BAIN DE SANG 2009-09-30
Un bain de sang ! C'est l'expression utilisée par de très nombreux médias, et notamment par RFI, pour évoquer les graves événements qui viennent de se dérouler en Guinée, à Conakry. L'armée a donc tiré sur les manifestants qui étaient rassemblés dans un stade. Les morts se comptent par dizaines. Alors on parle d'un bain de sang. L'expression s'entend assez souvent pour exprimer l'horreur de la situation, pour exprimer aussi qu'on est choqué et effrayé par la scène.
L'image est très forte et correspond de près à une réalité. Comme si donc les corps avaient saigné au point que le rapport au saignement s'était inversé. Il ne s'agit plus du sang qui s'écoule des plaies, et donc qui sort du corps des victimes. Il y en a tant qu'il entoure tout, et ce sont les corps qui baignent dans le sang. Le sang est donc devenu le milieu dans lequel reposent les morts ou les blessés.
Mais l'expression s'emploie presque toujours dans le même contexte, il s'agit de l'issue d'un affrontement. La plupart du temps on dit « ça s'est terminé dans un bain de sang ». Et on imagine donc qu'on aurait peut-être pu l'éviter, ou que tout au moins, il y a eu un moment où on ne savait pas comment l'affaire finirait. Et puis soudain, tout bascule dans l'horreur qu'on a pas su éviter.
On remarque donc que cette expression se trouve particulièrement pour parler, par exemple, d'une prise d'otage qui tourne mal, ou d'un cambriolage, d'un règlement de comptes, ou d'une agression. Le rapport de force commence par être placé sous le signe de la menace, sans violence sanglante, et soudain tout se précipite.
On trouve des expressions équivalentes, même si elles sont moins porteuses d'un effroi saisissant.
Un carnage par exemple. Le mot fait moins image, mais son origine n'écarte pas le sang, puisqu'il est formé sur le mot chair. Ce mot étrangement a eu des sens bien différents au cours de l'histoire de la langue française. Le carnage a été la viande qu'on donnait à manger aux animaux, et puis les périodes de l'année où on avait le droit de manger de la viande, dans la religion catholique.
Enfin le sens moderne est apparu, un carnage est une tuerie, et le mot insiste fortement sur la barbarie qui est à l'œuvre. Il s'agit d'une scène terrible, la cruauté en est visible, et l'origine du terme est encore à l'œuvre. Comme si les corps étaient transformés en chair, comme si, sous la violence torturante, ils étaient retournés à l'état de chair informe.
Le mot insiste donc sur l'intensité et souvent sur l'ampleur de ces attaques. Mais on n'a pas tellement l'idée d'une bataille à armes égales. Il y a le côté des victimes et celui des bourreaux ; exécution sanguinaire plutôt qu'affrontement. Ce qu'on trouve également dans un autre mot, qui a sensiblement le même sens, c'est massacre.
Coproduction du Centre national de Documentation Pédagogique. http://www.cndp.fr/