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Le Comte de Monte-Cristo, Alexandre Dumas, Tome 1, 12. Le père et le fils

12. Le père et le fils

M. Noirtier, car c'était en effet lui-même qui venait d'entrer, suivit des yeux le domestique jusqu'à ce qu'il eût refermé la porte; puis, craignant sans doute qu'il n'écoutât dans l'antichambre, il alla rouvrir derrière lui: la précaution n'était pas inutile, et la rapidité avec laquelle maître Germain se retira prouva qu'il n'était point exempt du péché qui perdit nos premiers pères. M. Noirtier prit alors la peine d'aller fermer lui-même la porte de l'antichambre, revint fermer celle de la chambre à coucher, poussa les verrous, et revint tendre la main à Villefort, qui avait suivi tous ces mouvements avec une surprise dont il n'était pas encore revenu.

«Ah çà! sais-tu bien, mon cher Gérard, dit-il au jeune homme en le regardant avec un sourire dont il était assez difficile de définir l'expression, que tu n'as pas l'air ravi de me voir?

—Si fait, mon père, dit Villefort, je suis enchanté; mais j'étais si loin de m'attendre à votre visite, qu'elle m'a quelque peu étourdi.

—Mais, mon cher ami, reprit M. Noirtier en s'asseyant, il me semble que je pourrais vous en dire autant. Comment! vous m'annoncez vos fiançailles à Marseille pour le 28 février, et le 3 mars vous êtes à Paris?

—Si j'y suis, mon père, dit Gérard en se rapprochant de M. Noirtier, ne vous en plaignez pas, car c'est pour vous que j'étais venu, et ce voyage vous sauvera peut-être.

—Ah! vraiment, dit M. Noirtier en s'allongeant nonchalamment dans le fauteuil où il était assis; vraiment! contez-moi donc cela, monsieur le magistrat, ce doit être curieux.

—Mon père, vous avez entendu parler de certain club bonapartiste qui se tient rue Saint-Jacques?

—No 53? Oui, j'en suis vice-président.

—Mon père, votre sang-froid me fait frémir.

—Que veux-tu, mon cher? quand on a été proscrit par les montagnards, qu'on est sorti de Paris dans une charrette de foin, qu'on a été traqué dans les landes de Bordeaux par les limiers de Robespierre, cela vous a aguerri à bien des choses. Continue donc. Eh bien, que s'est-il passé à ce club de la rue Saint-Jacques?

—Il s'y est passé qu'on y a fait venir le général Quesnel, et que le général Quesnel, sorti à neuf heures du soir de chez lui, a été retrouvé le surlendemain dans la Seine.

—Et qui vous a conté cette belle histoire?

—Le roi lui-même, monsieur.

—Eh bien, moi, en échange de votre histoire, continua Noirtier, je vais vous apprendre une nouvelle.

—Mon père, je crois savoir déjà ce que vous allez me dire.

—Ah! vous savez le débarquement de Sa Majesté l'Empereur?

—Silence, mon père, je vous prie, pour vous d'abord, et puis ensuite pour moi. Oui, je savais cette nouvelle, et même je la savais avant vous, car depuis trois jours je brûle le pavé, de Marseille à Paris, avec la rage de ne pouvoir lancer à deux cents lieues en avant de moi la pensée qui me brûle le cerveau.

—Il y a trois jours! êtes-vous fou? Il y a trois jours, l'Empereur n'était pas embarqué.

—N'importe, je savais le projet.

—Et comment cela?

—Par une lettre qui vous était adressée de l'île d'Elbe.

—À moi?

—À vous, et que j'ai surprise dans le portefeuille du messager. Si cette lettre était tombée entre les mains d'un autre, à cette heure, mon père, vous seriez fusillé, peut-être.»

Le père de Villefort se mit à rire.

«Allons, allons, dit-il, il paraît que la Restauration a appris de l'Empire la façon d'expédier promptement les affaires.... Fusillé! mon cher, comme vous y allez! et cette lettre, où est-elle? Je vous connais trop pour craindre que vous l'ayez laissée traîner.

—Je l'ai brûlée, de peur qu'il n'en restât un seul fragment: car cette lettre, c'était votre condamnation.

—Et la perte de votre avenir, répondit froidement Noirtier; oui, je comprends cela; mais je n'ai rien à craindre puisque vous me protégez.

—Je fais mieux que cela, monsieur, je vous sauve.

—Ah! diable! ceci devient plus dramatique; expliquez-vous.

—Monsieur, j'en reviens à ce club de la rue Saint-Jacques.

—Il paraît que ce club tient au cœur de messieurs de la police. Pourquoi n'ont-ils pas mieux cherché? ils l'auraient trouvé.

—Ils ne l'ont pas trouvé, mais ils sont sur la trace.

—C'est le mot consacré, je le sais bien: quand la police est en défaut, elle dit qu'elle est sur la trace, et le gouvernement attend tranquillement le jour où elle vient dire, l'oreille basse, que cette trace est perdue.

—Oui, mais on a trouvé un cadavre: le général Quesnel a été tué, et dans tous les pays du monde cela s'appelle un meurtre.

—Un meurtre, dites-vous? mais rien ne prouve que le général ait été victime d'un meurtre: on trouve tous les jours des gens dans la Seine, qui s'y sont jetés de désespoir, qui s'y sont noyés ne sachant pas nager.

—Mon père, vous savez très bien que le général ne s'est pas noyé par désespoir, et qu'on ne se baigne pas dans la Seine au mois de janvier. Non, non, ne vous abusez pas, cette mort est bien qualifiée de meurtre.

—Et qui l'a qualifiée ainsi?

—Le roi lui-même.

—Le roi! Je le croyais assez philosophe pour comprendre qu'il n'y a pas de meurtre en politique. En politique, mon cher, vous le savez comme moi, il n'y a pas d'hommes, mais des idées; pas de sentiments, mais des intérêts; en politique, on ne tue pas un homme: on supprime un obstacle, voilà tout. Voulez-vous savoir comment les choses se sont passées? eh bien, moi, je vais vous le dire. On croyait pouvoir compter sur le général Quesnel: on nous l'avait recommandé de l'île d'Elbe, l'un de nous va chez lui, l'invite à se rendre rue Saint-Jacques à une assemblée où il trouvera des amis; il y vient, et là on lui déroule tout le plan, le départ de l'île d'Elbe, le débarquement projeté; puis, quand il a tout écouté tout entendu, qu'il ne reste plus rien à lui apprendre, il répond qu'il est royaliste: alors chacun se regarde; on lui fait faire serment, il le fait, mais de si mauvaise grâce vraiment, que c'était tenter Dieu que de jurer ainsi; eh bien, malgré tout cela, on a laissé le général sortir libre, parfaitement libre. Il n'est pas rentré chez lui, que voulez-vous, mon cher? Il est sorti de chez nous: il se sera trompé de chemin, voilà tout. Un meurtre! en vérité vous me surprenez, Villefort, vous, substitut du procureur du roi, de bâtir une accusation sur de si mauvaises preuves. Est-ce que jamais je me suis avisé de vous dire à vous, quand vous exercez votre métier de royaliste, et que vous faites couper la tête à l'un des miens: «Mon fils, vous avez commis un meurtre!» Non, j'ai dit: «Très bien, monsieur, vous avez combattu victorieusement; à demain la revanche.»

—Mais, mon père, prenez garde, cette revanche sera terrible quand nous la prendrons.

—Je ne vous comprends pas.

—Vous comptez sur le retour de l'usurpateur?

—Je l'avoue.

—Vous vous trompez, mon père, il ne fera pas dix lieues dans l'intérieur de la France sans être poursuivi, traqué, pris comme une bête fauve.

—Mon cher ami, l'Empereur est, en ce moment, sur la route de Grenoble, le 10 ou le 12 il sera à Lyon, et le 20 ou le 25 à Paris.

—Les populations vont se soulever....

—Pour aller au-devant de lui.

—Il n'a avec lui que quelques hommes, et l'on enverra contre lui des armées.

—Qui lui feront escorte pour rentrer dans la capitale. En vérité, mon cher Gérard, vous n'êtes encore qu'un enfant; vous vous croyez bien informé parce qu'un télégraphe vous dit, trois jours après le débarquement: «L'usurpateur est débarqué à Cannes avec quelques hommes; on est à sa poursuite.» Mais où est-il? que fait-il? vous n'en savez rien: on le poursuit, voilà tout ce que vous savez. Eh bien, on le poursuivra ainsi jusqu'à Paris, sans brûler une amorce.

—Grenoble et Lyon sont des villes fidèles, et qui lui opposeront une barrière infranchissable.

—Grenoble lui ouvrira ses portes avec enthousiasme, Lyon tout entier ira au-devant de lui. Croyez-moi, nous sommes aussi bien informés que vous, et notre police vaut bien la vôtre: en voulez-vous une preuve? c'est que vous vouliez me cacher votre voyage, et que cependant j'ai su votre arrivée une demi-heure après que vous avez eu passé la barrière; vous n'avez donné votre adresse à personne qu'à votre postillon, eh bien, je connais votre adresse, et la preuve en est que j'arrive chez vous juste au moment où vous allez vous mettre à table; sonnez donc, et demandez un second couvert; nous dînerons ensemble.

—En effet, répondit Villefort, regardant son père avec étonnement, en effet, vous me paraissez bien instruit.

—Eh! mon Dieu, la chose est toute simple; vous autres, qui tenez le pouvoir, vous n'avez que les moyens que donne l'argent; nous autres, qui l'attendons, nous avons ceux que donne le dévouement.

—Le dévouement? dit Villefort en riant.

—Oui, le dévouement; c'est ainsi qu'on appelle en termes honnêtes, l'ambition qui espère.»

Et le père de Villefort étendit lui-même la main vers le cordon de la sonnette pour appeler le domestique que n'appelait pas son fils. Villefort lui arrêta le bras.

«Attendez, mon père, dit le jeune homme, encore un mot.

—Dites.

—Si mal faite que soit la police royaliste, elle sait cependant une chose terrible.

—Laquelle?

—C'est le signalement de l'homme qui, le matin du jour où a disparu le général Quesnel, s'est présenté chez lui.

—Ah! elle sait cela, cette bonne police? et ce signalement, quel est-il?

—Teint brun, cheveux, favoris et yeux noirs redingote bleue boutonnée jusqu'au menton, rosette d'officier de la Légion d'honneur à la boutonnière, chapeau à larges bords et canne de jonc.

—Ah! ah! elle sait cela? dit Noirtier, et pourquoi donc, en ce cas, n'a-t-elle pas mis la main sur cet homme?

—Parce qu'elle l'a perdu, hier ou avant-hier, au coin de la rue Coq-Héron.

—Quand je vous disais que votre police était une sotte?

—Oui, mais d'un moment à l'autre elle peut le trouver.

—Oui, dit Noirtier en regardant insoucieusement autour de lui, oui, si cet homme n'est pas averti, mais il l'est; et, ajouta-t-il en souriant, il va changer de visage et de costume.»

À ces mots, il se leva, mit bas sa redingote et sa cravate, alla vers une table sur laquelle étaient préparées toutes les pièces du nécessaire de toilette de son fils, prit un rasoir, se savonna le visage, et d'une main parfaitement ferme abattit ces favoris compromettants qui donnaient à la police un document si précieux.

Villefort le regardait faire avec une terreur qui n'était pas exempte d'admiration.

Ses favoris coupés, Noirtier donna un autre tour à ses cheveux: prit, au lieu de sa cravate noire, une cravate de couleur qui se présentait à la surface d'une malle ouverte; endossa, au lieu de sa redingote bleue et boutonnante, une redingote de Villefort, de couleur marron et de forme évasée; essaya devant la glace le chapeau à bords retroussés du jeune homme, parut satisfait de la manière dont il lui allait, et, laissant la canne de jonc dans le coin de la cheminée où il l'avait posée, il fit siffler dans sa main nerveuse une petite badine de bambou avec laquelle l'élégant substitut donnait à sa démarche la désinvolture qui en était une des principales qualités.

«Eh bien, dit-il, se retournant vers son fils stupéfait, lorsque cette espèce de changement à vue fut opéré, eh bien, crois-tu que ta police me reconnaisse maintenant?

—Non, mon père, balbutia Villefort; je l'espère, du moins.

—Maintenant, mon cher Gérard, continua Noirtier, je m'en rapporte à ta prudence pour faire disparaître tous les objets que je laisse à ta garde.

—Oh! soyez tranquille, mon père, dit Villefort.

—Oui, oui! et maintenant je crois que tu as raison, et que tu pourrais bien, en effet, m'avoir sauvé la vie; mais, sois tranquille, je te rendrai cela prochainement.»

Villefort hocha la tête. «Tu n'es pas convaincu?

—J'espère, du moins, que vous vous trompez.

—Reverras-tu le roi?

—Peut-être.

—Veux-tu passer à ses yeux pour un prophète?

—Les prophètes de malheur sont mal venus à la cour, mon père.

—Oui, mais, un jour ou l'autre, on leur rend justice; et suppose une seconde Restauration, alors tu passeras pour un grand homme.

—Enfin, que dois-je dire au roi?

—Dis-lui ceci: «Sire, on vous trompe sur les dispositions de la France, sur l'opinion des villes, sur l'esprit de l'armée; celui que vous appelez à Paris l'ogre de Corse, qui s'appelle encore l'usurpateur à Nevers, s'appelle déjà Bonaparte à Lyon, et l'Empereur à Grenoble. Vous le croyez traqué, poursuivi, en fuite; il marche, rapide comme l'aigle qu'il rapporte. Les soldats, que vous croyez mourants de faim, écrasés de fatigue, prêts à déserter, s'augmentent comme les atomes de neige autour de la boule qui se précipite. Sire, partez; abandonnez la France à son véritable maître, à celui qui ne l'a pas achetée, mais conquise; partez, Sire, non pas que vous couriez quelque danger, votre adversaire est assez fort pour faire grâce, mais parce qu'il serait humiliant pour un petit-fils de saint Louis de devoir la vie à l'homme d'Arcole, de Marengo et d'Austerlitz.» Dis-lui cela, Gérard; ou plutôt, va, ne lui dis rien; dissimule ton voyage; ne te vante pas de ce que tu es venu faire et de ce que tu as fait à Paris; reprends la poste; si tu as brûlé le chemin pour venir, dévore l'espace pour retourner; rentre à Marseille de nuit; pénètre chez toi par une porte de derrière, et là reste bien doux, bien humble, bien secret, bien inoffensif surtout, car cette fois, je te le jure, nous agirons en gens vigoureux et qui connaissent leurs ennemis. Allez, mon fils, allez, mon cher Gérard, et moyennant cette obéissance aux ordres paternels, ou, si vous l'aimez mieux, cette déférence pour les conseils d'un ami, nous vous maintiendrons dans votre place. Ce sera, ajouta Noirtier en souriant, un moyen pour vous de me sauver une seconde fois, si la bascule politique vous remet un jour en haut et moi en bas. Adieu, mon cher Gérard; à votre prochain voyage, descendez chez moi.»

Et Noirtier sortit à ces mots, avec la tranquillité qui ne l'avait pas quitté un instant pendant la durée de cet entretien si difficile.

Villefort, pâle et agité, courut à la fenêtre, entrouvrit le rideau, et le vit passer, calme et impassible, au milieu de deux ou trois hommes de mauvaise mine, embusqués au coin des bornes et à l'angle des rues, qui étaient peut-être là pour arrêter l'homme aux favoris noirs, à la redingote bleue et au chapeau à larges bords.

Villefort demeura ainsi, debout et haletant, jusqu'à ce que son père eût disparu au carrefour Bussy. Alors il s'élança vers les objets abandonnés par lui, mit au plus profond de sa malle la cravate noire et la redingote bleue, tordit le chapeau qu'il fourra dans le bas d'une armoire, brisa la canne de jonc en trois morceaux qu'il jeta au feu, mit une casquette de voyage, appela son valet de chambre, lui interdit d'un regard les mille questions qu'il avait envie de faire, régla son compte avec l'hôtel, sauta dans sa voiture qui l'attendait tout attelée, apprit à Lyon que Bonaparte venait d'entrer à Grenoble, et, au milieu de l'agitation qui régnait tout le long de la route, arriva à Marseille, en proie à toutes les transes qui entrent dans le cœur de l'homme avec l'ambition et les premiers honneurs.

12. Le père et le fils 12. Der Vater und der Sohn 12. Father and son 12. Padre e hijo 12. Vader en zoon 12. Pai e filho 12. Far och son 12. Батько і син

M. Noirtier, car c’était en effet lui-même qui venait d’entrer, suivit des yeux le domestique jusqu’à ce qu’il eût refermé la porte; puis, craignant sans doute qu’il n’écoutât dans l’antichambre, il alla rouvrir derrière lui: la précaution n’était pas inutile, et la rapidité avec laquelle maître Germain se retira prouva qu’il n’était point exempt du péché qui perdit nos premiers pères. M. Noirtier, for it was indeed himself who had just entered, followed the servant with his eyes until he had closed the door; then, doubtless fearing that he would listen in the antechamber, he went and reopened behind him: the precaution was not useless, and the rapidity with which Master Germain retired proved that he was not exempt from sin. who lost our first fathers. M. Noirtier prit alors la peine d’aller fermer lui-même la porte de l’antichambre, revint fermer celle de la chambre à coucher, poussa les verrous, et revint tendre la main à Villefort, qui avait suivi tous ces mouvements avec une surprise dont il n’était pas encore revenu. M. Noirtier then took the trouble of closing the door of the antechamber himself, came back to close the bedroom door, pushed the bolts, and returned a hand to Villefort, who had followed all these movements with a surprise of which he had not yet returned.

«Ah çà! "Oh that! sais-tu bien, mon cher Gérard, dit-il au jeune homme en le regardant avec un sourire dont il était assez difficile de définir l’expression, que tu n’as pas l’air ravi de me voir? Do you know, my dear Gerard, "he said to the young man, looking at him with a smile, the expression of which was hard enough to define," that you do not seem very pleased to see me?

—Si fait, mon père, dit Villefort, je suis enchanté; mais j’étais si loin de m’attendre à votre visite, qu’elle m’a quelque peu étourdi. "Yes, father," said Villefort, "I am delighted; but I was so far from waiting for your visit, that she somewhat dazed me. «Если да, отец, - сказал Вильфор, - я в восторге; но я так далеко не ожидал вашего визита, что она несколько ошеломляла меня.

—Mais, mon cher ami, reprit M. Noirtier en s’asseyant, il me semble que je pourrais vous en dire autant. "But, my dear friend," said M. Noirtier, sitting down, "it seems to me that I could say as much to you. Comment! How? 'Or' What! vous m’annoncez vos fiançailles à Marseille pour le 28 février, et le 3 mars vous êtes à Paris? you announce to me your engagement at Marseilles for the 28th of February, and the 3rd of March you are at Paris?

—Si j’y suis, mon père, dit Gérard en se rapprochant de M. Noirtier, ne vous en plaignez pas, car c’est pour vous que j’étais venu, et ce voyage vous sauvera peut-être. "If I am there, father," said Gerard, getting closer to M. Noirtier, "do not complain, for it was for you that I had come, and this journey will perhaps save you.

—Ah! vraiment, dit M. Noirtier en s’allongeant nonchalamment dans le fauteuil où il était assis; vraiment! really, said M. Noirtier, stretching out nonchalantly in the armchair where he was seated; really! contez-moi donc cela, monsieur le magistrat, ce doit être curieux. tell me that, sir, it must be curious.

—Mon père, vous avez entendu parler de certain club bonapartiste qui se tient rue Saint-Jacques? "Father, have you heard of a certain Bonapartist club which is held in the rue Saint-Jacques?"

—No 53? —No 53? Oui, j’en suis vice-président. Yes, I am vice-president.

—Mon père, votre sang-froid me fait frémir. "Father, your coolness makes me shudder.

—Que veux-tu, mon cher? "What do you want, my dear? quand on a été proscrit par les montagnards, qu’on est sorti de Paris dans une charrette de foin, qu’on a été traqué dans les landes de Bordeaux par les limiers de Robespierre, cela vous a aguerri à bien des choses. when one has been proscribed by the mountaineers, that one has left Paris in a hay cart, that one has been hunted down in the moors of Bordeaux by the hounds of Robespierre, it has seasoned you on many things. Continue donc. So keep going. Eh bien, que s’est-il passé à ce club de la rue Saint-Jacques? Well, what happened to this club on rue Saint-Jacques?

—Il s’y est passé qu’on y a fait venir le général Quesnel, et que le général Quesnel, sorti à neuf heures du soir de chez lui, a été retrouvé le surlendemain dans la Seine. "It happened there that General Quesnel was summoned, and that General Quesnel, who had gone out at nine o'clock in the evening from his house, was found two days later in the Seine.

—Et qui vous a conté cette belle histoire? -And who told you this beautiful story?

—Le roi lui-même, monsieur. “The king himself, sir.

—Eh bien, moi, en échange de votre histoire, continua Noirtier, je vais vous apprendre une nouvelle. "Well, me, in exchange for your story," continued Noirtier, "I am going to teach you something new.

—Mon père, je crois savoir déjà ce que vous allez me dire. "Father, I think I already know what you are going to tell me.

—Ah! “Ah! vous savez le débarquement de Sa Majesté l’Empereur? Do you know the landing of His Majesty the Emperor?

—Silence, mon père, je vous prie, pour vous d’abord, et puis ensuite pour moi. “Silence, father, please, for yourself first, and then for me. Oui, je savais cette nouvelle, et même je la savais avant vous, car depuis trois jours je brûle le pavé, de Marseille à Paris, avec la rage de ne pouvoir lancer à deux cents lieues en avant de moi la pensée qui me brûle le cerveau. Yes, I knew this news, and even I knew it before you, for for three days I have been burning the pavement, from Marseilles to Paris, with the rage of not being able to launch two hundred leagues ahead of me the thought which burns me on brain.

—Il y a trois jours! -Three days ago! êtes-vous fou? Are you mad? Il y a trois jours, l’Empereur n’était pas embarqué. Three days ago the Emperor was not embarked.

—N’importe, je savais le projet. -No matter, I knew the project.

—Et comment cela? “And how is that?

—Par une lettre qui vous était adressée de l’île d’Elbe. "By a letter addressed to you from the Island of Elba."

—À moi? -To me?

—À vous, et que j’ai surprise dans le portefeuille du messager. "To you, and whom I caught in the messenger's wallet." Si cette lettre était tombée entre les mains d’un autre, à cette heure, mon père, vous seriez fusillé, peut-être.» If this letter had fallen into the hands of another, at this time, my father, you would be shot, perhaps. "

Le père de Villefort se mit à rire. Villefort's father began to laugh.

«Allons, allons, dit-il, il paraît que la Restauration a appris de l’Empire la façon d’expédier promptement les affaires.... Fusillé! "Come, come," said he, "it seems that the Restoration learned from the Empire how to speedily dispatch business." «Давай, давай, - сказал он, - похоже, что Реставрация научилась у Империи, как быстро отправлять бизнес». mon cher, comme vous y allez! my dear, how are you going! et cette lettre, où est-elle? and this letter, where is it? Je vous connais trop pour craindre que vous l’ayez laissée traîner. I know you too well to fear that you let her hang out.

—Je l’ai brûlée, de peur qu’il n’en restât un seul fragment: car cette lettre, c’était votre condamnation. “I burned it, lest there should be a single fragment left: for this letter was your condemnation.

—Et la perte de votre avenir, répondit froidement Noirtier; oui, je comprends cela; mais je n’ai rien à craindre puisque vous me protégez. "And the loss of your future," replied Noirtier coldly; yes, I understand that; but I have nothing to fear since you protect me.

—Je fais mieux que cela, monsieur, je vous sauve. "I do better than that, sir, I save you."

—Ah! “Ah! diable! Devil! ceci devient plus dramatique; expliquez-vous. this becomes more dramatic; explain yourself.

—Monsieur, j’en reviens à ce club de la rue Saint-Jacques. "Sir, I come back to this club on St. Jacques Street.

—Il paraît que ce club tient au cœur de messieurs de la police. -It seems that this club is the heart of the police. Pourquoi n’ont-ils pas mieux cherché? Why did not they look better? ils l’auraient trouvé. they would have found it.

—Ils ne l’ont pas trouvé, mais ils sont sur la trace. -They have not found it, but they are on the trail.

—C’est le mot consacré, je le sais bien: quand la police est en défaut, elle dit qu’elle est sur la trace, et le gouvernement attend tranquillement le jour où elle vient dire, l’oreille basse, que cette trace est perdue. -It is the consecrated word, I know it well: when the police are in default, she says she is on the track, and the government quietly waits the day when she comes to say, with a low ear, that this trace is lost.

—Oui, mais on a trouvé un cadavre: le général Quesnel a été tué, et dans tous les pays du monde cela s’appelle un meurtre. "Yes, but we found a corpse: General Quesnel was killed, and in every country in the world it's called murder.

—Un meurtre, dites-vous? "Murder, you say?" mais rien ne prouve que le général ait été victime d’un meurtre: on trouve tous les jours des gens dans la Seine, qui s’y sont jetés de désespoir, qui s’y sont noyés ne sachant pas nager. but nothing proves that the general was the victim of a murder: we find every day people in the Seine, who threw themselves there in despair, who drowned there not knowing how to swim.

—Mon père, vous savez très bien que le général ne s’est pas noyé par désespoir, et qu’on ne se baigne pas dans la Seine au mois de janvier. “Father, you know very well that the general did not drown out of despair, and that one does not bathe in the Seine in January. Non, non, ne vous abusez pas, cette mort est bien qualifiée de meurtre. No, no, don't be fooled, this death is well qualified as murder.

—Et qui l’a qualifiée ainsi? And who qualified it?

—Le roi lui-même. “The king himself.

—Le roi! -The king! Je le croyais assez philosophe pour comprendre qu’il n’y a pas de meurtre en politique. I thought him philosophical enough to understand that there is no murder in politics. En politique, mon cher, vous le savez comme moi, il n’y a pas d’hommes, mais des idées; pas de sentiments, mais des intérêts; en politique, on ne tue pas un homme: on supprime un obstacle, voilà tout. In politics, my dear, you know it as I do, there are no men, but ideas; no feelings, but interests; in politics, we do not kill a man: we remove an obstacle, that's all. Voulez-vous savoir comment les choses se sont passées? Do you want to know how things went? eh bien, moi, je vais vous le dire. well, I will tell you. On croyait pouvoir compter sur le général Quesnel: on nous l’avait recommandé de l’île d’Elbe, l’un de nous va chez lui, l’invite à se rendre rue Saint-Jacques à une assemblée où il trouvera des amis; il y vient, et là on lui déroule tout le plan, le départ de l’île d’Elbe, le débarquement projeté; puis, quand il a tout écouté tout entendu, qu’il ne reste plus rien à lui apprendre, il répond qu’il est royaliste: alors chacun se regarde; on lui fait faire serment, il le fait, mais de si mauvaise grâce vraiment, que c’était tenter Dieu que de jurer ainsi; eh bien, malgré tout cela, on a laissé le général sortir libre, parfaitement libre. We thought we could count on General Quesnel: we had been recommended to him from the island of Elba, one of us goes to his house, invited him to go to the Rue Saint-Jacques to an assembly where he will find friends ; he comes there, and there the whole plan is unfolded, the departure of the island of Elba, the projected landing; then, when he has listened to everything heard, that there is nothing left to teach him, he answers that he is a royalist: then everyone looks at each other; they make him take an oath, he does it, but so badly, that it was tempting for God to swear thus; Well, in spite of all that, we let the general go free, perfectly free. Мы думали, что можем рассчитывать на генерала Квеснела: нас порекомендовали ему с острова Эльба, один из нас идет к нему домой, пригласил его поехать на улицу Сен-Жак на собрание, где он найдет друзей ; он приходит туда, и там разворачивается весь план: отправление на остров Эльба, предполагаемая высадка; затем, когда он выслушал все услышанное, что ему нечему учить, он отвечает, что он роялист: тогда все смотрят друг на друга; они заставляют его дать клятву, он делает это, но так сильно, что Богу было так заманчиво клясться; Ну, несмотря на все это, мы отпускаем генерала на свободу, совершенно бесплатно. Il n’est pas rentré chez lui, que voulez-vous, mon cher? He hasn't come home, what do you want, my dear? Il est sorti de chez nous: il se sera trompé de chemin, voilà tout. He left our house: he will have been wrong, that's all. Un meurtre! A murder! en vérité vous me surprenez, Villefort, vous, substitut du procureur du roi, de bâtir une accusation sur de si mauvaises preuves. in truth you surprise me, Villefort, you, substitute for the procureur du roi, to build an accusation on such bad proofs. Est-ce que jamais je me suis avisé de vous dire à vous, quand vous exercez votre métier de royaliste, et que vous faites couper la tête à l’un des miens: «Mon fils, vous avez commis un meurtre!» Non, j’ai dit: «Très bien, monsieur, vous avez combattu victorieusement; à demain la revanche.» Have I ever been advised to tell you when you exercise your Royalist profession and cut off one of my own heads: "My son, you have committed murder!" No, I said, "Very well, sir, you fought victoriously; tomorrow, revenge. "

—Mais, mon père, prenez garde, cette revanche sera terrible quand nous la prendrons. "But, my father, take care, this revenge will be terrible when we take it.

—Je ne vous comprends pas. -I do not understand you.

—Vous comptez sur le retour de l’usurpateur? "Are you counting on the usurper's return?"

—Je l’avoue. -I admit it.

—Vous vous trompez, mon père, il ne fera pas dix lieues dans l’intérieur de la France sans être poursuivi, traqué, pris comme une bête fauve. "You are mistaken, father, it will not be ten leagues in the interior of France without being pursued, hunted down, taken like a wild beast.

—Mon cher ami, l’Empereur est, en ce moment, sur la route de Grenoble, le 10 ou le 12 il sera à Lyon, et le 20 ou le 25 à Paris. "My dear friend, the Emperor is at this moment on the road to Grenoble, on the 10th or the 12th, he will be at Lyons, and the 20th or 25th at Paris.

—Les populations vont se soulever.... -The populations will rise ....

—Pour aller au-devant de lui. -To meet him.

—Il n’a avec lui que quelques hommes, et l’on enverra contre lui des armées. "He has only a few men with him, and armies will be sent against him."

—Qui lui feront escorte pour rentrer dans la capitale. "Who will escort him back to the capital." En vérité, mon cher Gérard, vous n’êtes encore qu’un enfant; vous vous croyez bien informé parce qu’un télégraphe vous dit, trois jours après le débarquement: «L’usurpateur est débarqué à Cannes avec quelques hommes; on est à sa poursuite.» Mais où est-il? In truth, my dear Gerard, you are still only a child; you think you are well informed because a telegraph tells you, three days after the landing: "The usurper has landed at Cannes with some men; we are in pursuit. "But where is he? que fait-il? What is he doing? vous n’en savez rien: on le poursuit, voilà tout ce que vous savez. you do not know anything about it; you pursue it, that's all you know. Eh bien, on le poursuivra ainsi jusqu’à Paris, sans brûler une amorce. Well, we will continue it like this as far as Paris, without burning a primer.

—Grenoble et Lyon sont des villes fidèles, et qui lui opposeront une barrière infranchissable. -Grenoble and Lyon are faithful cities, and who will oppose it an impassable barrier.

—Grenoble lui ouvrira ses portes avec enthousiasme, Lyon tout entier ira au-devant de lui. —Grenoble will open its doors to him with enthusiasm, all of Lyon will go out to meet him. Croyez-moi, nous sommes aussi bien informés que vous, et notre police vaut bien la vôtre: en voulez-vous une preuve? Believe me, we are as knowledgeable as you, and our policy is well worth yours: do you want proof? c’est que vous vouliez me cacher votre voyage, et que cependant j’ai su votre arrivée une demi-heure après que vous avez eu passé la barrière; vous n’avez donné votre adresse à personne qu’à votre postillon, eh bien, je connais votre adresse, et la preuve en est que j’arrive chez vous juste au moment où vous allez vous mettre à table; sonnez donc, et demandez un second couvert; nous dînerons ensemble. it is because you wanted to hide your journey from me, and yet I knew your arrival half an hour after you had passed the barrier; you gave your address to no one other than your postilion, well, I know your address, and the proof is that I come to you just when you are going to sit down to table; ring then, and ask for a second cover; we will dine together.

—En effet, répondit Villefort, regardant son père avec étonnement, en effet, vous me paraissez bien instruit. "Indeed," replied Villefort, looking at his father with astonishment, "you seem to me well informed."

—Eh! mon Dieu, la chose est toute simple; vous autres, qui tenez le pouvoir, vous n’avez que les moyens que donne l’argent; nous autres, qui l’attendons, nous avons ceux que donne le dévouement. my God, the thing is very simple; you, who hold power, you have only the means that gives money; we, who are waiting for it, have those whom devotion gives us.

—Le dévouement? -The dedication? dit Villefort en riant. said Villefort, laughing.

—Oui, le dévouement; c’est ainsi qu’on appelle en termes honnêtes, l’ambition qui espère.» -Yes, dedication; this is what is called in honest terms, ambition that hopes. "

Et le père de Villefort étendit lui-même la main vers le cordon de la sonnette pour appeler le domestique que n’appelait pas son fils. And Villefort's father stretched out his hand towards the bell-rope to call the servant whom his son did not call. Villefort lui arrêta le bras. Villefort stopped his arm.

«Attendez, mon père, dit le jeune homme, encore un mot. "Wait, father," said the young man, "another word.

—Dites. “Say.

—Si mal faite que soit la police royaliste, elle sait cependant une chose terrible. "If the royalist police are badly done, they know something terrible.

—Laquelle? -Which?

—C’est le signalement de l’homme qui, le matin du jour où a disparu le général Quesnel, s’est présenté chez lui. It is the description of the man who, on the morning of the day General Quesnel disappeared, came to his house.

—Ah! “Ah! elle sait cela, cette bonne police? she knows that, that good police? et ce signalement, quel est-il? and this description, what is it?

—Teint brun, cheveux, favoris et yeux noirs redingote bleue boutonnée jusqu’au menton, rosette d’officier de la Légion d’honneur à la boutonnière, chapeau à larges bords et canne de jonc. -Black brown, hair, whiskers, and black eyes, blue frock-coat buttoned up to the chin, rosette of Officer of the Legion of Honor in the buttonhole, brimmed hat and rush-rod.

—Ah! “Ah! ah! elle sait cela? does she know that? dit Noirtier, et pourquoi donc, en ce cas, n’a-t-elle pas mis la main sur cet homme? said Noirtier, "and why then, in this case, did she not lay hands on this man?

—Parce qu’elle l’a perdu, hier ou avant-hier, au coin de la rue Coq-Héron. “Because she lost it yesterday or the day before, at the corner of rue Coq-Héron.

—Quand je vous disais que votre police était une sotte? -When I told you that your police was a fool?

—Oui, mais d’un moment à l’autre elle peut le trouver. -Yes, but from one moment to another she can find it.

—Oui, dit Noirtier en regardant insoucieusement autour de lui, oui, si cet homme n’est pas averti, mais il l’est; et, ajouta-t-il en souriant, il va changer de visage et de costume.» "Yes," said Noirtier, looking carelessly about him, "yes, if this man is not warned, but he is; and, "he added with a smile," he will change his face and costume. "

À ces mots, il se leva, mit bas sa redingote et sa cravate, alla vers une table sur laquelle étaient préparées toutes les pièces du nécessaire de toilette de son fils, prit un rasoir, se savonna le visage, et d’une main parfaitement ferme abattit ces favoris compromettants qui donnaient à la police un document si précieux. At these words he got up, put down his frock coat and tie, went to a table on which were prepared all the parts of the toiletry of his son, took a razor, soaped his face, and a perfect hand firm crushed those compromising favorites that gave the police such a valuable document.

Villefort le regardait faire avec une terreur qui n’était pas exempte d’admiration. Villefort watched him do so with a terror that was not without admiration.

Ses favoris coupés, Noirtier donna un autre tour à ses cheveux: prit, au lieu de sa cravate noire, une cravate de couleur qui se présentait à la surface d’une malle ouverte; endossa, au lieu de sa redingote bleue et boutonnante, une redingote de Villefort, de couleur marron et de forme évasée; essaya devant la glace le chapeau à bords retroussés du jeune homme, parut satisfait de la manière dont il lui allait, et, laissant la canne de jonc dans le coin de la cheminée où il l’avait posée, il fit siffler dans sa main nerveuse une petite badine de bambou avec laquelle l’élégant substitut donnait à sa démarche la désinvolture qui en était une des principales qualités. His favorite cut off, Noirtier gave another turn to his hair: he took, instead of his black tie, a colored tie which appeared on the surface of an open trunk; donned, instead of his blue and button-down frock coat, a Villefort frock coat, brown in color and flared; The young man's hat with turned-up edges was tried in front of the mirror, seemed satisfied with the manner in which he was going, and, leaving the reed stick in the corner of the fireplace where he had put it, he whistled in his nervous hand. a little bamboo bamboo with which the elegant substitute gave to his approach the casualness which was one of the main qualities.

«Eh bien, dit-il, se retournant vers son fils stupéfait, lorsque cette espèce de changement à vue fut opéré, eh bien, crois-tu que ta police me reconnaisse maintenant? "Well," he said, turning to his stupefied son, "when this sort of change of sight was made, well, do you think your police now recognize me?"

—Non, mon père, balbutia Villefort; je l’espère, du moins. "No, father," stammered Villefort; I hope so, at least.

—Maintenant, mon cher Gérard, continua Noirtier, je m’en rapporte à ta prudence pour faire disparaître tous les objets que je laisse à ta garde. "Now, my dear Gerard," continued Noirtier, "I rely on your prudence to remove all the objects I leave in your care.

—Oh! soyez tranquille, mon père, dit Villefort. be easy, father, said Villefort.

—Oui, oui! et maintenant je crois que tu as raison, et que tu pourrais bien, en effet, m’avoir sauvé la vie; mais, sois tranquille, je te rendrai cela prochainement.» and now I think that you are right, and that you might indeed have saved my life; but, be quiet, I will return this to you soon. "

Villefort hocha la tête. Villefort nodded. «Tu n’es pas convaincu? "Are not you convinced?

—J’espère, du moins, que vous vous trompez. "I hope, at least, that you are mistaken.

—Reverras-tu le roi? Will you restore the king?

—Peut-être. -Perhaps.

—Veux-tu passer à ses yeux pour un prophète? -Do you want to pass in his eyes for a prophet?

—Les prophètes de malheur sont mal venus à la cour, mon père. "The prophets of misfortune have come to court badly, my father.

—Oui, mais, un jour ou l’autre, on leur rend justice; et suppose une seconde Restauration, alors tu passeras pour un grand homme. "Yes, but one day or another, we give them justice; and suppose a second Restoration, then you will pass for a great man.

—Enfin, que dois-je dire au roi? “Finally, what should I say to the king?

—Dis-lui ceci: «Sire, on vous trompe sur les dispositions de la France, sur l’opinion des villes, sur l’esprit de l’armée; celui que vous appelez à Paris l’ogre de Corse, qui s’appelle encore l’usurpateur à Nevers, s’appelle déjà Bonaparte à Lyon, et l’Empereur à Grenoble. "Tell him this:" Sire, you are deceived as to the dispositions of France, the opinion of the towns, the spirit of the army; the man whom you call in Paris the ogre of Corsica, who is still called the usurper at Nevers, is already called Bonaparte at Lyons, and the Emperor at Grenoble. Скажите ему это: «Сир, вы обмануты в отношении расположения Франции, мнения городов, духа армии; Человека, которого вы называете в Париже людоедом Корсики, которого до сих пор называют узурпатором в Невере, уже называют Бонапарт в Лионе, а Император в Гренобле. Vous le croyez traqué, poursuivi, en fuite; il marche, rapide comme l’aigle qu’il rapporte. You believe him hunted down, pursued, on the run; he walks, quick as the eagle he brings back. Вы верите, что его выслеживали, преследовали, в бегах; он идет, быстрый как орел, которого он возвращает. Les soldats, que vous croyez mourants de faim, écrasés de fatigue, prêts à déserter, s’augmentent comme les atomes de neige autour de la boule qui se précipite. The soldiers, whom you think are dying of hunger, crushed with fatigue, ready to desert, increase like the atoms of snow around the ball that rushes. Sire, partez; abandonnez la France à son véritable maître, à celui qui ne l’a pas achetée, mais conquise; partez, Sire, non pas que vous couriez quelque danger, votre adversaire est assez fort pour faire grâce, mais parce qu’il serait humiliant pour un petit-fils de saint Louis de devoir la vie à l’homme d’Arcole, de Marengo et d’Austerlitz.» Dis-lui cela, Gérard; ou plutôt, va, ne lui dis rien; dissimule ton voyage; ne te vante pas de ce que tu es venu faire et de ce que tu as fait à Paris; reprends la poste; si tu as brûlé le chemin pour venir, dévore l’espace pour retourner; rentre à Marseille de nuit; pénètre chez toi par une porte de derrière, et là reste bien doux, bien humble, bien secret, bien inoffensif surtout, car cette fois, je te le jure, nous agirons en gens vigoureux et qui connaissent leurs ennemis. Sire, leave; abandon France to its true master, to him who has not bought it, but conquered; go, Sire, not that you run any danger, your adversary is strong enough to pardon, but because it would be humiliating for a grandson of St. Louis to owe life to the man from Arcola, Marengo and d'Austerlitz. "Tell him that, Gerard; or rather, go, do not tell him anything; conceal your journey; do not boast of what you have come to do and what you have done in Paris; resume the post office; if you have burned the way to come, devour the space to return; return to Marseilles by night; enter your house by a back door, and there remains very sweet, very humble, very secretive, especially inoffensive, because this time, I swear to you, we will act as vigorous people and who know their enemies. Сир, уходи; оставь Францию ее истинному хозяину, тому, кто ее не купил, но покорил; иди, сир, не из-за того, что ты представляешь опасность, твой противник достаточно силен для прощения, а потому что для внука Сент-Луиса было бы унизительно отдавать жизнь человеку из Арколы, Маренго и д'Аустерлиц. "Скажи ему это, Джерард; вернее, иди, не говори ему ничего; скрыть свое путешествие; не хвастайтесь тем, что вы сделали, и тем, что вы сделали в Париже; возобновить почтовое отделение; если вы сожгли путь, пожирайте пространство, чтобы вернуться; вернуться в Марсель ночью; войдите в свой дом через заднюю дверь, и там останется очень мило, очень скромно, очень скрытно, особенно безобидно, потому что на этот раз, клянусь вам, мы будем действовать как энергичные люди, которые знают своих врагов. Allez, mon fils, allez, mon cher Gérard, et moyennant cette obéissance aux ordres paternels, ou, si vous l’aimez mieux, cette déférence pour les conseils d’un ami, nous vous maintiendrons dans votre place. Go, my son, go, my dear Gerard, and with this obedience to the paternal orders, or, if you like it better, this deference to the advice of a friend, we will keep you in your place. Ce sera, ajouta Noirtier en souriant, un moyen pour vous de me sauver une seconde fois, si la bascule politique vous remet un jour en haut et moi en bas. It will be, "added Noirtier, with a smile," a means for you to save me a second time, if the political seesaw one day gives you upstairs and me down. Adieu, mon cher Gérard; à votre prochain voyage, descendez chez moi.» Farewell, my dear Gerard; on your next trip, go down to my house. "

Et Noirtier sortit à ces mots, avec la tranquillité qui ne l’avait pas quitté un instant pendant la durée de cet entretien si difficile. And Noirtier went out at these words, with the tranquility which had not left him for a moment during the duration of this difficult interview. И Нуартье вышел на эти слова со спокойствием, которое не оставляло его ни на мгновение во время этого трудного интервью.

Villefort, pâle et agité, courut à la fenêtre, entrouvrit le rideau, et le vit passer, calme et impassible, au milieu de deux ou trois hommes de mauvaise mine, embusqués au coin des bornes et à l’angle des rues, qui étaient peut-être là pour arrêter l’homme aux favoris noirs, à la redingote bleue et au chapeau à larges bords. Villefort, pale and agitated, ran to the window, opened the curtain, and saw him pass, calm and impassive, in the midst of two or three bad-looking men, ambushed at the corner of the corner and at the corner of the streets, which were perhaps there to stop the man with the black favorites, the blue frock coat and the broad-brimmed hat.

Villefort demeura ainsi, debout et haletant, jusqu’à ce que son père eût disparu au carrefour Bussy. Villefort thus remained, standing and panting, until his father had disappeared at the Bussy crossroads. Alors il s’élança vers les objets abandonnés par lui, mit au plus profond de sa malle la cravate noire et la redingote bleue, tordit le chapeau qu’il fourra dans le bas d’une armoire, brisa la canne de jonc en trois morceaux qu’il jeta au feu, mit une casquette de voyage, appela son valet de chambre, lui interdit d’un regard les mille questions qu’il avait envie de faire, régla son compte avec l’hôtel, sauta dans sa voiture qui l’attendait tout attelée, apprit à Lyon que Bonaparte venait d’entrer à Grenoble, et, au milieu de l’agitation qui régnait tout le long de la route, arriva à Marseille, en proie à toutes les transes qui entrent dans le cœur de l’homme avec l’ambition et les premiers honneurs. Then he rushed to the objects abandoned by him, put in the depths of his trunk the black tie and the blue frock coat, twisted the hat he stuffed into the bottom of a cupboard, broke the cane of rush into three pieces that he threw in the fire, put on a traveling cap, called his valet de chambre, forbade him from a look the thousand questions he wanted to do, settled his account with the hotel, jumped into his car that He waited for the whole hitch, learned at Lyons that Bonaparte had just entered Grenoble, and, in the midst of the commotion which reigned all along the road, arrived at Marseilles, prey to all the trances which enter the heart of Paris. the man with ambition and the first honors.