Science et Cornichons - 1 - Crotale et Nombrils (1/2)
Sciences et Cornichons ! Sciences et Cornichons ... Sciences et Cornichons ?
Bonjour à toutes et à tous et bienvenue dans Sciences et Cornichons, le podcast consacré aux études scientifiques les plus improbables.
Je suis David Manfredini et pour le premier épisode, je vais demander à mon acolyte Gauthier Lausberg de résumer brièvement le principe de ce podcast.
Bonjour à tous et à toutes.
Alors David, est-ce que tu sais déjà ce qu'est un prix Nobel ?
Eh bien oui, mais je vais te demander de me le rappeler.
Alors, un prix Nobel c'est un prix qui récompense soit une grande découverte scientifique, soit un grand acte au nom de la paix ou autres valeurs admirables.
Et aujourd'hui, nous n'allons pas parler des prix Nobel, nous allons parler des prix IgNobel.
Alors, peux-tu deviner ce qu'est un prix IgNobel ?
L'opposé des prix Nobel.
Eh bien, pas tout à fait l'opposé, mais effectivement on est dans quelque chose de moins classique, de moins honorable.
On est plutôt sur des récompenses scientifiques également, pour des découvertes un peu plus excentriques, un peu plus loufoques, mais qui ont le mérite de faire rire et également, bien sûr, de faire réfléchir.
Donc Gautier et moi, en avons chacun sélectionné un, que l'autre ignore totalement, et nous allons tenter de vous les présenter.
Alors Gautier, qu'est-ce que tu nous as choisi aujourd'hui ?
Alors David, je pense savoir que tu es l'heureux propriétaire d'un animal de compagnie.
J'ai effectivement un flamboyant félin.
Ah, fabuleux. Alors, imaginons que tu sois blessé ou griffé par ce félin, que ferais-tu ?
Eh bien, je me couperais le bras et puis j'appellerais mon médecin pour vérifier que j'ai bien cautérisé la plaie.
Voilà, ou dans une moindre mesure ou dans une réaction plus sensée, tu t'appliquerais simplement ce qu'on peut faire dans le cas d'une griffure pour chat.
Oui, mais bon, autant être sûr. Je préfère éviter les mauvaises surprises.
Voilà, dans le doute, tu as raison, soyons-en sûrs.
Alors, prenons maintenant un cas un peu plus...
Je change un petit peu l'hypothèse de départ.
Si, au lieu d'avoir un félin comme animal de compagnie, tu avais un Crotalus viridis, à savoir un crotale des prairies.
Ça a déjà moins de griffes.
Ça a moins de griffes.
C'est effectivement l'un des avantages du crotale des prairies par rapport au chat.
Néanmoins, ça a l'inconvénient d'avoir de vilains crocs.
Alors, si tu devais être mordu par un serpent pareil, qu'est-ce que tu ferais ?
Qu'est-ce qui t'inquièterait en tout cas ?
Alors déjà, ce qui m'inquièterait, probablement en premier, c'est que je ne connais absolument pas le numéro du Centre Antipoisons.
Je serais donc en train de hurler et de crier dans la pièce "au secours" !
Et je serais probablement mort dans les 3 minutes qui surviennent.
Effectivement, l'une des inquiétudes qu'on peut avoir par rapport à un serpent comparé au chat, c'est que le serpent, lui, est "vénineux".
Ce qui est moins le cas de la plupart des chats, et "vénineux", je ne suis pas sûr que ce mot existe, mais soit ! Je te laisse continuer.
"Vénineux" est un très beau mot.
Alors, déjà, le chat venimeux, ce serait absolument extraordinaire, mais passons.
Mais tu sais que l'ornithorynque est venimeux.
C'est Perry ! Perry l'ornithorynque !
Merci Perry.
Pour reprendre ma petite histoire, sache qu'en 1990, en Arizona, un jeune homme de 28 ans avait le plaisir d'avoir un crotalus viridis, et donc un crotale des prairies, comme animal de compagnie
Lorsque soudain !
Il s'est fait mordre au visage.
Plus exactement à la lèvre droite supérieure.
Mais comment est-ce que tu te fais mordre à la lèvre supérieure ?
Tu lui fais des bisous ?
Est-ce que tu fais des bisous à ton chat ?
Oui, mais lui, il est mignon et il a des poils ... et il n'a pas de venin ... la plupart du temps.
On ne dira pas si c'était une bonne idée ou pas.
En est-il que le jeune homme est mordu et qu'il doit agir.
Alors, il ne s'agit pas de sa première mauvaise expérience.
Et il a déjà été mordu 14 fois par son serpent.
Il aime vraiment beaucoup son serpent. Il aime vraiment beaucoup son serpent.
Et les 14 précédentes fois, il s'est soigné de manière assez logique, c'est-à-dire en s'administrant de l'antivenin.
Sauf qu'à force, après 14 fois, son corps réagit assez mal à l'antivenin.
Et qu'ayant passé de peu à côté d'un choc anaphylactique, pour cette nouvelle et quinzième morsure, il décide de changer de traitement et de procéder autrement.
Et c'est en procédant autrement qu'il va, à sa modeste façon, rentrer dans l'histoire.
En tout cas, celle de Ig Nobel.
Mais alors, qu'est-ce qu'il a fait ?
Eh bien, déjà, il n'a pas agi seul.
Il a demandé l'aide de son voisin.
Ça, ça n'a rien de choquant.
Il a ensuite décidé de se dire qu'il fallait intégrer la voiture dans son plan pour se guérir.
Et plus exactement, la batterie de la voiture.
Jusque-là, tout me paraît tout à fait cohérent et sensé.
Alors, sensé, je ne sais pas.
Toujours en est-il qu'il va avec son voisin s'allonger à côté de sa voiture, qu'il va relier la batterie de la voiture à sa lèvre via un câble muni de pinces.
Tout à fait logique.
Alors, le voisin va monter dans la voiture et faire tourner celle-ci à 3000 tours par minute.
Il ne va pas faire tourner la voiture pendant 5 secondes, ni même 20 secondes ou 30 secondes, mais bien pendant 5 minutes complètes.
Et tu peux en faire des choses pendant 5 minutes.
Tu peux cuisiner un repas extrêmement rapide.
Tu peux aller courir.
Tu peux aller promener ton chien.
Qu'est-ce que tu peux faire encore pendant 5 minutes ?
Eh bien, dans le cas ici, il a fait griller son voisin pendant 5 minutes avec sa voiture.
Voilà. Alors, l'article à l'origine de l'histoire nous apprend que le voisin en question devait quand même être relativement sadique parce que le patient, donc, qu'il devait voir vu qu'il était allongé à côté de la voiture, aurait perdu conscience dès la première décharge électrique.
Et donc, il s'est dit « Continuons. Ça me semble être une bonne méthode. Ça a l'air de fonctionner. En tout cas, il y a une réaction. »
Roger ! Roger ! ... Il ne réagit pas. Ça doit marcher.
On continue. Continuons.
Hop ! Un petit coup de gaz. Et donc, quand l'ambulance est arrivée 15 minutes plus tard,
c'était pour trouver, bien évidemment, le jeune homme inconscient, brûlé au visage et complètement incontinent.
Merveilleux !
Mais alors, malgré ces quelques effets secondaires mineurs, la question que tout le monde se pose : est-ce que ça a marché pour le venin ?
Eh bien, l'IgNobel de médecine de l'année 1994 va récompenser les docteurs Richard C. Dart et Richard A. Gustafon pour leur fameuse étude :
« L'échec des traitements par électrochoc pour l'enveniment par crotale ».
Et également le fameux patient pour avoir tenté une étincelante, mais douloureuse tentative, car l'IgNobel, c'est aussi la reconnaissance du sens du sacrifice.
Alors moi, ce qui me fascine dans cette histoire, c'est quand même le titre de l'étude
avec « L'échec des traitements par électrochoc pour l'enveniment par crotale ».
Ce qui veut quand même sous-entendre que pour l'enveniment par crotale, ça ne marche pas, mais que pour d'autres serpents, ça pourrait éventuellement fonctionner.
Ah, la science, c'est quelque chose d'exact.
On ne peut pas fermer toutes les portes.
C'est merveilleux, la science.
J'aime quand les gens prennent à bras le corps des problèmes de la société qu'on peut finalement rencontrer presque tous les jours.
Pour tous ceux qui ont un serpent de compagnie, ce qui est quand même extrêmement fréquent.
Voilà, c'est ça. Moi, je trouve qu'il y a aussi une histoire de solidarité entre voisins.
Oui, le voisin, il a le coeur sur la main.
J'aimerais bien avoir des voisins qui soient aussi prêts à m'aider quand j'ai un problème.
Ah, au prix de l'essence, faire tourner ta voiture comme ça pendant 5 minutes, même pour voir griller son voisin, c'est un investissement à notre époque.
C'est une belle preuve d'amitié.
Et donc, pour nos éventuels auditeurs qui seraient tentés de brancher une batterie sur leur visage :ça a déjà été fait.
Il faudra donc la mettre ailleurs.
Alors David, ça c'était mon Ig Nobel.
Alors maintenant, qu'est-ce que tu nous as réservé aujourd'hui ?
Alors je ne suis pas sûr de faire mieux, mais pour mon étude du jour, j'ai choisi un domaine de recherche particulièrement important et pourtant trop souvent négligé par la science.
Alors on parle régulièrement de tout ce que peut produire le corps, les larmes, les crottes de nez, le cérumen ...
Bon appétit à ceux qui nous écoutent en mangeant, mais on ignore presque toujours un phénomène qui touche pourtant une grande partie de l'espèce humaine.
Je ne suis pas sûr d'avoir envie de savoir pour être franc, mais vas-y, continue.
Nous allons aujourd'hui parler du nombril.
Alors pour ceux qui dormaient en cours de biologie et qui ne se lavent jamais ... ou les deux.
C'est ce petit orifice situé au bas du ventre et qui est la trace de la naissance de chacun.
Et tu vas me dire : David, c'est bien beau, mais tout le monde sait ce que c'est un nombril.
C'est bien beau, mais tout le monde sait ce que c'est un nombril.
Effectivement, mais si le nombril est une trace de ta naissance, il est également capable, lui aussi, de donner naissance.
La nature n'est-elle pas magnifique ?
C'est pas magnifique le mot employé.
Alors, une fois n'est pas coutume, Gauthier, je vais te faire participer, toi et les auditeurs.
Je vais vous demander de prendre quelques instants.
Alors déjà, regardez si vous êtes bien à l'abri des regards et regardez discrètement votre nombril.
Si vous êtes au travail, peut-être, mettez-vous dans un coin tranquille et vérifiez si, dans votre nombril, vous avez quelque chose.
Est-ce qu'on peut regarder le nombril du voisin si on est au travail ?
Il vaut mieux éviter. D'accord.
Même si ton voisin est aussi serviable que celui de l'histoire du crotale.
Ah oui. C'est un thème sur les voisins, en fait.
C'est une thématique cachée du podcast du jour.
C'est la thématique des voisins.
Alors, Gauthier, est-ce que tu as des peluches de nombril ?
N'aie pas peur de nous mentir.
Non, je n'ai pas de peluches de nombril.
Eh bien, je ne te crois pas, mais si tu en avais, je te dirais "Félicitations!", puisque tu ferais partie des 70% de la population qui ont des peluches dans leur nombril.
Mais tu vas me demander, "David, qu'est-ce qui cause ces peluches de nombril ?"
Qu'est-ce qui cause ces peluches de nombril ?
Eh bien, je suis très content que tu me poses cette question, parce que j'ai justement passé l'après-midi à chercher la réponse à cette merveilleuse question.
Eh bien, c'est le docteur Karl Kruszelnicki, un vulgarisateur scientifique australien, qui s'est intéressé en premier à cette question cruciale.
D'où viennent les peluches de nombril ?
De quelles couleurs sont-elles ?
Et qui sont les personnes frappées par ce phénomène ?
Un peu comme la fameuse question philosophique : "qui sommes-nous ? D'où venons-nous ? Quel est le but de la vie ?", mais cette fois posée pour les nombrils.
Un homme qui n'avait pas grand-chose à faire de sa vie en fait.
Et il a d'ailleurs été récompensé pour ses travaux en 2002 par un Ig Nobel dans les recherches interdisciplinaires.
Alors, pour obtenir des réponses, le docteur Karl a demandé à 5000 personnes des informations sur leurs peluches de nombril.
Alors, moi, je me dis toujours : on vient t'interroger pour une recherche scientifique.
Tu te dis que tu vas pouvoir donner une information intéressante, compléter quelque chose, et là, on vient te demander pour ton nombril, quoi.
C'est quand même une déception.
Oui, mais, on te demande pour ton nombril pour faire avancer la science.
Et certains ont tellement été touchés par cette demande qu'ils ont même envoyé des échantillons pour qu'ils soient examinés au microscope.