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VERNE, Jules – Voyage au centre de la Terre, XIV

XIV

Stapi est une bourgade formée d'une trentaine de huttes, et bâtie en pleine lave sous les rayons du soleil réfléchis par le volcan. Elle s'étend au fond d'un petit fjord encaissé dans une muraille du plus étrange effet.

On sait que le basalte est une roche brune d'origine ignée. Elle affecte des formes régulières qui surprennent par leur disposition. Ici la nature procède géométriquement et travaille à la manière humaine, comme si elle eût manié l'équerre, le compas et le fil à plomb. Si partout ailleurs elle fait de l'art avec ses grandes masses jetées sans ordre, ses cônes à peine ébauchés, ses pyramides imparfaites, avec la bizarre succession de ses lignes, ici, voulant donner l'exemple de la régularité, et précédant les architectes des premiers âges, elle a créé un ordre sévère, que ni les splendeurs de Babylone ni les merveilles de la Grèce n'ont jamais dépassé.

J'avais bien entendu parler de la Chaussée des Géants en Irlande, et de la Grotte de Fingal dans l'une des Hébrides, mais le spectacle d'une substruction basaltique ne s'était pas encore offert à mes regards.

Or, à Stapi, ce phénomène apparaissait dans toute sa beauté.

La muraille du fjörd, comme toute la côte de la presqu'île, se composait d'une suite de colonnes verticales, hautes de trente pieds. Ces fûts droits et d'une proportion pure supportaient une archivolte, faite de colonnes horizontales dont le surplombement formait demi-voûte au-dessus de la mer. À de certains intervalles, et sous cet impluvium naturel, l'œil surprenait des ouvertures ogivales d'un dessin admirable, à travers lesquelles les flots du large venaient se précipiter en écumant. Quelques tronçons de basalte, arrachés par les fureurs de l'Océan, s'allongeaient sur le sol comme les débris d'un temple antique, ruines éternellement jeunes, sur lesquelles passaient les siècles sans les entamer.

Telle était la dernière étape de notre voyage terrestre. Hans nous y avait conduits avec intelligence, et je me rassurais un peu en songeant qu'il devait nous accompagner encore.

En arrivant à la porte de la maison du recteur, simple cabane basse, ni plus belle, ni plus confortable que ses voisines, je vis un homme en train de ferrer un cheval, le marteau à la main, et le tablier de cuir aux reins.

« Saelvertu, » lui dit le chasseur.

— « God dag », répondit le maréchal-ferrant en parfait danois.

— « Kyrkoherde, » fit Hans en se retournant vers mon oncle.

— Le recteur ! répéta ce dernier. Il paraît, Axel, que ce brave homme est le recteur. Pendant ce temps, le guide mettait le « kyrkoherde » au courant de la situation ; celui-ci, suspendant son travail, poussa une sorte de cri en usage sans doute entre chevaux et maquignons, et aussitôt une grande mégère sortit de la cabane. Si elle ne mesurait pas six pieds de haut, il ne s'en fallait guère. Je craignais qu'elle ne vînt offrir aux voyageurs le baiser islandais ; mais il n'en fut rien, et même elle mit assez peu de bonne grâce à nous introduire dans sa maison.

La chambre des étrangers me parut être la plus mauvaise du presbytère, étroite, sale et infecte. Il fallut s'en contenter ; le recteur ne semblait pas pratiquer l'hospitalité antique. Loin de là. Avant la fin du jour, je vis que nous avions affaire à un forgeron, à un pêcheur, à un chasseur, à un charpentier, et pas du tout à un ministre du Seigneur. Nous, étions en semaine, il est vrai. Peut-être se rattrapait-il le dimanche.

Je ne veux pas dire du mal de ces pauvres prêtres qui, après tout, sont fort misérables ; ils reçoivent du gouvernement danois un traitement ridicule et perçoivent le quart de la dîme de leur paroisse, ce qui ne fait pas une somme de soixante marks courants[1]. De là, nécessité de travailler pour vivre ; mais à pêcher, à chasser, à ferrer des chevaux, on finit par prendre les manières, le ton et les mœurs des chasseurs, des pêcheurs et autres gens un peu rudes ; le soir même je m'aperçus que notre hôte ne comptait pas la sobriété au nombre de ses vertus.

Mon oncle comprit vite à quel genre d'homme il avait affaire ; au lieu d'un brave et digne savant, il trouvait un paysan lourd et grossier ; il résolut donc de commencer au plus tôt sa grande expédition et de quitter cette cure peu hospitalière. Il ne regardait pas à ses fatigues et résolut d'aller passer quelques jours dans la montagne.

Les préparatifs de départ furent donc faits dès le lendemain de notre arrivée à Stapi. Hans loua les services de trois Islandais pour remplacer les chevaux dans le transport des bagages ; mais, une fois arrivés au fond du cratère, ces indigènes devaient rebrousser chemin et nous abandonner à nous-mêmes. Ce point fut parfaitement arrêté.

À cette occasion, mon oncle dut apprendre au chasseur que son intention était de poursuivre la reconnaissance du volcan jusqu'à ses dernières limites.

Hans se contenta d'incliner la tête. Aller là ou ailleurs, s'enfoncer dans les entrailles de son île ou la parcourir, il n'y voyait aucune différence. Quant à moi, distrait jusqu'alors par les incidents du voyage, j'avais un peu oublié l'avenir, mais maintenant je sentais l'émotion me reprendre de plus belle. Qu'y faire ? Si j'avais pu tenter de résister au professeur Lidenbrock, c'était à Hambourg et non au pied du Sneffels. Une idée, entre toutes, me tracassait fort, idée effrayante et faite pour ébranler des nerfs moins sensibles que les miens.

« Voyons, me disais-je, nous allons gravir le Sneffels. Bien. Nous allons visiter son cratère. Bon. D'autres l'ont fait qui n'en sont pas morts. Mais ce n'est pas tout. S'il se présente un chemin pour descendre dans les entrailles du sol, si ce malencontreux Saknussemm a dit vrai, nous allons nous perdre au milieu des galeries souterraines du volcan. Or, rien n'affirme que le Sneffels soit éteint ! Qui prouve qu'une éruption ne se prépare pas ? De ce que le monstre dort depuis 1229, s'ensuit-il qu'il ne puisse se réveiller ? Et, s'il se réveille, qu'est-ce que nous deviendrons ? Cela demandait la peine d'y réfléchir, et j'y réfléchissais. Je ne pouvais dormir sans rêver d'éruption. Or, le rôle de scorie me paraissait assez brutal à jouer.

Enfin je n'y tins plus ; je résolus de soumettre le cas à mon oncle le plus adroitement possible, et sous la forme d'une hypothèse parfaitement irréalisable.

J'allai le trouver. Je lui fis part de mes craintes, et je me reculai pour le laisser éclater à son aise.

« J'y pensais, » répondit-il simplement.

Que signifiaient ces paroles ! Allait-il donc entendre la voix de la raison ? Songeait-il à suspendre ses projets ? C'eût été trop beau pour être possible.

Après quelques instants de silence, pendant lesquels je n'osais l'interroger, il reprit en disant :

« J'y pensais. Depuis notre arrivée à Stapi, je me suis préoccupé de la grave question que tu viens de me soumettre, car il ne faut pas agir en imprudents.

— Non, répondis-je avec force.

— Il y a six cents ans que le Sneffels est muet ; mais il peut parler. Or les éruptions sont toujours précédées par des phénomènes parfaitement connus. J'ai donc interrogé les habitants du pays, j'ai étudié le sol, et je puis te le dire, Axel, il n'y aura pas d'éruption. À cette affirmation je restai stupéfait, et je ne pus répliquer.

« Tu doutes de mes paroles ? dit mon oncle ; eh bien ! suis-moi. J'obéis machinalement. En sortant du presbytère, le professeur prit un chemin direct qui, par une ouverture de la muraille basaltique, s'éloignait de la mer. Bientôt nous étions en rase campagne, si l'on peut donner ce nom à un amoncellement immense de déjections volcaniques ; le pays paraissait comme écrasé sous une pluie de pierres énormes, de trapp, de basalte, de granit et de toutes les roches pyroxéniques.

Je voyais ça et là des fumerolles monter dans les airs ; ces vapeurs blanches nommées « reykir » en langue islandaise, venaient des sources thermales, et elles indiquaient, par leur violence, l'activité volcanique du sol. Cela me paraissait justifier mes craintes. Aussi je tombai de mon haut quand mon oncle me dit :

Je voyais ça et là des fumeroles monter dans les airs.

« Tu vois toutes ces fumées, Axel ; eh bien, elles prouvent que nous n'avons rien à redouter des fureurs du volcan !

— Par exemple ! m'écriai-je.

— Retiens bien ceci, reprit le professeur : aux approches d'une éruption, ces fumerolles redoublent d'activité pour disparaître complètement pendant la durée du phénomène, car les fluides élastiques, n'ayant plus la tension nécessaire, prennent le chemin des cratères au lieu de s'échapper à travers les fissures du globe. Si donc ces vapeurs se maintiennent dans leur état habituel, si leur énergie ne s'accroît pas, si tu ajoutes à cette observation que le vent, la pluie ne sont pas remplacés par un air lourd et calme, tu peux affirmer qu'il n'y aura pas d'éruption prochaine.

— Mais…

— Assez. Quand la science a prononcé, il n'y a plus qu'à se taire. Je revins à la cure l'oreille basse. Mon oncle m'avait battu avec des arguments scientifiques. Cependant j'avais encore un espoir, c'est qu'une fois arrivés au fond du cratère, il serait impossible, faute de galerie, de descendre plus profondément, et cela en dépit de tous les Saknussemm du monde.

Je passai la nuit suivante en plein cauchemar au milieu d'un volcan et des profondeurs de la terre, je me sentis lancé dans les espaces planétaires sous la forme de roche éruptive.

Le lendemain, 23 juin, Hans nous attendait avec ses compagnons chargés des vivres, des outils et des instruments. Deux bâtons ferrés, deux fusils, deux cartouchières, étaient réservés à mon oncle et à moi. Hans, en homme de précaution, avait ajouté à nos bagages une outre pleine qui, jointe à nos gourdes, nous assurait de l'eau pour huit jours.

Il était neuf heures du matin. Le recteur et sa haute mégère attendaient devant leur porte. Ils voulaient sans doute nous adresser l'adieu suprême de l'hôte au voyageur. Mais cet adieu prit la forme inattendue d'une note formidable, où l'on comptait jusqu'à l'air de la maison pastorale, air infect, j'ose le dire. Ce digne couple nous rançonnait comme un aubergiste suisse et portait à un beau prix son hospitalité surfaite.

Mon oncle paya sans marchander. Un homme qui partait pour le centre de la terre ne regardait pas à quelques rixdales.

Ce point réglé, Hans donna le signal du départ, et quelques instants après nous avions quitté Stapi.

↑Monnaie de Hambourg, 90 fr. environ.


XIV XIV XIV XIV XIV XIV XIV

Stapi est une bourgade formée d’une trentaine de huttes, et bâtie en pleine lave sous les rayons du soleil réfléchis par le volcan. Stapi é uma vila composta por cerca de trinta cabanas, construída no meio da lava sob os raios do sol refletidos pelo vulcão. Стапі - це село, що складається з близько тридцяти хатин, побудованих посеред лави під сонячними променями, відбитими вулканом. Elle s’étend au fond d’un petit fjord encaissé dans une muraille du plus étrange effet. It stretches out at the bottom of a small fjord enclosed in a wall of the strangest effect. Estende-se no fundo de um pequeno fiorde encerrado por uma parede do mais estranho efeito. Він лежить на дні невеликого фіорду, оточеного стіною з дивним ефектом.

On sait que le basalte est une roche brune d’origine ignée. Відомо, що базальт - це коричнева гірська порода вулканічного походження. Elle affecte des formes régulières qui surprennent par leur disposition. Ici la nature procède géométriquement et travaille à la manière humaine, comme si elle eût manié l’équerre, le compas et le fil à plomb. Here, nature proceeds geometrically and works in the human manner, as if wielding square, compass and plumb line. Aqui a natureza procede geometricamente e funciona à maneira humana, como se tivesse manuseado o esquadro, a bússola e o fio de prumo. Тут природа діє геометрично і працює по-людськи, так, ніби вона володіє косинцем, циркулем і схилом. Si partout ailleurs elle fait de l’art avec ses grandes masses jetées sans ordre, ses cônes à peine ébauchés, ses pyramides imparfaites, avec la bizarre succession de ses lignes, ici, voulant donner l’exemple de la régularité, et précédant les architectes des premiers âges, elle a créé un ordre sévère, que ni les splendeurs de Babylone ni les merveilles de la Grèce n’ont jamais dépassé. Se em todos os outros lugares faz arte com suas grandes massas atiradas desordenadamente, seus cones mal esboçados, suas pirâmides imperfeitas, com a sucessão bizarra de suas linhas, aqui, querendo dar o exemplo de regularidade, e precedendo os arquitetos desde os primeiros tempos ela criou uma ordem severa, que nem os esplendores da Babilônia nem as maravilhas da Grécia jamais superaram. Якщо скрізь вона творить мистецтво своїми величезними масами, кинутими без порядку, своїми ледь наміченими конусами, своїми недосконалими пірамідами, з химерною послідовністю своїх ліній, то тут, бажаючи дати приклад регулярності і випередивши архітекторів перших століть, вона створила суворий порядок, який ніколи не перевершили ні пишноти Вавилону, ні чудеса Греції...

J’avais bien entendu parler de la Chaussée des Géants en Irlande, et de la Grotte de Fingal dans l’une des Hébrides, mais le spectacle d’une substruction basaltique ne s’était pas encore offert à mes regards. Я чув про Гігантську дамбу в Ірландії та про печеру Фінгала на одному з Гебридських островів, але видовище базальтової підструктури ще не спадало мені на думку.

Or, à Stapi, ce phénomène apparaissait dans toute sa beauté.

La muraille du fjörd, comme toute la côte de la presqu’île, se composait d’une suite de colonnes verticales, hautes de trente pieds. Ces fûts droits et d’une proportion pure supportaient une archivolte, faite de colonnes horizontales dont le surplombement formait demi-voûte au-dessus de la mer. Estes barris retos e de proporções puras sustentavam uma arquivolta, constituída por colunas horizontais cuja saliência formava uma semi-abóbada sobre o mar. Эти прямые бочки чистой пропорции поддерживали архивольт, выполненный из горизонтальных колонн, чей вылет образовывал полукруг над морем. Ці прямі вали чистих пропорцій підтримували архівольт з горизонтальних колон, звис яких утворював над морем пів арки. À de certains intervalles, et sous cet impluvium naturel, l’œil surprenait des ouvertures ogivales d’un dessin admirable, à travers lesquelles les flots du large venaient se précipiter en écumant. At certain intervals, and beneath this natural impluvium, the eye caught sight of ogival openings of admirable design, through which the waves of the sea rushed forward foaming. Em certos intervalos, e sob este implúvio natural, o olhar avistava aberturas ogivais de desenho admirável, por onde as ondas do mar vinham precipitando-se, espumando. Через певні проміжки часу, під цим природним імлювієм, око впадали в око оживаючі отвори чудового дизайну, крізь які в піні виривалися хвилі відкритого моря. Quelques tronçons de basalte, arrachés par les fureurs de l’Océan, s’allongeaient sur le sol comme les débris d’un temple antique, ruines éternellement jeunes, sur lesquelles passaient les siècles sans les entamer. Some sections of basalt, wrenched by the fury of the ocean, lay on the ground like the remains of an ancient temple, ruins eternally young, on which passed the centuries without beginning them. Alguns trechos de basalto, dilacerados pela fúria do oceano, estendiam-se sobre o solo como os destroços de um antigo templo, ruínas eternamente jovens, sobre as quais os séculos se passaram sem rompê-las.

Telle était la dernière étape de notre voyage terrestre. Hans nous y avait conduits avec intelligence, et je me rassurais un peu en songeant qu’il devait nous accompagner encore. Hans had led us there with intelligence, and I reassured myself a little, thinking that he must accompany us again. Ганс розумно привів нас туди, і я відчув себе трохи заспокоєним, що він все ще буде супроводжувати нас.

En arrivant à la porte de la maison du recteur, simple cabane basse, ni plus belle, ni plus confortable que ses voisines, je vis un homme en train de ferrer un cheval, le marteau à la main, et le tablier de cuir aux reins. Chegando à porta da casa do reitor, uma cabana simples e baixa, nem mais bonita nem mais confortável que as vizinhas, vi um homem ferrando um cavalo, martelo na mão e avental de couro nas costas. Коли я підійшов до дверей будинку настоятеля, простої низької хатини, не красивішої і не зручнішої за сусідні, я побачив чоловіка, який підковував коня, з молотком у руці і шкіряним фартухом на спині.

« Saelvertu, » lui dit le chasseur.

— « God dag », répondit le maréchal-ferrant en parfait danois.

— « Kyrkoherde, » fit Hans en se retournant vers mon oncle.

— Le recteur ! répéta ce dernier. Il paraît, Axel, que ce brave homme est le recteur. Pendant ce temps, le guide mettait le « kyrkoherde » au courant de la situation ; celui-ci, suspendant son travail, poussa une sorte de cri en usage sans doute entre chevaux et maquignons, et aussitôt une grande mégère sortit de la cabane. During this time, the guide put the "kyrkoherde" informed of the situation; the latter, suspending his work, uttered a sort of cry, doubtless in use between horses and maquignons, and at once a great shrew went out of the hut. Durante este tempo, o guia informou o "kyrkoherde" da situação; este, suspendendo o trabalho, soltou uma espécie de grito provavelmente usado entre cavalos e negociantes de cavalos, e imediatamente uma megera alta saiu da cabana. Тим часом провідник повідомив "киркогерду" про ситуацію; той, призупинивши свою роботу, вигукнув щось на кшталт вигуку, що вживається, без сумніву, між кіньми і вершниками, і в ту ж мить з хатини вискочила велика землерийка. Si elle ne mesurait pas six pieds de haut, il ne s’en fallait guère. If she did not measure six feet tall, he hardly did it. Якщо він не був шість футів заввишки, то не дуже близько. Je craignais qu’elle ne vînt offrir aux voyageurs le baiser islandais ; mais il n’en fut rien, et même elle mit assez peu de bonne grâce à nous introduire dans sa maison. I feared that she would come to offer the travelers the Icelandic kiss; but it was not so, and even she had little good grace to introduce us into her house. Tive medo de que ela viesse oferecer aos viajantes o beijo islandês; mas isso não aconteceu, e mesmo ela não foi muito gentil em nos levar para dentro de sua casa. Я боявся, що вона прийде, щоб запропонувати мандрівникам ісландський поцілунок, але вона цього не зробила, і навіть не була дуже люб'язною, запросивши нас до свого будинку.

La chambre des étrangers me parut être la plus mauvaise du presbytère, étroite, sale et infecte. The strangers' room seemed to me to be the worst in the presbytery, narrow, dirty and foul. Il fallut s’en contenter ; le recteur ne semblait pas pratiquer l’hospitalité antique. It had to be satisfied; the rector did not seem to practice ancient hospitality. Loin de là. Зовсім ні. Avant la fin du jour, je vis que nous avions affaire à un forgeron, à un pêcheur, à un chasseur, à un charpentier, et pas du tout à un ministre du Seigneur. Before the end of the day, I saw that we were dealing with a blacksmith, a fisherman, a hunter, a carpenter, and not at all a minister of the Lord. Antes do final do dia, vi que estávamos lidando com um ferreiro, um pescador, um caçador, um carpinteiro, e de forma alguma um ministro do Senhor. Nous, étions en semaine, il est vrai. We were on a weekday, it's true. Estávamos durante a semana, é verdade. Ми були в будній день, це правда. Peut-être se rattrapait-il le dimanche. Maybe he was catching up on Sunday. Talvez ele tenha compensado no domingo.

Je ne veux pas dire du mal de ces pauvres prêtres qui, après tout, sont fort misérables ; ils reçoivent du gouvernement danois un traitement ridicule et perçoivent le quart de la dîme de leur paroisse, ce qui ne fait pas une somme de soixante marks courants[1]. I do not mean to speak ill of those poor priests who, after all, are very miserable; they receive a ridiculous treatment from the Danish government, and receive a quarter of the tithe of their parish, which does not amount to sixty current marks [1]. Não pretendo falar mal desses pobres padres que, afinal, são muito miseráveis; recebem tratamento ridículo do governo dinamarquês e recebem um quarto do dízimo de sua paróquia, o que não chega a 60 marcos atuais [1]. De là, nécessité de travailler pour vivre ; mais à pêcher, à chasser, à ferrer des chevaux, on finit par prendre les manières, le ton et les mœurs des chasseurs, des pêcheurs et autres gens un peu rudes ; le soir même je m’aperçus que notre hôte ne comptait pas la sobriété au nombre de ses vertus. Hence, the need to work for a living; but to fish, to hunt, to shoe horses, one ends up taking the manners, the tone and the manners of the hunters, the fishermen and other somewhat rough people; the same evening I noticed that our host did not count sobriety among his virtues. Звідси необхідність працювати, щоб заробити на життя; але рибалка, мисливство, підковування коней - все це призводить до того, що людина переймає манери, тон і мораль мисливців, рибалок та інших досить грубих людей; того ж вечора я помітив, що наш господар не зараховує тверезість до своїх чеснот.

Mon oncle comprit vite à quel genre d’homme il avait affaire ; au lieu d’un brave et digne savant, il trouvait un paysan lourd et grossier ; il résolut donc de commencer au plus tôt sa grande expédition et de quitter cette cure peu hospitalière. My uncle quickly realized what kind of man he was dealing with; instead of a brave and worthy scholar he found a heavy and coarse peasant; he resolved, therefore, to begin his great expedition as soon as possible, and to leave this hospitable cure. Meu tio entendeu rapidamente com que tipo de homem estava lidando; em vez de um erudito valente e digno, ele encontrou um camponês pesado e grosseiro; ele, portanto, resolveu começar sua grande expedição o mais rápido possível e abandonar essa cura inóspita. Незабаром дядько зрозумів, з якою людиною він має справу; замість хороброго і гідного вченого він знайшов важкого і грубого селянина; тому він вирішив якнайшвидше розпочати свою велику експедицію і покинути цю негостинну парафію. Il ne regardait pas à ses fatigues et résolut d’aller passer quelques jours dans la montagne.

Les préparatifs de départ furent donc faits dès le lendemain de notre arrivée à Stapi. Hans loua les services de trois Islandais pour remplacer les chevaux dans le transport des bagages ; mais, une fois arrivés au fond du cratère, ces indigènes devaient rebrousser chemin et nous abandonner à nous-mêmes. Hans hired three Icelanders to replace the horses in carrying the luggage, but once we reached the bottom of the crater, the natives had to turn back and leave us to our own devices. Hans contratou os serviços de três islandeses para substituir os cavalos no transporte de bagagem; mas, assim que chegamos ao fundo da cratera, esses nativos tiveram que voltar e nos abandonar a nós mesmos. Ганс найняв трьох ісландців, щоб замінити коней для перевезення багажу, але коли ми досягли дна кратера, аборигенам довелося повернути назад і залишити нас самих. Ce point fut parfaitement arrêté. This point was perfectly stopped. Этот момент был полностью остановлен. Цей момент був абсолютно чітко викладений.

À cette occasion, mon oncle dut apprendre au chasseur que son intention était de poursuivre la reconnaissance du volcan jusqu’à ses dernières limites. Nessa ocasião, meu tio teve que informar ao caçador que sua intenção era continuar o reconhecimento do vulcão até seus últimos limites. Цього разу дядькові довелося сказати мисливцеві, що він має намір продовжувати розвідку вулкана до останньої межі.

Hans se contenta d’incliner la tête. Aller là ou ailleurs, s’enfoncer dans les entrailles de son île ou la parcourir, il n’y voyait aucune différence. Para ir para lá ou para outro lugar, para afundar nas entranhas de sua ilha ou para viajar, ele não via diferença. Йти туди чи кудись ще, занурюватися в надра свого острова чи ходити по ньому, він не бачив різниці. Quant à moi, distrait jusqu’alors par les incidents du voyage, j’avais un peu oublié l’avenir, mais maintenant je sentais l’émotion me reprendre de plus belle. As for me, distracted until then by the incidents of the journey, I had forgotten the future a little, but now I felt the emotion take me over again. Щодо мене, то я, відволікаючись до того часу на інциденти під час подорожі, забув про майбутнє, але тепер відчув, що емоції повертаються. Qu’y faire ? What to do? Що робити? Si j’avais pu tenter de résister au professeur Lidenbrock, c’était à Hambourg et non au pied du Sneffels. Se eu pudesse tentar resistir ao professor Lidenbrock, seria em Hamburgo e não aos pés de Sneffels. Une idée, entre toutes, me tracassait fort, idée effrayante et faite pour ébranler des nerfs moins sensibles que les miens. One idea, among all, was bothering me, a frightening idea, and made to shake nerves less sensitive than mine. Одна ідея з усіх інших не давала мені спокою, страшна ідея, яка могла б розхитати нерви і менш чутливі, ніж мої.

« Voyons, me disais-je, nous allons gravir le Sneffels. “Venha”, disse a mim mesmo, “vamos escalar o Sneffels. Bien. Nous allons visiter son cratère. Bon. D’autres l’ont fait qui n’en sont pas morts. Others did it that did not die. Це робили й інші, хто не загинув. Mais ce n’est pas tout. Але це ще не все. S’il se présente un chemin pour descendre dans les entrailles du sol, si ce malencontreux Saknussemm a dit vrai, nous allons nous perdre au milieu des galeries souterraines du volcan. Or, rien n’affirme que le Sneffels soit éteint ! But nothing says that the Sneffels is off! Однак немає жодних доказів того, що сніффель вимер! Qui prouve qu’une éruption ne se prépare pas ? De ce que le monstre dort depuis 1229, s’ensuit-il qu’il ne puisse se réveiller ? Et, s’il se réveille, qu’est-ce que nous deviendrons ? Cela demandait la peine d’y réfléchir, et j’y réfléchissais. It was worth thinking about it, and I was thinking about it. Про це варто було подумати, і я думав про це. Je ne pouvais dormir sans rêver d’éruption. Or, le rôle de scorie me paraissait assez brutal à jouer. But the role of slag seemed to me rather brutal to play. No entanto, o papel da escória parecia bastante brutal para mim. Але роль шлаку мені здалася досить брутальною.

Enfin je n’y tins plus ; je résolus de soumettre le cas à mon oncle le plus adroitement possible, et sous la forme d’une hypothèse parfaitement irréalisable. At last I did not hold on; I resolved to submit the case to my uncle as adroitly as possible, and in the form of a perfectly unachievable hypothesis. Нарешті я не витримав і вирішив подати справу дядькові якомога хитріше, у вигляді абсолютно нездійсненної гіпотези.

J’allai le trouver. I went to find him. Я пішов його шукати. Je lui fis part de mes craintes, et je me reculai pour le laisser éclater à son aise. I told him my fears, and I stepped back to let him burst at his ease. Contei a ele sobre meus medos e recuei para deixá-lo explodir à vontade. Я розповів йому про свої страхи і відійшов, щоб дати йому можливість висловитися.

« J’y pensais, » répondit-il simplement. "I thought about it," he replied simply.

Que signifiaient ces paroles ! Allait-il donc entendre la voix de la raison ? Чи почує він голос розуму? Songeait-il à suspendre ses projets ? C’eût été trop beau pour être possible. It would have been too good to be possible. Це було б занадто добре, щоб бути можливим.

Après quelques instants de silence, pendant lesquels je n’osais l’interroger, il reprit en disant :

« J’y pensais. Depuis notre arrivée à Stapi, je me suis préoccupé de la grave question que tu viens de me soumettre, car il ne faut pas agir en imprudents. Since our arrival at Stapi, I have been concerned about the serious question you have just submitted to me, for one must not act in recklessness. З моменту нашого прибуття в Стапі мене турбує серйозне питання, яке ви мені щойно поставили, тому що ми не повинні діяти нерозважливо.

— Non, répondis-je avec force. - Ні, - рішуче відповіла я.

— Il y a six cents ans que le Sneffels est muet ; mais il peut parler. Or les éruptions sont toujours précédées par des phénomènes parfaitement connus. J’ai donc interrogé les habitants du pays, j’ai étudié le sol, et je puis te le dire, Axel, il n’y aura pas d’éruption. Тож я розпитав місцевих, вивчив ґрунт і можу сказати тобі, Акселю, що виверження не буде. À cette affirmation je restai stupéfait, et je ne pus répliquer.

« Tu doutes de mes paroles ? "Ви сумніваєтеся в моїх словах? dit mon oncle ; eh bien ! suis-moi. J’obéis machinalement. En sortant du presbytère, le professeur prit un chemin direct qui, par une ouverture de la muraille basaltique, s’éloignait de la mer. Bientôt nous étions en rase campagne, si l’on peut donner ce nom à un amoncellement immense de déjections volcaniques ; le pays paraissait comme écrasé sous une pluie de pierres énormes, de trapp, de basalte, de granit et de toutes les roches pyroxéniques. Logo estávamos em campo aberto, se é que podemos dar esse nome a uma imensa pilha de excrementos vulcânicos; o país parecia esmagado por uma chuva de pedras enormes, armadilha, basalto, granito e todas as rochas de piroxênio.

Je voyais ça et là des fumerolles monter dans les airs ; ces vapeurs blanches nommées « reykir » en langue islandaise, venaient des sources thermales, et elles indiquaient, par leur violence, l’activité volcanique du sol. Aqui e ali, vi fumarolas subindo no ar; esses vapores brancos chamados "reykir" na língua islandesa, vinham de fontes termais, e indicavam, por sua violência, a atividade vulcânica do solo. Cela me paraissait justifier mes craintes. Здавалося, це виправдовувало мої побоювання. Aussi je tombai de mon haut quand mon oncle me dit : So I fell from my top when my uncle said to me: Então eu caí do meu topo quando meu tio me disse: Тож я впав, коли дядько сказав мені:

Je voyais ça et là des fumeroles monter dans les airs. Де-не-де я бачив дим, що здіймався в повітря.

« Tu vois toutes ces fumées, Axel ; eh bien, elles prouvent que nous n’avons rien à redouter des fureurs du volcan !

— Par exemple ! m’écriai-je.

— Retiens bien ceci, reprit le professeur : aux approches d’une éruption, ces fumerolles redoublent d’activité pour disparaître complètement pendant la durée du phénomène, car les fluides élastiques, n’ayant plus la tension nécessaire, prennent le chemin des cratères au lieu de s’échapper à travers les fissures du globe. - Lembre-se, continuou o professor: ao aproximar-se de uma erupção, essas fumarolas redobram sua atividade para desaparecer completamente durante a duração do fenômeno, pois os fluidos elásticos, não tendo mais a tensão necessária, tomam o caminho das crateras no em vez de escapar pelas fendas do globo. - Запам'ятайте це, - сказав професор, - коли наближається виверження, ці фумароли подвоюють свою активність, щоб потім повністю зникнути на час явища, тому що еластичні рідини, не маючи більше необхідного натягу, йдуть шляхом кратерів замість того, щоб вирватися через тріщини в земній кулі. Si donc ces vapeurs se maintiennent dans leur état habituel, si leur énergie ne s’accroît pas, si tu ajoutes à cette observation que le vent, la pluie ne sont pas remplacés par un air lourd et calme, tu peux affirmer qu’il n’y aura pas d’éruption prochaine.

— Mais…

— Assez. Quand la science a prononcé, il n’y a plus qu’à se taire. Je revins à la cure l’oreille basse. I went back to the cure with a low ear. Voltei à cura com o ouvido baixo. Я вернулся к лекарству с низким ухом. Я повернулася до клініки, притиснувши вухо до землі. Mon oncle m’avait battu avec des arguments scientifiques. Cependant j’avais encore un espoir, c’est qu’une fois arrivés au fond du cratère, il serait impossible, faute de galerie, de descendre plus profondément, et cela en dépit de tous les Saknussemm du monde. Porém, eu ainda tinha uma esperança, que uma vez que chegássemos ao fundo da cratera, seria impossível, por falta de uma galeria, descer mais fundo, e isso apesar de todos os Saknussemms no mundo.

Je passai la nuit suivante en plein cauchemar au milieu d’un volcan et des profondeurs de la terre, je me sentis lancé dans les espaces planétaires sous la forme de roche éruptive.

Le lendemain, 23 juin, Hans nous attendait avec ses compagnons chargés des vivres, des outils et des instruments. Deux bâtons ferrés, deux fusils, deux cartouchières, étaient réservés à mon oncle et à moi. Hans, en homme de précaution, avait ajouté à nos bagages une outre pleine qui, jointe à nos gourdes, nous assurait de l’eau pour huit jours. Hans, um homem cauteloso, tinha acrescentado à nossa bagagem uma garrafa cheia que, junto com nossas cabaças, nos servia de água por uma semana. Ганс, як людина завбачлива, додав до нашого багажу повний бурдюк вина, який разом з нашими пляшками з водою забезпечив нас водою на вісім днів.

Il était neuf heures du matin. Була дев'ята ранку. Le recteur et sa haute mégère attendaient devant leur porte. Ils voulaient sans doute nous adresser l’adieu suprême de l’hôte au voyageur. Вони, мабуть, хотіли дати нам найвище прощання господаря з мандрівником. Mais cet adieu prit la forme inattendue d’une note formidable, où l’on comptait jusqu’à l’air de la maison pastorale, air infect, j’ose le dire. But this farewell took the unexpected form of a formidable note, in which one could count even the air of the pastoral house, a foul air, I dare say it. Mas esta despedida assumiu a forma inesperada de uma nota formidável, em que se podia contar até o ar da casa pastoral, ar fedorento, atrevo-me a dizê-lo. Але це прощання набуло несподіваної форми грізної ноти, в якій було оцінено повітря душпастирського дому, повітря, яке, наважуся сказати, було нечистим. Ce digne couple nous rançonnait comme un aubergiste suisse et portait à un beau prix son hospitalité surfaite. This worthy couple ransomed us like a Swiss innkeeper and paid a fair price for their overrated hospitality. Esse casal digno nos resgatou como um estalajadeiro suíço e pagou um preço justo por sua hospitalidade superestimada. Ця поважна пара вимагала від нас викупу, як швейцарський трактирник, і взяла кругленьку суму за свою переоцінену гостинність.

Mon oncle paya sans marchander. My uncle paid without haggling. Meu tio pagou sem pechinchar. Дядько заплатив, не торгуючись. Un homme qui partait pour le centre de la terre ne regardait pas à quelques rixdales. Людина, яка прямує до центру землі, не дивиться на кілька риксдалів.

Ce point réglé, Hans donna le signal du départ, et quelques instants après nous avions quitté Stapi. With this settled, Hans gave the signal for departure, and a few moments later we had left Stapi.

↑Monnaie de Hambourg, 90 fr. environ.