×

We use cookies to help make LingQ better. By visiting the site, you agree to our cookie policy.


image

Little women ''Les quatre filles du docteur Marsch'', Une expérience XI

Une expérience XI

Et Jo, qui elle-même n'était pas dans son humeur habituelle, se précipita dans le parloir, où elle aperçut Beth sanglotant sur son petit oiseau Pip, qu'elle venait de trouver mort dans sa cage, ses petites pattes étendues pathétiquement comme s'il eût imploré la nourriture qui lui avait manqué.

« C'est ma faute, je l'ai oublié ; il ne lui reste pas une seule goutte d'eau ni un seul grain de millet ! Oh ! Pip, Pip, comment ai-je pu être si cruelle pour vous ? » s'écriait Beth en pleurant et prenant la pauvre petite bête dans ses mains pour essayer de la ranimer.

Jo regarda l'oeil à moitié fermé du petit serin, toucha sa petite poitrine, et, le trouvant raide et froid, secoua la tête et lui offrit sa boîte à dominos pour cercueil.

« Mettez-le dans le four, il se réchauffera peut- être, et il vivra, dit Amy.

– Pip est mort de faim, non de froid ; je ne veux pas, par-dessus le marché, le faire rôtir ; je l'envelopperai dans un linceul, et je l'enterrerai. Je n'aurai plus jamais un autre oiseau. Ah ! mon pauvre Pip ! je suis bien trop méchante pour en mériter un autre, murmura Beth, qui, assise par terre, tenait son favori près de ses lèvres, espérant, mais en vain, qu'il finirait par revivre sous ses baisers.

– L'enterrement se fera cette après-midi, et nous y assisterons toutes, dit Jo. Ne pleurez pas, petite Beth : c'est un grand malheur ; mais rien ne va bien cette semaine, et votre gentil Pip a eu le pire de l'expérience. Croyez-moi, ôtez mes dominos et mettez-les dans leur boîte ; après dîner, nous lui ferons un joli petit enterrement. »

Laissant à ses soeurs le soin de consoler Beth, elle s'en alla dans la cuisine, qu'elle trouva dans un état de confusion décourageant. Elle mit un grand tablier de cuisine et commença à ranger la pièce ; toutes ses assiettes étaient empilées et prêtes à être lavées, lorsqu'elle découvrit que son feu était éteint.

« Voilà une perspective agréable », murmura- t-elle en refermant brusquement la porte du four qui était ouverte, et en remuant vigoureusement les cendres dans lesquelles elle ne parvint pas à trouver trace de feu.

Toutefois, ayant rallumé le feu, elle pensa qu'elle ferait bien d'aller d'abord au marché pendant que l'eau chauffait. Le grand air la remit en bonne humeur, et, se flattant d'avoir fait un très bon marché, elle revint, chargée d'une très jeune langouste, de très vieilles asperges et de deux boîtes de framboises insuffisamment mûres. Hannah avait laissé du pain à faire, Meg l'avait travaillé de bonne heure, l'avait mis sur l'âtre pour le faire lever, puis l'avait... oublié ! Meg causait avec Sallie Gardiner dans le parloir, lorsqu'une porte s'ouvrit avec précipitation, et une figure toute rouge apparut, demandant si le pain n'était pas suffisamment levé lorsqu'il débordait le long des casseroles.

Sallie ne se fit pas faute de rire, et Meg fit des signes de tête et des froncements de sourcils si expressifs que l'apparition s'enfuit. Jo mit sans plus tarder le pain trop levé et peut-être aigri dans le four. Mme Marsch sortit quelques instants après. Elle s'était contentée de regarder un peu de tous côtés comment allaient les choses, et de dire un mot de consolation à Beth, occupée de coudre un linceul de soie blanche pour le pauvre Pip.

Un étrange sentiment d'abandon saisit les quatre soeurs quand elles virent partir leur mère. Mais où le désespoir les saisit, ce fut lorsque, cinq minutes après, miss Crocker arriva en leur disant qu'elle venait leur demander sans façon à dîner ! ! ! Cette dame était une vieille fille maigre et jaune, qui avait un nez pointu, des yeux inquisiteurs qui voyaient tout, et une langue qui s'aiguisait volontiers sur ce qui concernait son prochain.

Les quatre soeurs ne l'aimaient pas du tout ; mais on leur avait appris à être bonnes pour elle, simplement parce qu'elle était pauvre et âgée et qu'elle avait peu d'amis. Aussi Meg lui donna-t- elle immédiatement le fauteuil. Elle se mit même avec résignation en devoir de lui tenir compagnie. La vieille demoiselle en profita pour questionner, critiquer et raconter des histoires peu obligeantes sur les amis de la famille, et bien d'autres.

Il est impossible de décrire les anxiétés de Jo jusqu'à l'heure du dîner, qui a lieu de bonne heure en Amérique. Ce dîner de Jo resta bien longtemps célèbre dans toutes les mémoires comme un sujet de rires sans fin. Sans doute, elle avait fait de son mieux ; mais elle découvrit, ce jour-là, que, pour faire une cuisinière, il faut quelque chose de plus que de l'audace et de la bonne volonté.

Elle fut obligée de reconnaître, en servant chacun des plats de son dîner, que les têtes des asperges étaient presque toutes réduites en bouillie, et que les tiges, les branches étaient dures comme du bois ; que le pain calciné était devenu du charbon ; que les pommes de terre étaient à moitié crues ; que la langouste était belle et très rouge à l'oeil, mais vide ; que sa salade, cent fois trop assaisonnée, était exécrable, et qu'enfin, si le blanc-manger n'était que de l'eau, les framboises étaient sûres.

La pauvre Jo aurait bien voulu pouvoir se cacher sous terre en voyant ses plats aussitôt délaissés que goûtés. Amy riait sous cape, Meg semblait déconcertée, miss Crocker faisait la moue ; seul Laurie faisait à mauvais dîner bon visage. Jo comptait se rattraper sur la crème, qu'elle avait si bien battue et sucrée. En voyant Laurie en avaler gaiement une grande cuillerée, elle crut qu'elle allait pouvoir respirer. Mais que devint-elle, quand, regardant la bonne petite Beth, elle la vit toute suffoquée comme quelqu'un qui a dans la bouche quelque chose dont il ne parvient pas à se débarrasser en l'absorbant !

« Oh ! qu'y a-t-il ? s'écria Jo en tremblant.

– Du sel, bien sûr, au lieu de sucre, ma pauvre Jo, et beaucoup de sel ! » répondit Meg avec un geste tragique.

Jo poussa un gémissement en retombant sur sa chaise. Elle devin écarlate, et était sur le point de pleurer, lorsque ses yeux rencontrèrent ceux de Laurie qui, manifestement, faisait un énorme effort pour ne pas pouffer de rire. Le côté comique de l'aventure la frappa alors subitement, et, prenant bravement son parti de son infortune et de celle de ses convives, elle rit à s'en rendre malade. Chacune l'imita ; le malheureux dîner finit donc gaiement sur des olives et des éclats de rire.

« Je n'ai pas assez de force d'esprit pour débarrasser la table maintenant, dit Jo, lorsque le dîner fut terminé, et que miss Crocker fut partie pour raconter sa déconvenue à d'autres amis ; il nous reste à procéder à l'enterrement du pauvre Pip. »

Laurie creusa sous les lilas du bosquet une tombe pour le petit Pip. Sa maîtresse au coeur tendre l'y déposa avec beaucoup de larmes ; on le couvrit de mousse, et l'on déposa une guirlande de violettes et de millet sur la pierre qui portait l'épitaphe suivante, que Jo avait composée au milieu des ennuis de son dîner :

ICI REPOSE PIP MARSCH

ESTIMÉ ENTRE TOUS POUR SES TALENTS DE CHANTEUR.

IL MOURUT LE 7 JUIN,

TENDREMENT AIMÉ ET PLEURÉ

PAR TOUS CEUX QUI L'ONT CONNU ;

IL NE SERA JAMAIS REMPLACÉ.

La cérémonie terminée, Beth, tout émotionnée, se retira dans sa chambre pour se recueillir ; mais les lits n'étaient pas faits. Elle essaya de se distraire en les faisant et en mettant la chambre en ordre. Meg aida Jo à ranger les restes du festin. Cela leur prit la moitié de l'après-midi, et les fatigua tellement qu'elles convinrent entre elles de se contenter pour leur souper de pain et de rôties.

Laurie emmena Amy pour lui faire faire une promenade en voiture, ce qui était une action charitable, car le dîner de Jo l'avait mal disposée.

Lorsque Mme Marsch revint et qu'elle vit ses trois filles occupées à ranger, elle eût pu se rendre compte d'une partie du résultat de l'épreuve à laquelle elle les avait soumises. Avant que les petites maîtresses de maison eussent pu se reposer, il arriva des visites, et elles durent se dépêcher de s'habiller pour les recevoir. Quand, enfin, le crépuscule arriva, elles vinrent s'asseoir l'une après l'autre sur le seuil de la porte du jardin, à côté des roses de juin qui commençaient à fleurir. Chacune d'elles soupirait comme après des mois de fatigues et d'ennuis.

« Quelle terrible journée nous venons de passer ! dit Jo qui était toujours la première à parler.

– Elle m'a paru si désagréable ! soupira Meg.

– Elle ne ressemblait guère à nos bonnes journées d'autrefois, ajouta Amy.

– Elle ne pouvait pas être aussi douce que les autres, sans maman et sans Pip, soupira Beth en regardant la petite cage vide avec des larmes dans les yeux.

– Me voici revenue, ma chérie, et demain vous pourrez avoir, non pas un autre Pip, mais un autre oiseau, si vous le désirez.

– Oh ! non, mère, dit Beth, je ne veux pas oublier Pip... »

Mme Marsch vint alors prendre place et se reposer au milieu d'elles.

« Eh bien ! Êtes-vous heureuses de votre expérience ? Désirez-vous la prolonger d'une semaine ? » demanda-t-elle à ses filles en prenant Beth sur ses genoux.

Les quatre soeurs se tournèrent vers elle comme les fleurs vers le soleil. Jo répondit d'un ton décidé :

« Oh ! non ! »

Et ses soeurs répétèrent en choeur :

« Oh ! non ! oh ! non !

– Vous pensez alors que les jours où le travail alterne avec la récréation ont leur mérite ?

– Il n'est pas bon de ne faire que s'amuser, dit Jo en secouant la tête d'un air grave. Quant à moi, j'en suis fatiguée, et je veux me mettre à travailler sérieusement pendant mes vacances.

– Vous pourriez apprendre à faire un peu de cuisine ; c'est un talent utile, qu'aucune femme ne devrait ignorer, dit Mme Marsch, qui avait rencontré miss Crocker et l'avait entendue décrire le fameux dîner de Jo. Je me reproche de ne vous avoir pas donné, comme cela se pratique dans bien des pays, des leçons de ménage.

– Oh ! maman, est-ce que vous êtes sortie et nous avez laissé tout à faire rien que pour voir comment nous nous en tirerions ? demanda Meg, qui, pendant toute la journée, avait eu des soupçons.

– Oui ; je voulais vous faire voir que le bonheur de toute une famille dépend du concours de chacun de ses membres. Vous vous êtes assez bien tirées des premiers jours de la semaine, quand Hannah et moi avons fait votre ouvrage ; je ne suppose pas cependant que vous ayez été très heureuses pendant ces jours-là. Mon épreuve a eu pour but de vous faire comprendre ce qui arrive lorsque chacun ne pense qu'à soi. Ne trouvez-vous pas qu'il est plus doux de s'entraider et de supporter chacune sa petite part du fardeau, afin d'avoir un intérieur ordonné en vue de toute la famille ?

– Oui, mère, oui !

– Vous verrez, maman, nous allons travailler comme des abeilles, et nous aimerons notre travail, dit Jo. Quant à moi, je vais apprendre à faire le ménage de la cuisine. Je veux avoir un véritable succès la première fois que je donnerai un dîner.

– Et moi, je coudrai le linge de papa, au lieu de vous laisser toute la tâche, maman ; c'est bien mal à moi de n'aimer pas assez à coudre régulièrement, dit Meg. Ce serait plus utile que la mauvaise besogne que je fais quand j'entreprends de l'arranger mes robes, qui vont bien comme elles sont, et que je gâte en voulant en améliorer la façon.

– Moi, je ferai mes devoirs tous les jours, et je ne passerai pas trop de temps à ma musique et à mes poupées ; il faut étudier et non pas jouer », dit Beth.

Et Amy, suivant l'exemple de ses soeurs, s'écria :

« J'apprendrai à faire des boutonnières, et je ferai attention à ma manière de parler.

– Très bien, dit Mme Marsch ; je suis satisfaite de notre expérience, et je m'imagine que nous n'aurons pas à la recommencer. Mais ne vous jetez pas dans l'autre extrême, et ne travaillez pas jusqu'à vous lasser du travail. Ayez des heures régulières de travail et de récréation, et prouvez, en employant bien votre temps, que vous en comprenez la valeur.

– Oh ! mère, soyez-en bien sûre, nous nous souviendrons de la semaine sans travail ! » s'écrièrent-elles comme d'une seule voix.

Et elles tinrent leur promesse.

Une expérience XI Experience XI 경험 XI

Et Jo, qui elle-même n'était pas dans son humeur habituelle, se précipita dans le parloir, où elle aperçut Beth sanglotant sur son petit oiseau Pip, qu'elle venait de trouver mort dans sa cage, ses petites pattes étendues pathétiquement comme s'il eût imploré la nourriture qui lui avait manqué. Y Jo, que no estaba de su humor habitual, corrió al salón, donde vio a Beth sollozando sobre su pajarito Pip, que acababa de encontrar muerto en su jaula, con las patitas estiradas patéticamente como si hubiera estado mendigando la comida que le había faltado.

« C'est ma faute, je l'ai oublié ; il ne lui reste pas une seule goutte d'eau ni un seul grain de millet ! Oh ! Pip, Pip, comment ai-je pu être si cruelle pour vous ? » s'écriait Beth en pleurant et prenant la pauvre petite bête dans ses mains pour essayer de la ranimer.

Jo regarda l'oeil à moitié fermé du petit serin, toucha sa petite poitrine, et, le trouvant raide et froid, secoua la tête et lui offrit sa boîte à dominos pour cercueil. Jo miró el ojo semicerrado del pequeño sereno, le tocó el pechito y, al encontrarlo rígido y frío, sacudió la cabeza y le ofreció su caja de dominó como ataúd.

« Mettez-le dans le four, il se réchauffera peut- être, et il vivra, dit Amy. Mételo en el horno, a lo mejor se calienta y vive", dice Amy.

– Pip est mort de faim, non de froid ; je ne veux pas, par-dessus le marché, le faire rôtir ; je l'envelopperai dans un linceul, et je l'enterrerai. - Pip murió de hambre, no de frío; no quiero asarlo encima de todo lo demás; lo envolveré en un sudario y lo enterraré. Je n'aurai plus jamais un autre oiseau. Ah ! mon pauvre Pip ! je suis bien trop méchante pour en mériter un autre, murmura Beth, qui, assise par terre, tenait son favori près de ses lèvres, espérant, mais en vain, qu'il finirait par revivre sous ses baisers. Soy demasiado malvada para merecer otro", murmuró Beth, que se sentó en el suelo y se acercó a su favorito a los labios, esperando en vano que volviera a la vida bajo sus besos.

– L'enterrement se fera cette après-midi, et nous y assisterons toutes, dit Jo. - The funeral will be this afternoon, and we'll all attend," says Jo. Ne pleurez pas, petite Beth : c'est un grand malheur ; mais rien ne va bien cette semaine, et votre gentil Pip a eu le pire de l'expérience. Croyez-moi, ôtez mes dominos et mettez-les dans leur boîte ; après dîner, nous lui ferons un joli petit enterrement. »

Laissant à ses soeurs le soin de consoler Beth, elle s'en alla dans la cuisine, qu'elle trouva dans un état de confusion décourageant. Elle mit un grand tablier de cuisine et commença à ranger la pièce ; toutes ses assiettes étaient empilées et prêtes à être lavées, lorsqu'elle découvrit que son feu était éteint. Se puso un gran delantal de cocina y comenzó a ordenar la habitación; todos sus platos estaban apilados y listos para ser lavados, cuando descubrió que su fuego se había apagado.

« Voilà une perspective agréable », murmura- t-elle en refermant brusquement la porte du four qui était ouverte, et en remuant vigoureusement les cendres dans lesquelles elle ne parvint pas à trouver trace de feu.

Toutefois, ayant rallumé le feu, elle pensa qu'elle ferait bien d'aller d'abord au marché pendant que l'eau chauffait. Le grand air la remit en bonne humeur, et, se flattant d'avoir fait un très bon marché, elle revint, chargée d'une très jeune langouste, de très vieilles asperges et de deux boîtes de framboises insuffisamment mûres. The fresh air put her in a good mood, and, flattering herself that she had made a very good deal, she returned, loaded with a very young lobster, some very old asparagus and two boxes of under-ripe raspberries. Hannah avait laissé du pain à faire, Meg l'avait travaillé de bonne heure, l'avait mis sur l'âtre pour le faire lever, puis l'avait... oublié ! Hannah had left bread to make, Meg had worked it early, put it on the hearth to rise, and then forgotten about it! Meg causait avec Sallie Gardiner dans le parloir, lorsqu'une porte s'ouvrit avec précipitation, et une figure toute rouge apparut, demandant si le pain n'était pas suffisamment levé lorsqu'il débordait le long des casseroles. Meg was chatting with Sallie Gardiner in the parlour, when a door opened hurriedly, and a flushed figure appeared, asking if the bread wasn't risen enough when it overflowed the length of the pans. Meg estaba charlando con Sallie Gardiner en el salón cuando una puerta se abrió apresuradamente y apareció una figura con la cara roja, preguntando si el pan había subido lo suficiente cuando se derramó de las cacerolas.

Sallie ne se fit pas faute de rire, et Meg fit des signes de tête et des froncements de sourcils si expressifs que l'apparition s'enfuit. Sallie didn't fail to laugh, and Meg nodded and frowned so expressively that the apparition fled. Sallie se rió, y Meg asintió y frunció el ceño tan expresivamente que la aparición huyó. Jo mit sans plus tarder le pain trop levé et peut-être aigri dans le four. Without further ado, Jo put the over-risen and perhaps sour bread in the oven. Sin más preámbulos, Jo metió en el horno el pan demasiado fermentado y posiblemente agrio. Mme Marsch sortit quelques instants après. Mrs. Marsch came out a few moments later. Elle s'était contentée de regarder un peu de tous côtés comment allaient les choses, et de dire un mot de consolation à Beth, occupée de coudre un linceul de soie blanche pour le pauvre Pip.

Un étrange sentiment d'abandon saisit les quatre soeurs quand elles virent partir leur mère. Mais où le désespoir les saisit, ce fut lorsque, cinq minutes après, miss Crocker arriva en leur disant qu'elle venait leur demander sans façon à dîner ! But where despair gripped them was when, five minutes later, Miss Crocker arrived, telling them she'd come to ask them in no uncertain terms for dinner! Pero se desesperaron cuando, cinco minutos después, llegó la señorita Crocker y les dijo que había venido a invitarles a cenar. ! ! Cette dame était une vieille fille maigre et jaune, qui avait un nez pointu, des yeux inquisiteurs qui voyaient tout, et une langue qui s'aiguisait volontiers sur ce qui concernait son prochain. This lady was a skinny, yellow spinster with a pointed nose, inquisitive, all-seeing eyes, and a tongue that readily sharpened on what concerned her neighbor. Esta señora era una solterona flaca y amarilla, con una nariz puntiaguda, unos ojos inquisitivos que lo veían todo y una lengua que no tardaba en captar cualquier cosa que preocupara a su vecina.

Les quatre soeurs ne l'aimaient pas du tout ; mais on leur avait appris à être bonnes pour elle, simplement parce qu'elle était pauvre et âgée et qu'elle avait peu d'amis. Aussi Meg lui donna-t- elle immédiatement le fauteuil. Así que Meg le cedió inmediatamente la silla. Elle se mit même avec résignation en devoir de lui tenir compagnie. La vieille demoiselle en profita pour questionner, critiquer et raconter des histoires peu obligeantes sur les amis de la famille, et bien d'autres. The old lady took the opportunity to question, criticize and tell unhelpful stories about the family's friends, and many others.

Il est impossible de décrire les anxiétés de Jo jusqu'à l'heure du dîner, qui a lieu de bonne heure en Amérique. It's impossible to describe Jo's anxieties until dinnertime, which comes early in America. Ce dîner de Jo resta bien longtemps célèbre dans toutes les mémoires comme un sujet de rires sans fin. Sans doute, elle avait fait de son mieux ; mais elle découvrit, ce jour-là, que, pour faire une cuisinière, il faut quelque chose de plus que de l'audace et de la bonne volonté. No doubt she had done her best, but that day she discovered that to be a cook, you need something more than audacity and good will.

Elle fut obligée de reconnaître, en servant chacun des plats de son dîner, que les têtes des asperges étaient presque toutes réduites en bouillie, et que les tiges, les branches étaient dures comme du bois ; que le pain calciné était devenu du charbon ; que les pommes de terre étaient à moitié crues ; que la langouste était belle et très rouge à l'oeil, mais vide ; que sa salade, cent fois trop assaisonnée, était exécrable, et qu'enfin, si le blanc-manger n'était que de l'eau, les framboises étaient sûres. She was obliged to admit, as she served each of her dinner courses, that the asparagus heads were almost all reduced to mush, and that the stalks and branches were as hard as wood; that the charred bread had become charcoal; that the potatoes were half raw; that the lobster was beautiful and very red to the eye, but empty; that her salad, a hundred times over-seasoned, was execrable, and that finally, if the blancmange was only water, the raspberries were safe. Se vio obligada a admitir, mientras servía cada uno de los platos de su cena, que las cabezas de los espárragos estaban casi todas reducidas a papilla, y que los tallos y las ramas estaban duros como la madera; que el pan carbonizado se había convertido en carbón; que las patatas estaban medio crudas; que la langosta era hermosa y muy roja a la vista, pero vacía; que su ensalada, cien veces condimentada en exceso, era execrable, y que, por último, si el manjar blanco era sólo agua, las frambuesas estaban a salvo.

La pauvre Jo aurait bien voulu pouvoir se cacher sous terre en voyant ses plats aussitôt délaissés que goûtés. Poor Jo would have liked to be able to hide underground, seeing her dishes as soon abandoned as tasted. A la pobre Jo le hubiera gustado poder esconderse bajo tierra al ver que abandonaban sus platos nada más probarlos. Amy riait sous cape, Meg semblait déconcertée, miss Crocker faisait la moue ; seul Laurie faisait à mauvais dîner bon visage. Amy laughed under her breath, Meg seemed bewildered, Miss Crocker pouted; only Laurie made a good face at a bad dinner. Amy se rió en voz baja, Meg parecía desconcertada, la señorita Crocker hizo un mohín; sólo Laurie puso cara de valiente. Jo comptait se rattraper sur la crème, qu'elle avait si bien battue et sucrée. Jo intended to make up for it on the cream, which she had beaten and sweetened so well. Jo pretendía compensarlo con la nata, que tan bien había batido y endulzado. En voyant Laurie en avaler gaiement une grande cuillerée, elle crut qu'elle allait pouvoir respirer. Cuando vio a Laurie tragar alegremente una gran cucharada, pensó que iba a poder respirar. Mais que devint-elle, quand, regardant la bonne petite Beth, elle la vit toute suffoquée comme quelqu'un qui a dans la bouche quelque chose dont il ne parvient pas à se débarrasser en l'absorbant ! But what did she think, when, looking at good little Beth, she saw her all suffocated like someone who has something in their mouth that they can't get rid of by absorbing it! Pero ¡qué pensó cuando, al mirar a la buena de Beth, la vio toda atragantada como quien tiene algo en la boca que no puede quitarse de encima tragándoselo!

« Oh ! qu'y a-t-il ? s'écria Jo en tremblant.

– Du sel, bien sûr, au lieu de sucre, ma pauvre Jo, et beaucoup de sel ! » répondit Meg avec un geste tragique.

Jo poussa un gémissement en retombant sur sa chaise. Elle devin écarlate, et était sur le point de pleurer, lorsque ses yeux rencontrèrent ceux de Laurie qui, manifestement, faisait un énorme effort pour ne pas pouffer de rire. Se puso roja y estaba a punto de llorar cuando sus ojos se cruzaron con los de Laurie, que obviamente estaba haciendo un gran esfuerzo por no reírse. Le côté comique de l'aventure la frappa alors subitement, et, prenant bravement son parti de son infortune et de celle de ses convives, elle rit à s'en rendre malade. The comical side of the adventure suddenly struck her, and, bravely taking her share of misfortune and that of her guests, she laughed herself sick. El lado cómico de la aventura la sorprendió de repente y, aceptando valientemente su desgracia y la de sus invitados, se desternilló de risa. Chacune l'imita ; le malheureux dîner finit donc gaiement sur des olives et des éclats de rire. And so the unhappy dinner ended with olives and laughter. Todos siguieron el ejemplo, así que la infeliz cena terminó felizmente con aceitunas y muchas risas.

« Je n'ai pas assez de force d'esprit pour débarrasser la table maintenant, dit Jo, lorsque le dîner fut terminé, et que miss Crocker fut partie pour raconter sa déconvenue à d'autres amis ; il nous reste à procéder à l'enterrement du pauvre Pip. »

Laurie creusa sous les lilas du bosquet une tombe pour le petit Pip. Sa maîtresse au coeur tendre l'y déposa avec beaucoup de larmes ; on le couvrit de mousse, et l'on déposa une guirlande de violettes et de millet sur la pierre qui portait l'épitaphe suivante, que Jo avait composée au milieu des ennuis de son dîner :

ICI REPOSE PIP MARSCH

ESTIMÉ ENTRE TOUS POUR SES TALENTS DE CHANTEUR.

IL MOURUT LE 7 JUIN,

TENDREMENT AIMÉ ET PLEURÉ TENDERLY LOVED AND MOURNED

PAR TOUS CEUX QUI L'ONT CONNU ;

IL NE SERA JAMAIS REMPLACÉ.

La cérémonie terminée, Beth, tout émotionnée, se retira dans sa chambre pour se recueillir ; mais les lits n'étaient pas faits. Cuando terminó la ceremonia, una emocionada Beth se retiró a su habitación para reflexionar, pero las camas no estaban hechas. Elle essaya de se distraire en les faisant et en mettant la chambre en ordre. Meg aida Jo à ranger les restes du festin. Meg ayudó a Jo a guardar las sobras del banquete. Cela leur prit la moitié de l'après-midi, et les fatigua tellement qu'elles convinrent entre elles de se contenter pour leur souper de pain et de rôties.

Laurie emmena Amy pour lui faire faire une promenade en voiture, ce qui était une action charitable, car le dîner de Jo l'avait mal disposée. Laurie took Amy for a drive, which was a charitable thing to do, as Jo's dinner had left her feeling ill-disposed. Laurie se llevó a Amy a dar una vuelta en coche, lo cual fue muy caritativo, ya que la cena de Jo la había dejado maltrecha.

Lorsque Mme Marsch revint et qu'elle vit ses trois filles occupées à ranger, elle eût pu se rendre compte d'une partie du résultat de l'épreuve à laquelle elle les avait soumises. When Mrs. Marsch returned and saw her three daughters busy tidying up, she could see part of the result of the test she had put them through. Cuando la Sra. Marsch regresó y vio a sus tres hijas ocupadas en ordenar, pudo ver parte del resultado de la prueba a la que las había sometido. Avant que les petites maîtresses de maison eussent pu se reposer, il arriva des visites, et elles durent se dépêcher de s'habiller pour les recevoir. Before the little housewives could rest, visitors arrived, and they had to hurry to get dressed to receive them. Antes de que las pequeñas amas de casa pudieran descansar, llegaron visitas, y tuvieron que apresurarse a vestirse para recibirlas. Quand, enfin, le crépuscule arriva, elles vinrent s'asseoir l'une après l'autre sur le seuil de la porte du jardin, à côté des roses de juin qui commençaient à fleurir. Cuando por fin llegó el crepúsculo, se sentaron uno a uno en el umbral del jardín, junto a las rosas de junio que empezaban a florecer. Chacune d'elles soupirait comme après des mois de fatigues et d'ennuis. Each of them sighed as if after months of fatigue and trouble.

« Quelle terrible journée nous venons de passer ! "What a terrible day we've just had! dit Jo qui était toujours la première à parler. said Jo, who was always the first to speak.

– Elle m'a paru si désagréable ! - She seemed so unpleasant! soupira Meg.

– Elle ne ressemblait guère à nos bonnes journées d'autrefois, ajouta Amy.

– Elle ne pouvait pas être aussi douce que les autres, sans maman et sans Pip, soupira Beth en regardant la petite cage vide avec des larmes dans les yeux. - She couldn't be as sweet as the others, without Mum and Pip, sighed Beth, looking at the empty little cage with tears in her eyes.

– Me voici revenue, ma chérie, et demain vous pourrez avoir, non pas un autre Pip, mais un autre oiseau, si vous le désirez. - I'm back, darling, and tomorrow you can have, not another Pip, but another bird, if you like.

– Oh ! non, mère, dit Beth, je ne veux pas oublier Pip... » No, Mother," said Beth, "I don't want to forget Pip..."

Mme Marsch vint alors prendre place et se reposer au milieu d'elles.

« Eh bien ! Êtes-vous heureuses de votre expérience ? Désirez-vous la prolonger d'une semaine ? » demanda-t-elle à ses filles en prenant Beth sur ses genoux.

Les quatre soeurs se tournèrent vers elle comme les fleurs vers le soleil. Jo répondit d'un ton décidé :

« Oh ! non ! »

Et ses soeurs répétèrent en choeur :

« Oh ! non ! oh ! non !

– Vous pensez alors que les jours où le travail alterne avec la récréation ont leur mérite ? - So you think that days when work alternates with playtime have their merits?

– Il n'est pas bon de ne faire que s'amuser, dit Jo en secouant la tête d'un air grave. - It's no good just having fun," says Jo, shaking her head gravely. Quant à moi, j'en suis fatiguée, et je veux me mettre à travailler sérieusement pendant mes vacances. As for me, I'm tired of it, and I want to start working seriously during my vacations.

– Vous pourriez apprendre à faire un peu de cuisine ; c'est un talent utile, qu'aucune femme ne devrait ignorer, dit Mme Marsch, qui avait rencontré miss Crocker et l'avait entendue décrire le fameux dîner de Jo. Je me reproche de ne vous avoir pas donné, comme cela se pratique dans bien des pays, des leçons de ménage. I reproach myself for not having given you lessons in housekeeping, as is the practice in many countries. Me reprocho no haberte dado lecciones de limpieza, como se hace en muchos países.

– Oh ! maman, est-ce que vous êtes sortie et nous avez laissé tout à faire rien que pour voir comment nous nous en tirerions ? Mom, did you go out and leave everything to us just to see how we'd get on? Mamá, ¿te fuiste y nos dejaste todo a nosotros sólo para ver cómo nos iba? demanda Meg, qui, pendant toute la journée, avait eu des soupçons.

– Oui ; je voulais vous faire voir que le bonheur de toute une famille dépend du concours de chacun de ses membres. Vous vous êtes assez bien tirées des premiers jours de la semaine, quand Hannah et moi avons fait votre ouvrage ; je ne suppose pas cependant que vous ayez été très heureuses pendant ces jours-là. Mon épreuve a eu pour but de vous faire comprendre ce qui arrive lorsque chacun ne pense qu'à soi. Ne trouvez-vous pas qu'il est plus doux de s'entraider et de supporter chacune sa petite part du fardeau, afin d'avoir un intérieur ordonné en vue de toute la famille ?

– Oui, mère, oui !

– Vous verrez, maman, nous allons travailler comme des abeilles, et nous aimerons notre travail, dit Jo. Quant à moi, je vais apprendre à faire le ménage de la cuisine. Je veux avoir un véritable succès la première fois que je donnerai un dîner.

– Et moi, je coudrai le linge de papa, au lieu de vous laisser toute la tâche, maman ; c'est bien mal à moi de n'aimer pas assez à coudre régulièrement, dit Meg. - Y yo coseré la colada de papá en vez de dejarte todo el trabajo a ti, mamá; es malo por mi parte que no me guste coser con suficiente regularidad -dijo Meg. Ce serait plus utile que la mauvaise besogne que je fais quand j'entreprends de l'arranger mes robes, qui vont bien comme elles sont, et que je gâte en voulant en améliorer la façon. It would be more useful than the bad work I do when I undertake to arrange my dresses, which are fine as they are, and which I spoil by wanting to improve their manner. Eso sería más útil que el mal trabajo que hago cuando me pongo a arreglar mis vestidos, que están bien como están, y que estropeo intentando mejorar su aspecto.

– Moi, je ferai mes devoirs tous les jours, et je ne passerai pas trop de temps à ma musique et à mes poupées ; il faut étudier et non pas jouer », dit Beth.

Et Amy, suivant l'exemple de ses soeurs, s'écria :

« J'apprendrai à faire des boutonnières, et je ferai attention à ma manière de parler. "Aprenderé a hacer ojales y tendré cuidado al hablar.

– Très bien, dit Mme Marsch ; je suis satisfaite de notre expérience, et je m'imagine que nous n'aurons pas à la recommencer. - Very well," says Mrs. Marsch, "I'm satisfied with our experiment, and I imagine we won't have to do it again. Mais ne vous jetez pas dans l'autre extrême, et ne travaillez pas jusqu'à vous lasser du travail. Pero no te vayas al otro extremo ni trabajes hasta la extenuación. Ayez des heures régulières de travail et de récréation, et prouvez, en employant bien votre temps, que vous en comprenez la valeur. Keep regular hours of work and recreation, and prove, by making good use of your time, that you understand its value.

– Oh ! mère, soyez-en bien sûre, nous nous souviendrons de la semaine sans travail ! » s'écrièrent-elles comme d'une seule voix.

Et elles tinrent leur promesse. And they kept their promise. Y cumplieron su promesa.