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Candide by Voltaire Part 2 (Read by Bernard), Candide: Chapitre 22 (1)

Candide: Chapitre 22 (1)

Ce qui arriva en France à Candide et à Martin.

[1] [1] Ce chapitre XXII a été beaucoup augmenté en 1761 ; voyez ma note, plus en bas.

Candide ne s'arrêta dans Bordeaux qu'autant de temps qu'il en fallait pour vendre quelques cailloux du Dorado, et pour s'accommoder d'une bonne chaise à deux places ; car il ne pouvait plus se passer de son philosophe Martin ; il fut seulement très fâché de se séparer de son mouton, qu'il laissa à l'académie des sciences de Bordeaux, laquelle proposa pour le sujet du prix de cette année de trouver pourquoi la laine de ce mouton était rouge ; et le prix fut adjugé à un savant du Nord, qui démontra par A, plus B, moins C divisé par Z, que le mouton devait être rouge, et mourir de la clavelée[2]. [2] Quelques progrès que les sciences aient faits, il est impossible que, sur dix mille hommes qui les cultivent en Europe, et sur trois cents académies qui y sont établies, il ne se trouve point quelque académie qui propose des prix ridicules, et quelques savants qui fassent d'étranges applications des sciences les plus utiles. Ce ridicule avait frappé M. de Voltaire dans son séjour à Berlin. Les savants du Nord conservaient encore à cette époque quelques restes de l'ancienne barbarie scolastique ; et la philosophie hardie, mais hypothétique et absurde de Leibnitz, n'avait pas contribué à les en dépouiller. Cependant tous les voyageurs que Candide rencontra dans les cabarets de la route lui disaient : Nous allons à Paris.

Cet empressement général lui donna enfin l'envie de voir cette capitale ; ce n'était pas beaucoup se détourner du chemin de Venise. Il entra par le faubourg Saint-Marceau, et crut être dans le plus vilain village de la Vestphalie.

A peine Candide fut-il dans son auberge, qu'il fut attaqué d'une maladie légère, causée par ses fatigues. Comme il avait au doigt un diamant énorme, et qu'on avait aperçu dans son équipage une cassette prodigieusement pesante, il eut aussitôt auprès de lui deux médecins qu'il n'avait pas mandés, quelques amis intimes qui ne le quittèrent pas, et deux dévotes qui faisaient chauffer ses bouillons. Martin disait : Je me souviens d'avoir été malade aussi à Paris dans mon premier voyage ; j'étais fort pauvre : aussi n'eus-je ni amis, ni dévotes, ni médecins, et je guéris. Cependant, à force de médecines et de saignées, la maladie de Candide devint sérieuse.

Un habitué du quartier vint avec douceur lui demander un billet payable au porteur pour l'autre monde : Candide n'en voulut rien faire ; les dévotes l'assurèrent que c'était une nouvelle mode : Candide répondit qu'il n'était point homme à la mode. Martin voulut jeter l'habitué par les fenêtres. Le clerc jura qu'on n'enterrerait point Candide. Martin jura qu'il enterrerait le clerc, s'il continuait à les importuner. La querelle s'échauffa : Martin le prit par les épaules, et le chassa rudement ; ce qui causa un grand scandale, dont on fit un procès-verbal. Candide guérit ; et pendant sa convalescence il eut très bonne compagnie à souper chez lui.

On jouait gros jeu. Candide était tout étonné que jamais les as ne lui vinssent ; et Martin ne s'en étonnait pas. Parmi ceux qui lui faisaient les honneurs de la ville, il y avait un petit abbé périgourdin, l'un de ces gens empressés, toujours alertes, toujours serviables, effrontés, caressants, accommodants, qui guettent les étrangers à leur passage, leur content l'histoire scandaleuse de la ville, et leur offrent des plaisirs à tout prix. Celui-ci mena d'abord Candide et Martin à la comédie. On y jouait une tragédie nouvelle. Candide se trouva placé auprès de quelques beaux esprits.

Cela ne l'empêcha pas de pleurer à des scènes jouées parfaitement. Un des raisonneurs qui étaient à ses côtés lui dit dans un entr'acte : Vous avez grand tort de pleurer, cette actrice est fort mauvaise ; l'acteur qui joue avec elle est plus mauvais acteur encore ; la pièce est encore plus mauvaise que les acteurs ; l'auteur ne sait pas un mot d'arabe, et cependant la scène est en Arabie[3] ; et, de plus, c'est un homme qui ne croit pas aux idées innées ; je vous apporterai demain vingt brochures contre lui[4]. Monsieur, combien avez-vous de pièces de théâtre en France ?

dit Candide à l'abbé ; lequel répondit : Cinq ou six mille. C'est beaucoup, dit Candide : combien y en a-t-il de bonnes ? Quinze ou seize, répliqua l'autre. C'est beaucoup, dit Martin. [3] La Grange Chancel adressa à Voltaire, en 1718, une Épitre à M.Arouet de Voltaire, dans laquelle on trouve ces vers : Que ton exactitude à dépeindre les mœurs S'étende jusqu'aux noms de tes moindres acteurs, Et qu'en les prononçant ils nous fassent connaître Les pays et les temps où tu les fais renaître. Je vois avec dépit, pour ne produire rien, Chez le Thébain Oedipe, Hidaspe l'Indien. Voltaire profita de la critique, et mit Araspe au lieu de Hidaspe.

C'est peut-être à ces vers de La Grange Chancel que Voltaire fait ici allusion. [4] Dans l'édition de 1759, on lit : « … contre lui. Monsieur, lui dit l'abbé périgourdin, avez-vous remarqué cette jeune personne qui a un visage si piquant et une taille si fine ? Il ne vous en coûtera que dix mille francs par mois, et pour cinquante mille écus de diamants.

Je n'ai qu'un jour ou deux à lui donner, répondit Candide, parceque j'ai un rendez-vous à Venise, qui presse. Le soir, après souper, l'insinuant Périgourdin redoubla de politesses et d'attentions. Vous avez donc, monsieur, lui dit-il, un rendez-vous à Venise, etc. » (Voyez page 306.) Le texte actuel existe dès 1761. Candide fut très content d'une actrice qui fesait la reine Élizabeth, dans une assez plate tragédie[5], que l'on joue quelquefois. Cette actrice, dit-il à Martin, me plaît beaucoup ; elle a un faux air de mademoiselle Cunégonde ; je serais bien aise de la saluer. L'abbé périgourdin s'offrit à l'introduire chez elle. Candide, élevé en Allemagne, demanda quelle était l'étiquette, et comment on traitait en France les reines d'Angleterre. Il faut distinguer, dit l'abbé : en province, on les mène au cabaret ; à Paris, on les respecte quand elles sont belles, et on les jette à la voirie quand elles sont mortes. Des reines à la voirie ! dit Candide.

Oui vraiment, dit Martin ; monsieur l'abbé a raison ; j'étais à Paris quand mademoiselle Monime[6] passa, comme on dit, de cette vie à l'autre ; on lui refusa,ce que ces gens-ci appellent les honneurs de la sépulture, c'est-à-dire de pourrir avec tous les gueux du quartier dans un vilain cimetière ; elle fut enterrée toute seule de sa bande au coin de la rue de Bourgogne ; ce qui dut lui faire une peine extrême, car elle pensait très noblement. Cela est bien impoli, dit Candide. Que voulez-vous ? dit Martin ; ces gens-ci sont ainsi faits.

Imaginez toutes les contradictions, toutes les incompatibilités possibles, vous les verrez dans le gouvernement, dans les tribunaux, dans les églises, dans les spectacles de cette drôle de nation. Est-il vrai qu'on rit toujours à Paris ? dit Candide.

Oui, dit l'abbé, mais c'est en enrageant ; car on s'y plaint de tout avec de grands éclats de rire ; même[7] on y fait en riant les actions les plus détestables. [5] C'est probablement _le Comte d'Essex_, tragédie de Thomas Corneille. (Note de M. Decroix.)

[6] Mademoiselle Lecouvreur.--Sur le refus de sépulture à mademoiselle Lecouvreur, en 1730, voyez, tome XII, la pièce intitulée : _La Mort de mademoiselle Lecouvreur_. [7] Feu Decroix proposait, au lieu de _même_, de mettre ici _comme_. Je n'ai trouvé cette version dans aucune édition. Quel est, dit Candide, ce gros cochon qui me disait tant de mal de la pièce où j'ai tant pleuré, et des acteurs qui m'ont fait tant de plaisir ? C'est un mal-vivant, répondit l'abbé, qui gagne sa vie à dire du mal de toutes les pièces et de tous les livres ; il hait quiconque réussit, comme les eunuques haïssent les jouissants ; c'est un de ces serpents de la littérature qui se nourrissent de fange et de venin ; c'est un folliculaire. Qu'appelez-vous folliculaire ? dit Candide.

C'est, dit l'abbé, un feseur de feuilles, un Fréron. C'est ainsi que Candide, Martin, et le Périgourdin, raisonnaient sur l'escalier, en voyant défiler le monde au sortir de la pièce. Quoique je sois très empressé de revoir mademoiselle Cunégonde, dit Candide, je voudrais pourtant souper avec mademoiselle Clairon, car elle m'a paru admirable. L'abbé n'était pas homme à approcher de mademoiselle Clairon, qui ne voyait que bonne compagnie. Elle est engagée pour ce soir, dit-il ; mais j'aurai l'honneur de vous mener chez une dame de qualité, et là vous connaîtrez Paris comme si vous y aviez été quatre ans. Candide, qui était naturellement curieux, se laissa mener chez la dame, au fond du faubourg Saint-Honoré ; on y était occupé d'un pharaon ; douze tristes pontes tenaient chacun en main un petit livre de cartes, registre cornu de leurs infortunes. Un profond silence régnait, la pâleur était sur le front des pontes, l'inquiétude sur celui du banquier ; et la dame du logis, assise auprès de ce banquier impitoyable, remarquait avec des yeux de lynx tous les parolis, tous les sept-et-le-va de campagne, dont chaque joueur cornait ses cartes ; elle les faisait décorner avec une attention sévère, mais polie, et ne se fâchait point, de peur de perdre ses pratiques. La dame se faisait appeler la marquise de Parolignac.

Sa fille, âgée de quinze ans, était au nombre des pontes, et avertissait d'un clin d'œil des friponneries de ces pauvres gens qui tâchaient de réparer les cruautés du sort. L'abbé périgourdin, Candide, et Martin, entrèrent ; personne ne se leva, ni les salua, ni les regarda ; tous étaient profondément occupés de leurs cartes. Madame la baronne de Thunder-ten-tronckh était plus civile, dit Candide.

Cependant l'abbé s'approcha de l'oreille de la marquise, qui se leva à moitié, honora Candide d'un sourire gracieux, et Martin d'un air de tête tout-à-fait noble ; elle fit donner un siège et un jeu de cartes à Candide, qui perdit cinquante mille francs en deux tailles : après quoi on soupa très gaiement ; et tout le monde était étonné que Candide ne fût pas ému de sa perte ; les laquais disaient entre eux, dans leur langage de laquais : Il faut que ce soit quelque milord anglais. Le souper fut comme la plupart des soupers de Paris, d'abord du silence, ensuite un bruit de paroles qu'on ne distingue point, puis des plaisanteries dont la plupart sont insipides, de fausses nouvelles, de mauvais raisonnements, un peu de politique, et beaucoup de médisance ; on parla même de livres nouveaux. Avez-vous vu, dit l'abbé périgourdin, le roman du sieur Gauchat, docteur en théologie ? Oui, répondit un des convives, mais je n'ai pu l'achever. Nous avons une foule d'écrits impertinents ; mais tous ensemble n'approchent pas de l'impertinence de Gauchat, docteur en théologie[8] ; je suis si rassasié de cette immensité de détestables livres qui nous inondent, que je me suis mis à ponter au pharaon. Et les Mélanges de l'archidiacre Trublet, qu'en dites-vous ? dit l'abbé. Ah ! dit madame de Parolignac, l'ennuyeux mortel ! comme il vous dit curieusement ce que tout le monde sait ! comme il discute pesamment ce qui ne vaut pas la peine d'être remarqué légèrement ! comme il s'approprie, sans esprit, l'esprit des autres ! comme il gâte ce qu'il pille ! comme il me dégoûte ! mais il ne me dégoûtera plus ; c'est assez d'avoir lu quelques pages de l'archidiacre. [8] II faisait un mauvais ouvrage intitulé : Lettres sur quelques écrits de ce temps.

On lui donna une abbaye, et il fut plus richement récompensé que s'il avait fait L'Esprit des Lois, et résolu le problème de la précession des équinoxes. K.--C'est D'Alembert qui a résolu le problème de la précession des équinoxes : voyez, tome XXI, la note des éditeurs sur le chapitre XLIII du Précis du Siècle de Louis XV. Il y avait à table un homme savant et de goût qui appuya ce que disait la marquise.

On parla ensuite de tragédies ; la dame demanda pourquoi il y avait des tragédies qu'on jouait quelquefois, et qu'on ne pouvait lire. L'homme de goût expliqua très bien comment une pièce pouvait avoir quelque intérêt, et n'avoir presque aucun mérite ; il prouva en peu de mots que ce n'était pas assez d'amener une ou deux de ces situations qu'on trouve dans tous les romans, et qui séduisent toujours les spectateurs ; mais qu'il faut être neuf sans être bizarre, souvent sublime et toujours naturel, connaître le cœur humain et le faire parler ; être grand poëte, sans que jamais aucun personnage de la pièce paraisse poëte ; savoir parfaitement sa langue, la parler avec pureté, avec une harmonie continue, sans que jamais la rime coûte rien au sens. Quiconque, ajouta-t-il, n'observe pas toutes ces règles, peut faire une ou deux tragédies applaudies au théâtre, mais il ne sera jamais compté au rang des bons écrivains ; il y a très peu de bonnes tragédies : les unes sont des idylles en dialogues bien écrits et bien rimés ; les autres, des raisonnements politiques qui endorment, ou des amplifications qui rebutent ; les autres, des rêves d'énergumène, en style barbare, des propos interrompus, de longues apostrophes aux dieux, parcequ'on ne sait point parler aux hommes, des maximes fausses, des lieux communs ampoulés. Candide écouta ce propos avec attention, et conçut une grande idée du discoureur ; et, comme la marquise avait eu soin de le placer à côté d'elle, il s'approcha de son oreille, et prit la liberté de lui demander qui était cet homme qui parlait si bien. C'est un savant, dit la dame, qui ne ponte point, et que l'abbé m'amène quelquefois à souper ; il se connaît parfaitement en tragédies et en livres, et il a fait une tragédie sifflée, et un livre dont on n'a jamais vu hors de la boutique de son libraire qu'un exemplaire qu'il m'a dédié. Le grand homme !


Candide: Chapitre 22 (1) Candide: Kapitel 22 (1) Candide: Chapter 22 (1) Cándido: Capítulo 22 (1)

Ce qui arriva en France à Candide et à Martin. What happened in France to Candide and Martin.

[1] [1] Ce chapitre XXII a été beaucoup augmenté en 1761 ; voyez ma note, plus en bas.

Candide ne s’arrêta dans Bordeaux qu’autant de temps qu’il en fallait pour vendre quelques cailloux du Dorado, et pour s’accommoder d’une bonne chaise à deux places ; car il ne pouvait plus se passer de son philosophe Martin ; il fut seulement très fâché de se séparer de son mouton, qu’il laissa à l’académie des sciences de Bordeaux, laquelle proposa pour le sujet du prix de cette année de trouver pourquoi la laine de ce mouton était rouge ; et le prix fut adjugé à un savant du Nord, qui démontra par A, plus B, moins C divisé par Z, que le mouton devait être rouge, et mourir de la clavelée[2]. Cândido parou em Bordéus apenas o tempo necessário para vender algumas pedrinhas do Dorado e aguentar uma boa cadeira de dois lugares; pois ele não podia mais passar sem seu filósofo Martin; só lamentou muito separar-se de sua ovelha, que deixou para a Academia de Ciências de Bordeaux, que propôs como tema do prêmio deste ano descobrir por que a lã dessa ovelha era vermelha; e o prêmio foi concedido a um estudioso do Norte, que provou por A, mais B, menos C dividido por Z, que a ovelha deve ser vermelha e morrer de varíola. [2] Quelques progrès que les sciences aient faits, il est impossible que, sur dix mille hommes qui les cultivent en Europe, et sur trois cents académies qui y sont établies, il ne se trouve point quelque académie qui propose des prix ridicules, et quelques savants qui fassent d’étranges applications des sciences les plus utiles. Ce ridicule avait frappé M. de Voltaire dans son séjour à Berlin. Esse ridículo atingiu o sr. de Voltaire durante sua estada em Berlim. Les savants du Nord conservaient encore à cette époque quelques restes de l’ancienne barbarie scolastique ; et la philosophie hardie, mais hypothétique et absurde de Leibnitz, n’avait pas contribué à les en dépouiller. Os eruditos do Norte ainda conservavam nessa época alguns resquícios da velha barbárie escolástica; e a filosofia ousada, mas hipotética e absurda de Leibnitz não contribuiu para despojá-los dela. Cependant tous les voyageurs que Candide rencontra dans les cabarets de la route lui disaient : Nous allons à Paris.

Cet empressement général lui donna enfin l’envie de voir cette capitale ; ce n’était pas beaucoup se détourner du chemin de Venise. Il entra par le faubourg Saint-Marceau, et crut être dans le plus vilain village de la Vestphalie. He entered the Faubourg Saint-Marceau, and thought he was in the ugliest village in Vestphalia. Entró en el Faubourg Saint-Marceau y pensó que estaba en el pueblo más asqueroso de Vestfalia.

A peine Candide fut-il dans son auberge, qu’il fut attaqué d’une maladie légère, causée par ses fatigues. Mal Cândido chegou à sua estalagem, foi atacado por uma doença branda, causada pelo cansaço. Comme il avait au doigt un diamant énorme, et qu’on avait aperçu dans son équipage une cassette prodigieusement pesante, il eut aussitôt auprès de lui deux médecins qu’il n’avait pas mandés, quelques amis intimes qui ne le quittèrent pas, et deux dévotes qui faisaient chauffer ses bouillons. Como llevaba un enorme diamante en el dedo y en su equipaje se había visto un casete prodigiosamente pesado, fue atendido inmediatamente por dos médicos a los que no había convocado, unos cuantos amigos íntimos que no se separaron de su lado y dos mujeres devotas que le calentaban los caldos. Como tinha no dedo um enorme diamante, e como se viu em sua carruagem um caixão prodigiosamente pesado, trouxe imediatamente consigo dois médicos que não pedira, alguns amigos íntimos que nunca o abandonaram e dois devotos que se acalentaram. seus caldos. Martin disait : Je me souviens d’avoir été malade aussi à Paris dans mon premier voyage ; j’étais fort pauvre : aussi n’eus-je ni amis, ni dévotes, ni médecins, et je guéris. Martin disse: Lembro-me de estar doente também em Paris na minha primeira viagem; Eu era muito pobre: então não tinha amigos, nem devotos, nem médicos, e me recuperei. Cependant, à force de médecines et de saignées, la maladie de Candide devint sérieuse.

Un habitué du quartier vint avec douceur lui demander un billet payable au porteur pour l’autre monde : Candide n’en voulut rien faire ; les dévotes l’assurèrent que c’était une nouvelle mode : Candide répondit qu’il n’était point homme à la mode. Um freguês local veio gentilmente pedir-lhe uma passagem ao portador para o outro mundo: Cândido não quis fazer nada; os devotos asseguraram-lhe que era uma nova moda: Cândido respondeu que não era um homem da moda. Martin voulut jeter l’habitué par les fenêtres. Martin wanted to throw the regular out of the windows. Martin queria jogar o regular pelas janelas. Le clerc jura qu’on n’enterrerait point Candide. Martin jura qu’il enterrerait le clerc, s’il continuait à les importuner. Martin swore he'd bury the cleric if he kept bothering them. Martin jurou que enterraria o funcionário se continuasse a incomodá-los. La querelle s’échauffa : Martin le prit par les épaules, et le chassa rudement ; ce qui causa un grand scandale, dont on fit un procès-verbal. The quarrel flared up, and Martin grabbed him by the shoulders and threw him out, causing a great scandal, which was duly recorded. A briga esquentou: Martin o pegou pelos ombros e o afugentou rudemente; que causou um grande escândalo, do qual foi feito um relatório. Candide guérit ; et pendant sa convalescence il eut très bonne compagnie à souper chez lui.

On jouait gros jeu. We were playing big game. Estávamos jogando um grande jogo. Candide était tout étonné que jamais les as ne lui vinssent ; et Martin ne s’en étonnait pas. Parmi ceux qui lui faisaient les honneurs de la ville, il y avait un petit abbé périgourdin, l’un de ces gens empressés, toujours alertes, toujours serviables, effrontés, caressants, accommodants, qui guettent les étrangers à leur passage, leur content l’histoire scandaleuse de la ville, et leur offrent des plaisirs à tout prix. Among those who did him the honors of the city, there was a little Perigord abbot, one of those eager people, always alert, always helpful, cheeky, caressing, accommodating, who watch for strangers as they pass, please them. scandalous history of the city, and offer them pleasures at all costs. Entre los que le hicieron los honores de la ciudad había un abadito de Périgord, una de esas personas ansiosas, siempre alerta, siempre servicial, descarada, acariciadora, complaciente, que vigila a los extranjeros a su paso, les cuenta la escandalosa historia de la ciudad y les ofrece placeres a cualquier precio. Entre aqueles que lhe fizeram as honras da cidade, havia um pequeno abade Perigord, uma dessas pessoas ansiosas, sempre alertas, sempre prestativas, atrevidas, acariciantes, acomodadas, que vigiam os estranhos que passam, agrada-os. a cidade, e oferecer-lhes prazeres a todo custo. Celui-ci mena d’abord Candide et Martin à la comédie. Isso primeiro levou Cândido e Martin à comédia. On y jouait une tragédie nouvelle. Candide se trouva placé auprès de quelques beaux esprits.

Cela ne l’empêcha pas de pleurer à des scènes jouées parfaitement. Un des raisonneurs qui étaient à ses côtés lui dit dans un entr’acte : Vous avez grand tort de pleurer, cette actrice est fort mauvaise ; l’acteur qui joue avec elle est plus mauvais acteur encore ; la pièce est encore plus mauvaise que les acteurs ; l’auteur ne sait pas un mot d’arabe, et cependant la scène est en Arabie[3] ; et, de plus, c’est un homme qui ne croit pas aux idées innées ; je vous apporterai demain vingt brochures contre lui[4]. Uno de los razonadores que estaban a su lado le dijo en un intermedio: Haces muy mal en llorar, esta actriz es muy mala; el actor que actúa con ella es aún peor actor; la obra es aún peor que los actores; el autor no sabe una palabra de árabe, y sin embargo el escenario está en Arabia[3]; y, además, es un hombre que no cree en las ideas innatas; mañana te traeré veinte panfletos contra él[4]. Monsieur, combien avez-vous de pièces de théâtre en France ?

dit Candide à l’abbé ; lequel répondit : Cinq ou six mille. C’est beaucoup, dit Candide : combien y en a-t-il de bonnes ? That's a lot, says Candide: how many good ones are there? Quinze ou seize, répliqua l’autre. C’est beaucoup, dit Martin. [3] La Grange Chancel adressa à Voltaire, en 1718, une Épitre à M.Arouet de Voltaire, dans laquelle on trouve ces vers : Que ton exactitude à dépeindre les mœurs S’étende jusqu’aux noms de tes moindres acteurs, [3] En 1718, La Grange Chancel escribe a Voltaire un Epitre à M.Arouet de Voltaire, en el que escribe: Que ton exactitude à dépeindre les mœurs S'étende jusqu'aux noms de tes moindres acteurs, [3] La Grange Chancel dirigiu a Voltaire, em 1718, uma Epístola a M. Arouet de Voltaire, na qual encontramos estes versos: Que a tua precisão em retratar a moral Se estende aos nomes dos teus atores menores, Et qu’en les prononçant ils nous fassent connaître Les pays et les temps où tu les fais renaître. Je vois avec dépit, pour ne produire rien, Chez le Thébain Oedipe, Hidaspe l’Indien. Voltaire profita de la critique, et mit Araspe au lieu de Hidaspe.

C’est peut-être à ces vers de La Grange Chancel que Voltaire fait ici allusion. [4] Dans l’édition de 1759, on lit : « … contre lui. Monsieur, lui dit l’abbé périgourdin, avez-vous remarqué cette jeune personne qui a un visage si piquant et une taille si fine ? Sir, said the Perigordian abbé to him, have you noticed this young person who has such a piquant face and such a slender waist? Senhor, disse-lhe o abade Perigordiano, notou este jovem que tem um rosto tão picante e uma cintura tão fina? Il ne vous en coûtera que dix mille francs par mois, et pour cinquante mille écus de diamants. It will only cost you ten thousand francs a month, and fifty thousand crowns worth of diamonds. Custará apenas dez mil francos por mês e cinquenta mil coroas em diamantes.

Je n’ai qu’un jour ou deux à lui donner, répondit Candide, parceque j’ai un rendez-vous à Venise, qui presse. I only have a day or two to give him, answered Candide, because I have an appointment in Venice, which is urgent. Le soir, après souper, l’insinuant Périgourdin redoubla de politesses et d’attentions. Vous avez donc, monsieur, lui dit-il, un rendez-vous à Venise, etc. » (Voyez page 306.) Le texte actuel existe dès 1761. Candide fut très content d’une actrice qui fesait la reine Élizabeth, dans une assez plate tragédie[5], que l’on joue quelquefois. Cette actrice, dit-il à Martin, me plaît beaucoup ; elle a un faux air de mademoiselle Cunégonde ; je serais bien aise de la saluer. L’abbé périgourdin s’offrit à l’introduire chez elle. Candide, élevé en Allemagne, demanda quelle était l’étiquette, et comment on traitait en France les reines d’Angleterre. Cândido, criado na Alemanha, perguntou qual era a etiqueta e como as rainhas da Inglaterra eram tratadas na França. Il faut distinguer, dit l’abbé : en province, on les mène au cabaret ; à Paris, on les respecte quand elles sont belles, et on les jette à la voirie quand elles sont mortes. We must distinguish, says the abbé: in the provinces, they are taken to the cabaret; in Paris, they are respected when they are beautiful, and they are thrown into the garbage when they are dead. Hay que hacer una distinción -dijo el abate-: en provincias, las llevamos al cabaret; en París, las respetamos cuando están guapas y las tiramos cuando están muertas. É preciso distinguir, diz o abade: nas províncias, levam-se ao cabaré; em Paris, são respeitadas quando são bonitas e são jogadas no lixo quando estão mortas. Des reines à la voirie ! Queens on the road! Rainhas na estrada! dit Candide.

Oui vraiment, dit Martin ; monsieur l’abbé a raison ; j’étais à Paris quand mademoiselle Monime[6] passa, comme on dit, de cette vie à l’autre ; on lui refusa,ce que ces gens-ci appellent les honneurs de la sépulture, c’est-à-dire de pourrir avec tous les gueux du quartier dans un vilain cimetière ; elle fut enterrée toute seule de sa bande au coin de la rue de Bourgogne ; ce qui dut lui faire une peine extrême, car elle pensait très noblement. Yes indeed, said Martin; the abbé is right; I was in Paris when Mademoiselle Monime[6] passed, as they say, from this life to the other; he was refused what these people call the honors of burial, that is to say, to rot with all the beggars of the neighborhood in an ugly cemetery; she was buried alone with her band at the corner of the rue de Bourgogne; which must have pained her extremely, for she thought very nobly. Cela est bien impoli, dit Candide. Que voulez-vous ? dit Martin ; ces gens-ci sont ainsi faits.

Imaginez toutes les contradictions, toutes les incompatibilités possibles, vous les verrez dans le gouvernement, dans les tribunaux, dans les églises, dans les spectacles de cette drôle de nation. Imagine todas as contradições, todas as incompatibilidades possíveis, você as verá no governo, nos tribunais, nas igrejas, nos espetáculos desta estranha nação. Est-il vrai qu’on rit toujours à Paris ? Is it true that we always laugh in Paris? dit Candide.

Oui, dit l’abbé, mais c’est en enrageant ; car on s’y plaint de tout avec de grands éclats de rire ; même[7] on y fait en riant les actions les plus détestables. [5] C’est probablement _le Comte d’Essex_, tragédie de Thomas Corneille. (Note de M. Decroix.)

[6] Mademoiselle Lecouvreur.--Sur le refus de sépulture à mademoiselle Lecouvreur, en 1730, voyez, tome XII, la pièce intitulée : _La Mort de mademoiselle Lecouvreur_. [6] Mademoiselle Lecouvreur.--Sobre a recusa de enterro de Mademoiselle Lecouvreur, em 1730, ver, tomo XII, a peça intitulada: _La Mort de mademoiselle Lecouvreur_. [7] Feu Decroix proposait, au lieu de _même_, de mettre ici _comme_. Je n’ai trouvé cette version dans aucune édition. Quel est, dit Candide, ce gros cochon qui me disait tant de mal de la pièce où j’ai tant pleuré, et des acteurs qui m’ont fait tant de plaisir ? What, says Candide, is this big pig who said so much ill to me about the play in which I cried so much, and about the actors who gave me so much pleasure? C’est un mal-vivant, répondit l’abbé, qui gagne sa vie à dire du mal de toutes les pièces et de tous les livres ; il hait quiconque réussit, comme les eunuques haïssent les jouissants ; c’est un de ces serpents de la littérature qui se nourrissent de fange et de venin ; c’est un folliculaire. Es un malviviente", replicó el abate, "que se gana la vida hablando mal de todas las obras y de todos los libros; odia a cualquiera que tenga éxito, igual que los eunucos odian a los que se divierten; es una de esas serpientes literarias que se alimentan de fango y veneno; es un folicular. É um doente, respondeu o abade, que ganha a vida falando mal de todas as peças e de todos os livros; ele odeia quem tem sucesso, como os eunucos odeiam os desfrutadores; é uma dessas serpentes da literatura que se alimentam de lama e veneno; é um folicular. Qu’appelez-vous folliculaire ? dit Candide.

C’est, dit l’abbé, un feseur de feuilles, un Fréron. Ele é, diz o abade, um tecelão de folhas, um Fréron. C’est ainsi que Candide, Martin, et le Périgourdin, raisonnaient sur l’escalier, en voyant défiler le monde au sortir de la pièce. Quoique je sois très empressé de revoir mademoiselle Cunégonde, dit Candide, je voudrais pourtant souper avec mademoiselle Clairon, car elle m’a paru admirable. L’abbé n’était pas homme à approcher de mademoiselle Clairon, qui ne voyait que bonne compagnie. The Abbé was not a man to go near Mademoiselle Clairon, who only saw good company. O abade não era homem para se aproximar de Mademoiselle Clairon, que só via boa companhia. Elle est engagée pour ce soir, dit-il ; mais j’aurai l’honneur de vous mener chez une dame de qualité, et là vous connaîtrez Paris comme si vous y aviez été quatre ans. She's engaged for tonight, he said; but I shall have the honor of taking you to a lady of quality, and there you will know Paris as if you had been there four years. Candide, qui était naturellement curieux, se laissa mener chez la dame, au fond du faubourg Saint-Honoré ; on y était occupé d’un pharaon ; douze tristes pontes tenaient chacun en main un petit livre de cartes, registre cornu de leurs infortunes. Cándido, curioso por naturaleza, se dejó conducir a casa de la señora, al final del Faubourg Saint-Honoré; estaban ocupados con un faraón; doce tristes pundonorosos sostenían cada uno un librito de cartas, el registro cornudo de sus desgracias. Cândido, naturalmente curioso, deixou-se conduzir à casa da senhora, no extremo do Faubourg Saint-Honoré; estavam ocupados com um faraó; doze sábios tristes, cada um com um livrinho de cartas nas mãos, um registro com chifres de seus infortúnios. Un profond silence régnait, la pâleur était sur le front des pontes, l’inquiétude sur celui du banquier ; et la dame du logis, assise auprès de ce banquier impitoyable, remarquait avec des yeux de lynx tous les parolis, tous les sept-et-le-va de campagne, dont chaque joueur cornait ses cartes ; elle les faisait décorner avec une attention sévère, mais polie, et ne se fâchait point, de peur de perdre ses pratiques. Reinaba un profundo silencio, la palidez estaba en la frente de los entendidos, la ansiedad en la del banquero; y la señora de la casa, sentada junto a este despiadado banquero, observaba con ojos de lince todos los parolis, todos los sept-et-le-va campestres, con que cada jugador marcaba sus cartas; las hacía marcar con una atención severa pero cortés, y no se enfadaba, por miedo a perder sus prácticas. Reinava um profundo silêncio, a palidez na testa dos pânditas, a ansiedade na do banqueiro; e a dona da casa, sentada ao lado desse banqueiro impiedoso, notou com olhos de lince todas as parolis, todos os sete-e-le-va da campanha, com os quais cada jogador enfeitava suas cartas; ela os descornava com atenção severa, mas educada, e nunca se zangava por medo de perder a prática. La dame se faisait appeler la marquise de Parolignac.

Sa fille, âgée de quinze ans, était au nombre des pontes, et avertissait d’un clin d’œil des friponneries de ces pauvres gens qui tâchaient de réparer les cruautés du sort. Su hija, de quince años, era una de las pundonorosas, y con un guiño advertía de las travesuras de esa pobre gente que intentaba compensar las crueldades del destino. Sua filha, de quinze anos, era uma das garras, e avisou com uma piscadela sobre as artimanhas daquelas pobres pessoas que tentavam reparar as crueldades do destino. L’abbé périgourdin, Candide, et Martin, entrèrent ; personne ne se leva, ni les salua, ni les regarda ; tous étaient profondément occupés de leurs cartes. Madame la baronne de Thunder-ten-tronckh était plus civile, dit Candide.

Cependant l’abbé s’approcha de l’oreille de la marquise, qui se leva à moitié, honora Candide d’un sourire gracieux, et Martin d’un air de tête tout-à-fait noble ; elle fit donner un siège et un jeu de cartes à Candide, qui perdit cinquante mille francs en deux tailles : après quoi on soupa très gaiement ; et tout le monde était étonné que Candide ne fût pas ému de sa perte ; les laquais disaient entre eux, dans leur langage de laquais : Il faut que ce soit quelque milord anglais. Le souper fut comme la plupart des soupers de Paris, d’abord du silence, ensuite un bruit de paroles qu’on ne distingue point, puis des plaisanteries dont la plupart sont insipides, de fausses nouvelles, de mauvais raisonnements, un peu de politique, et beaucoup de médisance ; on parla même de livres nouveaux. A ceia foi como a maioria das ceias em Paris, primeiro silêncio, depois um barulho de palavras indistinguíveis, depois piadas, a maioria das quais são insípidas, notícias falsas, raciocínio ruim, um pouco de política... e muita calúnia; falou-se até em livros novos. Avez-vous vu, dit l’abbé périgourdin, le roman du sieur Gauchat, docteur en théologie ? Você já viu, disse o abade do Périgord, o romance do sieur Gauchat, doutor em teologia? Oui, répondit un des convives, mais je n’ai pu l’achever. Nous avons une foule d’écrits impertinents ; mais tous ensemble n’approchent pas de l’impertinence de Gauchat, docteur en théologie[8] ; je suis si rassasié de cette immensité de détestables livres qui nous inondent, que je me suis mis à ponter au pharaon. We have a host of impertinent writings; but all together they don't approach the impertinence of Gauchat, docteur en théologie[8]; I'm so satiated with this immensity of detestable books that flood us, that I've started pontificating to the pharaoh. Tenemos un sinfín de escritos impertinentes; pero todos juntos no se acercan a la impertinencia de Gauchat, Doctor en Teología[8]; estoy tan saciado de esta inmensidad de libros detestables que nos inundan, que me he puesto a pontificar al Faraón. Temos uma multidão de escritos impertinentes; mas todos juntos não se aproximam da impertinência de Gauchat, doutor em teologia[8]; Estou tão saciado com essa imensidão de livros detestáveis que nos inundam, que comecei a colocar faraó. Et les Mélanges de l’archidiacre Trublet, qu’en dites-vous ? E as Misturas do Archdeacon Trublet, o que você diz? dit l’abbé. Ah ! dit madame de Parolignac, l’ennuyeux mortel ! comme il vous dit curieusement ce que tout le monde sait ! comme il discute pesamment ce qui ne vaut pas la peine d’être remarqué légèrement ! ¡ya que discute con gran detalle cosas que no vale la pena mencionar en absoluto! quão ponderadamente ele discute o que não vale a pena notar levianamente! comme il s’approprie, sans esprit, l’esprit des autres ! comme il gâte ce qu’il pille ! comme il me dégoûte ! mais il ne me dégoûtera plus ; c’est assez d’avoir lu quelques pages de l’archidiacre. [8] II faisait un mauvais ouvrage intitulé : Lettres sur quelques écrits de ce temps.

On lui donna une abbaye, et il fut plus richement récompensé que s’il avait fait L’Esprit des Lois, et résolu le problème de la précession des équinoxes. He was given an abbey, and was more richly rewarded than if he had written L'Esprit des Lois, and solved the problem of the precession of the equinoxes. Deram-lhe uma abadia, e ele foi mais bem recompensado do que se tivesse escrito L'Esprit des Lois e resolvido o problema da precessão dos equinócios. K.--C’est D’Alembert qui a résolu le problème de la précession des équinoxes : voyez, tome XXI, la note des éditeurs sur le chapitre XLIII du Précis du Siècle de Louis XV. Il y avait à table un homme savant et de goût qui appuya ce que disait la marquise.

On parla ensuite de tragédies ; la dame demanda pourquoi il y avait des tragédies qu’on jouait quelquefois, et qu’on ne pouvait lire. L’homme de goût expliqua très bien comment une pièce pouvait avoir quelque intérêt, et n’avoir presque aucun mérite ; il prouva en peu de mots que ce n’était pas assez d’amener une ou deux de ces situations qu’on trouve dans tous les romans, et qui séduisent toujours les spectateurs ; mais qu’il faut être neuf sans être bizarre, souvent sublime et toujours naturel, connaître le cœur humain et le faire parler ; être grand poëte, sans que jamais aucun personnage de la pièce paraisse poëte ; savoir parfaitement sa langue, la parler avec pureté, avec une harmonie continue, sans que jamais la rime coûte rien au sens. Quiconque, ajouta-t-il, n’observe pas toutes ces règles, peut faire une ou deux tragédies applaudies au théâtre, mais il ne sera jamais compté au rang des bons écrivains ; il y a très peu de bonnes tragédies : les unes sont des idylles en dialogues bien écrits et bien rimés ; les autres, des raisonnements politiques qui endorment, ou des amplifications qui rebutent ; les autres, des rêves d’énergumène, en style barbare, des propos interrompus, de longues apostrophes aux dieux, parcequ’on ne sait point parler aux hommes, des maximes fausses, des lieux communs ampoulés. Quien, añadió, no observe todas estas reglas, podrá hacer una o dos tragedias aplaudidas en el teatro, pero nunca se contará entre las filas de los buenos escritores; hay muy pocas tragedias buenas: unas son idilios en diálogos bien escritos y bien rimados; otras, razonamientos políticos que duermen a la gente, o amplificaciones que la desaniman; otras, sueños enérgicos, en estilo bárbaro, discursos interrumpidos, largos apóstrofes a los dioses, porque no se sabe hablar a los hombres, máximas falsas, lugares comunes ampulosos. Quem, acrescentou, não observar todas essas regras, pode escrever uma ou duas tragédias que são aplaudidas no teatro, mas nunca será contado entre os bons escritores; há pouquíssimas tragédias boas: algumas são idílios em diálogos bem escritos e bem rimados; os outros, raciocínios políticos que o adormecem, ou amplificações que o desanimam; os outros, sonhos fanáticos, em estilo bárbaro, observações interrompidas, longas apóstrofes aos deuses, porque não se sabe falar aos homens, máximas falsas, chavões bombásticos. Candide écouta ce propos avec attention, et conçut une grande idée du discoureur ; et, comme la marquise avait eu soin de le placer à côté d’elle, il s’approcha de son oreille, et prit la liberté de lui demander qui était cet homme qui parlait si bien. C’est un savant, dit la dame, qui ne ponte point, et que l’abbé m’amène quelquefois à souper ; il se connaît parfaitement en tragédies et en livres, et il a fait une tragédie sifflée, et un livre dont on n’a jamais vu hors de la boutique de son libraire qu’un exemplaire qu’il m’a dédié. He's a scholar," said the lady, "who doesn't lay eggs, and whom the Abbé sometimes brings to supper; he knows a lot about tragedies and books, and he's written a tragedy that's been hissed at, and a book of which only one copy, dedicated to me, has ever been seen outside his bookseller's store. Es un erudito -dijo la dama- que no pone huevos, y a quien el abate lleva a veces a cenar; sabe mucho de tragedias y de libros, y ha escrito una tragedia que ha sido silbada, y un libro del que sólo se ha visto un ejemplar, dedicado a mí, fuera de su librería. Ele é um erudito, disse a senhora, que não põe ovos, e que o abade às vezes me traz para jantar; ele está perfeitamente familiarizado com tragédias e livros, e ele escreveu uma tragédia sibilada, e um livro do qual ninguém jamais viu fora de sua livraria, exceto um exemplar que ele dedicou a mim. Le grand homme !