gravement. Mercedes bowed gravely.

«Ce n’est pas encore mon nom, dit-elle, et dans mon pays cela porte malheur, assure-t-on, d’appeler les filles du nom de leur fiancé avant que ce fiancé soit leur mari; appelez-moi donc Mercédès, je vous prie. “It is not yet my name,” she said, “and in my country it is bad luck, they say, to call girls by the name of their fiancé before this fiancé is their husband; please call me Mercédès.

—Il faut lui pardonner, à ce bon voisin Caderousse, dit Dantès, il se trompe de si peu de chose! "You must forgive him, to that good neighbor Caderousse," said Dantes, "he is mistaken for so little! «Мы должны простить его, этому доброму соседу Кадрусу, - сказал Дантес, - он ошибается за так мало!

—Ainsi, la noce va avoir lieu incessamment monsieur Dantès? - So, the wedding will take place shortly Mr. Dantes?

dit Danglars en saluant les deux jeunes gens. said Danglars, greeting the two young people. —Le plus tôt possible, monsieur Danglars; aujourd’hui tous les accords chez le papa Dantès, et demain ou après-demain, au plus tard, le dîner des fiançailles, ici, à la Réserve. “As soon as possible, Monsieur Danglars; today all the arrangements at papa Dantès, and tomorrow or the day after tomorrow, at the latest, the engagement dinner here at the Reserve. Как можно скорее, г-н Дангларс; сегодня все договоренности в Papa Dantes, а завтра или на следующий день, как минимум, обручальный ужин здесь, в заповеднике.

Les amis y seront, je l’espère; c’est vous dire que vous êtes invité, monsieur Danglars; c’est te dire que tu en es, Caderousse. Friends will be there, I hope; that is to say that you are invited, Mr. Danglars; it's telling you that you are, Caderousse. Надеюсь, там будут друзья. то есть вас приглашают, г-н Дангларс; это говорит вам, что вы, Кадрусс. —Et Fernand, dit Caderousse en riant d’un rire pâteux, Fernand en est-il aussi? "And Fernand," said Caderousse, laughing with a pasty laugh, "is Fernand too?

—Le frère de ma femme est mon frère, dit Edmond, et nous le verrions avec un profond regret, Mercédès et moi, s’écarter de nous dans un pareil moment.» "The brother of my wife is my brother," said Edmond, "and we would see him with deep regret, Mercedes and me, depart from us at such a moment." «Брат моей жены - мой брат, - сказал Эдмонд, - и мы увидим его с большим сожалением, Мерседес и я, уйдем от нас в такой момент».

Fernand ouvrit la bouche pour répondre; mais la voix expira dans sa gorge, et il ne put articuler un seul mot. Fernand opened his mouth to answer; but the voice died in his throat, and he could not speak a single word.

«Aujourd’hui les accords, demain ou après-demain les fiançailles... diable! “Today the agreements, tomorrow or the day after tomorrow the engagement ... devil!

vous êtes bien pressé, capitaine. you are in a great hurry, captain. —Danglars, reprit Edmond en souriant, je vous dirai comme Mercédès disait tout à l’heure à Caderousse: ne me donnez pas le titre qui ne me convient pas encore, cela me porterait malheur. "Langlars," replied Edmond, smiling, "I will tell you, as Mercedes had just said to Caderousse: do not give me the title which does not suit me yet; it would bring me bad luck."

—Pardon, répondit Danglars; je disais donc simplement que vous paraissiez bien pressé; que diable! "Excuse me," replied Danglars; I was simply saying that you seemed in a hurry; What the hell! «Простите, - ответил Дангларс; Я просто говорил, что ты спешил; Какого черта!

nous avons le temps: le  Pharaon  ne se remettra guère en mer avant trois mois. we have time: the Pharaoh will hardly get back to sea for three months. —On est toujours pressé d’être heureux, monsieur Danglars, car lorsqu’on a souffert longtemps on a grand-peine à croire au bonheur. "We are always in a hurry to be happy, Mr. Danglars, for when we have suffered a long time, we have great difficulty in believing in happiness. «Мы всегда торопимся, чтобы быть счастливым, мистер Дангларс, потому что, когда мы долгое время страдали, нам очень трудно верить в счастье.

Mais ce n’est pas l’égoïsme seul qui me fait agir: il faut que j’aille à Paris. But it is not selfishness alone that makes me act: I must go to Paris. —Ah!

vraiment! à Paris: et c’est la première fois que vous y allez, Dantès? in Paris: and this is your first time there, Dantès? —Oui.

—Vous y avez affaire? -Are you dealing with it?

—Pas pour mon compte: une dernière commission de notre pauvre capitaine Leclère à remplir; vous comprenez, Danglars, c’est sacré. "Not for my account: a last commission of our poor Captain Leclere to fill; you understand, Danglars, it's sacred.

D’ailleurs soyez tranquille, je ne prendrai que le temps d’aller et revenir. Besides, don't worry, I will only take the time to go and come back. Кроме того, будь тихим, я буду тратить время только на то, чтобы вернуться и вернуться. —Oui, oui, je comprends», dit tout haut Danglars. "Yes, yes, I understand," said Danglars aloud.

Puis tout bas: Then, in a whisper: Затем, шепотом:

«À Paris, pour remettre à son adresse sans doute la lettre que le grand maréchal lui a donnée. "In Paris, to deliver to his address, no doubt, the letter which the grand marshal gave him.

Pardieu! Pardieu! cette lettre me fait pousser une idée, une excellente idée! this letter makes me grow an idea, an excellent idea! Ah!

Dantès, mon ami, tu n’es pas encore couché au registre du  Pharaon  sous le numéro 1.» Dantes, my friend, you are not yet in the register of the Pharaoh under number 1. " Дантес, друг мой, ты еще не в реестре фараона под номером 1. " Puis se retournant vers Edmond, qui s’éloignait déjà: Then turning to Edmond, who was already moving away: Затем повернулся к Эдмонду, который уже уходил:

«Bon voyage! "Bon voyage!

lui cria-t-il. he shouted. —Merci», répondit Edmond en retournant la tête et en accompagnant ce mouvement d’un geste amical. “Thank you,” Edmond replied, turning his head and accompanying the movement with a friendly gesture.

Puis les deux amants continuèrent leur route, calmes et joyeux comme deux élus qui montent au ciel. Then the two lovers went on their way, calm and happy as two elect who ascend to heaven.