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Candide by Voltaire Part 2 (Read by Bernard), Candide: Chapitre 18

Candide: Chapitre 18

Ce qu'ils virent dans le pays d'Eldorado Cacambo témoigna à son hôte toute sa curiosité ; l'hôte lui dit : Je suis fort ignorant, et je m'en trouve bien ; mais nous avons ici un vieillard retiré de la cour qui est le plus savant homme du royaume, et le plus communicatif. Aussitôt il mène Cacambo chez le vieillard. Candide ne jouait plus que le second personnage, et accompagnait son valet.

Ils entrèrent dans une maison fort simple, car la porte n'était que d'argent, et les lambris des appartements n'étaient que d'or, mais travaillés avec tant de goût, que les plus riches lambris ne l'effaçaient pas. L'antichambre n'était à la vérité incrustée que de rubis et d'émeraudes ; mais l'ordre dans lequel tout était arrangé réparait bien cette extrême simplicité. Le vieillard reçut les deux étrangers sur un sofa matelassé de plumes de colibri, et leur fit présenter des liqueurs dans des vases de diamant ; après quoi il satisfit à leur curiosité en ces termes :

Je suis âgé de cent soixante et douze ans, et j'ai appris de feu mon père, écuyer du roi, les étonnantes révolutions du Pérou dont il avait été témoin. Le royaume où nous sommes est l'ancienne patrie des incas, qui en sortirent très imprudemment pour aller subjuguer une partie du monde, et qui furent enfin détruits par les Espagnols. Les princes de leur famille qui restèrent dans leur pays natal furent plus sages ; ils ordonnèrent, du consentement de la nation, qu'aucun habitant ne sortirait jamais de notre petit royaume ; et c'est ce qui nous a conservé notre innocence et notre félicité. Les Espagnols ont eu une connaissance confuse de ce pays, ils l'ont appelé _Eldorado_ ; et un Anglais, nommé le chevalier Raleigh, en a même approché il y a environ cent années ; mais, comme nous sommes entourés de rochers inabordables et de précipices, nous avons toujours été jusqu'à présent à l'abri de la rapacité des nations de l'Europe, qui ont une fureur inconcevable pour les cailloux et pour la fange de notre terre, et qui, pour en avoir, nous tueraient tous jusqu'au dernier. La conversation fut longue ; elle roula sur la forme du gouvernement, sur les mœurs, sur les femmes, sur les spectacles publics, sur les arts.

Enfin Candide, qui avait toujours du goût pour la métaphysique, fit demander par Cacambo si dans le pays il y avait une religion. Le vieillard rougit un peu.

Comment donc ! dit-il, en pouvez-vous douter ? Est-ce que vous nous prenez pour des ingrats ? Cacambo demanda humblement quelle était la religion d'Eldorado. Le vieillard rougit encore : Est-ce qu'il peut y avoir deux religions ? dit-il.

Nous avons, je crois, la religion de tout le monde ; nous adorons Dieu du soir jusqu'au matin. N'adorez vous qu'un seul Dieu ? dit Cacambo, qui servait toujours d'interprète aux doutes de Candide. Apparemment, dit le vieillard, qu'il n'y en a ni deux, ni trois, ni quatre. Je vous avoue que les gens de votre monde font des questions bien singulières. Candide ne se lassait pas de faire interroger ce bon vieillard ; il voulut savoir comment on priait Dieu dans Eldorado.

Nous ne le prions point, dit le bon et respectable sage ; nous n'avons rien à lui demander, il nous a donné tout ce qu'il nous faut ; nous le remercions sans cesse. Candide eut la curiosité de voir des prêtres ; il fit demander où ils étaient. Le bon vieillard sourit. Mes amis, dit-il, nous sommes tous prêtres ; le roi et tous les chefs de famille chantent des cantiques d'actions de grâces solennellement tous les matins, et cinq ou six mille musiciens les accompagnent.--Quoi ! vous n'avez point de moines qui enseignent, qui disputent, qui gouvernent, qui cabalent, et qui font brûler les gens qui ne sont pas de leur avis ? --Il faudrait que nous fussions fous, dit le vieillard ; nous sommes tous ici du même avis, et nous n'entendons pas ce que vous voulez dire avec vos moines. Candide à tous ces discours demeurait en extase, et disait en lui-même : Ceci est bien différent de la Vestphalie et du château de monsieur le baron : si notre ami Pangloss avait vu Eldorado, il n'aurait plus dit que le château de Thunder-ten-tronckh était ce qu'il y avait de mieux sur la terre ; il est certain qu'il faut voyager. Après cette longue conversation, le bon vieillard fit atteler un carrosse à six moutons, et donna douze de ses domestiques aux deux voyageurs pour les conduire à la cour.

Excusez-moi, leur dit-il, si mon âge me prive de l'honneur de vous accompagner. Le roi vous recevra d'une manière dont vous ne serez pas mécontents, et vous pardonnerez sans doute aux usages du pays, s'il y en a quelques uns qui vous déplaisent. Candide et Cacambo montent en carrosse ; les six moutons volaient, et en moins de quatre heures on arriva au palais du roi, situé à un bout de la capitale.

Le portail était de deux cent vingt pieds de haut, et de cent de large ; il est impossible d'exprimer quelle en était la matière. On voit assez quelle supériorité prodigieuse elle devait avoir sur ces cailloux et sur ce sable que nous nommons or et pierreries. Vingt belles filles de la garde reçurent Candide et Cacambo à la descente du carrosse, les conduisirent aux bains, les vêtirent de robes d'un tissu de duvet de colibri ; après quoi les grands officiers et les grandes officières de la couronne les menèrent à l'appartement de sa majesté au milieu de deux files, chacune de mille musiciens, selon l'usage ordinaire. Quand ils approchèrent de la salle du trône, Cacambo demanda à un grand officier comment il fallait s'y prendre pour saluer sa majesté : si on se jetait à genoux ou ventre à terre ; si on mettait les mains sur la tête ou sur le derrière ; si on léchait la poussière de la salle : en un mot, quelle était la cérémonie. L'usage, dit le grand-officier, est d'embrasser le roi et de le baiser des deux côtés. Candide et Cacambo sautèrent au cou de sa majesté, qui les reçut avec toute la grâce imaginable, et qui les pria poliment à souper.

En attendant, on leur fit voir la ville, les édifices publics élevés jusqu'aux nues, les marchés ornés de mille colonnes, les fontaines d'eau pure, les fontaines d'eau rose, celles de liqueurs de cannes de sucre qui coulaient continuellement dans de grandes places pavées d'une espèce de pierreries qui répandaient une odeur semblable à celle du girofle et de la cannelle. Candide demanda à voir la cour de justice, le parlement ; on lui dit qu'il n'y en avait point, et qu'on ne plaidait jamais. Il s'informa s'il y avait des prisons, et on lui dit que non. Ce qui le surprit davantage, et qui lui fit le plus de plaisir, ce fut le palais des sciences, dans lequel il vit une galerie de deux mille pas, toute pleine d'instruments de mathématiques et de physique. Après avoir parcouru toute l'après-dînée à peu près la millième partie de la ville, on les ramena chez le roi. Candide se mit à table entre sa majesté, son valet Cacambo, et plusieurs dames. Jamais on ne fit meilleure chère, et jamais on n'eut plus d'esprit à souper qu'en eut sa majesté. Cacambo expliquait les bons mots du roi à Candide, et quoique traduits, ils paraissaient toujours des bons mots. De tout ce qui étonnait Candide, ce n'était pas ce qui l'étonna le moins. Ils passèrent un mois dans cet hospice.

Candide ne cessait de dire à Cacambo : Il est vrai, mon ami, encore une fois, que le château où je suis né ne vaut pas le pays où nous sommes ; mais enfin mademoiselle Cunégonde n'y est pas, et vous avez sans doute quelque maîtresse en Europe. Si nous restons ici, nous n'y serons que comme les autres ; au lieu que si nous retournons dans notre monde, seulement avec douze moutons chargés de cailloux d'Eldorado, nous serons plus riches que tous les rois ensemble, nous n'aurons plus d'inquisiteurs à craindre, et nous pourrons aisément reprendre mademoiselle Cunégonde. Ce discours plut à Cacambo ; on aime tant à courir, à se faire valoir chez les siens, à faire parade de ce qu'on a vu dans ses voyages, que les deux heureux résolurent de ne plus l'être, et de demander leur congé à sa majesté. Vous faites une sottise, leur dit le roi : je sais bien que mon pays est peu de chose ; mais, quand on est passablement quelque part, il faut y rester.

Je n'ai pas assurément le droit de retenir des étrangers ; c'est une tyrannie qui n'est ni dans nos mœurs ni dans nos lois ; tous les hommes sont libres ; partez quand vous voudrez, mais la sortie est bien difficile. Il est impossible de remonter la rivière rapide sur laquelle vous êtes arrivés par miracle, et qui court sous des voûtes de rochers.

Les montagnes qui entourent tout mon royaume ont dix mille pieds de hauteur, et sont droites comme des murailles : elles occupent chacune en largeur un espace de plus de dix lieues ; on ne peut en descendre que par des précipices. Cependant, puisque vous voulez absolument partir, je vais donner ordre aux intendants des machines d'en faire une qui puisse vous transporter commodément. Quand on vous aura conduits au revers des montagnes, personne ne pourra vous accompagner ; car mes sujets ont fait vœu de ne jamais sortir de leur enceinte, et ils sont trop sages pour rompre leur vœu. Demandez-moi d'ailleurs tout ce qu'il vous plaira. Nous ne demandons à votre majesté, dit Cacambo, que quelques moutons chargés de vivres, de cailloux, et de la boue du pays. Le roi rit : Je ne conçois pas, dit-il, quel goût vos gens d'Europe ont pour notre boue jaune : mais emportez-en tant que vous voudrez, et grand bien vous fasse. Il donna l'ordre sur-le-champ à ses ingénieurs de faire une machine pour guinder ces deux hommes extraordinaires hors du royaume. Trois mille bons physiciens y travaillèrent ; elle fut prête au bout de quinze jours, et ne coûta pas plus de vingt millions de livres sterling, monnaie du pays. On mit sur la machine Candide et Cacambo ; il y avait deux grands moutons rouges sellés et bridés pour leur servir de monture quand ils auraient franchi les montagnes, vingt moutons de bât chargés de vivres, trente qui portaient des présents de ce que le pays a de plus curieux, et cinquante chargés d'or, de pierreries, et de diamants. Le roi embrassa tendrement les deux vagabonds.

Ce fut un beau spectacle que leur départ, et la manière ingénieuse dont ils furent hissés eux et leurs moutons au haut des montagnes.

Les physiciens prirent congé d'eux après les avoir mis en sûreté, et Candide n'eut plus d'autre désir et d'autre objet que d'aller présenter ses moutons à mademoiselle Cunégonde. Nous avons, dit-il, de quoi payer le gouverneur de Buenos-Ayres, si mademoiselle Cunégonde peut être mise à prix. Marchons vers la Cayenne, embarquons-nous, et nous verrons ensuite quel royaume nous pourrons acheter.

Candide: Chapitre 18 Candide: Kapitel 18 Candide: Chapter 18 Cándido: Capítulo 18

Ce qu'ils virent dans le pays d'Eldorado What they saw in the land of Eldorado Cacambo témoigna à son hôte toute sa curiosité ; l'hôte lui dit : Je suis fort ignorant, et je m'en trouve bien ; mais nous avons ici un vieillard retiré de la cour qui est le plus savant homme du royaume, et le plus communicatif. Cacambo testified to his guest all his curiosity; the host said to him: "I am very ignorant, and I am well off; but here we have an old man removed from the court, who is the most learned man in the kingdom, and the most communicative. Cacambo mostrou ao anfitrião toda a sua curiosidade; o anfitrião lhe disse: sou muito ignorante e me sinto bem com isso; mas aqui temos um velho, aposentado da corte, que é o homem mais instruído do reino e o mais comunicativo. Aussitôt il mène Cacambo chez le vieillard. He immediately leads Cacambo to the old man. Candide ne jouait plus que le second personnage, et accompagnait son valet. Candide only played the second character, and accompanied his valet.

Ils entrèrent dans une maison fort simple, car la porte n'était que d'argent, et les lambris des appartements n'étaient que d'or, mais travaillés avec tant de goût, que les plus riches lambris ne l'effaçaient pas. They entered a very simple house, for the door was only silver, and the paneling of the apartments was only gold, but worked with so much taste, that the richest paneling did not efface it. Entraram numa casa muito simples, pois a porta era só de prata e os lambris dos aposentos só de ouro, mas trabalhados com tanto gosto que os mais ricos lambris não o apagavam. L'antichambre n'était à la vérité incrustée que de rubis et d'émeraudes ; mais l'ordre dans lequel tout était arrangé réparait bien cette extrême simplicité. The antechamber was indeed encrusted only with rubies and emeralds; but the order in which everything was arranged repaired this extreme simplicity. Le vieillard reçut les deux étrangers sur un sofa matelassé de plumes de colibri, et leur fit présenter des liqueurs dans des vases de diamant ; après quoi il satisfit à leur curiosité en ces termes : The old man received the two strangers on a sofa quilted with hummingbird feathers, and had them presented liqueurs in diamond vases; after which he satisfied their curiosity in these terms: El anciano recibió a los dos forasteros en un sofá tapizado con plumas de colibrí, e hizo que les obsequiaran con licores en jarrones de diamantes: O velho recebeu os dois estranhos em um sofá acolchoado com penas de beija-flor e os presenteou com licores em vasos de diamantes; após o que ele satisfez sua curiosidade nestes termos:

Je suis âgé de cent soixante et douze ans, et j'ai appris de feu mon père, écuyer du roi, les étonnantes révolutions du Pérou dont il avait été témoin. I am a hundred and seventy-two years old, and I have learned from the late father, the king's squire, the astonishing revolutions of Peru which he had witnessed. Tenho cento e setenta e dois anos e aprendi com meu falecido pai, escudeiro do rei, as surpreendentes revoluções no Peru que ele testemunhou. Le royaume où nous sommes est l'ancienne patrie des incas, qui en sortirent très imprudemment pour aller subjuguer une partie du monde, et qui furent enfin détruits par les Espagnols. The kingdom where we are is the ancient homeland of the Incas, who came out very imprudently to go to subjugate a part of the world, and which were finally destroyed by the Spaniards. Les princes de leur famille qui restèrent dans leur pays natal furent plus sages ; ils ordonnèrent, du consentement de la nation, qu'aucun habitant ne sortirait jamais de notre petit royaume ; et c'est ce qui nous a conservé notre innocence et notre félicité. The princes of their family who remained in their native land were wiser; they ordered, with the consent of the nation, that no inhabitant should ever leave our little kingdom; and this is what has kept us innocent and happy. Os príncipes de sua família que permaneceram em seu país natal eram mais sábios; eles ordenaram, com o consentimento da nação, que nenhum habitante deveria deixar nosso pequeno reino; e foi isso que preservou nossa inocência e nossa felicidade. Les Espagnols ont eu une connaissance confuse de ce pays, ils l'ont appelé _Eldorado_ ; et un Anglais, nommé le chevalier Raleigh, en a même approché il y a environ cent années ; mais, comme nous sommes entourés de rochers inabordables et de précipices, nous avons toujours été jusqu'à présent à l'abri de la rapacité des nations de l'Europe, qui ont une fureur inconcevable pour les cailloux et pour la fange de notre terre, et qui, pour en avoir, nous tueraient tous jusqu'au dernier. The Spaniards had a confused knowledge of this country, they called it _Eldorado_; and an Englishman, named Chevalier Raleigh, even approached it about a hundred years ago; but as we are surrounded by unapproachable rocks and precipices, we have hitherto been sheltered from the rapacity of the nations of Europe, who have an inconceivable fury for pebbles and for the mud of our earth. and who, to have any, would kill us all to the last. Os espanhóis tinham um conhecimento confuso deste país, chamavam-no _Eldorado_; e um inglês, chamado Knight Raleigh, chegou a se aproximar dele há cerca de cem anos; mas, como estamos cercados por rochas e precipícios inacessíveis, sempre estivemos protegidos da voracidade das nações da Europa, que têm uma raiva inconcebível pelos seixos e pelo lamaçal de nossa terra. , mataria a todos nós até o fim. La conversation fut longue ; elle roula sur la forme du gouvernement, sur les mœurs, sur les femmes, sur les spectacles publics, sur les arts.

Enfin Candide, qui avait toujours du goût pour la métaphysique, fit demander par Cacambo si dans le pays il y avait une religion. Le vieillard rougit un peu. The old man blushed a little.

Comment donc ! dit-il, en pouvez-vous douter ? he said, can you doubt it? Est-ce que vous nous prenez pour des ingrats ? Do you take us for ungrateful? Cacambo demanda humblement quelle était la religion d'Eldorado. Le vieillard rougit encore : Est-ce qu'il peut y avoir deux religions ? The old man blushes again: Can there be two religions? O velho corou novamente: Pode haver duas religiões? dit-il.

Nous avons, je crois, la religion de tout le monde ; nous adorons Dieu du soir jusqu'au matin. We have, I believe, the religion of everyone; we worship God from evening to morning. Temos, acredito, a religião de todos; adoramos a Deus desde a tarde até a manhã. N'adorez vous qu'un seul Dieu ? Do you worship only one God? dit Cacambo, qui servait toujours d'interprète aux doutes de Candide. said Cacambo, who always interpreted Candide's doubts. Apparemment, dit le vieillard, qu'il n'y en a ni deux, ni trois, ni quatre. Apparently," says the old man, "there are neither two, nor three, nor four. Je vous avoue que les gens de votre monde font des questions bien singulières. I admit to you that people in your world make very special questions. Candide ne se lassait pas de faire interroger ce bon vieillard ; il voulut savoir comment on priait Dieu dans Eldorado.

Nous ne le prions point, dit le bon et respectable sage ; nous n'avons rien à lui demander, il nous a donné tout ce qu'il nous faut ; nous le remercions sans cesse. Candide eut la curiosité de voir des prêtres ; il fit demander où ils étaient. Cândido estava curioso para ver padres; perguntou onde eles estavam. Le bon vieillard sourit. Mes amis, dit-il, nous sommes tous prêtres ; le roi et tous les chefs de famille chantent des cantiques d'actions de grâces solennellement tous les matins, et cinq ou six mille musiciens les accompagnent.--Quoi ! vous n'avez point de moines qui enseignent, qui disputent, qui gouvernent, qui cabalent, et qui font brûler les gens qui ne sont pas de leur avis ? ¿no hay monjes que enseñan, que discuten, que gobiernan, que hacen cábalas y que queman a los que no están de acuerdo con ellos? você não tem monges que ensinam, que disputam, que governam, que cabalam e que queimam pessoas que não são de sua opinião? --Il faudrait que nous fussions fous, dit le vieillard ; nous sommes tous ici du même avis, et nous n'entendons pas ce que vous voulez dire avec vos moines. "We must be mad," said the old man; we are all here in agreement, and we do not hear what you mean with your monks. Candide à tous ces discours demeurait en extase, et disait en lui-même : Ceci est bien différent de la Vestphalie et du château de monsieur le baron : si notre ami Pangloss avait vu Eldorado, il n'aurait plus dit que le château de Thunder-ten-tronckh était ce qu'il y avait de mieux sur la terre ; il est certain qu'il faut voyager. If our friend Pangloss had seen Eldorado, he would no longer have said that Thunder-ten-tronckh's castle was the best thing on earth; it's certain that one must travel. Cândido em todos esses discursos ficou em êxtase, e disse a si mesmo: Isso é muito diferente de Vestfália e do castelo de Monsieur le Baron: se nosso amigo Pangloss tivesse visto Eldorado, ele teria dito apenas o castelo do Trovão. era o melhor da terra; é certo que é necessário viajar. Après cette longue conversation, le bon vieillard fit atteler un carrosse à six moutons, et donna douze de ses domestiques aux deux voyageurs pour les conduire à la cour. After this long conversation, the good old man had a carriage with six sheep harnessed, and gave twelve of his servants to the two travelers to drive them to the court. Depois dessa longa conversa, o bom velhinho mandou uma carruagem atrelada com seis ovelhas e entregou doze de seus servos aos dois viajantes para conduzi-los à corte.

Excusez-moi, leur dit-il, si mon âge me prive de l'honneur de vous accompagner. Excuse me, he tells them, if my age deprives me of the honor of accompanying you. Le roi vous recevra d'une manière dont vous ne serez pas mécontents, et vous pardonnerez sans doute aux usages du pays, s'il y en a quelques uns qui vous déplaisent. The king will receive you in a way that you will not be dissatisfied with, and you will doubtless forgive the customs of the country, if there are some that displease you. El rey os recibirá de una manera con la que no estaréis descontentos, y sin duda perdonaréis las costumbres del país, si hay alguna que os desagrade. O rei vai recebê-lo de uma maneira que não lhe desagradará, e você sem dúvida perdoará os costumes do país, se houver algum que o desagrade. Candide et Cacambo montent en carrosse ; les six moutons volaient, et en moins de quatre heures on arriva au palais du roi, situé à un bout de la capitale. Candide and Cacambo ride in coach; the six sheep flew, and in less than four hours they arrived at the King's palace, situated at one end of the capital. Cândido e Cacambo entram na carruagem; as seis ovelhas voavam e em menos de quatro horas chegaram ao palácio do rei, situado numa extremidade da capital.

Le portail était de deux cent vingt pieds de haut, et de cent de large ; il est impossible d'exprimer quelle en était la matière. The portal was two hundred and twenty feet high, and one hundred wide; it is impossible to express what the matter was. O portão tinha duzentos e vinte pés de altura e cem de largura; é impossível expressar qual era o assunto. On voit assez quelle supériorité prodigieuse elle devait avoir sur ces cailloux et sur ce sable que nous nommons or et pierreries. It is easy to see what prodigious superiority it must have over these pebbles and sand which we call gold and precious stones. É fácil ver que prodigiosa superioridade deve ter tido sobre aqueles seixos e aquela areia que chamamos de ouro e pedras preciosas. Vingt belles filles de la garde reçurent Candide et Cacambo à la descente du carrosse, les conduisirent aux bains, les vêtirent de robes d'un tissu de duvet de colibri ; après quoi les grands officiers et les grandes officières de la couronne les menèrent à l'appartement de sa majesté au milieu de deux files, chacune de mille musiciens, selon l'usage ordinaire. Twenty beautiful girls of the guard received Candide and Cacambo as they disembarked from the carriage, led them to the baths, and dressed them in robes of hummingbird down; after which the great officers and officials of the crown led them to his majesty's apartment in the middle of two lines, each of a thousand musicians, according to ordinary custom. Quand ils approchèrent de la salle du trône, Cacambo demanda à un grand officier comment il fallait s'y prendre pour saluer sa majesté : si on se jetait à genoux ou ventre à terre ; si on mettait les mains sur la tête ou sur le derrière ; si on léchait la poussière de la salle : en un mot, quelle était la cérémonie. When they approached the throne room, Cacambo asked a great officer how he should go to salute his majesty: if one fell on one's knees or belly on the ground; if you put your hands on your head or your back; if we licked the dust of the room: in a word, what was the ceremony. Quando se aproximaram da sala do trono, Cacambo perguntou a um grande oficial como se deveria saudar sua majestade: se caísse de joelhos ou de barriga no chão; se você colocar as mãos na cabeça ou no traseiro; se lambesse a poeira do quarto: em uma palavra, qual foi a cerimônia. L'usage, dit le grand-officier, est d'embrasser le roi et de le baiser des deux côtés. The custom," says the grand officer, "is to embrace the king and kiss him on both sides. Candide et Cacambo sautèrent au cou de sa majesté, qui les reçut avec toute la grâce imaginable, et qui les pria poliment à souper. Candide and Cacambo jumped at the neck of his majesty, who received them with every imaginable grace, and politely asked them to supper. Cândido e Cacambo saltaram ao pescoço de Sua Majestade, que os recebeu com toda a graça imaginável, e educadamente os convidou para jantar.

En attendant, on leur fit voir la ville, les édifices publics élevés jusqu'aux nues, les marchés ornés de mille colonnes, les fontaines d'eau pure, les fontaines d'eau rose, celles de liqueurs de cannes de sucre qui coulaient continuellement dans de grandes places pavées d'une espèce de pierreries qui répandaient une odeur semblable à celle du girofle et de la cannelle. In the meantime, they were shown around the city, the public buildings raised to the clouds, the markets adorned with a thousand columns, the fountains of pure water, the fountains of pink water, the fountains of sugarcane liquors that flowed continuously in large squares paved with a kind of jewels that spread a scent similar to that of cloves and cinnamon. Enquanto isso, mostrava-se a cidade, os prédios públicos erguidos até as nuvens, os mercados adornados com mil colunas, as fontes de água pura, as fontes de água rósea, as de cachaça que fluía continuamente em grandes praças. pavimentada com uma espécie de pedras preciosas que exalavam um odor semelhante ao de cravo e canela. Candide demanda à voir la cour de justice, le parlement ; on lui dit qu'il n'y en avait point, et qu'on ne plaidait jamais. Candide asked to see the court of justice, the parliament; they told him that there was none, and that they never pleaded. Cándido pidió ver el tribunal de justicia, el parlamento; le dijeron que no había ninguno y que el caso nunca se había discutido. Cândido pediu para ver o tribunal de justiça, o parlamento; eles lhe disseram que não havia nenhum, e que ninguém nunca implorou. Il s'informa s'il y avait des prisons, et on lui dit que non. Ce qui le surprit davantage, et qui lui fit le plus de plaisir, ce fut le palais des sciences, dans lequel il vit une galerie de deux mille pas, toute pleine d'instruments de mathématiques et de physique. What surprised him most, and which pleased him most, was the palace of sciences, in which he saw a gallery of two thousand paces full of instruments of mathematics and physics. Après avoir parcouru toute l'après-dînée à peu près la millième partie de la ville, on les ramena chez le roi. After having gone through the whole of the afternoon about a thousandth part of the city, they were brought back to the king. Depois de ter percorrido toda a tarde cerca de uma milésima parte da cidade, eles foram levados de volta ao rei. Candide se mit à table entre sa majesté, son valet Cacambo, et plusieurs dames. Candide sat at table between his majesty, his valet Cacambo, and several ladies. Jamais on ne fit meilleure chère, et jamais on n'eut plus d'esprit à souper qu'en eut sa majesté. Never was there a better price, and never was there more reason to sup with his majesty. Cacambo expliquait les bons mots du roi à Candide, et quoique traduits, ils paraissaient toujours des bons mots. Cacambo explained the good words of the king to Candide, and although translated, they always seemed good words. Cacambo explicava as piadas do rei a Cândido e, embora traduzidas, ainda pareciam piadas. De tout ce qui étonnait Candide, ce n'était pas ce qui l'étonna le moins. Of all that surprised Candide, it was not what surprised him the least. De tudo o que surpreendeu Cândido, não foi isso que o surpreendeu menos. Ils passèrent un mois dans cet hospice.

Candide ne cessait de dire à Cacambo : Il est vrai, mon ami, encore une fois, que le château où je suis né ne vaut pas le pays où nous sommes ; mais enfin mademoiselle Cunégonde n'y est pas, et vous avez sans doute quelque maîtresse en Europe. Candide kept saying to Cacambo: It is true, my friend, once again, that the castle where I was born is not worth the country where we are; but, in short, Mademoiselle Cunegonde is not there, and you doubtless have some mistress in Europe. Si nous restons ici, nous n'y serons que comme les autres ; au lieu que si nous retournons dans notre monde, seulement avec douze moutons chargés de cailloux d'Eldorado, nous serons plus riches que tous les rois ensemble, nous n'aurons plus d'inquisiteurs à craindre, et nous pourrons aisément reprendre mademoiselle Cunégonde. Se ficarmos aqui, só estaremos lá como os outros; ao passo que se voltarmos ao nosso mundo, apenas com doze ovelhas carregadas de pedras do Eldorado, seremos mais ricos do que todos os reis juntos, não teremos mais inquisidores a temer e poderemos facilmente recapturar a senhorita Cunegundes. Ce discours plut à Cacambo ; on aime tant à courir, à se faire valoir chez les siens, à faire parade de ce qu'on a vu dans ses voyages, que les deux heureux résolurent de ne plus l'être, et de demander leur congé à sa majesté. Este discurso agradou a Cacambo; gosta-se tanto de correr, de se exibir entre a própria gente, de exibir o que se viu em suas viagens, que os dois sortudos resolveram não sê-lo mais e pedir a sua majestade que se fosse. Vous faites une sottise, leur dit le roi : je sais bien que mon pays est peu de chose ; mais, quand on est passablement quelque part, il faut y rester. You are foolish, "said the king to them;" I know very well that my country is little; but, when you are quite somewhere, you have to stay there. Vocês estão fazendo uma estupidez, disse-lhes o rei: Eu sei muito bem que meu país é uma coisa pequena; mas, quando se está razoavelmente em algum lugar, deve-se permanecer lá.

Je n'ai pas assurément le droit de retenir des étrangers ; c'est une tyrannie qui n'est ni dans nos mœurs ni dans nos lois ; tous les hommes sont libres ; partez quand vous voudrez, mais la sortie est bien difficile. I certainly do not have the right to detain strangers; it is a tyranny which is neither in our morals nor in our laws; all men are free; leave when you want, but the exit is difficult. Certamente não tenho o direito de deter estranhos; é uma tirania que não está nem em nossa moral nem em nossas leis; todos os homens são livres; sair quando quiser, mas a saída é muito difícil. Il est impossible de remonter la rivière rapide sur laquelle vous êtes arrivés par miracle, et qui court sous des voûtes de rochers.

Les montagnes qui entourent tout mon royaume ont dix mille pieds de hauteur, et sont droites comme des murailles : elles occupent chacune en largeur un espace de plus de dix lieues ; on ne peut en descendre que par des précipices. As montanhas que cercam todo o meu reino têm dez mil pés de altura e são retas como muros: cada uma delas ocupa uma largura de mais de dez léguas; só se pode descer dela por precipícios. Cependant, puisque vous voulez absolument partir, je vais donner ordre aux intendants des machines d'en faire une qui puisse vous transporter commodément. No entanto, já que você quer absolutamente ir embora, vou mandar os comissários das máquinas fazerem uma que possa transportá-lo confortavelmente. Quand on vous aura conduits au revers des montagnes, personne ne pourra vous accompagner ; car mes sujets ont fait vœu de ne jamais sortir de leur enceinte, et ils sont trop sages pour rompre leur vœu. Quando você for levado para a parte de trás das montanhas, ninguém poderá acompanhá-lo; pois meus súditos juraram nunca deixar seu recinto, e eles são sábios demais para quebrar seu voto. Demandez-moi d'ailleurs tout ce qu'il vous plaira. Ask me anything you like. Nous ne demandons à votre majesté, dit Cacambo, que quelques moutons chargés de vivres, de cailloux, et de la boue du pays. Só pedimos a Vossa Majestade, disse Cacambo, algumas ovelhas carregadas de mantimentos, seixos e lama do país. Le roi rit : Je ne conçois pas, dit-il, quel goût vos gens d'Europe ont pour notre boue jaune : mais emportez-en tant que vous voudrez, et grand bien vous fasse. The king laughs: "I do not understand," said he, "what taste your people of Europe have for our yellow mud: but take them as you please, and do yourself well. O rei ri: não entendo, disse ele, que gosto tem o seu povo da Europa por nossa lama amarela: mas pegue o quanto quiser, e muito bem lhe fará. Il donna l'ordre sur-le-champ à ses ingénieurs de faire une machine pour guinder ces deux hommes extraordinaires hors du royaume. Inmediatamente ordenó a sus ingenieros que fabricaran una máquina para guiar a estos dos hombres extraordinarios fuera del reino. Ele imediatamente ordenou que seus engenheiros fizessem uma máquina para tirar esses dois homens extraordinários do reino. Trois mille bons physiciens y travaillèrent ; elle fut prête au bout de quinze jours, et ne coûta pas plus de vingt millions de livres sterling, monnaie du pays. Three thousand good physicists worked there; it was ready after a fortnight, and cost not more than twenty millions of pounds sterling, the country's currency. On mit sur la machine Candide et Cacambo ; il y avait deux grands moutons rouges sellés et bridés pour leur servir de monture quand ils auraient franchi les montagnes, vingt moutons de bât chargés de vivres, trente qui portaient des présents de ce que le pays a de plus curieux, et cinquante chargés d'or, de pierreries, et de diamants. Cândido e Cacambo foram colocados na máquina; havia duas grandes ovelhas vermelhas seladas e rédeas para servirem de montaria para eles quando tivessem atravessado as montanhas, vinte ovelhas carregadas de provisões, trinta que carregavam os presentes mais curiosos do país e cinquenta carregadas de ouro, pedras preciosas e diamantes. Le roi embrassa tendrement les deux vagabonds.

Ce fut un beau spectacle que leur départ, et la manière ingénieuse dont ils furent hissés eux et leurs moutons au haut des montagnes. Foi uma bela visão a partida deles e a maneira engenhosa como eles e suas ovelhas foram içados ao topo das montanhas.

Les physiciens prirent congé d'eux après les avoir mis en sûreté, et Candide n'eut plus d'autre désir et d'autre objet que d'aller présenter ses moutons à mademoiselle Cunégonde. The physicists took leave of them after having put them in safety, and Candide had no other desire and no other object than to present his sheep to Mademoiselle Cunegonde. Os físicos despediram-se deles depois de os pôr em segurança, e Cândido não tinha outro desejo nem outro objecto senão apresentar as suas ovelhas à senhorita Cunegundes. Nous avons, dit-il, de quoi payer le gouverneur de Buenos-Ayres, si mademoiselle Cunégonde peut être mise à prix. We have, he says, enough to pay the governor of Buenos Ayres, if Mademoiselle Cunegonde can be priced. Temos, disse ele, o suficiente para pagar ao governador de Buenos Aires, se a senhorita Cunegundes puder ser recompensada. Marchons vers la Cayenne, embarquons-nous, et nous verrons ensuite quel royaume nous pourrons acheter.