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Candide by Voltaire Part 2 (Read by Bernard), Candide: Chapitre 16

Candide: Chapitre 16

Ce qui advint aux deux voyageurs avec deux filles, deux singes, et les sauvages nommés Oreillons.

Candide et son valet furent au-delà des barrières, et personne ne savait encore dans le camp la mort du jésuite allemand.

Le vigilant Cacambo avait eu soin de remplir sa valise de pain, de chocolat, de jambon, de fruits, et de quelques mesures de vin.

Ils s'enfoncèrent avec leurs chevaux andalous dans un pays inconnu où ils ne découvrirent aucune route. Enfin une belle prairie entrecoupée de ruisseaux se présenta devant eux. Nos deux voyageurs font repaître leurs montures. Cacambo propose à son maître de manger, et lui en donne l'exemple. Comment veux-tu, disait Candide, que je mange du jambon, quand j'ai tué le fils de monsieur le baron, et que je me vois condamné à ne revoir la belle Cunégonde de ma vie ? à quoi me servira de prolonger mes misérables jours, puisque je dois les traîner loin d'elle dans les remords et dans le désespoir ?

et que dira le Journal de Trévoux[1] ? [1] L'ouvrage cité sous le titre de _Journal de Trévoux_, du nom de la ville où il s'imprima, est intitulé : _Mémoires pour servir à l'histoire des sciences et des beaux-arts_.

Ce titre a subi plusieurs changements. En parlant ainsi, il ne laissa pas de manger.

Le soleil se couchait. Les deux égarés entendirent quelques petits cris qui paraissaient poussés par des femmes. Ils ne savaient si ces cris étaient de douleur ou de joie ; mais ils se levèrent précipitamment avec cette inquiétude et cette alarme que tout inspire dans un pays inconnu.

Ces clameurs partaient de deux filles toutes nues qui couraient légèrement au bord de la prairie, tandis que deux singes les suivaient en leur mordant les fesses. Candide fut touché de pitié ; il avait appris à tirer chez les Bulgares, et il aurait abattu une noisette dans un buisson sans toucher aux feuilles. Il prend son fusil espagnol à deux coups, tire, et tue les deux singes. Dieu soit loué, mon cher Cacambo ! j'ai délivré d'un grand péril ces deux pauvres créatures : si j'ai commis un péché en tuant un inquisiteur et un jésuite, je l'ai bien réparé en sauvant la vie à deux filles.

Ce sont peut-être deux demoiselles de condition, et cette aventure nous peut procurer de très grands avantages dans le pays. Il allait continuer, mais sa langue devint percluse quand il vit ces deux filles embrasser tendrement les deux singes, fondre en larmes sur leurs corps, et remplir l'air des cris les plus douloureux.

Je ne m'attendais pas à tant de bonté d'âme, dit-il enfin à Cacambo ; lequel lui répliqua : Vous avez fait là un beau chef d'œuvre, mon maître ; vous avez tué les deux amants de ces demoiselles. Leurs amants ! serait-il possible ?

vous vous moquez de moi, Cacambo ; le moyen de vous croire ? Mon cher maître, repartit Cacambo, vous êtes toujours étonné de tout ; pourquoi trouvez-vous si étrange que dans quelques pays il y ait des singes qui obtiennent les bonnes grâces des dames ? ils sont des quarts d'homme, comme je suis un quart d'Espagnol. Hélas ! reprit Candide, je me souviens d'avoir entendu dire à maître Pangloss qu'autrefois pareils accidents étaient arrivés, et que ces mélanges avaient produit des égypans, des faunes, des satyres ; que plusieurs grands personnages de l'antiquité en avaient vu ; mais je prenais cela pour des fables.

Vous devez être convaincu à présent, dit Cacambo, que c'est une vérité, et vous voyez comment en usent les personnes qui n'ont pas reçu une certaine éducation ; tout ce que je crains, c'est que ces dames ne nous fassent quelque méchante affaire. Ces réflexions solides engagèrent Candide à quitter la prairie, et à s'enfoncer dans un bois.

Il y soupa avec Cacambo ; et tous deux, après avoir maudit l'inquisiteur de Portugal, le gouverneur de Buénos-Ayres, et le baron, s'endormirent sur de la mousse.

A leur réveil, ils sentirent qu'ils ne pouvaient remuer ; la raison en était que pendant la nuit les Oreillons, habitants du pays, à qui les deux dames les avaient dénoncés, les avaient garrottés avec des cordes d'écorces d'arbre. Ils étaient entourés d'une cinquantaine d'Oreillons tout nus, armés de flèches, de massues, et de haches de caillou : les uns fesaient bouillir une grande chaudière ; les autres préparaient des broches, et tous criaient : C'est un jésuite, c'est un jésuite !

nous serons vengés, et nous ferons bonne chère ; mangeons du jésuite, mangeons du jésuite !

Je vous l'avais bien dit, mon cher maître, s'écria tristement Cacambo, que ces deux filles nous joueraient d'un mauvais tour.

Candide apercevant la chaudière et les broches s'écria : Nous allons certainement être rôtis ou bouillis. Ah ! que dirait maître Pangloss, s'il voyait comme la pure nature est faite ? Tout est bien ; soit, mais j'avoue qu'il est bien cruel, d'avoir perdu mademoiselle Cunégonde, et d'être mis à la broche par des Oreillons. Cacambo ne perdait jamais la tête. Ne désespérez de rien, dit-il au désolé Candide ; j'entends un peu le jargon de ces peuples, je vais leur parler.

Ne manquez pas, dit Candide, de leur représenter quelle est l'inhumanité affreuse de faire cuire des hommes, et combien cela est peu chrétien. Messieurs, dit Cacambo, vous comptez donc manger aujourd'hui un jésuite ?

c'est très bien fait ; rien n'est plus juste que de traiter ainsi ses ennemis. En effet le droit naturel nous enseigne à tuer notre prochain, et c'est ainsi qu'on en agit dans toute la terre.

Si nous n'usons pas du droit de le manger, c'est que nous avons d'ailleurs de quoi faire bonne chère ; mais vous n'avez pas les mêmes ressources que nous : certainement il vaut mieux manger ses ennemis que d'abandonner aux corbeaux et aux corneilles le fruit de sa victoire. Mais, messieurs, vous ne voudriez pas manger vos amis. Vous croyez aller mettre un jésuite en broche, et c'est votre défenseur, c'est l'ennemi de vos ennemis que vous allez rôtir.

Pour moi, je suis né dans votre pays ; monsieur que vous voyez est mon maître, et bien loin d'être jésuite, il vient de tuer un jésuite, il en porte les dépouilles ; voilà le sujet de votre méprise. Pour vérifier ce que je vous dis, prenez sa robe, portez-la à la première barrière du royaume de los padres ; informez-vous si mon maître n'a pas tué un officier jésuite. Il vous faudra peu de temps ; vous pourrez toujours nous manger, si vous trouvez que je vous ai menti.

Mais, si je vous ai dit la vérité, vous connaissez trop les principes du droit public, les mœurs, et les lois, pour ne nous pas faire grâce. Les Oreillons trouvèrent ce discours très raisonnable ; ils députèrent deux notables pour aller en diligence s'informer de la vérité ; les deux députés s'acquittèrent de leur commission en gens d'esprit, et revinrent bientôt apporter de bonnes nouvelles.

Les Oreillons délièrent leurs deux prisonniers, leur firent toutes sortes de civilités, leur offrirent des filles, leur donnèrent des rafraîchissements, et les reconduisirent jusqu'aux confins de leurs états, en criant avec allégresse : Il n'est point jésuite, il n'est point jésuite ! Candide ne se lassait point d'admirer le sujet de sa délivrance.

Quel peuple ! disait-il, quels hommes ! quelles mœurs ! si je n'avais pas eu le bonheur de donner un grand coup d'épée au travers du corps du frère de mademoiselle Cunégonde, j'étais mangé sans rémission.

Mais, après tout, la pure nature est bonne, puisque ces gens-ci, au lieu de me manger, m'ont fait mille honnêtetés, dès qu'ils ont su que je n'étais pas jésuite.

Candide: Chapitre 16 Candide: Chapter 16 Cándido: Capítulo 16

Ce qui advint aux deux voyageurs avec deux filles, deux singes, et les sauvages nommés Oreillons. This happened to the two travelers with two girls, two monkeys, and the savages named Mumps. O que aconteceu com os dois viajantes com duas garotas, dois macacos e os selvagens chamados Oreillons.

Candide et son valet furent au-delà des barrières, et personne ne savait encore dans le camp la mort du jésuite allemand. Cândido e seu criado estavam além das barreiras, e ninguém no campo ainda sabia da morte do jesuíta alemão.

Le vigilant Cacambo avait eu soin de remplir sa valise de pain, de chocolat, de jambon, de fruits, et de quelques mesures de vin.

Ils s’enfoncèrent avec leurs chevaux andalous dans un pays inconnu où ils ne découvrirent aucune route. They plunged with their Andalusian horses into an unknown country where they found no road. Enfin une belle prairie entrecoupée de ruisseaux se présenta devant eux. Finally a beautiful meadow interspersed with streams presented itself in front of them. Nos deux voyageurs font repaître leurs montures. Our two travelers feed their mounts. Nossos dois viajantes alimentam suas montarias. Cacambo propose à son maître de manger, et lui en donne l’exemple. Cacambo offers his master to eat, and gives him the example. Comment veux-tu, disait Candide, que je mange du jambon, quand j’ai tué le fils de monsieur le baron, et que je me vois condamné à ne revoir la belle Cunégonde de ma vie ? à quoi me servira de prolonger mes misérables jours, puisque je dois les traîner loin d’elle dans les remords et dans le désespoir ? what good will it do me to prolong my miserable days, since I must drag them away from her in remorse and despair? De que me adianta prolongar meus dias miseráveis, já que devo arrastá-los para longe dela com remorso e desespero?

et que dira le Journal de Trévoux[1] ? and what will the Journal de Trévoux[1] say? [1] L’ouvrage cité sous le titre de _Journal de Trévoux_, du nom de la ville où il s’imprima, est intitulé : _Mémoires pour servir à l’histoire des sciences et des beaux-arts_. [1] The work quoted under the title of _Journal de Trévoux_, from the name of the city where it was printed, is entitled: _Mémoires pour servi à l'histoire des sciences et des beaux-arts_.

Ce titre a subi plusieurs changements. This title has undergone several changes. En parlant ainsi, il ne laissa pas de manger. In speaking thus, he did not fail to eat.

Le soleil se couchait. The sun was setting. Les deux égarés entendirent quelques petits cris qui paraissaient poussés par des femmes. The two strays heard a few small cries which seemed to be uttered by women. Os dois desgarrados ouviram alguns pequenos gritos que pareciam ser proferidos por mulheres. Ils ne savaient si ces cris étaient de douleur ou de joie ; mais ils se levèrent précipitamment avec cette inquiétude et cette alarme que tout inspire dans un pays inconnu. They did not know whether these cries were of pain or joy; but they rose hastily with that anxiety and alarm that everything inspires in an unknown country.

Ces clameurs partaient de deux filles toutes nues qui couraient légèrement au bord de la prairie, tandis que deux singes les suivaient en leur mordant les fesses. The clamor rang from two naked girls running lightly to the edge of the meadow, while two monkeys followed them, biting their buttocks. Esses gritos vieram de duas garotas nuas correndo levemente pela beira do prado, enquanto dois macacos as seguiam, mordendo suas nádegas. Candide fut touché de pitié ; il avait appris à tirer chez les Bulgares, et il aurait abattu une noisette dans un buisson sans toucher aux feuilles. Candide was touched with pity; he had learned to shoot at the Bulgarians, and he would have cut down a nut in a bush without touching the leaves. Cândido sentiu pena; aprendera a atirar com os búlgaros e teria cortado uma noz num arbusto sem tocar nas folhas. Il prend son fusil espagnol à deux coups, tire, et tue les deux singes. He takes his Spanish double-barreled gun, shoots, and kills the two monkeys. Dieu soit loué, mon cher Cacambo ! God be praised, my dear Cacambo! Deus seja louvado, meu querido Cacambo! j’ai délivré d’un grand péril ces deux pauvres créatures : si j’ai commis un péché en tuant un inquisiteur et un jésuite, je l’ai bien réparé en sauvant la vie à deux filles. I delivered these two poor creatures from a great peril: if I committed a sin by killing an Inquisitor and a Jesuit, I made amends for it by saving the lives of two girls.

Ce sont peut-être deux demoiselles de condition, et cette aventure nous peut procurer de très grands avantages dans le pays. They may be two damsels of condition, and this adventure can bring us great advantages in the country. São talvez duas moças de condição, e esta aventura pode nos trazer grandes vantagens no país. Il allait continuer, mais sa langue devint percluse quand il vit ces deux filles embrasser tendrement les deux singes, fondre en larmes sur leurs corps, et remplir l’air des cris les plus douloureux. He was going to go on, but his tongue became lame when he saw these two girls tenderly kissing the two monkeys, bursting into tears on their bodies, and filling the air with the most painful cries. Ele ia continuar, mas sua língua ficou aleijada quando viu essas duas meninas beijando os dois macacos com ternura, explodindo em lágrimas em seus corpos e enchendo o ar com os gritos mais dolorosos.

Je ne m’attendais pas à tant de bonté d’âme, dit-il enfin à Cacambo ; lequel lui répliqua : Vous avez fait là un beau chef d’œuvre, mon maître ; vous avez tué les deux amants de ces demoiselles. I did not expect so much kindness, he said at last to Cacambo; which he replied: "You have made a beautiful masterpiece, my master; you killed the two lovers of these young ladies. Leurs amants ! Their lovers! serait-il possible ?

vous vous moquez de moi, Cacambo ; le moyen de vous croire ? you make fun of me, Cacambo; the way to believe you? Mon cher maître, repartit Cacambo, vous êtes toujours étonné de tout ; pourquoi trouvez-vous si étrange que dans quelques pays il y ait des singes qui obtiennent les bonnes grâces des dames ? ils sont des quarts d’homme, comme je suis un quart d’Espagnol. they are men's quarters, as I am a quarter of a Spaniard. eles são um quarto de homem, como eu sou um quarto de espanhol. Hélas ! reprit Candide, je me souviens d’avoir entendu dire à maître Pangloss qu’autrefois pareils accidents étaient arrivés, et que ces mélanges avaient produit des égypans, des faunes, des satyres ; que plusieurs grands personnages de l’antiquité en avaient vu ; mais je prenais cela pour des fables. respondeu Cândido. que vários grandes personagens da antiguidade o viram; mas eu levei isso para fábulas.

Vous devez être convaincu à présent, dit Cacambo, que c’est une vérité, et vous voyez comment en usent les personnes qui n’ont pas reçu une certaine éducation ; tout ce que je crains, c’est que ces dames ne nous fassent quelque méchante affaire. You must be convinced now, says Cacambo, that it is a truth, and you see how it is used by people who have not received a certain education; all I fear is that these ladies do not do us any bad business. Ya debes estar convencido -dijo Cacambo- de que esto es cierto, y ya ves cómo lo utilizan las personas que no han recibido una cierta educación; lo único que temo es que estas señoras nos hagan algún feo. Ces réflexions solides engagèrent Candide à quitter la prairie, et à s’enfoncer dans un bois. These solid reflections prompted Candide to leave the meadow and head into the woods. Estas sólidas reflexiones impulsaron a Cándido a abandonar el prado y adentrarse en un bosque. Esses reflexos sólidos induziram Cândido a deixar o prado e entrar em um bosque.

Il y soupa avec Cacambo ; et tous deux, après avoir maudit l’inquisiteur de Portugal, le gouverneur de Buénos-Ayres, et le baron, s’endormirent sur de la mousse. He supped there with Cacambo; and both, having cursed the inquisitor of Portugal, the governor of Buenos-Ayres, and the baron, fell asleep on moss. Ele jantou lá com Cacambo; e ambos, depois de amaldiçoar o inquisidor de Portugal, o governador de Buenos-Ayres e o barão, adormeceram sobre o musgo.

A leur réveil, ils sentirent qu’ils ne pouvaient remuer ; la raison en était que pendant la nuit les Oreillons, habitants du pays, à qui les deux dames les avaient dénoncés, les avaient garrottés avec des cordes d’écorces d’arbre. When they awoke, they felt they could not stir; the reason was that during the night the local Mumps, to whom the two ladies had denounced them, had garrotted them with ropes of tree bark. Quando acordaram, sentiram que não podiam se mexer; a razão foi que durante a noite os Oreillons, habitantes do país, a quem as duas senhoras os denunciaram, os amarraram com cordas de casca de árvore. Ils étaient entourés d’une cinquantaine d’Oreillons tout nus, armés de flèches, de massues, et de haches de caillou : les uns fesaient bouillir une grande chaudière ; les autres préparaient des broches, et tous criaient : C’est un jésuite, c’est un jésuite ! Eles estavam cercados por cerca de cinquenta Oreillons nus, armados com flechas, porretes e machados de seixo: alguns estavam fervendo um grande caldeirão; os outros preparavam broches e todos gritavam: é jesuíta, é jesuíta!

nous serons vengés, et nous ferons bonne chère ; mangeons du jésuite, mangeons du jésuite ! we'll be avenged, and we'll eat good food; let's eat Jesuit, let's eat Jesuit! seremos vingados e aplaudiremos; vamos comer jesuíta, vamos comer jesuíta!

Je vous l’avais bien dit, mon cher maître, s’écria tristement Cacambo, que ces deux filles nous joueraient d’un mauvais tour. I told you, my dear master," exclaimed Cacambo sadly, "that these two girls would play a nasty trick on us. Eu lhe disse, meu caro mestre, exclamou Cacambo com tristeza, que essas duas moças nos pregariam uma má peça.

Candide apercevant la chaudière et les broches s’écria : Nous allons certainement être rôtis ou bouillis. Ah ! que dirait maître Pangloss, s’il voyait comme la pure nature est faite ? what would Master Pangloss say, if he saw how pure nature is made? Tout est bien ; soit, mais j’avoue qu’il est bien cruel, d’avoir perdu mademoiselle Cunégonde, et d’être mis à la broche par des Oreillons. All is well ; but I must confess that it is very cruel to have lost Mademoiselle Cunegonde, and to be put on the spit by Millons. Tudo está bem ; que assim seja, mas confesso que é muito cruel ter perdido Mademoiselle Cunegundes e ser espetado por Oreillons. Cacambo ne perdait jamais la tête. Cacambo never lost his head. Ne désespérez de rien, dit-il au désolé Candide ; j’entends un peu le jargon de ces peuples, je vais leur parler. Don't despair of anything," he said to the desolate Candide, "I understand a little of the jargon of these peoples, and I'm going to speak to them.

Ne manquez pas, dit Candide, de leur représenter quelle est l’inhumanité affreuse de faire cuire des hommes, et combien cela est peu chrétien. Don't fail," says Candide, "to show them what an awful inhumanity it is to cook men, and how unchristian it is. Não falhe, diz Cândido, em mostrar-lhes que terrível desumanidade é cozinhar homens, e quão anticristão isso é. Messieurs, dit Cacambo, vous comptez donc manger aujourd’hui un jésuite ? Gentlemen, "said Cacambo," do you intend to eat a Jesuit today?

c’est très bien fait ; rien n’est plus juste que de traiter ainsi ses ennemis. it's very well done; there's nothing fairer than treating your enemies this way. En effet le droit naturel nous enseigne à tuer notre prochain, et c’est ainsi qu’on en agit dans toute la terre. Indeed, natural law teaches us to kill our neighbor, and this is how it is done all over the world.

Si nous n’usons pas du droit de le manger, c’est que nous avons d’ailleurs de quoi faire bonne chère ; mais vous n’avez pas les mêmes ressources que nous : certainement il vaut mieux manger ses ennemis que d’abandonner aux corbeaux et aux corneilles le fruit de sa victoire. If we do not use the right to eat it, it is because we have good food; but you do not have the same resources as we do: it is certainly better to eat one's enemies than to leave crows and crows the fruit of his victory. Se não usamos o direito de comê-lo, é porque temos o suficiente para comer bem; mas você não tem os mesmos recursos que nós: certamente é melhor comer seus inimigos do que entregar aos corvos e corvos o fruto de sua vitória. Mais, messieurs, vous ne voudriez pas manger vos amis. But, gentlemen, you wouldn't want to eat your friends. Vous croyez aller mettre un jésuite en broche, et c’est votre défenseur, c’est l’ennemi de vos ennemis que vous allez rôtir. You think you're going to put a Jesuit on a spit, and it's your defender, the enemy of your enemies, that you're going to roast. Você pensa que vai colocar um jesuíta no espeto, e é o seu defensor, é o inimigo dos seus inimigos que você vai assar.

Pour moi, je suis né dans votre pays ; monsieur que vous voyez est mon maître, et bien loin d’être jésuite, il vient de tuer un jésuite, il en porte les dépouilles ; voilà le sujet de votre méprise. As for me, I was born in your country; the gentleman you see is my master, and far from being a Jesuit, he has just killed a Jesuit, and is carrying his remains; this is the subject of your misunderstanding. Pour vérifier ce que je vous dis, prenez sa robe, portez-la à la première barrière du royaume de los padres ; informez-vous si mon maître n’a pas tué un officier jésuite. To verify what I'm telling you, take his dress, take it to the first barrier in the kingdom of los padres; find out if my master didn't kill a Jesuit officer. Il vous faudra peu de temps ; vous pourrez toujours nous manger, si vous trouvez que je vous ai menti. You will need little time; you will always be able to eat us, if you find that I lied to you. Levará pouco tempo; você sempre pode nos comer, se descobrir que eu menti para você.

Mais, si je vous ai dit la vérité, vous connaissez trop les principes du droit public, les mœurs, et les lois, pour ne nous pas faire grâce. But if I have told you the truth, you know too well the principles of public law, manners, and laws, so as not to give us grace. Mas, se eu lhe disse a verdade, você conhece muito bem os princípios do direito público, costumes e leis, para não nos perdoar. Les Oreillons trouvèrent ce discours très raisonnable ; ils députèrent deux notables pour aller en diligence s’informer de la vérité ; les deux députés s’acquittèrent de leur commission en gens d’esprit, et revinrent bientôt apporter de bonnes nouvelles. The Oreillons found this speech very reasonable; they deputed two notables to go diligently to inquire into the truth; the two deputies discharged their commission in men of mind, and returned soon to bring good news. Os Oreillons acharam esse discurso muito razoável; eles designaram dois notáveis para irem diligentemente para investigar a verdade; os dois deputados absolveram-se de sua comissão como pessoas de inteligência, e logo voltaram com boas notícias.

Les Oreillons délièrent leurs deux prisonniers, leur firent toutes sortes de civilités, leur offrirent des filles, leur donnèrent des rafraîchissements, et les reconduisirent jusqu’aux confins de leurs états, en criant avec allégresse : Il n’est point jésuite, il n’est point jésuite ! The Oreillons untied their two prisoners, did them every kind of courtesy, offered them girls, gave them refreshments, and led them back to the confines of their states, shouting with glee: He's not a Jesuit, he's not a Jesuit! Candide ne se lassait point d’admirer le sujet de sa délivrance. Candide never tired of admiring the subject of his deliverance. Cândido não se cansava de admirar o tema de sua libertação.

Quel peuple ! disait-il, quels hommes ! he would say, what men! quelles mœurs ! what morals! si je n’avais pas eu le bonheur de donner un grand coup d’épée au travers du corps du frère de mademoiselle Cunégonde, j’étais mangé sans rémission. if I hadn't had the good fortune to thrust my sword through the body of Mademoiselle Cunégonde's brother, I'd have been eaten without remission.

Mais, après tout, la pure nature est bonne, puisque ces gens-ci, au lieu de me manger, m’ont fait mille honnêtetés, dès qu’ils ont su que je n’étais pas jésuite. But, after all, pure nature is good, since these people, instead of eating me, did me a thousand kindnesses as soon as they found out I wasn't a Jesuit. Pero, al fin y al cabo, la naturaleza pura es buena, ya que esta gente, en lugar de comerme, me hizo mil bondades en cuanto se enteró de que no era jesuita. Mas, afinal, a natureza pura é boa, pois essas pessoas, em vez de me comer, mostraram-me mil honestidades assim que souberam que eu não era jesuíta.