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l'histoire de France, Le siècle des lumières – Paris et la France sous Louis XV

Le siècle des lumières – Paris et la France sous Louis XV

Philippe a vingt ans.

Il est chevalier et fait partie de ces nobles privilégiés que Louis XIV a accueillis à sa cour. Comme des milliers d'autres courtisans, il a appris avec consternation et angoisse la mort du vieux roi. Chacun à Versailles se demande ce que le duc d'Orléans, neveu de Louis XIV – qui sera régent – fera de tous ceux à qui le défunt roi avait accordé sa faveur…

Le matin même, grande surprise : Philippe a reçu l'ordre de sauter à cheval et de partir pour l'étranger annoncer l'avènement de Louis XV. Pas une minute à perdre ! A peine le temps de jeter dans un sac quelques vêtements et le voilà déjà traversant Paris.

Il fait beau et Philippe observe la capitale avec plus d'attention que d'habitude. On n'y trouve guère de places, à part la place royale (l'actuelle place des Vosges), commencée sous Henri IV, et la place des Victoires. Mais 600 rues sillonnent la ville. A quelques exceptions près, les plus importantes ne dépassent pas 5 à 8 mètres de large. Philippe serait prêt à les baptiser « avenues », quand il les compare aux ruelles et culs-de-sac qui les joignent et n'ont pas changé depuis le Moyen Age.

Point de trottoirs. Seulement un ruisseau central au creux duquel s'écoulent des eaux sales. Philipe se souvient que son père lui a rapporté une exclamation du petit Louis XIII, un jour qu'il revenait à Paris de Saint-Germain-en-Laye. Epouvanté devant des tas d'ordures, les excréments et le fumier accumulés en pleine rue, le petit roi avait crié à sa gouvernante : »Mais que çà sent pas bon ! » « Notre roi pourrait dire la même chose », pense Philippe amusé. Il a dû mettre son cheval au pas. Circuler dans paris est toujours une aventure. Dès le matin, les charrettes des boulangers et des maraîchers causent d'inextricables embouteillages.

Puis ce sont les troupeaux de bœufs, de veaux, de moutons que l'on dirige vers les boucheries. Et puis, plus tard dans la matinée, les voitures publiques, appelées coches, qui partent pour la province et en reviennent. Il y a aussi les « carrosses à cinq sols » qui, sur six lignes, comme aujourd'hui nos autobus, suivent un itinéraire déterminé.

Philippe, un peu effaré comme chaque fois qu'il circule dans Paris, voit tout cela se croiser, se mêler – parfois se heurter – aux voitures privées, de plus en plus nombreuses. Non seulement les gentilshommes, mais les bourgeois fortunés possèdent des carrosses. On loue aussi des voitures au mois ou à la journée. Et il ne faut pas oublier les fiacres, les chaises à porteurs, pas plus que les « vinaigrettes », étranges caisses sur deux roues, traînées par un homme et poussées par derrière par une femme ou un enfant.

De cet enchevêtrement s'élève un tintamarre assourdissant, surtout quand on arrive de Versailles. Le jeune chevalier ne sait où donner de l'oreille, entre les cris des vendeurs ambulants et ceux des boutiquiers dont les éventaires s'ouvrent en pleine rue. Sans oublier les appels des arracheurs de dents, des batteurs d'estrade, des montreurs de marionnettes.

Philippe se remémore ce que lui a conté un ami. Circulant la nuit à pied, il s'est trouvé agressé par trois des dangereux malfaiteurs qui, du crépuscule jusqu'à l'aube, sont les maîtres de la rue. Non seulement on l'a dépouillé de sa bourse, mais on l'a déshabillé de force et on lui a volé tous ses vêtements, y compris ses bas et ses souliers. Le malheureux a dû rentrer chez lui nu comme un ver. Il paraît que c'est fréquent. En fait, dès la nuit tombée, Paris devient un coupe-gorge. Dans onze « cours des miracles » ont vécu longtemps plusieurs milliers de « truands » : vrai et faux infirmes, voleurs, assassins, femmes de mauvaises vie. Heureusement, le lieutenant de police La Reynie s'est décidé à intervenir contre ces repaires à la tête d'une force armée considérable.

Une fois de plus, Philippe s'étonne de voir la population des quartiers pauvres à ce point entassée. Les maisons hautes et étroites abritent quatre, cinq et jusqu'à dix familles. Là, demeurent surtout les ouvriers. Ils vivent toujours comme au Moyen Age, en corporations. L'ouvrier doit d'abord être apprenti. Vivant chez son patron, celui-là ne lui verse aucun salaire. Quand l'apprenti devient compagnon, il va se faire embaucher au bureau de placement de la corporation. Il touche entre 12 et 30 sous par jour. Plutôt 12 que 30 d'ailleurs.

Comme la viande coûte de 3 à 4 sous la livre, inutile de dire que l'ouvrier en mange rarement. Il travaille quotidiennement de 12 à 16 heures. Celui qui est au service d'un artisan est favorisé par rapport à l'ouvrier de manufacture qui souvent ne touche que 6 sous par jour et doit obéir à un règlement dont la rigueur épouvanterait Philippe s'il l'a connaissait.

Notre chevalier respire. Le voici dans un quartier riche. Là, il aperçoit des palais, des hôtels particuliers, des couvents, tous très à l'aise dans leurs vastes jardins. Philippe se dit que c'est cela Paris : un contraste perpétuel.

Tiens, un porteur d'eau ! Une femme sort d'une maison, un seau à la main. Le porteur y déverse le liquide qu'il porte sur son dos, dans une sorte de réservoir attaché aux épaules. Pour ce seau, la femme verse un denier. Philippe sait que le ravitaillement en eau de Paris pose un grave problème. Seuls de rares immeubles reçoivent par canalisations l'eau de Belleville, de Rungis, du Pré-Saint-Gervais. Le reste de la population doit s'alimenter aux trente fontaines publiques de la ville, où l'on fait la queue pendant des matinées entières. Aussi les femmes du petit peuple préfèrent-elles, malgré les interdictions, aller puiser leur eau à la seine. Cette eau est presque entièrement réservée à la cuisine. Une baignoire est plus rare qu'un diamant. On en loue mais la plupart des parisiens n'en ont jamais vu. C'est à peine si l'on pense à se laver. Tous ces gens que croise Philippe sont donc sales ? Oui. Y compris les femmes les plus élégantes. Elles dissimulent leur crasse sous les crèmes et la mauvaise odeur sous les parfums violents.

Question : les Français du Moyen Age, qui étaient si propres, disposaient-ils donc d'une eau plus abondante ? Non. Pour la même quantité d'eau, les villes étaient plus petites, voilà tout. Le Paris que traverse Philippe compte 500 000 habitants au moins.

Le cheval de Philippe galope sur cette large route qu'ombragent les ormes de Sully. Lui qui a grandi dans les jardins de Versailles se sent dans la campagne comme en pays de connaissance.

En ce début de septembre, qu'elle est belle cette campagne ! De temps en temps, Philippe s'arrête dans un village ou se rafraîchit dans une auberge. Il observe avec curiosité les paysans qu'il voit autour de lui. Car, à ses yeux, ces gens-là appartiennent à une espèce à part. Il a lu l'écrivain La Bruyère qui décrit ainsi les paysans : « L'on voit certains animaux farouches, des mâles et des femelles, répandus par la campagne, noirs, livides et tout brûlés de soleil, attachés à la terre qu'ils fouillent et qu'ils remuent avec une opiniâtreté invincible ; ils ont comme une voix articulée et, quand ils se lèvent sur leurs pieds, ils montrent une face humaine et, en effet, ils sont des hommes. » Philippe se souvient encore que, selon La Bruyère, ces paysans « se retirent la nuit dans des tanières, où ils vivent de pain noir, d'eau et de racines ».

La Bruyère a-t-il exagéré ? C'est ce que se demande Philippe. D'abord les racines ne sont autres que des carottes, des navets, des radis et aussi des patates, cultivées en France bien avant que Parmentier y impose officiellement la pomme de terre. En fait, les paysans de La Bruyère, ce sont les ouvriers agricoles, ou manouvriers. Ils existent mais ne sont pas toute la paysannerie.

Les petits propriétaires ruraux, eux, fort nombreux, ressemblent plutôt à ceux dont le peintre Le Nain nous a laissé l'image. Ils habitent dans des demeures propres et tranquilles et, sans être riches, ne sont nullement misérables. Ils seraient même à leur aise s'ils ne succombaient sous le poids des impôts : la dîme, la gabelle, la taille. Quand s'y ajoutent les droits féodaux dont ils sont redevables envers le seigneur, souvent il ne leur reste que les yeux pour pleurer.

Philippe a entendu parler de ces révoltes paysannes qui se sont succédées pendant tout le XVIIè siècle. Quand la disette ou la famine s'abattait sur les campagnes, les paysans se voyaient quand même réclamer l'impôt. Alors, furieux, ils se soulevaient. Chaque fois, le roi a envoyé des troupes. Chaque fois, on a arrêté des coupables en grand nombre, on a pendu beaucoup, et envoyé les autres ramer aux galères. L'ordre a été rétabli, mais dans les campagnes, on a gardé la mémoire, accablante, de ces répressions impitoyables.

Autre souvenir épouvanté dont Philippe recueille l'écho dans les villages qu'il traverse : la famine de 1693. Cette année-là, la récolte n'a été que la moitié de celle d'une année normale. On a été réduit à absorber du pain confectionné avec des glands, avec des fougères. On a même mangé de l'herbe ! Le célèbre Fénelon, archevêque de Paris, a osé écrire à Louis XIV que la France n'était plus « qu'un grand hôpital désolé et sans provisions ».

Et que dire de la famine de 1709 ! Pour soutenir les interminables guerres de Louis XIV, le royaume avait été littéralement saigné à blanc par l'impôt et les taxes. Soudain, ce pays déjà à bout de force a été frappé par un hiver tel que, de mémoire d'homme, on n'en avait jamais vu. A Versailles, le vin a gelé dans les verres. L'encre se solidifiait dans les encriers. Ce n'était pas le pire : dans la terre, tous les blés ont pourri. Il n'y a pas eu de récoltes sur la plus grande partie de la France. Les vignobles ayant gelé, il n'y a pas eu non plus de vendanges. Les arbres fruitiers sont morts. Le bétail, le gibier ont péri.

Philippe a vu, six ans plus tôt, les enfants de quatre à cinq ans se nourrir dans les prairies comme des moutons. Il a vu des hommes et des femmes couchés, agonisants le long des grands chemins. Deux millions de morts sur vingt millions de Français !

Philippe remonte à cheval. Il se dit que décidément il faut admirer ces paysans. En six années, ils ont replanté, semé de nouveau, reconstitué leurs troupeaux. Ils se sont acharnés et ont rendu au « jardin français » toute sa beauté, toute sa richesse.

Cependant qu'il galope, comment Philippe pourrait-il prévoir que, pour les paysans de notre pays, les grands malheurs sont derrière eux. Ce qui va commencer pour ces infortunés, c'est une véritable période de prospérité. Enfin !

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Philippe a vingt ans. Philippe is twenty years old.

Il est chevalier et fait partie de ces nobles privilégiés que Louis XIV a accueillis à sa cour. He is a knight and is one of those privileged nobles whom Louis XIV welcomed at his court. È un cavaliere ed è uno di quei nobili privilegiati che Luigi XIV accolse alla sua corte. Ele é um cavaleiro e é um dos privilegiados nobres que Luís XIV recebeu em sua corte. Comme des milliers d'autres courtisans, il a appris avec consternation et angoisse la mort du vieux roi. Like thousands of other courtiers, he learned with dismay and anguish the death of the old king. Como milhares de outros cortesãos, ele aprendeu com consternação e angustia a morte do velho rei. Chacun à Versailles se demande ce que le duc d'Orléans, neveu de Louis XIV – qui sera régent – fera de tous ceux à qui le défunt roi avait accordé sa faveur… Everyone at Versailles wonders what the Duke of Orleans, nephew of Louis XIV - who will be regent - will make of all those to whom the late king had granted his favor ... Tutti a Versailles si chiedono cosa farà il duca d'Orleans, nipote di Luigi XIV - che sarà reggente - con tutti coloro ai quali il defunto re aveva concesso il suo favore ... Todos em Versalhes se perguntam o que fará o duque de Orleans, sobrinho de Luís XIV - que será o regente - de todos aqueles a quem o falecido rei concedeu seu favor ...

Le matin même, grande surprise : Philippe a reçu l'ordre de sauter à cheval et de partir pour l'étranger annoncer l'avènement de Louis XV. Noch am Morgen große Überraschung: Philippe erhielt den Befehl, zu Pferd zu springen und ins Ausland zu gehen, um die Ankunft Ludwigs XV. Ankündigen zu können. The very morning, great surprise: Philippe was ordered to jump on horseback and leave for abroad to announce the advent of Louis XV. Quella stessa mattina ci fu una grande sorpresa: Philippe ricevette l'ordine di saltare a cavallo e di recarsi all'estero per annunciare l'avvento di Luigi XV. Pas une minute à perdre ! Not a minute to lose ! A peine le temps de jeter dans un sac quelques vêtements et le voilà déjà traversant Paris. Hardly time to throw a few clothes in a bag and he is already crossing Paris. Pouco tempo para jogar algumas roupas em uma sacola e ele já está atravessando Paris.

Il fait beau et Philippe observe la capitale avec plus d'attention que d'habitude. The weather is fine and Philippe is watching the capital with more attention than usual. On n'y trouve guère de places, à part la place royale (l'actuelle place des Vosges), commencée sous Henri IV, et la place des Victoires. There are hardly any places, except for the royal square (the current Place des Vosges), begun under Henry IV, and the Place des Victoires. Mais 600 rues sillonnent la ville. But 600 streets crisscross the city. A quelques exceptions près, les plus importantes ne dépassent pas 5 à 8 mètres de large. Mit wenigen Ausnahmen sind die größten nicht breiter als 5 bis 8 Meter. With some exceptions, the most important do not exceed 5 to 8 meters wide. Philippe serait prêt à les baptiser « avenues », quand il les compare aux ruelles et culs-de-sac qui les joignent et n'ont pas changé depuis le Moyen Age. Philippe wäre bereit, sie "Alleen" zu taufen, wenn er sie mit den Gassen und Sackgassen vergleicht, die sich ihnen anschließen und sich seit dem Mittelalter nicht verändert haben. Philippe would be ready to baptize them "avenues", when he compares them to the alleys and cul-de-sacs that join them and have not changed since the Middle Ages.

Point de trottoirs. Keine Bürgersteige. No sidewalks. Seulement un ruisseau central au creux duquel s'écoulent des eaux sales. Nur ein zentraler Strom, an dessen Grund schmutziges Wasser fließt. Only a central stream in the hollow of which flows dirty water. Philipe se souvient que son père lui a rapporté une exclamation du petit Louis XIII, un jour qu'il revenait à Paris de Saint-Germain-en-Laye. Philipe erinnert sich, dass sein Vater ihm eines Tages einen Ausruf des kleinen Ludwig XIII. Brachte, als er von Saint-Germain-en-Laye nach Paris zurückkehrte. Philipe remembers that his father brought him an exclamation of little Louis XIII, one day he was returning to Paris from Saint-Germain-en-Laye. Philipe lembra que seu pai lhe trouxe uma exclamação do pequeno Louis XIII, um dia ele estava voltando para Paris de Saint-Germain-en-Laye. Epouvanté devant des tas d'ordures, les excréments et le fumier accumulés en pleine rue, le petit roi avait crié à sa gouvernante : »Mais que çà sent pas bon ! Erschrocken vor Haufen von Müll, Exkrementen und Mist, die sich auf der Straße angesammelt hatten, hatte der kleine König seiner Haushälterin gerufen: "Aber wie riecht es? Terrified by piles of garbage, dung and manure accumulated in the street, the little king had shouted to his housekeeper: "But how bad it feels! Terrorizzato davanti ai cumuli di immondizia, agli escrementi e allo sterco accumulati in mezzo alla strada, il piccolo re aveva gridato alla sua governante: “Ma non ha un buon profumo! Aterrorizado por pilhas de lixo, esterco e estrume acumulados na rua, o pequeno rei gritou para sua governanta: "Mas que pena! » « Notre roi  pourrait dire la même chose », pense Philippe amusé. "Our king could say the same thing," thought Philip amused. Il a dû mettre son cheval au pas. Er musste sein Pferd in Schritt setzen. He had to put his horse in step. Deve aver portato il suo cavallo a fare una passeggiata. Ele teve que colocar seu cavalo em passo. Circuler dans paris est toujours une aventure. Sich in Paris fortzubewegen ist immer ein Abenteuer. Circulating in Paris is always an adventure. Dès le matin, les charrettes des boulangers et des maraîchers causent d'inextricables embouteillages. In the morning, the carts of bakers and market gardeners cause inextricable traffic jams. Fin dal mattino i carri dei fornai e degli orticoltori provocano inestricabili ingorghi. De manhã, os carrinhos de padeiros e horticultores causam engarrafamentos inextricáveis.

Puis ce sont les troupeaux de bœufs, de veaux, de moutons que l'on dirige vers les boucheries. Dann sind es die Herden von Ochsen, Kälbern und Schafen, die an die Metzger gerichtet sind. Then there are the herds of oxen, calves and sheep that are directed to the butcheries. Poi sono le mandrie di buoi, vitelli e pecore che vengono indirizzate alle macellerie. Depois, há os rebanhos de bois, bezerros e ovelhas que são direcionados para os açougues. Et puis, plus tard dans la matinée, les voitures publiques, appelées coches, qui partent pour la province et en reviennent. Und dann, später am Morgen, die öffentlichen Autos, Coches genannt, die in die Provinz fahren und zurückkommen. And then, later in the morning, public cars, called coaches, that leave for the province and come back. E poi, in tarda mattinata, le auto pubbliche, chiamate pullman, che partono per la provincia e tornano. E depois, no final da manhã, os carros públicos, chamados de ônibus, que partem para a província e voltam. Il y a aussi les « carrosses à cinq sols » qui, sur six lignes, comme aujourd'hui nos autobus, suivent un itinéraire déterminé. Es gibt auch die „fünfstöckigen Reisebusse“, die auf sechs Linien wie unsere heutigen Busse einer bestimmten Route folgen. There are also the "five-floor coaches" which, on six lines, like today our buses, follow a determined route. Ci sono anche le “carrozze a cinque piani” che, su sei linee, come i nostri oggi, seguono un percorso determinato.

Philippe, un peu effaré comme chaque fois qu'il circule dans  Paris, voit tout cela se croiser, se mêler – parfois se heurter – aux voitures privées, de plus en plus nombreuses. Philippe, ein wenig verwirrt wie jedes Mal, wenn er durch Paris reist, sieht all diese Kreuzungen, die sich mit immer mehr Privatwagen vermischen - manchmal kollidieren. Philippe, a little frightened as every time he travels in Paris, sees all this cross, mingle - sometimes bump - with private cars, more and more numerous. Philippe, un po 'spaventato come ogni volta che viaggia a Parigi, vede tutto questo incrociarsi, mescolarsi - a volte scontrarsi - con auto private, sempre più numerose. Philippe, um pouco assustado como toda vez que ele viaja em Paris, vê toda essa cruz, se mistura - às vezes bata - com carros particulares, cada vez mais numerosos. Non seulement les gentilshommes, mais les bourgeois fortunés possèdent des carrosses. Not only the gentlemen, but the wealthy bourgeois possess carriages. On loue aussi des voitures au mois ou à la journée. Wir vermieten Autos auch monatlich oder tageweise. We also rent cars by the month or by the day. Também alugamos carros por mês ou por dia. Et il ne faut pas oublier les fiacres, les chaises à porteurs, pas plus que les « vinaigrettes », étranges caisses sur deux roues, traînées par un homme et poussées par derrière par une femme ou un enfant. Und wir dürfen die Taxis, Limousinenstühle nicht mehr vergessen als die "Verbände", seltsame Koffer auf zwei Rädern, die von einem Mann gezogen und von einer Frau oder einem Kind von hinten geschoben wurden. And we must not forget the cabs, the sedan chairs, any more than the "vinaigrettes", strange boxes on two wheels, dragged by a man and pushed from behind by a woman or a child.

De cet enchevêtrement s'élève un tintamarre assourdissant, surtout quand on arrive de  Versailles. Aus diesem Gewirr steigt ein ohrenbetäubender Lärm, besonders wenn man aus Versailles ankommt. From this entanglement arises a deafening din, especially when one arrives from Versailles. Da questo groviglio nasce un frastuono assordante, soprattutto quando si arriva da Versailles. Le jeune chevalier ne sait où donner de l'oreille, entre les cris des vendeurs ambulants et ceux des boutiquiers dont les éventaires s'ouvrent en pleine rue. Der junge Ritter weiß nicht, wo er zwischen den Schreien der Straßenverkäufer und denen der Ladenbesitzer, deren Stände sich auf der Straße öffnen, zuhören soll. The young knight does not know where to give ear, between the cries of street vendors and those of shopkeepers whose stands open in the street. Il giovane cavaliere non sa dove ascoltare, tra le grida dei venditori ambulanti e quelle dei negozianti le cui bancarelle si aprono in mezzo alla strada. O jovem cavaleiro não sabe onde dar ouvidos, entre os gritos dos vendedores ambulantes e os dos lojistas cujos estandes se abrem na rua. Sans oublier les appels des arracheurs de dents, des batteurs d'estrade, des montreurs de marionnettes. Not to mention the calls of tooth pullers, stage drummers, puppet showers. Senza dimenticare i richiami degli estrattori di denti, dei tamburini della piattaforma, delle docce dei burattini. Sem mencionar as chamadas de puxadores de dente, bateristas de palco, chuveiros de marionetes.

Philippe se remémore ce que lui a conté un ami. Philippe erinnert sich, was ihm ein Freund erzählt hat. Philippe remembers what a friend told him. Philippe ricorda quello che gli ha detto un amico. Circulant la nuit à pied, il s'est trouvé agressé par trois des dangereux malfaiteurs qui, du crépuscule jusqu'à l'aube, sont les maîtres de la rue. Walking at night on foot, he was attacked by three of the dangerous criminals who, from dusk until dawn, are the masters of the street. Non seulement on l'a dépouillé de sa bourse, mais on l'a déshabillé de force et on lui a volé tous ses vêtements, y compris ses bas et ses souliers. Er wurde nicht nur seiner Handtasche beraubt, sondern auch gewaltsam ausgezogen und alle seine Kleider, einschließlich seiner Strümpfe und Schuhe, wurden gestohlen. Not only was he stripped of his purse, but he was stripped naked and stolen of all his clothes, including his stockings and shoes. Não só ele foi despojado de sua bolsa, mas ele foi despido e roubado de todas as suas roupas, incluindo suas meias e sapatos. Le malheureux a dû rentrer chez lui nu comme un ver. The unfortunate man had to go home naked like a worm. O infeliz teve que ir para casa nu como um verme. Il paraît que c'est fréquent. Es scheint häufig zu sein. It seems that it is frequent. En fait, dès la nuit tombée, Paris devient un coupe-gorge. In fact, as soon as night falls, Paris becomes a cut-throat. De fato, assim que a noite cai, Paris se torna uma ferida na garganta. Dans onze « cours des miracles » ont vécu longtemps plusieurs milliers de « truands » : vrai et faux infirmes, voleurs, assassins, femmes de mauvaises vie. In elf „Cour des Miracles“ lebten lange Zeit Tausende von „Gaunern“: wahre und falsche Invaliden, Diebe, Mörder, böse Frauen. In eleven "courses of miracles" have lived for many thousands of "mobsters": true and false invalids, thieves, murderers, women of bad life. Heureusement, le lieutenant de police La Reynie s'est décidé à intervenir contre ces repaires à la tête d'une force armée considérable. Glücklicherweise beschloss Polizeileutnant La Reynie, an der Spitze einer beträchtlichen Streitmacht gegen diese Höhlen einzugreifen. Fortunately, the police lieutenant La Reynie decided to intervene against these dens at the head of a considerable armed force.

Une fois de plus, Philippe s'étonne de voir la population des quartiers pauvres à ce point entassée. Wieder einmal ist Philippe überrascht, dass die Bevölkerung armer Viertel so überfüllt ist. Once again, Philippe is surprised to see the population of the poor neighborhoods so crowded. Les maisons hautes et étroites abritent quatre, cinq et jusqu'à dix familles. The tall, narrow houses house four, five and up to ten families. Là, demeurent surtout les ouvriers. There, remain especially the workers. Lá, permanecem especialmente os trabalhadores. Ils vivent toujours comme au Moyen Age, en corporations. They live as in the Middle Ages, in corporations. L'ouvrier doit d'abord être apprenti. Der Arbeiter muss zuerst ein Lehrling sein. The worker must first be an apprentice. O trabalhador deve primeiro ser um aprendiz. Vivant chez son patron, celui-là ne lui verse aucun salaire. Er lebt mit seinem Chef zusammen und zahlt ihm kein Gehalt. Living with his boss, this one pays him no salary. Vivendo com seu chefe, este não lhe paga salário. Quand l'apprenti devient compagnon, il va se faire embaucher au bureau de placement de la corporation. When the apprentice becomes a journeyman, he will be hired at the employment office of the corporation. Quando o aprendiz se tornar um viajante, ele será contratado no escritório de emprego da corporação. Il touche entre 12 et 30 sous par jour. Er verdient zwischen 12 und 30 Sous pro Tag. He gets between 12 and 30 cents a day. Ele fica entre 12 e 30 centavos por dia. Plutôt 12 que 30 d'ailleurs. Eher 12 als 30. Rather 12 than 30 by the way. Mais 12 do que 30 pelo caminho.

Comme la viande coûte de 3 à 4 sous la livre, inutile de dire que l'ouvrier en mange rarement. Since meat costs 3 to 4 cents a pound, needless to say, the worker seldom eats it. Como a carne custa de 3 a 4 centavos por libra, é desnecessário dizer que o trabalhador raramente come. Il travaille quotidiennement de 12 à 16 heures. He works daily from 12 to 16 hours. Celui qui est au service d'un artisan est favorisé par rapport à l'ouvrier de manufacture qui souvent ne touche que 6 sous par jour et doit obéir à un règlement dont la rigueur épouvanterait Philippe s'il l'a connaissait. Wer im Dienste eines Handwerkers steht, wird dem Fabrikarbeiter vorgezogen, der oft nur 6 Cent pro Tag verdient und einer Vorschrift gehorchen muss, deren Strenge Philippe erschrecken würde, wenn er ihn kenne. The one who is in the service of a craftsman is favored over the factory worker who often only receives 6 sous a day and must obey a regulation whose rigor would terrify Philippe if he knew it.

Notre chevalier respire. Our knight is breathing. Le voici dans un quartier riche. Hier ist er in einer wohlhabenden Nachbarschaft. Here it is in a rich neighborhood. Là, il aperçoit des palais, des hôtels particuliers, des couvents, tous très à l'aise dans leurs vastes jardins. Dort sah er Paläste, Villen, Klöster, die sich alle in ihren weitläufigen Gärten sehr wohl fühlten. There, he sees palaces, mansions, convents, all very comfortable in their vast gardens. Philippe se dit que c'est cela Paris : un contraste perpétuel. Philippe thinks it's Paris: a perpetual contrast.

Tiens, un porteur d'eau ! Hier ein Wasserträger! Here, a water carrier! Une femme sort d'une maison, un seau à la main. A woman comes out of a house with a bucket in her hand. Le porteur y déverse le liquide qu'il porte sur son dos, dans une sorte de réservoir attaché aux épaules. Der Träger gießt die Flüssigkeit, die er auf dem Rücken trägt, in eine Art Tank, der an den Schultern befestigt ist. The wearer pours the liquid he carries on his back, in a sort of tank attached to the shoulders. O usuário derrama o líquido que ele carrega nas costas, em uma espécie de tanque preso aos ombros. Pour ce seau, la femme verse un denier. Für diesen Eimer gießt die Frau einen Penny ein. For this bucket, the woman pours a denier. Philippe sait que le ravitaillement en eau de Paris pose un grave problème. Philippe weiß, dass die Pariser Wasserversorgung ein ernstes Problem darstellt. Philippe knows that water supply in Paris is a serious problem. Philippe sabe que o abastecimento de água em Paris é um problema sério. Seuls de rares immeubles reçoivent par canalisations l'eau de Belleville, de Rungis, du Pré-Saint-Gervais. Only a few buildings receive piped water from Belleville, Rungis, Pré-Saint-Gervais. Le reste de la population doit s'alimenter aux trente fontaines publiques de la ville, où l'on fait la queue pendant des matinées entières. Der Rest der Bevölkerung muss an den dreißig öffentlichen Brunnen der Stadt essen, an denen die Menschen den ganzen Morgen anstehen. The rest of the population has to eat at the city's thirty public fountains, where they queue up for whole mornings. Aussi les femmes du petit peuple préfèrent-elles, malgré les interdictions, aller puiser leur eau à la seine. Deshalb ziehen es die Frauen des einfachen Volkes trotz der Verbote vor, ihr Wasser aus der Seine zu schöpfen. So the women of the common people prefer, despite the prohibitions, to draw their water from the Seine. Assim, as mulheres das pessoas comuns preferem, apesar das proibições, tirar suas águas do Sena. Cette eau est presque entièrement réservée à la cuisine. Dieses Wasser ist fast ausschließlich zum Kochen reserviert. This water is almost entirely reserved for cooking. Une baignoire est plus rare qu'un diamant. Eine Badewanne ist seltener als ein Diamant. A bathtub is rarer than a diamond. On en loue mais la plupart des parisiens n'en ont jamais vu. Wir vermieten es, aber die meisten Pariser haben es noch nie gesehen. It is rented but most Parisians have never seen. C'est à peine si l'on pense à se laver. Du denkst kaum an Waschen. It is hardly if we think of washing. Tous ces gens que croise Philippe sont donc sales ? All these people that Philippe meets are so dirty? Oui. Y compris les femmes les plus élégantes. Einschließlich der elegantesten Frauen. Including the most elegant women. Elles dissimulent leur crasse sous les crèmes et la mauvaise odeur sous les parfums violents. They hide their grime under the creams and the bad smell under the violent perfumes.

Question : les Français du Moyen Age, qui étaient si propres, disposaient-ils donc d'une eau plus abondante ? Frage: Hatten die Franzosen des Mittelalters, die so sauber waren, mehr Wasser? Question: Did the medieval French, who were so clean, have more water? Non. Pour la même quantité d'eau, les villes étaient plus petites, voilà tout. Bei gleicher Wassermenge waren die Städte kleiner, das ist alles. For the same amount of water, the cities were smaller, that's all. Le Paris que traverse Philippe compte 500 000 habitants au moins. Das Paris, das Philippe durchquert, hat mindestens 500.000 Einwohner. The Paris Philippe runs through has at least 500,000 inhabitants.

Le cheval de Philippe galope sur cette large route qu'ombragent les ormes de Sully. Philippes Pferd galoppiert auf dieser breiten Straße, die von Sully Ulmen beschattet wird. Philippe's horse gallops along this wide road, which is covered with the elms of Sully. Il cavallo di Philippe galoppa lungo questa ampia strada ombreggiata dagli olmi di Sully. Lui qui a grandi dans les jardins de Versailles se sent dans la campagne comme en pays de connaissance. Wer in den Gärten von Versailles aufgewachsen ist, fühlt sich auf dem Land wie in einem Land des Wissens. He who grew up in the gardens of Versailles feels in the countryside as in a country of knowledge.

En ce début de septembre, qu'elle est belle cette campagne ! At the beginning of September, how beautiful is this campaign! De temps en temps, Philippe s'arrête dans un village ou se rafraîchit dans une auberge. Von Zeit zu Zeit hält Philippe in einem Dorf an oder erfrischt sich in einem Gasthaus. From time to time Philippe stops in a village where he gets refreshed in an inn. Di tanto in tanto, Philippe si ferma in un villaggio o si rifocilla in una locanda. Il observe avec curiosité les paysans qu'il voit autour de lui. Neugierig beobachtet er die Bauern, die er um sich herum sieht. He observes with curiosity the peasants he sees around him. Car, à ses yeux, ces gens-là appartiennent à une espèce à part. Weil diese Menschen in seinen Augen einer anderen Spezies angehören. Because, in his eyes, these people belong to a species apart. Il a lu l'écrivain La Bruyère qui décrit ainsi les paysans : «  L'on voit certains animaux farouches, des mâles et des femelles, répandus par la campagne, noirs, livides et tout brûlés de soleil, attachés à la terre qu'ils fouillent et qu'ils remuent avec une opiniâtreté invincible ; ils ont comme une voix articulée et, quand ils se lèvent sur leurs pieds, ils montrent une face humaine et, en effet, ils sont des hommes. Er las den Schriftsteller La Bruyère, der die Bauern folgendermaßen beschreibt: stöbern und bewegen Sie sich mit unbesiegbarer Hartnäckigkeit; Sie haben eine artikulierte Stimme und wenn sie sich auf die Füße stellen, zeigen sie ein menschliches Gesicht und sind in der Tat Männer. He read the writer La Bruyère who describes the peasants as follows: “We see certain wild animals, males and females, spread out in the countryside, black, livid and all burnt with sun, attached to the land rummage and stir with invincible obstinacy; they have like an articulated voice and, when they rise on their feet, they show a human face and, indeed, they are men. Ha letto lo scrittore La Bruyère che così descrive i contadini: “Vediamo certi animali selvatici, maschi e femmine, sparsi per la campagna, neri, lividi e tutti abbronzati, attaccati alla terra che cercano e si muovono con invincibile ostinazione; hanno una voce simile a quella articolata e, quando si alzano in piedi, mostrano un volto umano e, anzi, sono uomini. » Philippe se souvient encore que, selon La Bruyère, ces paysans «  se retirent la nuit dans des tanières, où ils vivent de pain noir, d'eau et de racines ». "Philippe erinnert sich noch immer daran, dass sich diese Bauern laut La Bruyère" nachts in Höhlen zurückziehen, wo sie von Schwarzbrot, Wasser und Wurzeln leben ". Philippe remembers that, according to La Bruyere, these peasants "retire at night into dens, where they live on black bread, water, and roots."

La Bruyère a-t-il exagéré ? Has La Bruyère exaggerated? C'est ce que se demande Philippe. Das wundert sich Philippe. That's what Philippe is asking. D'abord les racines ne sont autres que des carottes, des navets, des radis et aussi des patates, cultivées en France bien avant que Parmentier y impose officiellement la pomme de terre. Erstens sind die Wurzeln nichts anderes als Karotten, Rüben, Radieschen und auch Kartoffeln, die in Frankreich angebaut wurden, lange bevor Parmentier die Kartoffel dort offiziell auferlegte. First the roots are nothing but carrots, turnips, radishes and also potatoes, grown in France long before Parmentier officially imposed the potato. En fait, les paysans de La Bruyère, ce sont les ouvriers agricoles, ou manouvriers. Tatsächlich sind die Bauern von La Bruyère die Landarbeiter oder Arbeiter. In fact, the peasants of La Bruyère are the agricultural laborers, or laborers. Ils existent mais ne sont pas toute la paysannerie. Sie existieren, sind aber nicht die ganze Bauernschaft. They exist but are not the whole peasantry.

Les petits propriétaires ruraux, eux, fort nombreux, ressemblent plutôt à ceux dont le peintre Le Nain nous a laissé l'image. Die kleinen Landbesitzer selbst, sehr zahlreich, ähneln eher denen, von denen der Maler Le Nain uns das Bild hinterlassen hat. The small rural owners, they, very numerous, rather resemble those whose painter Le Nain left us the image. Ils habitent dans des demeures propres et tranquilles et, sans être riches, ne sont nullement misérables. They live in clean and quiet houses and, without being rich, are by no means miserable. Vivono in case pulite e tranquille e, senza essere ricchi, non sono affatto miserabili. Ils seraient même à leur aise s'ils ne succombaient sous le poids des impôts : la dîme, la gabelle, la taille. They would be at their ease if they did not fall under the weight of taxes: the tithe, the gabelle, the size. Estariam à vontade se não se submetessem ao peso dos impostos: o dízimo, o gabelle, o tamanho. Quand s'y ajoutent les droits féodaux dont ils sont redevables envers le seigneur, souvent il ne leur reste que les yeux pour pleurer. Wenn sie zu den feudalen Rechten hinzugefügt werden, sind sie dem Herrn verpflichtet, oft haben sie nur noch ihre Augen zum Weinen übrig. When the feudal rights of which they are indebted to the lord are added, often only their eyes are left to cry. Quando vengono aggiunti ai diritti feudali che devono al signore, spesso hanno solo occhi su cui piangere.

Philippe a entendu parler de ces révoltes paysannes qui se sont succédées pendant tout le XVIIè siècle. Philippe hat von diesen Bauernaufständen gehört, die im 17. Jahrhundert aufeinander folgten. Philippe heard about these peasant revolts which followed one another throughout the 17th century. Philippe ha sentito parlare di queste rivolte contadine che si sono susseguite per tutto il XVII secolo. Quand la disette ou la famine s'abattait sur les campagnes, les paysans se voyaient quand même réclamer l'impôt. Als Hungersnot oder Hungersnot auf dem Land niederging, sahen sich die Bauern immer noch in der Forderung nach Steuern. When food shortages or famine hit the countryside, the peasants still saw themselves claiming taxes. Quando la scarsità di cibo o la carestia colpivano le campagne, i contadini si vedevano ancora reclamare le tasse. Alors, furieux, ils se soulevaient. Then, furious, they rose up. Quindi, furiosi, si ribellarono. Chaque fois, le roi a envoyé des troupes. Each time, the king sent troops. Chaque fois, on a arrêté des coupables en grand nombre, on a pendu beaucoup, et envoyé les autres ramer aux galères. Jedes Mal, wenn wir viele Schuldige verhafteten, hingen wir viel und schickten die anderen, um zu den Galeeren zu rudern. Each time, numerous culprits were arrested, many hanged, and the others rowed to the galleys. L'ordre a été rétabli, mais dans les campagnes, on a gardé la mémoire, accablante, de ces répressions impitoyables. Order has been restored, but in the countryside, the overwhelming memory of these ruthless repressions has been kept.

Autre souvenir épouvanté dont Philippe recueille l'écho dans les villages qu'il traverse : la famine de 1693. Eine weitere erschrockene Erinnerung, von der Philippe das Echo in den Dörfern sammelt, die er durchquert: die Hungersnot von 1693. Another frightened memory which Philippe collects echo in the villages he passes through: the famine of 1693. Un altro ricordo spaventato che Philippe raccoglie riecheggia nei paesi che attraversa: la carestia del 1693. Cette année-là, la récolte n'a été que la moitié de celle d'une année normale. Die Ernte in diesem Jahr war nur halb so hoch wie in einem normalen Jahr. That year, the harvest was only half that of a normal year. On a été réduit à absorber du pain confectionné avec des glands, avec des fougères. Wir wurden reduziert, um Brot mit Eicheln und Farnen aufzunehmen. It was reduced to absorbing bread made with acorns, with ferns. Ci siamo ridotti a mangiare pane fatto con le ghiande, con le felci. On a même mangé de l'herbe ! Wir haben sogar Gras gegessen! We even ate grass! Le célèbre Fénelon, archevêque de Paris, a osé écrire à Louis XIV que la France n'était plus « qu'un grand hôpital désolé et sans provisions ». Der berühmte Fenelon, Erzbischof von Paris, wagte es, Ludwig XIV. Zu schreiben, Frankreich sei nicht länger "sondern ein großes, verlassenes Krankenhaus ohne Proviant". The famous Fenelon, archbishop of Paris, dared to write to Louis XIV that France was no longer "a great hospital desolate and without provisions".

Et que dire de la famine de 1709 ! Und was ist mit der Hungersnot von 1709! And what about the famine of 1709! Pour soutenir les interminables guerres de Louis XIV, le royaume avait été littéralement saigné à blanc par l'impôt et les taxes. Um die endlosen Kriege Ludwigs XIV. Zu unterstützen, war das Königreich buchstäblich mit Steuern weiß geblutet worden. To support the interminable wars of Louis XIV, the kingdom had literally been bled white by taxes and duties. Per sostenere le interminabili guerre di Luigi XIV, il regno era stato letteralmente dissanguato da tasse e prelievi. Soudain, ce pays déjà à bout de force a été frappé par un hiver tel que, de mémoire d'homme, on n'en avait jamais vu. Plötzlich wurde dieses bereits erschöpfte Land von einem Winter heimgesucht, so dass wir ihn in lebendiger Erinnerung nie gesehen hatten. Suddenly, this country already exhausted was hit by a winter such as, in memory of man, we had never seen. A Versailles, le vin a gelé dans les verres. In Versailles gefror der Wein in den Gläsern. At Versailles, the wine froze in glasses. L'encre se solidifiait dans les encriers. The ink solidified in the inkwells. L'inchiostro si solidificò nei calamai. A tinta solidificou nos tinteiros. Ce n'était pas le pire : dans la terre, tous les blés ont pourri. It was not the worst: in the earth, all the wheat rotted. Il n'y a pas eu de récoltes sur la plus grande partie de la France. In den meisten Teilen Frankreichs gab es keine Ernte. There were no harvests over most of France. Les vignobles ayant gelé, il n'y a pas eu non plus de vendanges. As the vineyards froze, there were no harvests. Les arbres fruitiers sont morts. Die Obstbäume sind tot. The fruit trees are dead. Le bétail, le gibier ont péri. Cattle and game have perished.

Philippe a vu, six ans plus tôt, les enfants de quatre à cinq ans se nourrir dans les prairies comme des moutons. Philippe sah sechs Jahre zuvor Kinder im Alter von vier bis fünf Jahren, die sich wie Schafe von der Prärie ernährten. Philippe saw, six years earlier, children four to five years old feeding in the meadows like sheep. Il a vu des hommes et des femmes couchés, agonisants le long des grands chemins. Er sah Männer und Frauen liegen und auf den Autobahnen sterben. He saw men and women lying, dying along the highways. Vide uomini e donne che giacevano moribondi lungo le autostrade. Deux millions de morts sur vingt millions de Français ! Two million deaths out of twenty million French people!

Philippe remonte à cheval. Philippe goes back on horseback. Il se dit que décidément il faut admirer ces paysans. He said to himself that we should definitely admire these peasants. En six années, ils ont replanté, semé de nouveau, reconstitué leurs troupeaux. In six years, they replanted, sown again, restored their flocks. In sei anni, hanno ripiantato, seminato di nuovo, ricostituito le loro mandrie. Ils se sont acharnés et ont rendu au « jardin français » toute sa beauté, toute sa richesse. Sie arbeiteten hart und kehrten in den "französischen Garten" zurück, all seine Schönheit, all seinen Reichtum. They have persevered and returned to the "French garden" all its beauty, all its wealth. Hanno lavorato sodo e hanno restituito al “giardino alla francese” tutta la sua bellezza, tutta la sua ricchezza.

Cependant qu'il galope, comment Philippe pourrait-il prévoir que, pour les paysans de notre pays, les grands malheurs sont derrière eux. Wie auch immer er galoppiert, wie konnte Philippe vorhersehen, dass für die Bauern unseres Landes das große Unglück hinter ihnen liegt? While he gallops, how could Philippe foresee that, for the peasants of our country, great misfortunes are behind them. Mentre galoppa, come potrebbe Philippe prevedere che, per i contadini del nostro paese, dietro di loro ci siano grandi disgrazie. Ce qui va commencer pour ces infortunés, c'est une véritable période de prospérité. Was für diese Unglücklichen beginnen wird, ist eine echte Periode des Wohlstands. What will begin for these unfortunate people is a true period of prosperity. Enfin ! Finally !