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Les mots de l'actualité, FRATERNITÉ   2010-01-04

FRATERNITÉ 2010-01-04

Quand on présente ses voeux à la nation, même si l'on est président de la République – enfin, surtout si l'on est président de la République – il faut trouver quelque chose à dire. Quelque chose qui marque, qui retienne l'attention, qui donne une direction, qui suscite éventuellement le commentaire. Il faut trouver un mot, une formule, une idée qui reste dans les mémoires, ne serait-ce que quelques jours.

Cette année, il semble que ce soit la fraternité, qui remplisse cet office, un mot bien connu, mais qui a une histoire politique présente dans tous les esprits. On le sait bien que ce mot de fraternité est le troisième, et dernier, de la devise de la République : Liberté Egalité Fraternité. Les trois mots ne sont pas inconnus durant l'Ancien Régime. On les trouve souvent dans la littérature des Lumières, bien qu'ils ne soient pas associés dans ce slogan rimé et rythmé. Liberté et égalité seront les deux premiers à être adoptés par les révolutionnaires. Ce sont d'ailleurs les plus immédiatement politiques, qui peuvent se lier à des revendications concrètes. La fraternité semble témoigner d'une autre profondeur idéologique, et elle ne vient se poser que plus tard sur la guirlande de la Révolution. Il faut d'ailleurs attendre celles du XIXe siècle (1830 et 1848) pour que sa place y soit définitivement affermie. En effet, si les trois notions ne semblent pas devoir être mises exactement sur le même plan, c'est que les deux premières ont à voir à la fois avec un sentiment politique et sa réalité. Il y a une oscillation entre l'utopie et la vie sociale. La fraternité est bien différente. Elle ne se décrète pas ; on ne lutte pas pour l'obtenir. Et elle évoque plus une religion de l'État, de la nation, de la démocratie. Elle fait penser à ce culte de l'Être suprême dont parlait justement pendant la période révolutionnaire. L'Église était souvent considérée comme le lieu de la réaction. Mais on ne se jetait pas pour autant dans l'athéisme ! La fraternité était une idée qui pouvait donner une intelligence affective à la République.

Mais on sait bien que les devises, surtout celles qui sont anciennes et qu'on voit, sans vraiment les lire dans des endroits si divers et si nombreux, ont perdu leur sens littéral. Que dit maintenant le président de la république française ? Il essaie de remotiver, dans tous les sens du mot : remotiver des citoyens parfois désabusés par les difficultés économiques. Remotiver un vieux mot, c'est-à-dire le revitaliser, lui redonner son sens d'origine qui a pu s'effacer derrière une sonorité un peu creuse à force d'usure. Coproduction du Centre national de Documentation Pédagogique. http://www.cndp.fr/


FRATERNITÉ   2010-01-04 BRÜDERLICHKEIT 2010-01-04 FRATERNITY 2010-01-04 برادری 2010-01-04 FRATERNIDADE 2010-01-04

Quand on présente ses voeux à la nation, même si l'on est président de la République – enfin, surtout si l'on est président de la République – il faut trouver quelque chose à dire. Quelque chose qui marque, qui retienne l'attention, qui donne une direction, qui suscite éventuellement le commentaire. Il faut trouver un mot, une formule, une idée qui reste dans les mémoires, ne serait-ce que quelques jours.

Cette année, il semble que ce soit la fraternité, qui remplisse cet office, un mot bien connu, mais qui a une histoire politique présente dans tous les esprits. On le sait bien que ce mot de fraternité est le troisième, et dernier, de la devise de la République : Liberté Egalité Fraternité. Les trois mots ne sont pas inconnus durant l'Ancien Régime. On les trouve souvent dans la littérature des Lumières, bien qu'ils ne soient pas associés dans ce slogan rimé et rythmé. Liberté et égalité seront les deux premiers à être adoptés par les révolutionnaires. Ce sont d'ailleurs les plus immédiatement politiques, qui peuvent se lier à des revendications concrètes. La fraternité semble témoigner d'une autre profondeur idéologique, et elle ne vient se poser que plus tard sur la guirlande de la Révolution. Il faut d'ailleurs attendre celles du XIXe siècle (1830 et 1848) pour que sa place y soit définitivement affermie. En effet, si les trois notions ne semblent pas devoir être mises exactement sur le même plan, c'est que les deux premières ont à voir à la fois avec un sentiment politique et sa réalité. Il y a une oscillation entre l'utopie et la vie sociale. La fraternité est bien différente. Elle ne se décrète pas ; on ne lutte pas pour l'obtenir. Et elle évoque plus une religion de l'État, de la nation, de la démocratie. Elle fait penser à ce culte de l'Être suprême dont parlait justement pendant la période révolutionnaire. L'Église était souvent considérée comme le lieu de la réaction. Mais on ne se jetait pas pour autant dans l'athéisme ! La fraternité était une idée qui pouvait donner une intelligence affective à la République.

Mais on sait bien que les devises, surtout celles qui sont anciennes et qu'on voit, sans vraiment les lire dans des endroits si divers et si nombreux, ont perdu leur sens littéral. Que dit maintenant le président de la république française ? Il essaie de remotiver, dans tous les sens du mot : remotiver des citoyens parfois désabusés par les difficultés économiques. Remotiver un vieux mot, c'est-à-dire le revitaliser, lui redonner son sens d'origine qui a pu s'effacer derrière une sonorité un peu creuse à force d'usure. Coproduction du Centre national de Documentation Pédagogique. http://www.cndp.fr/