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Cinq semaines en ballon de Jules Verne, CHAPITRE V

CHAPITRE V

Rêves de Kennedy.—Articles et pronoms au pluriel.—Insinuations de Dick.—Promenade sur la carte d'Afrique —Ce qui reste entre les deux pointes du compas.—Expéditions actuelles.—Speke et Grant.—Kraff, de Decken, de Heuglin. Le docteur Fergusson pressait activement les préparatifs de son départ ; il dirigeait lui-même la construction de son aérostat, suivant certaines modifications sur lesquelles il gardait un silence absolu.

Depuis longtemps déjà, il s'était appliqué à l'étude de la langue arabe et de divers idiomes mandingues ; grâce à ses dispositions de polyglotte, il fit de rapides progrès. En attendant, son ami le chasseur ne le quittait pas d'une semelle ; il craignait sans doute que le docteur ne prît son vol sans rien dire ; il lui tenait encore à ce sujet les discours les plus persuasifs, qui ne persuadaient pas Samuel Fergusson, et s'échappait en supplications pathétiques, dont celui-ci se montrait peu touché Dick le sentait glisser entre ses doigts. Le pauvre Écossais était réellement à plaindre ; il ne considérait plus la voûte azurée sans de sombres terreurs ; il éprouvait, en dormant, des balancements vertigineux, et chaque nuit il se sentait choir d'incommensurables hauteurs. Nous devons ajouter que, pendant ces terribles cauchemars, il tomba de son lit une fois ou deux. Son premier soin fut de montrer à Fergusson une forte contusion qu'il se fit à la tête. « Et pourtant, ajouta-t-il avec bonhomie, trois pieds de hauteur ! pas plus ! et une bosse pareille ! Juge donc ! Cette insinuation, pleine de mélancolie, n'émût pas le docteur. « Nous ne tomberons pas, fit-il.

—Mais enfin, si nous tombons ?

—Nous ne tomberons pas. Ce fut net, et Kennedy n'eut rien à répondre. Ce qui exaspérait particulièrement Dick, c'est que le docteur semblait faire une abnégation parfaite de sa personnalité, à lui Kennedy ; il le considérait comme irrévocablement destiné à devenir son compagnon aérien. Cela n'était plus l'objet d'un doute Samuel faisait un intolérable abus du pronom pluriel de la première personne. « Nous » avançons..., « nous » serons prêts le..., « nous » partirons le

Et de l'adjectif possessif au singulier : « Notre » ballon..., « notre » nacelle..., « notre » exploration...

Et du pluriel donc !

« Nos » préparatifs..., « nos » découvertes .., « nos » ascensions...

Dick en frissonnait, quoique décidé à ne point partir ; mais il ne voulait pas trop contrarier son ami. Avouons même que, sans s'en rendre bien compte, il avait fait venir tout doucement d'Édimbourg quelques vêtements assortis et ses meilleurs fusils de chasse. Un jour, après avoir reconnu qu'avec un bonheur insolent, on pouvait avoir une chance sur mille de réussir, il feignit de se rendre aux désirs du docteur ; mais, pour reculer le voyage, il entama la série des échappatoires les plus variées. Il se rejeta sur l'utilité de l'expédition et sur son opportunité. Cette découverte des sources du Nil était-elle vraiment nécessaire ?... Aurait-on réellement travaillé pour le bonheur de l'humanité ?... Quand, au bout du compte, les peuplades de l'Afrique seraient civilisées, en seraient-elles plus heureuses ?... Était-on certain, d'ailleurs, que la civilisation ne fût pas plutôt là qu'en Europe — Peut-être. — Et d'abord ne pouvait-on attendre encore ?... La traversée de l'Afrique serait certainement faite un jour, et d'une façon moins hasardeuse... Dans un mois, dans dix mois, avant un an, quelque explorateur arriverait sans doute... Ces insinuations produisaient un effet tout contraire à leur but, et le docteur frémissait d'impatience. « Veux-tu donc, malheureux Dick, veux-tu donc, faux ami, que cette gloire profite à un autre ? Faut-il donc mentir à mon passé ? reculer devant des obstacles qui ne sont pas sérieux ? reconnaître par de lâches hésitations ce qu'ont fait pour moi, et le gouvernement anglais, et la Société Royale de Londres ? —Mais , reprit Kennedy, qui avait une grande habitude de cette conjonction.

—Mais, fit le docteur, ne sais-tu pas que mon voyage doit concourir au succès des entreprises actuelles Ignores-tu que de nouveaux explorateurs s'avancent vers le centre de l'Afrique —Cependant...

—Écoute-moi bien, Dick, et jette les yeux sur cette carte. Dick les jeta avec résignation.

« Remonte le cours du Nil, dit Fergusson.

—Je le remonte, dit docilement l'Écossais. —Arrive à Gondokoro.

—J'y suis. Et Kennedy songeait combien était facile un pareil voyage... sur la carte.

« Prends une des pointes de ce compas, reprit le docteur, et appuie-la sur cette ville que les plus hardis ont à peine dépassée.

—J'appuie. —Et maintenant cherche sur la côte l'île de Zanzibar, par 6° de latitude sud. —Je la tiens.

—Suis maintenant ce parallèle et arrive à Kazeh.

—C'est fait. —Remonte par le 33e degré de longitude jusqu'à l'ouverture du lac Oukéréoué, à l'endroit où s'arrêta le lieutenant Speke. —M'y voici ! Un peu plus, je tombais dans le lac.

—Eh bien ! sais-tu ce qu'on a le droit de supposer d'après les renseignements donnés par les peuplades riveraines ? —Je ne m'en doute pas. —C'est que ce lac, dont l'extrémité inférieure est par 2° 30' de latitude, doit s'étendre également de deux degrés et demi au-dessus de l'équateur. —Vraiment !

—Or, de cette extrémité septentrionale s'échappe un cours d'eau qui doit nécessairement rejoindre le Nil, si ce n'est le Nil lui-même. —Voilà qui est curieux.

—Or, appuie la seconde pointe de ton compas sur cette extrémité du lac Oukéréoué.

—C'est fait, ami Fergusson —Combien comptes-tu de degrés entre les deux pointes ?

—A peine deux.

—Et sais-tu ce que cela fait, Dick ?

—Pas le moins du monde.

—Cela fait à peine cent vingt milles [Cinquante lieues], c'est-à-dire rien. —Presque rien, Samuel.

—Or, sais-tu ce qui se passe en ce moment ?

—Non, sur ma vie !

—Eh bien ! le voici. La Société de Géographie a regardé comme très importante l'exploration de ce lac entrevu par Speke. Sous ses auspices, le lieutenant, aujourd'hui capitaine Speke, s'est associé le capitaine Grant de l'armée des Indes ; ils se sont mis à la tête d'une expédition nombreuse et largement subventionnée ; ils ont mission de remonter le lac et de re-venir jusqu'à Gondokoro ; ils ont reçu un subside de plus de cinq mille livres, et le gouverneur du Cap a mis des soldats hottentots à leur dispo-sition ; ils sont partis de Zanzibar à la fin d'octobre 1860. Pendant ce temps, l'Anglais John Petherick, consul de Sa Majesté à Kartoum, a reçu du Foreign-office sept cents livres environ ; il doit équiper un bateau à vapeur à Karthoum, le charger de provisions suffisantes, et se rendre à Gondokoro ; là il attendra la caravane du capitaine Speke et sera en mesure de la ravitailler. —Bien imaginé, dit Kennedy.

—Tu vois bien que cela presse, si nous voulons participer à ces travaux d'exploration Et ce n'est pas tout ; pendant que l'on marche d'un pas sûr à la découverte des sources du Nil, d'autres voyageurs vont hardiment au coeur de l'Afrique. —A pied, fit Kennedy

—A pied, répondit le docteur sans relever l'insinuation. Le docteur Krapf se propose de pousser dans l'ouest par le Djob, rivière située sous l'équateur. Le baron de Decken a quitté Monbaz, a reconnu les montagnes de Kenia et de Kilimandjaro, et s'enfonce vers le centre. —A pied toujours ?

—Toujours à pied, ou à dos de mulet.

—C'est exactement la même chose pour moi, répliqua Kennedy. —Enfin, reprit le docteur, M. de Heuglin, vice-consul d'Autriche à Karthoum, vient d'organiser une expédition très importante, dont le premier but est de rechercher le voyageur Vogel, qui, en 1853, fut envoyé dans le Soudan pour s'associer aux travaux du docteur Barth. En 1856, il quitta le Bornou, et résolut d'explorer ce pays inconnu qui s'étend entre le lac Tchad et le Darfour. Or, depuis ce temps, il nia pas reparu. Des lettres arrivées en juin 1860 à Alexandrie rapportent qu'il fut assassiné par les ordres du roi du Wadaï ; mais d'autres lettres, adressées par le docteur Hartmann au père du voyageur, disent, d'après les récits d'un fellatah du Bornou, que Vogel serait seulement un prisonnier à Wara ; tout espoir n'est donc pas perdu. Un comité s'est formé sous la présidence du duc régent de Saxe-Cobourg-Gotha ; mon ami Petermann en est le secrétaire ; une souscription nationale a fait les frais de l'expédition, à laquelle se sont joints de nombreux savants ; M. de Heuglin est parti de Masuah dans le mois de juin, et en même temps qu'il recherche les traces de Vogel, il doit explorer tout le pays compris entre le Nil et le Tchad, c'est-à-dire relier les opérations du capitaine Speke à celles du docteur Barth. Et alors l'Afrique aura été traversée de l'est à l'ouest [Depuis le départ du docteur Fergusson, on a appris que M. de Heuglin, à la suite de certaines discussions, a pris une route différente de celle assignée à son expédition, dont le commandement a été remis à M. Munzinger. ].

—Eh bien ! reprit l'Écossais, puisque tout cela s'emmanche si bien, qu'allons-nous faire là-bas ? Le docteur Fergusson ne répondit pas, et se contenta de hausser les épaules.

CHAPITRE V CHAPTER V CAPÍTULO V 5장 ГЛАВА V

Rêves de Kennedy.—Articles et pronoms au pluriel.—Insinuations de Dick.—Promenade sur la carte d'Afrique —Ce qui reste entre les deux pointes du compas.—Expéditions actuelles.—Speke et Grant.—Kraff, de Decken, de Heuglin. Dreams of Kennedy.—Articles and pronouns in the plural.—Insinuations of Dick.—Walk on the map of Africa—What remains between the two points of the compass.—Present expeditions.—Speke and Grant.—Kraff, de Decken, of Heuglin. Le docteur Fergusson pressait activement les préparatifs de son départ ; il dirigeait lui-même la construction de son aérostat, suivant certaines modifications sur lesquelles il gardait un silence absolu. Doctor Fergusson was actively pressing for preparations for his departure; he himself directed the construction of his aerostat, following certain modifications on which he kept absolute silence.

Depuis longtemps déjà, il s'était appliqué à l'étude de la langue arabe et de divers idiomes mandingues ; grâce à ses dispositions de polyglotte, il fit de rapides progrès. For a long time now, he had applied himself to the study of the Arabic language and various Mandingo languages; thanks to his polyglot disposition, he made rapid progress. En attendant, son ami le chasseur ne le quittait pas d'une semelle ; il craignait sans doute que le docteur ne prît son vol sans rien dire ; il lui tenait encore à ce sujet les discours les plus persuasifs, qui ne persuadaient pas Samuel Fergusson, et s'échappait en supplications pathétiques, dont celui-ci se montrait peu touché Dick le sentait glisser entre ses doigts. Meanwhile, his friend the hunter did not leave him with a sole; he doubtless feared that the doctor would take off without saying anything; he still made the most persuasive speeches on this subject, which did not persuade Samuel Fergusson, and escaped in pathetic supplications, of which he showed little touch Dick felt him slip between his fingers. Le pauvre Écossais était réellement à plaindre ; il ne considérait plus la voûte azurée sans de sombres terreurs ; il éprouvait, en dormant, des balancements vertigineux, et chaque nuit il se sentait choir d'incommensurables hauteurs. The poor Scot was really to be pitied; he no longer considered the azure vault without somber terrors; as he slept, he experienced dizzying swings, and every night he felt himself falling from immeasurable heights. Nous devons ajouter que, pendant ces terribles cauchemars, il tomba de son lit une fois ou deux. We must add that, during these terrible nightmares, he fell from his bed once or twice. Son premier soin fut de montrer à Fergusson une forte contusion qu'il se fit à la tête. His first care was to show Fergusson a strong bruise on his head. « Et pourtant, ajouta-t-il avec bonhomie, trois pieds de hauteur ! "And yet," he added kindly, "three feet tall!" pas plus ! no more ! et une bosse pareille ! and such a bump! Juge donc ! Cette insinuation, pleine de mélancolie, n'émût pas le docteur. This insinuation, full of melancholy, did not move the doctor. « Nous ne tomberons pas, fit-il. "We will not fall," he said.

—Mais enfin, si nous tombons ? "But what if we fall?"

—Nous ne tomberons pas. “We won't fall. Ce fut net, et Kennedy n'eut rien à répondre. It was clear, and Kennedy had nothing to say. Ce qui exaspérait particulièrement Dick, c'est que le docteur semblait faire une abnégation parfaite de sa personnalité, à lui Kennedy ; il le considérait comme irrévocablement destiné à devenir son compagnon aérien. What particularly exasperated Dick was that the doctor seemed to make a perfect abnegation of his personality, him Kennedy; he considered him irrevocably destined to become his aerial companion. Cela n'était plus l'objet d'un doute Samuel faisait un intolérable abus du pronom pluriel de la première personne. This was no longer the subject of a doubt Samuel was making an intolerable abuse of the plural pronoun of the first person. « Nous » avançons..., « nous » serons prêts le..., « nous » partirons le "We" advance ..., "we" will be ready on ..., "we" will leave on

Et de l'adjectif possessif au singulier : And from the adjective possessive to the singular: « Notre » ballon..., « notre » nacelle..., « notre » exploration... "Our" balloon ..., "our" basket ..., "our" exploration ...

Et du pluriel donc ! And therefore plural!

« Nos » préparatifs..., « nos » découvertes .., « nos » ascensions... "Our" preparations ..., "our" discoveries .., "our" climbs ...

Dick en frissonnait, quoique décidé à ne point partir ; mais il ne voulait pas trop contrarier son ami. Dick shuddered, although determined not to leave; but he didn't want to upset his friend too much. Avouons même que, sans s'en rendre bien compte, il avait fait venir tout doucement d'Édimbourg quelques vêtements assortis et ses meilleurs fusils de chasse. Let us admit that, without realizing it, he had brought slowly from Edinburgh a few matching clothes and his best hunting rifles. Un jour, après avoir reconnu qu'avec un bonheur insolent, on pouvait avoir une chance sur mille de réussir, il feignit de se rendre aux désirs du docteur ; mais, pour reculer le voyage, il entama la série des échappatoires les plus variées. One day, after having recognized that with insolent happiness, there was a one in a thousand chance of succeeding, he pretended to comply with the wishes of the doctor; but, to postpone the journey, he began the most varied series of loopholes. Il se rejeta sur l'utilité de l'expédition et sur son opportunité. He fell back on the usefulness of the expedition and its expediency. Cette découverte des sources du Nil était-elle vraiment nécessaire ?... Was this discovery of the sources of the Nile really necessary? ... Aurait-on réellement travaillé pour le bonheur de l'humanité ?... Would we really have worked for the happiness of humanity? ... Quand, au bout du compte, les peuplades de l'Afrique seraient civilisées, en seraient-elles plus heureuses ?... When, ultimately, the peoples of Africa are civilized, would they be happier? ... Était-on certain, d'ailleurs, que la civilisation ne fût pas plutôt là qu'en Europe — Peut-être. Was it certain, moreover, that civilization was not more there than in Europe - Maybe. — Et d'abord ne pouvait-on attendre encore ?... - And first couldn't we wait yet? ... La traversée de l'Afrique serait certainement faite un jour, et d'une façon moins hasardeuse... Dans un mois, dans dix mois, avant un an, quelque explorateur arriverait sans doute... The crossing of Africa would certainly be made one day, and in a less hazardous way ... In a month, in ten months, before a year, some explorer would undoubtedly arrive ... Ces insinuations produisaient un effet tout contraire à leur but, et le docteur frémissait d'impatience. These insinuations produced an effect quite contrary to their aim, and the doctor trembled with impatience. « Veux-tu donc, malheureux Dick, veux-tu donc, faux ami, que cette gloire profite à un autre ? "Do you want then, unhappy Dick, do you want, false friend, that this glory benefits another?" Faut-il donc mentir à mon passé ? So should I lie to my past? reculer devant des obstacles qui ne sont pas sérieux ? back away from obstacles that aren't serious? reconnaître par de lâches hésitations ce qu'ont fait pour moi, et le gouvernement anglais, et la Société Royale de Londres ? recognize in cowardly hesitation what have done for me, and the English government, and the Royal Society of London? —Mais , reprit Kennedy, qui avait une grande habitude de cette conjonction. "But," said Kennedy, who was very used to this conjunction.

—Mais, fit le docteur, ne sais-tu pas que mon voyage doit concourir au succès des entreprises actuelles Ignores-tu que de nouveaux explorateurs s'avancent vers le centre de l'Afrique "But," said the doctor, "don't you know that my journey must contribute to the success of current businesses? Do you not know that new explorers are advancing towards the center of Africa —Cependant... -However...

—Écoute-moi bien, Dick, et jette les yeux sur cette carte. “Listen to me, Dick, and look at this card. Dick les jeta avec résignation. Dick threw them in resignation.

« Remonte le cours du Nil, dit Fergusson. "Go up the Nile," said Fergusson.

—Je le remonte, dit docilement l'Écossais. "I'm going up," said the Scot. —Arrive à Gondokoro. —Arrive at Gondokoro.

—J'y suis. Et Kennedy songeait combien était facile un pareil voyage... sur la carte. And Kennedy thought how easy such a trip was ... on the map.

« Prends une des pointes de ce compas, reprit le docteur, et appuie-la sur cette ville que les plus hardis ont à peine dépassée. "Take one of the points of this compass," replied the doctor, "and press it against this town which the boldest have scarcely passed.

—J'appuie. -J'appuie. —Et maintenant cherche sur la côte l'île de Zanzibar, par 6° de latitude sud. —And now look for the island of Zanzibar on the coast, at 6 ° south latitude. —Je la tiens.

—Suis maintenant ce parallèle et arrive à Kazeh. “Now follow this parallel and arrive at Kazeh.

—C'est fait. -It is done. —Remonte par le 33e degré de longitude jusqu'à l'ouverture du lac Oukéréoué, à l'endroit où s'arrêta le lieutenant Speke. —Go back up the 33rd degree of longitude to the opening of Lake Oukéréoué, where Lieutenant Speke stopped. —M'y voici ! - Here I am! Un peu plus, je tombais dans le lac. A little more, I fell into the lake.

—Eh bien ! sais-tu ce qu'on a le droit de supposer d'après les renseignements donnés par les peuplades riveraines ? do you know what we have the right to suppose according to the information given by the neighboring peoples? —Je ne m'en doute pas. “I don't doubt it. —C'est que ce lac, dont l'extrémité inférieure est par 2° 30' de latitude, doit s'étendre également de deux degrés et demi au-dessus de l'équateur. - This is because this lake, whose lower end is at 2 ° 30 'latitude, must also extend two and a half degrees above the equator. —Vraiment ! -Really !

—Or, de cette extrémité septentrionale s'échappe un cours d'eau qui doit nécessairement rejoindre le Nil, si ce n'est le Nil lui-même. - Now, from this northern end escapes a stream which must necessarily join the Nile, if not the Nile itself. —Voilà qui est curieux. “This is curious.

—Or, appuie la seconde pointe de ton compas sur cette extrémité du lac Oukéréoué. “Now, press the second point of your compass on this end of Lake Oukéréoué.

—C'est fait, ami Fergusson —Combien comptes-tu de degrés entre les deux pointes ? “How many degrees do you have between the two points?

—A peine deux. “Barely two.

—Et sais-tu ce que cela fait, Dick ? "Do you know what that does, Dick?"

—Pas le moins du monde.

—Cela fait à peine cent vingt milles [Cinquante lieues], c'est-à-dire rien. "It's barely a hundred and twenty miles [Fifty leagues], that is to say nothing." —Presque rien, Samuel. “Almost nothing, Samuel.

—Or, sais-tu ce qui se passe en ce moment ? “Now, do you know what's going on right now?

—Non, sur ma vie !

—Eh bien ! le voici. La Société de Géographie a regardé comme très importante l'exploration de ce lac entrevu par Speke. The Geographic Society regarded as very important the exploration of this lake glimpsed by Speke. Sous ses auspices, le lieutenant, aujourd'hui capitaine Speke, s'est associé le capitaine Grant de l'armée des Indes ; ils se sont mis à la tête d'une expédition nombreuse et largement subventionnée ; ils ont mission de remonter le lac et de re-venir jusqu'à Gondokoro ; ils ont reçu un subside de plus de cinq mille livres, et le gouverneur du Cap a mis des soldats hottentots à leur dispo-sition ; ils sont partis de Zanzibar à la fin d'octobre 1860. Under his auspices, the lieutenant, now Captain Speke, teamed up with Captain Grant of the Indian Army; they led a large and largely subsidized expedition; their mission is to go up the lake and come back to Gondokoro; they received a subsidy of more than five thousand pounds, and the governor of Cape Town put Hottentot soldiers at their disposal; they left Zanzibar at the end of October 1860. Pendant ce temps, l'Anglais John Petherick, consul de Sa Majesté à Kartoum, a reçu du Foreign-office sept cents livres environ ; il doit équiper un bateau à vapeur à Karthoum, le charger de provisions suffisantes, et se rendre à Gondokoro ; là il attendra la caravane du capitaine Speke et sera en mesure de la ravitailler. Meanwhile, the Englishman John Petherick, His Majesty's consul in Kartoum, received from the Foreign Office about seven hundred pounds; he must equip a steamer at Karthoum, load it with sufficient provisions, and go to Gondokoro; there he will wait for Captain Speke's caravan and will be able to supply it. —Bien imaginé, dit Kennedy. "Well imagined," said Kennedy.

—Tu vois bien que cela presse, si nous voulons participer à ces travaux d'exploration Et ce n'est pas tout ; pendant que l'on marche d'un pas sûr à la découverte des sources du Nil, d'autres voyageurs vont hardiment au coeur de l'Afrique. - You can see that it is urgent, if we want to participate in this exploration work And that's not all; while one walks with a sure step to discover the sources of the Nile, other travelers boldly go to the heart of Africa. —A pied, fit Kennedy

—A pied, répondit le docteur sans relever l'insinuation. "On foot," replied the doctor, without noting the innuendo. Le docteur Krapf se propose de pousser dans l'ouest par le Djob, rivière située sous l'équateur. Doctor Krapf proposes to push in the west by the Djob, river located under the equator. Le baron de Decken a quitté Monbaz, a reconnu les montagnes de Kenia et de Kilimandjaro, et s'enfonce vers le centre. Baron de Decken left Monbaz, recognized the mountains of Kenia and Kilimanjaro, and sank towards the center. —A pied toujours ?

—Toujours à pied, ou à dos de mulet. - Always on foot, or on the back of a mule.

—C'est exactement la même chose pour moi, répliqua Kennedy. "It's exactly the same for me," said Kennedy. —Enfin, reprit le docteur, M. de Heuglin, vice-consul d'Autriche à Karthoum, vient d'organiser une expédition très importante, dont le premier but est de rechercher le voyageur Vogel, qui, en 1853, fut envoyé dans le Soudan pour s'associer aux travaux du docteur Barth. "Finally," replied the doctor, "M. de Heuglin, vice-consul of Austria at Karthoum, has just organized a very important expedition, the first aim of which is to seek the traveler Vogel, who, in 1853, was sent to the Sudan to join the work of Doctor Barth. En 1856, il quitta le Bornou, et résolut d'explorer ce pays inconnu qui s'étend entre le lac Tchad et le Darfour. In 1856, he left Bornou, and resolved to explore this unknown country which stretches between Lake Chad and Darfur. Or, depuis ce temps, il nia pas reparu. Since then, however, he has not appeared. Des lettres arrivées en juin 1860 à Alexandrie rapportent qu'il fut assassiné par les ordres du roi du Wadaï ; mais d'autres lettres, adressées par le docteur Hartmann au père du voyageur, disent, d'après les récits d'un fellatah du Bornou, que Vogel serait seulement un prisonnier à Wara ; tout espoir n'est donc pas perdu. Letters arriving in Alexandria in June 1860 report that he was assassinated by the orders of the king of Wadai; but other letters, addressed by Doctor Hartmann to the father of the traveler, say, according to the accounts of a fellatah of Bornou, that Vogel would be only a prisoner in Wara; all hope is therefore not lost. Un comité s'est formé sous la présidence du duc régent de Saxe-Cobourg-Gotha ; mon ami Petermann en est le secrétaire ; une souscription nationale a fait les frais de l'expédition, à laquelle se sont joints de nombreux savants ; M. de Heuglin est parti de Masuah dans le mois de juin, et en même temps qu'il recherche les traces de Vogel, il doit explorer tout le pays compris entre le Nil et le Tchad, c'est-à-dire relier les opérations du capitaine Speke à celles du docteur Barth. A committee was formed under the chairmanship of the Duke Regent of Saxe-Coburg-Gotha; my friend Petermann is the secretary; a national subscription paid for the expedition, to which many scholars joined; M. de Heuglin left Masuah in June, and at the same time that he is looking for Vogel's traces, he must explore the whole country between the Nile and Chad, that is to say, connect the Captain Speke's operations to those of Doctor Barth. Et alors l'Afrique aura été traversée de l'est à l'ouest [Depuis le départ du docteur Fergusson, on a appris que M. de Heuglin, à la suite de certaines discussions, a pris une route différente de celle assignée à son expédition, dont le commandement a été remis à M. Munzinger. And then Africa will have been crossed from east to west [Since the departure of Doctor Fergusson, we learned that Mr. de Heuglin, following certain discussions, took a different route from that assigned to his expedition, command of which was given to Mr. Munzinger. ].

—Eh bien ! reprit l'Écossais, puisque tout cela s'emmanche si bien, qu'allons-nous faire là-bas ? replied the Scot, since all this is so well fitted, what are we going to do there? Le docteur Fergusson ne répondit pas, et se contenta de hausser les épaules. Doctor Fergusson did not answer, and only shrugged.