×

We use cookies to help make LingQ better. By visiting the site, you agree to our cookie policy.


image

LA MACHINE À EXPLORER LE TEMPS, CHAPITRE III – L'EXPLORATEUR REVIENT

CHAPITRE III – L'EXPLORATEUR REVIENT

JE crois qu'aucun de nous ne crut alors à la machine. Le fait est que notre ami était un de ces hommes qui sont trop intelligents, trop habiles ou trop adroits pour qu'on les croie ; on avait avec lui l'impression qu'on ne le voyait jamais en entier ; on suspectait toujours quelque subtile réserve, quelque ingénuité en embuscade, derrière sa lucide franchise. Si c'eût été Filby qui nous eût montré le modèle et expliqué la chose, nous eussions été à son égard beaucoup moins sceptiques. Car nous nous serions rendu compte de ses motifs : un charcutier comprendrait Filby. Mais l'Explorateur du Temps avait plus qu'un soupçon de fantaisie parmi ses éléments constitutifs, et nous nous défiions de lui. Des choses qui auraient fait la renommée d'hommes beaucoup moins capables semblaient entre ses mains des supercheries. C'est une erreur de faire les choses trop facilement. Les gens graves qui le prenaient au sérieux ne se sentaient jamais sûrs de sa manière de faire. Ils semblaient en quelque sorte sentir qu'engager leurs réputations de sain jugement avec lui, c'était meubler une école avec des objets de porcelaine coquille d'œuf. Aussi je ne pense pas qu'aucun de nous ait beaucoup parlé de l'Explorateur du Temps dans l'intervalle qui sépara ce jeudi-là du suivant, bien que tout ce qu'il comportait de virtualités bizarres hantât sans aucun doute la plupart de nos esprits : ses éventualités, c'est-à-dire tout ce qu'il y avait de pratiquement incroyable, les curieuses possibilités d'anachronisme et de complète confusion qu'il suggérait. Pour ma part, j'étais particulièrement préoccupé par l'escamotage de la maquette. Je me rappelle en avoir discuté avec le Docteur que je rencontrai le vendredi au Linnoean. Il me dit avoir vu une semblable mystification à Tübingen, et il attachait une grande importance à la bougie soufflée. Mais il ne pouvait expliquer de quelle façon le tour se jouait.

Le jeudi suivant, je me rendis à Richmond – car j'étais, je crois, un des hôtes les plus assidus de l'Explorateur du Temps – et, arrivant un peu tard, je trouvai quatre ou cinq amis déjà réunis au salon. Le Docteur était adossé à la cheminée, une feuille de papier dans une main et sa montre dans l'autre. Je cherchai des yeux l'Explorateur du Temps.

« Il est maintenant sept heures et demie, dit le Docteur ; je crois que nous ferons mieux de dîner.

– Où est-il ? dis-je en nommant notre hôte.

– C'est vrai, vous ne faites qu'arriver. C'est singulier. Il a été retenu sans pouvoir se dégager ; il a laissé ce mot pour nous inviter à nous mettre à table à sept heures s'il n'était pas là. Il ajoute qu'il expliquera son retard quand il rentrera.

– En effet, c'est pitoyable de laisser gâter le dîner », dit le Rédacteur en chef d'un journal quotidien bien connu ; et là-dessus, le Docteur sonna le dîner.

Le Psychologue, le Docteur et moi étions les seuls qui eussions assisté au dîner précédent. Les autres étaient Blank, directeur du journal déjà mentionné, un certain journaliste et un autre personnage – tranquille, timide et barbu – que je ne connaissais pas et qui, autant que je pus l'observer, ne desserra pas les dents de toute la soirée. On fit à table maintes conjectures sur l'absence du maître de maison, et par plaisanterie je suggérai qu'il explorait peut-être sa quatrième dimension. Le Rédacteur en chef demanda une explication, et le Psychologue lui fit de bonne grâce un rapide récit du paradoxal et ingénieux subterfuge dont il avait été témoin huit jours auparavant. Au milieu de son explication, la porte du corridor s'ouvrit lentement et sans bruit. J'étais assis face à la porte et, le premier, je la vis s'ouvrir.

« Eh bien ! tout de même ! » m'écriai-je.

La porte s'ouvrit plus grande et l'Explorateur du Temps était devant nous. Je poussai un cri de surprise.

« Grand Dieu ! mais qu'arrive-t-il ? » demanda le Docteur qui l'aperçut ensuite.

Et tous les convives se tournèrent vers la porte.

Notre ami était dans un état surprenant. Son vêtement était poussiéreux et sale, souillé de taches verdâtres aux manches ; sa chevelure était emmêlée et elle me sembla plus grise – soit à cause de la poussière, soit que sa couleur ait réellement changé. Son visage était affreusement pâle. Il avait une profonde coupure au menton – une coupure à demi refermée. Il avait les traits tirés et l'air hagard de ceux qui sont en proie à une intense souffrance. Il hésita un instant, ébloui sans doute par la clarté. Puis il entra en boitant, tout comme eût fait un vagabond aux pieds endoloris. Nous le regardions en silence, attendant qu'il parlât.

Il n'ouvrit pas la bouche, mais s'avança péniblement jusqu'à la table, et fit un mouvement pour atteindre le vin. Le Rédacteur en chef remplit une coupe de champagne et la lui présenta. Il la vida jusqu'à la dernière goutte et parut se sentir mieux, car son regard fit le tour de la table et l'ombre de son sourire habituel erra sur ses lèvres.

« Que diable avez-vous bien pu faire ? » dit le Docteur.

L'Explorateur du Temps ne sembla pas entendre.

« Que je ne vous interrompe pas, surtout ! dit-il d'une voix mal assurée, je suis très bien. » Il s'arrêta, tendit son verre pour qu'on le remplît et le vida d'un seul trait. « Cela fait du bien ! » dit-il.

Ses yeux s'éclairèrent et une rougeur légère lui monta aux joues. Son regard parcourut rapidement nos visages avec une sorte de morne approbation et fit ensuite le tour de la salle chaude et confortable. Puis de nouveau il parla, comme s'il cherchait encore son chemin à travers ses mots.

« Je vais me laver et me changer, puis je redescendrai et vous donnerai les explications promises… Gardez-moi quelques tranches de mouton. Je meurs littéralement de faim. » Il reconnut tout à coup le Rédacteur en chef, qui était un convive assez rare, et lui souhaita la bienvenue. Le Rédacteur commença une question.

« Je vous répondrai tout à l'heure, dit l'Explorateur du Temps. Je me sens un peu… drôle. Ça ira très bien dans un moment. » Il posa son verre, et se dirigea vers la porte de l'escalier. Je remarquai à nouveau qu'il boitait et que son pied frappait lourdement le plancher, et en me levant un peu je pus voir ses pieds pendant qu'il sortait : il était simplement chaussé d'une paire de chaussettes déchirées et tachées de sang. Puis la porte se referma sur lui. J'avais bien envie de le suivre, mais je me rappelai combien il détestait qu'on fît des embarras à son endroit. Pendant un moment mon esprit battit la campagne. Puis j'entendis le Rédacteur en chef qui disait : “Singulière conduite d'un savant fameux” ; suivant son habitude il pensait en titres d'articles. Et cela ramena mon attention vers la table étincelante.

« Quelle est cette farce ? dit le journaliste. Est-ce qu'il aurait eu la fantaisie d'aller faire le coltineur-amateur ? Je n'y comprends rien. » Mes yeux rencontrèrent ceux du Psychologue, et ils y lurent ma propre interprétation. Je pensai à notre ami se hissant péniblement dans les escaliers. Je ne crois pas que personne d'autre eût remarqué qu'il boitait.

Le premier à revenir complètement de sa surprise fut le Docteur, qui sonna pour la suite du service – car notre ami ne pouvait pas supporter les domestiques sans cesse présents au dîner. Sur ce, le Rédacteur en chef prit son couteau et sa fourchette avec un grognement ; le personnage silencieux imita son exemple et l'on se remit à dîner. Tout d'abord la conversation se borna à quelques exclamations étonnées ; puis la curiosité du Rédacteur en chef devint pressante.

« Est-ce que notre ami augmente son modeste revenu en allant balayer les rues ? Ou bien subit-il des transformations à la Nabuchodonosor ?

– Je suis sûr, dis-je, que c'est encore cette histoire de la Machine du Temps. » Je repris où le Psychologue l'avait laissé le récit de notre précédente réunion. Les nouveaux convives étaient franchement incrédules. Le Rédacteur en chef soulevait des objections : Qu'est-ce que c'était que ça, l'Exploration du Temps ? Est-ce qu'un homme se couvre de poussière à se rouler dans un paradoxe, voyons ? Puis comme il se familiarisait avec l'idée, il eut recours à la plaisanterie : Est-ce qu'il n'y avait donc plus de brosses à habit dans le Futur ? Le journaliste, lui aussi, ne voulait croire à aucun prix et se joignait au Rédacteur en chef dans la tâche facile de ridiculiser toute l'affaire. L'un et l'autre appartenaient à la nouvelle espèce de journalistes jeunes gens joyeux et très irrespectueux. « Le correspondant spécial que nous avons envoyé dans la semaine prochaine nous annonce… » disait, ou plutôt clamait, le Journaliste. Lorsque l'Explorateur du Temps réapparut. Il s'était mis en habit et rien – sinon ses yeux hagards – ne restait du changement qui m'avait d'abord effrayé.

« Dites donc, lui demanda en riant le Rédacteur en chef, voilà qu'on me raconte que vous revenez d'un voyage dans le milieu de la semaine prochaine ! Révélez-nous les intentions du gouvernement, n'est-ce pas ? Combien voulez-vous pour l'article ? » L'Explorateur du Temps vint s'asseoir sans dire un mot. Il souriait tranquillement à sa façon accoutumée.

« Où est ma part ? dit-il.

Quel plaisir d'enfoncer encore une fourchette dans cette viande !

– Quelle blague ! dit le Rédacteur en chef.

– Au diable la blague ! dit l'Explorateur du Temps. J'ai besoin de manger, et je ne dirai pas un mot avant d'avoir remis un peu de peptones dans mon organisme. Merci. Passez-moi le sel.

– Un seul mot, dis-je. Vous revenez d'exploration ?

– Oui ! dit-il, la bouche pleine et en secouant la tête.

– Je donne un shilling la ligne pour un compte rendu in extenso », dit le Rédacteur en chef.

L'Explorateur poussa son verre du côté de l'Homme silencieux, et le fit tinter d'un coup d'ongle ; sur ce, l'Homme silencieux, qui le fixait avec ébahissement, sursauta et lui versa du vin. Le dîner s'acheva dans un malaise général. Pour ma part, de soudaines questions me venaient incessamment aux lèvres et je suis sûr qu'il en était de même pour les autres. Le journaliste essaya de diminuer la tension des esprits en contant des anecdotes. Notre ami donnait toute son attention à son dîner et semblait ne pas avoir mangé depuis une semaine. Le Docteur fumait une cigarette et considérait l'Explorateur à travers ses paupières mi-closes. L'Homme silencieux semblait encore plus gauche que d'habitude et vida sa coupe de champagne avec une régularité et une détermination purement nerveuses. Enfin notre hôte repoussa son assiette, et nous regarda.

« Je vous dois des excuses, dit-il. Je mourais tout bonnement de faim. Mais j'ai passé quelques moments bien surprenants. » Il atteignit un cigare dont il coupa le bout. « Mais venez au fumoir. C'est une histoire trop longue pour la raconter au milieu de la vaisselle sale. » Puis il sonna en se levant et nous conduisit dans la chambre attenante. « Vous avez parlé de la Machine à Blank et aux autres ? me dit-il, en se renversant dans son fauteuil.

– Mais ce n'est qu'un paradoxe ! dit le Rédacteur en chef.

– Je ne puis pas discuter ce soir. Je veux bien vous raconter l'histoire, mais non pas la discuter. Je vais, continua-t-il, vous faire le récit de ce qui m'est arrivé, si vous y tenez, mais il faudra vous abstenir de m'interrompre. J'ai besoin de raconter, absolument. La plus grande partie vous semblera pure invention ; soit ! Mais tout est vrai du premier au dernier mot. J'étais dans mon laboratoire à quatre heures et depuis lors… j'ai vécu huit jours… des jours tels qu'aucun être humain n'en a vécu auparavant ! Je suis presque épuisé, mais je ne veux pas dormir avant de vous avoir conté la chose d'un bout à l'autre. Après cela, j'irai me reposer. Mais pas d'interruption ! Est-ce convenu ?

– Convenu ! » dit le Rédacteur en chef.

Et tous nous répétâmes : « Convenu ! » Alors l'Explorateur du Temps raconta son histoire telle que je la transcris plus loin. Il s'enfonça d'abord dans son fauteuil, et parla du ton d'un homme fatigué ; peu à peu il s'anima. En l'écrivant, je ne sens que trop vivement l'insuffisance de la plume et du papier et surtout ma propre insuffisance pour l'exprimer avec toute sa valeur. Vous lirez, sans doute avec attention ; mais vous ne pourrez voir, dans le cercle brillant de la petite lampe, la face pâle et franche du conteur, et vous n'entendrez pas les inflexions de sa voix. Vous ne saurez pas combien son expression suivait les phases de son récit ! La plupart d'entre nous, qui écoutions, étions dans l'ombre, car les bougies des candélabres du fumoir n'avaient pas été allumées, et seules la face du journaliste et les jambes de l'Homme silencieux étaient éclairées. D'abord, nous nous regardions les uns les autres de temps en temps. Puis au bout d'un moment nous cessâmes de le faire pour rester les regards fixés sur le visage de l'Explorateur du Temps.


CHAPITRE III – L'EXPLORATEUR REVIENT KAPITEL III - DER FORSCHER KEHRT ZURÜCK CHAPTER III - THE EXPLORER RETURNS CAPÍTULO III - EL REGRESO DEL EXPLORADOR HOOFDSTUK III - DE ONTDEKKINGSREIZIGER KEERT TERUG ГЛАВА III - ВОЗВРАЩЕНИЕ ИССЛЕДОВАТЕЛЯ

JE crois qu'aucun de nous ne crut alors à la machine. ICH glaube, dass keiner von uns damals an die Maschine geglaubt hat. I don't think any of us believed in the machine then. O zamanlar hiçbirimizin makineye inandığına inanmıyorum. Le fait est que notre ami était un de ces hommes qui sont trop intelligents, trop habiles ou trop adroits pour qu'on les croie ; on avait avec lui l'impression qu'on ne le voyait jamais en entier ; on suspectait toujours quelque subtile réserve, quelque ingénuité en embuscade, derrière sa lucide franchise. Tatsache ist, dass unser Freund einer jener Männer war, die zu intelligent, zu geschickt oder zu gewandt sind, als dass man ihnen glauben könnte; man hatte bei ihm das Gefühl, dass man ihn nie ganz sah; man vermutete immer eine subtile Zurückhaltung, eine im Hinterhalt lauernde Naivität hinter seiner klaren Offenheit. The fact is, our friend was one of those men who are too clever, too clever, or too adroit to be believed; with him one had the impression that one never saw him completely; one always suspected some subtle reserve, some ingenuity in ambush, behind his lucid frankness. El hecho es que nuestro amigo era uno de esos hombres demasiado inteligentes, demasiado hábiles o demasiado astutos para ser creídos; con él se tenía la impresión de que nunca se le veía entero; siempre se sospechaba alguna sutil reserva, algún ingenio acechando tras su lúcida franqueza. Mesele şu ki, arkadaşımız inanılamayacak kadar zeki, çok zeki ya da çok zeki adamlardan biriydi; onun yanındayken, onu hiç tam olarak görmemiş izlenimi vardı; kişi her zaman, açık açık sözlülüğünün ardında, pusuya düşmüş bir marifetten, bazı ustalıklardan şüpheleniyordu. Si c'eût été Filby qui nous eût montré le modèle et expliqué la chose, nous eussions été à son égard beaucoup moins sceptiques. Wäre es Filby gewesen, der uns das Modell gezeigt und die Sache erklärt hätte, wären wir ihm gegenüber viel weniger skeptisch gewesen. If it had been Filby who had shown us the model and explained the thing, we would have been much less skeptical of him. Car nous nous serions rendu compte de ses motifs : un charcutier comprendrait Filby. Denn wir hätten seine Motive erkannt: Ein Metzger würde Filby verstehen. Because we would have realized his motives: a butcher would understand Filby. Çünkü amacının farkına varırdık: bir kasap Filby'yi anlayacaktır. Mais l'Explorateur du Temps avait plus qu'un soupçon de fantaisie parmi ses éléments constitutifs, et nous nous défiions de lui. Aber der Time Explorer hatte mehr als nur einen Hauch von Fantasie unter seinen Bausteinen, und wir misstrauten ihm. But the Time Explorer had more than a hint of whimsy among its constituent parts, and we mistrusted it. Pero el Explorador del Tiempo tenía algo más que una pizca de fantasía en sus componentes, y desconfiábamos de él. Ancak Zaman Gezgini'nin yapı taşları arasında bir miktar tuhaflıktan daha fazlası vardı ve biz ona güvenmedik. Des choses qui auraient fait la renommée d'hommes beaucoup moins capables semblaient entre ses mains des supercheries. Dinge, für die weit weniger fähige Männer berühmt gewesen wären, erschienen in seinen Händen als Täuschungen. Things that would have brought fame to far less capable men seemed to be trickery in his hands. Erkekleri daha az ün kazanmaya iten şeyler, onun elinde aldatmaca gibi görünüyordu. C'est une erreur de faire les choses trop facilement. Es ist ein Fehler, Dinge zu leicht zu machen. It is a mistake to do things too easily. Les gens graves qui le prenaient au sérieux ne se sentaient jamais sûrs de sa manière de faire. Die ernsten Menschen, die ihn ernst nahmen, fühlten sich nie sicher, wie er es anstellte. Serious people who took him seriously never felt sure of his way of doing things. Ils semblaient en quelque sorte sentir qu'engager leurs réputations de sain jugement avec lui, c'était meubler une école avec des objets de porcelaine coquille d'œuf. Sie schienen irgendwie zu spüren, dass es eine Aufgabe war, eine Schule mit Gegenständen aus Eierschalenporzellan auszustatten, wenn sie ihren Ruf eines vernünftigen Urteils mit ihm in Verbindung brachten. They somehow seemed to feel that to stake their reputations for sound judgment on him was to furnish a school with eggshell china. Aussi je ne pense pas qu'aucun de nous ait beaucoup parlé de l'Explorateur du Temps dans l'intervalle qui sépara ce jeudi-là du suivant, bien que tout ce qu'il comportait de virtualités bizarres hantât sans aucun doute la plupart de nos esprits : ses éventualités, c'est-à-dire tout ce qu'il y avait de pratiquement incroyable, les curieuses possibilités d'anachronisme et de complète confusion qu'il suggérait. So I don't think any of us talked much about the Time Explorer in the interval between that Thursday and the next, though all the weird virtualities in it undoubtedly haunted most of our minds: its contingencies, that is to say all that was virtually unbelievable, the curious possibilities of anachronism and complete confusion that it suggested. Pour ma part, j'étais particulièrement préoccupé par l'escamotage de la maquette. For my part, I was particularly concerned by the model's concealment. Je me rappelle en avoir discuté avec le Docteur que je rencontrai le vendredi au Linnoean. Ich erinnere mich, dass ich mit dem Doktor, den ich am Freitag im Linnoean traf, darüber gesprochen habe. I remember discussing it with the Doctor whom I met on Friday at the Linnoean. Il me dit avoir vu une semblable mystification à Tübingen, et il attachait une grande importance à la bougie soufflée. He told me that he had seen a similar hoax at Tübingen, and he attached great importance to the blown candle. Me dijo que había visto un engaño similar en Tubinga, y que daba mucha importancia a la vela apagada. Mais il ne pouvait expliquer de quelle façon le tour se jouait. Er konnte jedoch nicht erklären, auf welche Weise die Runde gespielt wurde. But he couldn't explain how the trick was played.

Le jeudi suivant, je me rendis à Richmond – car j'étais, je crois, un des hôtes les plus assidus de l'Explorateur du Temps – et, arrivant un peu tard, je trouvai quatre ou cinq amis déjà réunis au salon. Am nächsten Donnerstag fuhr ich nach Richmond - denn ich war, wie ich glaube, einer der eifrigsten Gäste des Time Explorers - und als ich etwas zu spät ankam, fand ich vier oder fünf Freunde bereits im Salon versammelt vor. The following Thursday I went to Richmond - for I was, I believe, one of the most assiduous guests of the Explorer of Time - and, arriving a little late, I found four or five friends already assembled in the drawing-room. Le Docteur était adossé à la cheminée, une feuille de papier dans une main et sa montre dans l'autre. Der Doktor lehnte am Kamin, ein Blatt Papier in der einen und seine Uhr in der anderen Hand. The Doctor was leaning against the fireplace, a sheet of paper in one hand and his watch in the other. Je cherchai des yeux l'Explorateur du Temps. Ich suchte mit den Augen nach dem Time Explorer.

« Il est maintenant sept heures et demie, dit le Docteur ; je crois que nous ferons mieux de dîner. "Es ist jetzt halb acht", sagte der Doktor, "ich glaube, wir essen besser zu Abend. 'It is now half-past seven,' said the Doctor; I think we'd better have dinner.

– Où est-il ? - Where is he ? dis-je en nommant notre hôte. I say, naming our host.

– C'est vrai, vous ne faites qu'arriver. - Das stimmt, Sie kommen gerade erst an. - It's true, you're just arriving. C'est singulier. Es ist singulär. It is singular. Il a été retenu sans pouvoir se dégager ; il a laissé ce mot pour nous inviter à nous mettre à table à sept heures s'il n'était pas là. Er wurde festgehalten, ohne sich befreien zu können; er hinterließ diese Notiz, um uns aufzufordern, uns um sieben Uhr zu Tisch zu setzen, wenn er nicht da wäre. He was held back without being able to free himself; he left this note to invite us to sit down to eat at seven o'clock if he wasn't there. Il ajoute qu'il expliquera son retard quand il rentrera. Er fügt hinzu, dass er seine Verspätung erklären wird, wenn er nach Hause kommt.

– En effet, c'est pitoyable de laisser gâter le dîner », dit le Rédacteur en chef d'un journal quotidien bien connu ; et là-dessus, le Docteur sonna le dîner. "Indeed, it is pitiful to let dinner spoil," said the Editor of a well-known daily newspaper; and thereupon the Doctor rang for dinner.

Le Psychologue, le Docteur et moi étions les seuls qui eussions assisté au dîner précédent. The Psychologist, the Doctor and I were the only ones who had attended the previous dinner. Les autres étaient Blank, directeur du journal déjà mentionné, un certain journaliste et un autre personnage – tranquille, timide et barbu – que je ne connaissais pas et qui, autant que je pus l'observer, ne desserra pas les dents de toute la soirée. Die anderen waren Blank, der Leiter der bereits erwähnten Zeitung, ein gewisser Journalist und eine weitere - ruhige, schüchterne und bärtige - Person, die ich nicht kannte und die, soweit ich das beobachten konnte, den ganzen Abend lang die Zähne nicht lockerte. The others were Blank, editor of the already mentioned newspaper, a certain journalist and another character - quiet, shy and bearded - whom I did not know and who, as far as I could observe, did not loosen his teeth all evening. . On fit à table maintes conjectures sur l'absence du maître de maison, et par plaisanterie je suggérai qu'il explorait peut-être sa quatrième dimension. Am Tisch wurden viele Vermutungen über die Abwesenheit des Hausherrn angestellt, und scherzhaft schlug ich vor, dass er vielleicht seine vierte Dimension erkundete. We made many conjectures at the table about the absence of the master of the house, and as a joke I suggested that he was perhaps exploring his fourth dimension. Le Rédacteur en chef demanda une explication, et le Psychologue lui fit de bonne grâce un rapide récit du paradoxal et ingénieux subterfuge dont il avait été témoin huit jours auparavant. Der Chefredakteur bat um eine Erklärung, und der Psychologe erzählte ihm bereitwillig eine kurze Geschichte von der paradoxen und genialen Täuschung, deren Zeuge er acht Tage zuvor geworden war. The Editor demanded an explanation, and the Psychologist graciously gave him a quick account of the paradoxical and ingenious subterfuge he had witnessed eight days before. Au milieu de son explication, la porte du corridor s'ouvrit lentement et sans bruit. Mitten in seiner Erklärung öffnete sich die Tür zum Korridor langsam und geräuschlos. In the middle of his explanation, the corridor door opened slowly and noiselessly. J'étais assis face à la porte et, le premier, je la vis s'ouvrir. I was sitting facing the door and I was the first to see it open.

« Eh bien ! tout de même ! immerhin! » m'écriai-je.

La porte s'ouvrit plus grande et l'Explorateur du Temps était devant nous. Je poussai un cri de surprise.

« Grand Dieu ! mais qu'arrive-t-il ? but what happens? » demanda le Docteur qui l'aperçut ensuite. asked the Doctor, who saw him next.

Et tous les convives se tournèrent vers la porte.

Notre ami était dans un état surprenant. Our friend was in a surprising state. Son vêtement était poussiéreux et sale, souillé de taches verdâtres aux manches ; sa chevelure était emmêlée et elle me sembla plus grise – soit à cause de la poussière, soit que sa couleur ait réellement changé. His clothing was dusty and dirty, stained with greenish stains on the sleeves; her hair was tangled and she looked grayer to me – either from the dust or that her color had actually changed. Son visage était affreusement pâle. Il avait une profonde coupure au menton – une coupure à demi refermée. He had a deep cut on his chin - a half-closed cut. Il avait les traits tirés et l'air hagard de ceux qui sont en proie à une intense souffrance. He had the drawn features and the haggard look of those who are in the throes of intense suffering. Il hésita un instant, ébloui sans doute par la clarté. He hesitated for a moment, no doubt dazzled by the light. Puis il entra en boitant, tout comme eût fait un vagabond aux pieds endoloris. Then he limped in, just as a wanderer with sore feet would have done. Nous le regardions en silence, attendant qu'il parlât. We looked at him in silence, waiting for him to speak.

Il n'ouvrit pas la bouche, mais s'avança péniblement jusqu'à la table, et fit un mouvement pour atteindre le vin. He didn't open his mouth, but trudged over to the table, and made a move to reach for the wine. Le Rédacteur en chef remplit une coupe de champagne et la lui présenta. The Editor-in-Chief filled a glass of champagne and presented it to him. Il la vida jusqu'à la dernière goutte et parut se sentir mieux, car son regard fit le tour de la table et l'ombre de son sourire habituel erra sur ses lèvres.

« Que diable avez-vous bien pu faire ? “What the hell could you have done? » dit le Docteur.

L'Explorateur du Temps ne sembla pas entendre. The Time Explorer did not seem to hear.

« Que je ne vous interrompe pas, surtout ! “That I don't interrupt you, above all! dit-il d'une voix mal assurée, je suis très bien. he said in an uncertain voice, I'm fine. » Il s'arrêta, tendit son verre pour qu'on le remplît et le vida d'un seul trait. He stopped, held out his glass to be refilled, and emptied it in one gulp. "Se detuvo, tendió su vaso para que se lo llenaran y lo vació de un solo trago. « Cela fait du bien ! "It feels good! » dit-il.

Ses yeux s'éclairèrent et une rougeur légère lui monta aux joues. Son regard parcourut rapidement nos visages avec une sorte de morne approbation et fit ensuite le tour de la salle chaude et confortable. His gaze quickly swept over our faces with a sort of gloomy approval and then circled the warm, comfortable room. Puis de nouveau il parla, comme s'il cherchait encore son chemin à travers ses mots. Then again he spoke, as if still finding his way through his words.

« Je vais me laver et me changer, puis je redescendrai et vous donnerai les explications promises… Gardez-moi quelques tranches de mouton. "I'm going to wash and change, then I'll come downstairs and give you the promised explanations… Save me a few slices of mutton." Je meurs littéralement de faim. I am literally starving. » Il reconnut tout à coup le Rédacteur en chef, qui était un convive assez rare, et lui souhaita la bienvenue. He suddenly recognized the Editor-in-Chief, who was a rather rare guest, and bade him welcome. Le Rédacteur commença une question.

« Je vous répondrai tout à l'heure, dit l'Explorateur du Temps. "I'll answer you later," said the Time Explorer. Je me sens un peu… drôle. I feel a little…funny. Ça ira très bien dans un moment. It'll be fine in a while. » Il posa son verre, et se dirigea vers la porte de l'escalier. He put down his glass, and headed for the stairway door. Je remarquai à nouveau qu'il boitait et que son pied frappait lourdement le plancher, et en me levant un peu je pus voir ses pieds pendant qu'il sortait : il était simplement chaussé d'une paire de chaussettes déchirées et tachées de sang. I noticed again that he was limping and his foot was hitting the floor heavily, and as I got up a little I could see his feet as he walked out: he was simply wearing a pair of torn and bloodstained socks. Puis la porte se referma sur lui. Then the door closed on him. J'avais bien envie de le suivre, mais je me rappelai combien il détestait qu'on fît des embarras à son endroit. I wanted to follow him, but I remembered how much he hated being embarrassed. Pendant un moment mon esprit battit la campagne. For a moment my mind raced. Puis j'entendis le Rédacteur en chef qui disait : “Singulière conduite d'un savant fameux” ; suivant son habitude il pensait en titres d'articles. Then I heard the Editor in Chief say: “Singular behavior of a famous scientist”; as usual he thought in titles of articles. Et cela ramena mon attention vers la table étincelante.

« Quelle est cette farce ? dit le journaliste. Est-ce qu'il aurait eu la fantaisie d'aller faire le coltineur-amateur ? Would he have had the fancy to go play the amateur coltineur? ¿Habría tenido el capricho de ir y ser un trolero aficionado? Je n'y comprends rien. I don't understand it. » Mes yeux rencontrèrent ceux du Psychologue, et ils y lurent ma propre interprétation. My eyes met those of the Psychologist, and there they read my own interpretation. Je pensai à notre ami se hissant péniblement dans les escaliers. I thought of our friend struggling up the stairs. Je ne crois pas que personne d'autre eût remarqué qu'il boitait. I don't think anyone else would have noticed that he was limping.

Le premier à revenir complètement de sa surprise fut le Docteur, qui sonna pour la suite du service – car notre ami ne pouvait pas supporter les domestiques sans cesse présents au dîner. The first to fully recover from his surprise was the Doctor, who rang for the rest of the service – as our friend could not bear the servants constantly present at dinner. Sur ce, le Rédacteur en chef prit son couteau et sa fourchette avec un grognement ; le personnage silencieux imita son exemple et l'on se remit à dîner. With that, the Editor picked up his knife and fork with a grunt; the silent personage imitated his example and they resumed their dinner. Tout d'abord la conversation se borna à quelques exclamations étonnées ; puis la curiosité du Rédacteur en chef devint pressante. At first the conversation was limited to a few astonished exclamations; then the editor's curiosity became pressing.

« Est-ce que notre ami augmente son modeste revenu en allant balayer les rues ? “Does our friend supplement his modest income by sweeping the streets? Ou bien subit-il des transformations à la Nabuchodonosor ? Or does he undergo Nebuchadnezzar-like transformations?

– Je suis sûr, dis-je, que c'est encore cette histoire de la Machine du Temps. “I'm sure,” I said, “it's that Time Machine thing again. » Je repris où le Psychologue l'avait laissé le récit de notre précédente réunion. "I picked up where the Psychologist had left off with the story of our previous meeting. Les nouveaux convives étaient franchement incrédules. Le Rédacteur en chef soulevait des objections : Qu'est-ce que c'était que ça, l'Exploration du Temps ? The Editor raised objections: What was that, the Exploration of Time? Est-ce qu'un homme se couvre de poussière à se rouler dans un paradoxe, voyons ? Does a man dust himself rolling around in a paradox, come on? Puis comme il se familiarisait avec l'idée, il eut recours à la plaisanterie : Est-ce qu'il n'y avait donc plus de brosses à habit dans le Futur ? Then, as he grew familiar with the idea, he resorted to joking: Weren't there any more clothes brushes in the Future? Le journaliste, lui aussi, ne voulait croire à aucun prix et se joignait au Rédacteur en chef dans la tâche facile de ridiculiser toute l'affaire. The journalist, too, didn't want to believe anything and joined the Editor in the easy task of ridiculing the whole affair. L'un et l'autre appartenaient à la nouvelle espèce de journalistes jeunes gens joyeux et très irrespectueux. Both belonged to the new breed of cheerful and very disrespectful young journalists. « Le correspondant spécial que nous avons envoyé dans la semaine prochaine nous annonce… » disait, ou plutôt clamait, le Journaliste. "The special correspondent we have sent next week is telling us..." said, or rather proclaimed, the Journalist. "El corresponsal especial que hemos enviado durante la próxima semana nos dice..." dijo, o más bien proclamó, el Periodista. Lorsque l'Explorateur du Temps réapparut. Il s'était mis en habit et rien – sinon ses yeux hagards – ne restait du changement qui m'avait d'abord effrayé. He had put on his coat and nothing – except his haggard eyes – remained of the change that had initially frightened me.

« Dites donc, lui demanda en riant le Rédacteur en chef, voilà qu'on me raconte que vous revenez d'un voyage dans le milieu de la semaine prochaine ! “Hey,” the Editor asked him laughingly, “I've been told you're coming back from a trip in the middle of next week! Révélez-nous les intentions du gouvernement, n'est-ce pas ? Reveal the government's intentions to us, won't you? Combien voulez-vous pour l'article ? How much do you want for the item? » L'Explorateur du Temps vint s'asseoir sans dire un mot. The Time Explorer sat down without saying a word. Il souriait tranquillement à sa façon accoutumée. He was smiling quietly in his usual way.

« Où est ma part ? " Where is my part ? dit-il.

Quel plaisir d'enfoncer encore une fourchette dans cette viande ! What a pleasure to push another fork into this meat!

– Quelle blague ! dit le Rédacteur en chef.

– Au diable la blague ! - To hell with the joke! dit l'Explorateur du Temps. J'ai besoin de manger, et je ne dirai pas un mot avant d'avoir remis un peu de peptones dans mon organisme. I need to eat, and I won't say a word until I put some peptones back into my system. Merci. Passez-moi le sel.

– Un seul mot, dis-je. "One word," I said. Vous revenez d'exploration ?

– Oui ! dit-il, la bouche pleine et en secouant la tête.

– Je donne un shilling la ligne pour un compte rendu in extenso », dit le Rédacteur en chef. “I give a shilling a line for a verbatim report,” said the Editor.

L'Explorateur poussa son verre du côté de l'Homme silencieux, et le fit tinter d'un coup d'ongle ; sur ce, l'Homme silencieux, qui le fixait avec ébahissement, sursauta et lui versa du vin. The Explorer pushed his glass towards the Silent Man, and clinked it with the flick of his fingernail; at that, the Silent Man, who was staring at him in amazement, jumped up and poured him some wine. Le dîner s'acheva dans un malaise général. The dinner ended in general unease. Pour ma part, de soudaines questions me venaient incessamment aux lèvres et je suis sûr qu'il en était de même pour les autres. Le journaliste essaya de diminuer la tension des esprits en contant des anecdotes. The journalist tried to ease the tension by telling stories. Notre ami donnait toute son attention à son dîner et semblait ne pas avoir mangé depuis une semaine. Le Docteur fumait une cigarette et considérait l'Explorateur à travers ses paupières mi-closes. The Doctor was smoking a cigarette and gazing at the Explorer through his half-closed eyelids. L'Homme silencieux semblait encore plus gauche que d'habitude et vida sa coupe de champagne avec une régularité et une détermination purement nerveuses. The Silent Man seemed even clumsier than usual and emptied his glass of champagne with pure nervous regularity and determination. Enfin notre hôte repoussa son assiette, et nous regarda. Finally our host pushed his plate away and looked at us.

« Je vous dois des excuses, dit-il. "I owe you an apology," he said. Je mourais tout bonnement de faim. I was just starving to death. Mais j'ai passé quelques moments bien surprenants. But I had some very surprising moments. » Il atteignit un cigare dont il coupa le bout. « Mais venez au fumoir. “But come to the smoking room. C'est une histoire trop longue pour la raconter au milieu de la vaisselle sale. » Puis il sonna en se levant et nous conduisit dans la chambre attenante. « Vous avez parlé de la Machine à Blank et aux autres ? "You told Blank and the others about the Machine?" me dit-il, en se renversant dans son fauteuil. he said to me, leaning back in his chair.

– Mais ce n'est qu'un paradoxe ! dit le Rédacteur en chef.

– Je ne puis pas discuter ce soir. “I can't talk tonight. Je veux bien vous raconter l'histoire, mais non pas la discuter. I don't mind telling you the story, but not discussing it. Je vais, continua-t-il, vous faire le récit de ce qui m'est arrivé, si vous y tenez, mais il faudra vous abstenir de m'interrompre. I will, he continued, tell you the story of what happened to me, if you insist on it, but you will have to refrain from interrupting me. J'ai besoin de raconter, absolument. I need to tell, absolutely. La plus grande partie vous semblera pure invention ; soit ! Most of it will seem pure invention to you; is ! Mais tout est vrai du premier au dernier mot. J'étais dans mon laboratoire à quatre heures et depuis lors… j'ai vécu huit jours… des jours tels qu'aucun être humain n'en a vécu auparavant ! I was in my laboratory at four o'clock and since then...I have lived eight days...days such as no human being has lived before! Je suis presque épuisé, mais je ne veux pas dormir avant de vous avoir conté la chose d'un bout à l'autre. I'm almost exhausted, but I don't want to sleep until I've told you all about it. Après cela, j'irai me reposer. Mais pas d'interruption ! Est-ce convenu ?

– Convenu ! » dit le Rédacteur en chef.

Et tous nous répétâmes : « Convenu ! » Alors l'Explorateur du Temps raconta son histoire telle que je la transcris plus loin. Then the Time Explorer told his story as I transcribe it below. Il s'enfonça d'abord dans son fauteuil, et parla du ton d'un homme fatigué ; peu à peu il s'anima. En l'écrivant, je ne sens que trop vivement l'insuffisance de la plume et du papier et surtout ma propre insuffisance pour l'exprimer avec toute sa valeur. In writing it, I feel only too keenly the insufficiency of pen and paper and above all my own insufficiency to express it with all its value. Vous lirez, sans doute avec attention ; mais vous ne pourrez voir, dans le cercle brillant de la petite lampe, la face pâle et franche du conteur, et vous n'entendrez pas les inflexions de sa voix. You will read, no doubt with attention; but you will not be able to see, in the shining circle of the little lamp, the pale and frank face of the storyteller, and you will not hear the inflections of his voice. Vous ne saurez pas combien son expression suivait les phases de son récit ! You will not know how much his expression followed the phases of his story! La plupart d'entre nous, qui écoutions, étions dans l'ombre, car les bougies des candélabres du fumoir n'avaient pas été allumées, et seules la face du journaliste et les jambes de l'Homme silencieux étaient éclairées. D'abord, nous nous regardions les uns les autres de temps en temps. Puis au bout d'un moment nous cessâmes de le faire pour rester les regards fixés sur le visage de l'Explorateur du Temps. Then after a while we stopped doing it to stay staring at the Time Explorer's face.