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Première & Dernière fois, Première & Dernière fois 07

Première & Dernière fois 07

Nous avons tous et toutes des premières et des dernières fois.

Et pour beaucoup, le cheminement entre les deux est une véritable aventure.

J'ai décidé de rencontrer des inconnus, ou presque inconnus, de partager avec elles

et eux ces confidences intimes, et de mesurer l'évolution de leurs désirs entre la première

et la dernière fois.

Pour le premier épisode de cette deuxième saison, j'ai rencontré Cécile, une rédactrice-correctrice

freelance de 34 ans.

C'est une femme qui se définit comme cisgenre et hétérosexuelle.

Elle est malvoyante de naissance.

Cécile m'a accueillie chez elle, dans sa maison coquette et chaleureuse du nord de

la France.

Cécile, bonjour, et merci de nous accueillir chez toi.

Merci, bonjour.

Je vais commencer par la question rituelle, on se vouvoie ou on se tutoie ?

On se tutoie.

Parfait.

Alors Cécile, tu as 34 ans et tu es malvoyante.

Est-ce que tu peux définir exactement ton handicap ? On peut dire handicap ?

On peut dire handicap, c'est comme ça que ça s'appelle.

Malvoyant, c'est dans la catégorie de ce qu'on appelle les déficients visuels, donc

ça comprend les malvoyants et les personnes aveugles.

Aveugle, c'est quelqu'un qui ne voit entre guillemets rien du tout.

En réalité, une personne aveugle a quand même une perception de lumière ou de couleur

ou de choses comme ça.

C'est pas forcément le noir complet.

Moi, en tant que malvoyante, je suis la marge juste au-dessus.

C'est une très très forte myopie.

J'ai un de mes deux yeux qui est considéré comme aveugle.

J'ai un oeil qui, avec correction, avec lequel je vois un dixième de ce qu'une personne

valide voit.

Avec correction ? Une fois que je suis corrigée.

Je ne peux pas monter au-delà de ça.

Si ça peut donner une idée à des personnes qui voient, en général, ça aide à comprendre.

Du coup, c'est de naissance ? Du coup, c'est de naissance.

Ça n'a pas évolué.

Je suis née avec ça et j'ai grandi et je me suis construite avec ça.

On va parler de la façon dont tu t'es construite et en particulier au niveau sexuel.

Comment on construit son imaginaire sexuel quand on ne voit pas ou presque pas ?

Son imaginaire sexuel, c'est vrai qu'il n'est pas tellement basé sur le visuel.

Ce n'est pas là qu'il est stimulé.

Je sais que je suis très réactive aux odeurs, de manière générale, dans ma vie, dans

mon quotidien.

C'est un sens auquel je me fie beaucoup, pour beaucoup de choses, beaucoup d'actes

du quotidien et qui jouent beaucoup dans le fait que je vais ressentir du désir ou pas,

bien plus que ce à quoi va ressembler la personne en face de moi, par exemple.

Je pose la question parce que je pensais au fait que, moi, comme je pense beaucoup

de gens de notre génération, on s'est vraiment construit avec le porno.

En tout cas, on s'est construit avec, j'espère pas totalement, mais en tout cas, on a grandi

avec.

Que ce soit les magazines, que ce soit les films, est-ce que toi aussi ?

Alors, moi, j'ai commencé à en consommer assez tard, en fait.

Plutôt vers 26, 27 ans, quelque chose comme ça.

Avant ça, j'étais déjà tombée sur des images, mais ça ne m'avait vraiment pas intéressée.

Pas plus que ça.

Après, oui, je peux en consommer.

Moi, je suis capable de voir ce qu'il y a sur un écran.

C'est juste une question de distance.

Donc, je peux tout à fait accéder à ces images.

Après, c'est vrai que ce n'est pas mon canal préféré de stimulation, on va dire.

Je vais être beaucoup plus touchée par, comme je disais, une odeur.

Les voix jouent beaucoup aussi.

Et le toucher, en fin de compte, c'est les autres sens qui interviennent en premier.

On va parler de ta première fois.

Est-ce que tu t'en souviens ?

Je me souviens de ma première fois, absolument.

T'avais quel âge ?

J'avais 18 ans, et quelques mois.

Comment ça s'est passé ?

Comment ça s'est passé ?

J'étais avec un garçon depuis quelques mois.

C'était un de mes premiers petits copains.

Pas le tout premier, mais un des premiers.

Et puis, en fait, lui, c'était sa première aussi.

On était tous les deux extrêmement maladroits.

C'était pas plus que ça scénarisé ou préparé, même si ça représentait quelque chose,

que ce soit la première.

On n'a pas sorti les bougies, on l'a pas fait comme dans une série ou un mauvais film américain.

C'était relativement spontané, hyper maladroit, très douloureux en ce qui me concerne.

Mais je crois qu'en fait, avec le recul, je crois que j'étais pas prête du tout,

que j'en avais pas tellement envie.

J'étais consentante, attention, mais je crois que j'en avais pas tellement envie,

que c'était plus pour me conformer à une attente, pour me débarrasser d'une corvée,

plus que par désir.

Tu savais ce qui devait se passer ?

Oui.

Tu avais étudié la théorie ?

La théorie, je la connaissais.

Ce qu'il y avait à savoir pour une première, ça suffisait, je le savais.

Donc j'ai pas été surprise là-dessus, mais c'était pas un moment de plaisir, non.

Franchement pas.

T'as pas eu de plaisir du tout ?

Non.

Désolée.

Ah bah non, bah...

Non c'est pas toi qui le dis.

Désolée pour toi.

C'est pour ça.

Désolée pour toi franchement.

Bah c'est que je suis auprès de lui, merde.

Je suis désolée pour moi aussi.

C'est dommage.

Est-ce que t'avais déjà eu du plaisir avant, toute seule ?

Alors toute seule non, parce que c'est pareil, à ma situation, c'est un truc que j'ai commencé

très très tard, vers 24-25 ans je dirais.

Avant ça, alors je ne sais pas si c'est parce que je suis quelqu'un qui a de manière

générale pas un imaginaire sexuel très développé, je suis quelqu'un qui a pas beaucoup,

même encore aujourd'hui j'ai assez peu de désirs en fait, c'est pas du tout un moteur

dans ma vie la sexualité, c'est un truc parmi d'autres.

Alors peut-être pour ça, est-ce que l'éducation catholique un petit peu a joué ?

Sans doute que oui dans une certaine mesure, j'imagine.

Mais toujours est-il que le seul plaisir que j'avais pu avoir avant ma première fois,

c'était des espèces de...

Comment...

Enfin je décrirais ça un petit peu comme des petites décharges électriques, on ressent

un truc, on sent que ça pourrait aller plus loin, que ça pourrait être plus fort, plus

grand, mais bon, c'est vraiment ça, ça fait comme une petite décharge.

Ça, ça m'était déjà arrivé dans des moments tendres avec le copain, c'est con,

tu vas le sentir qui est excité contre toi, tu joues avec ça, ça oui.

J'avais déjà ressenti du plaisir.

Est-ce que tu t'es sentie différente après cette première fois ?

J'étais surprise de pas me sentir différente parce qu'on en fait tellement tout un foin.

À l'adolescence, on est lycéens, moi en plus comme j'avais un peu plus de 18 ans,

d'autres amis étaient passés par ça avant, c'était un gros sujet à cet âge-là entre

nous, enfin entre copains.

Et en fin de compte, il y avait un côté un peu tout ça pour ça, enfin pourquoi on

en fait tout un monde en fin de compte ? Rien n'a changé.

Je me suis pas réveillée en me disant ça y est je suis une femme, enfin pas du tout.

Tu t'es pas dit que tu voulais continuer à explorer, que c'était presque un premier

pas dans quelque chose ?

Bah non parce qu'encore une fois, je crois que j'étais pas prête pour ça, je crois

que j'étais pas mûre pour ça, pas assez mature sexuellement, j'avais pas exploré

moi mon propre désir, mon imaginaire, etc.

J'étais pas du tout allée là-dedans et je pense qu'en voulant me conformer, en fin

de compte, je me suis presque un peu tirée une balle dans le pied, il m'a fallu un moment

avant de vraiment m'approprier ma sexualité, il m'a fallu pas mal d'années.

T'es restée avec lui après ?

C'est une histoire qui a duré en tout et pour tout, je dirais 4-5 mois, donc entre

le moment où a eu lieu la première fois et le moment où on s'est séparés, y a

dû se passer un mois ou deux.

Il t'a pas redemandé pour refaire une deuxième fois ?

Si, y en a eu d'autres après, mais enfin pareil, vite fait, super maladroit, super

franchement pas plaisant pour moi, et lui en était désolé, et en même temps, forcément

c'était un mec qui avait quasiment mon âge, il était comme un dingue, et moi je

disais non mais en fait ça m'intéresse pas, ça me saoule un peu, arrête tu me

chatouilles, enfin bon, j'étais pas du tout dans le délire, l'histoire c'est fini,

pas à cause de ça, mais c'est tout.

Après c'est quelqu'un avec qui je suis très très amie aujourd'hui, le temps a

passé.

Alors ça c'est rare ?

Et ben on est encore très amie aujourd'hui, et on en rit souvent, parce que c'est notre

première à tous les deux, et dans notre bande de copains, tout le monde le sait,

on l'a raconté à tout le monde quelques années plus tard, ça nous fait tous beaucoup

rire, et parfois comme on est des amis proches, on s'en reparle de ce truc de façon vraiment

intime et hyper sincère et personnelle, et on se parle de notre cheminement depuis,

et pour le coup ça c'est inattendu, et ça c'est une belle surprise de la première

fois.

Ouais, ça t'a permis de dédramatiser du coup, parce que tu sais comment il l'a pris.

Ouais, vachement.

On va faire un petit jeu, une petite pause, c'est basé sur le jeu à boire je n'ai jamais,

qui consiste à boire des shots, sauf que comme on est dans l'après-midi, on ne boira

pas de shots, mais bon du coup si les phrases que je te dis t'inspirent, ou tu les as déjà

faites, je t'invite à me raconter ce que tu as à dire.

J'ai déjà sodomisé un de mes partenaires.

Non, jamais.

On me l'a déjà demandé, mais je ne suis pas très à l'aise avec l'idée.

Je ne suis pas opposée à l'idée.

Maintenant, moi ça ne me fait pas kiffer, donc voilà.

Pas d'urgence de ce côté-là, en ce qui me concerne.

J'ai déjà eu des soucis avec du matériel.

Je n'ai jamais tellement utilisé de matériel, je suis hyper basique.

Ça peut être aussi avec des capotes ou ce genre de trucs, ça peut être de la contraception.

Ah oui, d'accord.

J'ai eu un souci de craquage de capote, mais ça c'est relativement classique, ça m'a

permis de tester la pilule en main et de me faire juger par la pharmacienne.

C'était merveilleux.

Je pense que je ne suis pas la seule à qui ça arrive, à qui c'est arrivé.

Souci avec du matériel.

Je suis en train d'essayer de réfléchir, je ne sais pas, un liquidage ou un truc du

genre.

Non, je n'ai rien qui me vient.

Écoute, c'est plutôt une bonne chose.

Tu n'as pas une énorme galère à raconter.

Félicitations, presque j'ai envie de te dire.

Non, vraiment, je ne me blâme rien.

J'ai déjà pensé à ma liste de courses pendant le sexe.

Ah oui, bien sûr que oui.

Le cri du coeur.

Je suis désolée, mais oui, évidemment.

A ta liste de courses spécifiquement ou à des cours ou à des trucs ?

Ah oui, à autre chose, à complètement autre chose.

A ce que je dois faire demain, à j'en sais rien moi.

Mais attends, là je pense qu'il est 14h10, il faut vraiment absolument qu'à la mi-choix

partie, vite, vite, vite, il faut qu'on se dépêche, il faut que j'ai le temps de

prendre ma douche derrière, ce genre de truc.

Mais oui, la liste de courses, techniquement, oui, bien sûr.

J'ai déjà pensé à quelqu'un d'autre pendant le sexe.

Oui, oui, aussi.

Alors, une personne que tu connais ou une personne genre type acteur de cinéma ?

Je suis pas du tout dans le délire acteur de cinéma, vraiment pas.

Non, en général, c'est plus quelqu'un que je connais.

Je le confesse.

Je me suis déjà masturbée dans des endroits pas prévus pour.

Non, non, je suis très, très sage.

C'est vrai, c'est décevant, mais c'est comme ça.

Ah mais c'est pas du tout décevant, il n'y a pas de mauvaise réponse ou de bonne réponse.

Il y a tellement une injonction à être des dingos du sexe que du coup, quand tu es quelqu'un

que ça intéresse pas plus que ça.

Non, non, non.

D'accord, j'arrête de m'excuser.

C'est une invitation à raconter ce que t'as fait, mais c'est pas forcément une injonction

à avoir fait des trucs dingos.

Je peux t'assurer que non, c'est chouette.

Le plus important, c'est que tu kiffes ce que tu fais, la façon dont tu le fais.

Tu nous as raconté qu'après ta première fois, t'as eu besoin de temps pour retrouver

ton désir ou trouver ton désir, tout simplement, et être prête et mature.

Ça a mis combien de temps ?

Ça se compte en années.

Je dirais que le moment où j'ai commencé à me réapproprier mon désir vraiment, ça

s'est fait progressivement, en fait.

Ça s'est pas fait en un seul jour, je dis des bêtises.

Ça s'est fait vraiment progressivement, au gré des rencontres, au gré des partenaires,

et au gré des périodes de célibat aussi, où d'un seul coup, on se met en veille pendant

X mois, et puis d'un seul coup, même si on a personne en face, on sent qu'il y a quelque

chose qui se réveille, donc on essaie de comprendre ce qui se joue.

Donc ça s'est fait en des années, un petit peu à la fois, un petit peu à la fois.

Tu racontes que du coup, tu t'es mis à la masturbation et au porno vers 24-25 ans.

C'est encore lié à une étape que t'as passée ?

Ça en fait partie.

Je le compte comme une des étapes.

C'était pendant le moment de célibat ?

Oui, c'était pendant le moment de célibat.

Deux ans de célibat font que bon, un moment, même si t'avais pas exploré la masturbation

avant, tu finis par y arriver.

Il a fallu que je sois capable d'avoir du plaisir avec quelqu'un pour être capable

de le reproduire seul, en fait.

Étonnamment.

D'habitude, c'est plutôt l'inverse.

La plupart des parcours que j'ai pu entendre, c'est plutôt le contraire.

C'est d'abord, j'apprends à me connaître pour pouvoir ensuite guider mon partenaire

ou moi donner le tempo dans une relation.

Moi, c'était plutôt un peu l'inverse.

Je pense qu'il a fallu que quelque chose se déclenche, presque mécaniquement, en fait.

Que quelque chose se déclenche, qu'un truc se débloque, et puis qu'après je l'explore

toute seule.

Et après, une fois que je me suis appropriée ça, j'ai été plus maîtresse de mon plaisir

avec quelqu'un.

Donc t'as eu d'abord des petites prémisses de plaisir avec quelqu'un, tu l'as cherchée

toute seule, et après t'es revenue avec quelqu'un d'autre pour pousser le truc, l'expérience.

Oui, c'est un peu ça.

Qu'est-ce que t'as cherché comme porno ?

Qu'est-ce que j'ai cherché comme porno ?

Et comment ? Enfin, je peux te pas souvenir de titre de film, mais...

Je vais pas trop rentrer dans les détails, mais je vais essayer de t'expliquer le cheminement.

J'ai commencé par lire.

J'ai commencé par des espèces de petites nouvelles érotiques, de trucs comme ça.

Je n'ai pas lu 51 degrés.

Mais au départ, j'avais acheté un bouquin pour une amie.

C'était plus un peu pour la faire sourire, et parce que l'objet était très joli.

En gros, c'était des espèces de contes détournés.

Des contes bien connus, genre le Petit Chapeau en Mouge, etc.

Détournés, pour en faire des petits contes érotiques et tout.

Et c'était pendu dans un super joli petit coffret.

Je me souviens qu'on avait eu une discussion toutes les deux,

parce qu'elle aussi, à l'époque, se masturbait pas.

Et toutes les deux, on se trouvait bizarre, et en même temps, on se comprenait.

Enfin, on avait beaucoup échangé à l'époque là-dessus.

Et donc, je lui avais offert.

Et avant de lui offrir, je l'avais lu.

Et puis, ça avait vraiment éveillé un truc.

Et donc, en lui offrant, je lui ai dit...

Je lui ai dit, je l'ai déjà lu, tu me diras ce que t'en penses, on en parlera, etc.

Donc, c'est d'abord né comme ça.

Après, je suis tombée par hasard...

Avant d'aller sur les plateformes vraiment hyper mainstream

de streaming porno gratuit, machin,

j'étais tombée une fois, par mes lectures,

parce que je lis pas mal de blogs féministes, etc.

J'étais tombée sur le travail d'Erika Lust,

sur le teaser d'un de ses films.

Je te vois acquiescer, mais je pense que oui,

c'est une référence qu'on doit souvent te donner.

Et là, d'un seul coup, ça a un peu levé mes appréhensions par rapport au porno.

Moi, le souvenir que j'en avais, c'était des images sur lesquelles j'étais tombée

avec juste des très gros plans de pénétration

en mode marteau-piqueur.

Et j'étais là, mais non, ça, jamais, ça m'excitera.

C'est pas possible.

Et là, d'un seul coup, elle intègre vraiment tellement

une sensualité qui est celle qu'on a dans la vraie vie,

des corps qui ressemblent à ceux qu'on peut croiser dans la vraie vie,

des situations qui sont pas complètement clichées

de la secrétaire ou la prof qui fait tomber son stylo.

Enfin, voilà, on est vraiment loin de ce genre de scénario.

Et du coup, ça m'a pas mal titillée.

Et c'est ce qui a guidé ensuite mes recherches de porno.

Donc, j'essaye de consommer du porno le plus éthique possible

parce que j'ai un vrai problème.

Je sais que pour le coup, ça peut me couper tout en vie

si j'ai le moindre doute, en fait, si je tombe sur une vidéo

et qu'à un moment, je vois le visage de la femme

qui, je sais pas, se crispe un petit peu

ou je perçois une fraction de seconde dans son regard

un truc qui me laisse penser qu'elle est pas en train de kiffer

ce qui se passe, même si c'est une fraction de seconde,

ça me coupe tout en vie. Vraiment. Je peux pas faire abstraction de ça.

J'ai besoin que tout le monde soit consentant

et que tout ça se passe dans ce cadre-là.

On aimerait bien qu'il y ait plus de gens comme toi.

C'est pas évident, parce que c'est vrai que c'est un accès hyper facile.

Honnêtement, c'est plateforme gratuite, c'est facile, c'est rapide.

Je dis pas que je ne consomme que du porno éthique.

C'est une vraie réflexion que je mène depuis quelques années

sur ma consommation de porno.

Ça t'excite même si y a que l'aspect visuel ?

Tu as dit tout à l'heure que tu avais besoin d'odeur, de toucher.

Est-ce que le porno juste classique comme ça peut t'exciter ?

Le porno juste classique comme ça peut me faire quelque chose

parce que tu vas toujours trouver un petit truc auquel t'accrocher.

Tu vas toujours trouver, je sais pas moi,

une caresse que tu vas voir qui a l'air plus sensuelle qu'une autre.

Ça va te faire tiquer d'un seul coup,

ça va allumer une espèce d'interrupteur de désir.

Après, moi je consomme du porno,

c'est vraiment à viser, 100%, masturbatoire.

C'est utilitaire, c'est bête, mais je sais pas dormir,

j'ai besoin de me détendre, je m'ennuie un peu,

je vais aller faire une sieste.

C'est dans ce genre de contexte.

Ça dure pas longtemps.

En tout cas, la majorité de ma consommation de porno,

c'est pour ce genre de trucs.

Je suis moins exigeante que dans ma vie, dans ma sexualité à moi.

Dans ma sexualité à moi, juste le visuel suffit pas.

Mais si c'est juste pour se masturber, ça fait le job quand même.

Là, on parlait de ta phase de célibat qui avait duré 2 ans,

vers ses âges de 24-25 ans.

T'as eu plusieurs compagnons, j'ai cru comprendre.

Oui, au cours de ma vie, oui.

Tu les as trouvés comment ?

Est-ce que t'as dragué par des applis, ce genre de trucs ?

La plupart d'entre eux, je les ai rencontrés dans la vraie vie.

En cours, les amis d'amis.

La plupart de mes partenaires, c'est comme ça que ça s'est passé.

Il y a un peu plus d'un an, j'ai fait 2 rencontres sur une appli,

j'ai fait 2 rencontres sur Tinder.

Voilà.

Ça s'est bien passé ?

Ça s'est bien passé pour les 2.

Et puis après, la dernière personne que j'ai rencontrée sur une appli,

c'est la personne avec qui je suis depuis un peu plus d'un an maintenant.

Donc voilà, c'était une très belle rencontre aussi, manifestement.

Comment tu t'étais présentée sur Tinder ?

Dans ma bio, j'avais mentionné,

pour faire une espèce d'écrémage,

justement dans l'idée d'utiliser l'outil le mieux possible,

j'avais mentionné que j'étais féministe,

en me disant que ça en mettra plein de côtés.

Et en tout cas, je vais repérer tout de suite les gens avec qui je n'ai pas envie de discuter,

avec qui je n'ai pas envie de faire de pédagogie,

je ne suis pas là pour ça, donc tout ça va se mettre de côté assez vite.

Je n'ai pas mentionné mon handicap,

parce que c'est quelque chose dont je préfère parler juste après.

Je le fais très très tôt,

je le fais avant même le premier rendez-vous.

Si premier rendez-vous il y a,

mais je ne le mets pas dans mon profil.

En tout cas en photo, ça peut ne pas se voir,

dans le quotidien ça ne se voit pas trop,

en tout cas quand on me voit pour la première fois, ça ne se voit pas trop.

C'est quelque chose dont je profite un peu.

Tu l'abordes assez vite, tu l'as dit,

les réactions des gens sur Tinder ?

Je n'ai jamais eu de réaction méchante,

j'espère que ce ne serait pas horrible,

parfois un peu maladroite,

mais de la même manière que dans la vie,

c'est parfois un peu maladroit,

la plupart du temps je ne m'offusque pas,

sauf si je suis vraiment dans un mauvais jour.

Globalement ça s'est plutôt bien passé,

la façon dont je l'amène,

c'est dans l'optique d'une première rencontre,

je présente comme ça,

je vais arriver en avance,

je serai là avant toi,

histoire d'être la première,

on me cherche et je ne dois pas chercher la personne.

Pour moi arriver sur une terrasse ou dans un bar,

c'est très compliqué pour trouver un visage,

même un visage connu, même un ami de longue date,

je ne vais pas le trouver dans le bar.

J'ai pas de souvenirs qu'à ce stade-là,

il y ait eu des questions ou des remarques

particulièrement notables,

par contre, une fois que j'ai la personne en face de moi,

et qu'on réaborde le sujet,

que ce soit le mec que j'ai en face ou moi,

quand on réaborde le sujet,

dans les trucs un peu marrants,

c'est « haha, mais du coup, tu ne vois pas si je suis moche ou si je suis beau ? »

Ah d'accord, encore cette question...

Je ne sais même pas quoi y répondre,

très honnêtement, elle me désarçonne à chaque fois,

je devrais y être habituée et avoir préparé une réponse.

Mais je ne sais jamais quoi répondre à ça,

parce que je suis capable de trouver quelqu'un de beau ou de moche,

même purement visuellement,

c'est quelque chose que je sais faire.

J'ai un sens critique, un sens esthétique,

un sens physique que je n'aime pas,

qui me plaise ou non.

J'ai facilement cette question qui me désarçonne et qui m'agace.

Ce n'est pas de leur faute,

c'est juste un trait d'humour maladroit,

par mes connaissances,

donc c'est tout, je m'efforce de ne pas m'en offusquer.

Et de répondre patientement.

Oui, c'est ça, j'y penserai la prochaine fois.

Les questions qu'on me pose souvent,

ce sont des questions sur le handicap lui-même,

on va me demander de préciser ce que je vois et ce que je ne vois pas,

ce que je suis capable de faire ou non dans mon quotidien,

des questions sur est-ce que tu conduis,

ton boulot, comment ça se passe à l'école,

des trucs un peu plus pratiques.

J'ai des questions aussi sur l'évolution possible,

est-ce que ça s'empire, est-ce que c'est toujours pareil,

est-ce qu'il y a un mieux possible,

enfin tu ne portes pas de lunettes, tu devrais porter des lunettes.

Ce genre de trucs.

Et sur le sujet de la sexualité,

c'est marrant parce que c'est un truc

que je serais prête à aborder avec mes partenaires,

ils n'ont jamais montré tellement d'intérêt,

sur cet angle-là.

Sur la façon dont tu le percevais.

Sur l'impact de mon handicap sur ma sexualité.

Est-ce que c'est par timidité,

par gêne de leur part, parce que je pense que c'est un sujet

avec lequel tout le monde n'est pas à l'aise,

de parler du handicap et de parler de sexualité,

tout le monde ne l'est pas non plus.

Petit combo de gêne chez certains.

Peut-être qu'il y a de ça, je ne sais pas.

Parce qu'encore une fois j'ai la chance que ça ne se voit pas

et on a l'impression que ça ne change rien.

Je pense que quelqu'un qui vient de me rencontrer

ou qui me connaît depuis pas très longtemps,

a le sentiment que ça ne change rien.

Et si, bien sûr que ça change les choses.

Comment ça impacte ta sexualité ?

Ça l'impacte, comme je le disais,

sur cette notion de désir où je pense

que j'accorde plus d'importance aux autres sens

que quelqu'un qui aura une vue parfaite.

J'imagine, encore une fois, je ne sais pas ce que c'est,

que d'être de ce côté-là de la barrière.

Je suppose que oui.

Je pense que je suis, dans l'acte,

je pense que je suis aussi plus sensible

à ce qui se passe sur mes autres sens.

C'est con, mais si j'ai un peu froid, par exemple,

ça me déconcentre complètement.

Je ne veux pas que tous mes sens soient bien,

soient à l'aise, s'y pas stimulés,

soit pas distraits.

J'ai remarqué que j'ai quasiment toujours les yeux fermés.

Je n'ai pas besoin de regarder

pour stimuler mon désir, pour me mettre dedans.

Je n'ai pas tellement besoin de voir l'autre,

de voir la tête qu'il fait, ou de regarder son corps,

ou de regarder à quoi ressemblent nos corps l'un avec l'autre.

Je ne sollicite pas ça.

Je sais que c'est quelque chose qu'on peut faire et qu'on fait.

Ce n'est pas du tout une ficelle sur laquelle je joue.

Tu préfères le sexe dans le noir ?

Sans aller jusque-là, la lumière ne me dérange pas.

Après, oui, quand même, pour des questions de pudeur,

selon que tu es à l'aise ou pas avec ton corps,

si tu es à l'aise ou pas avec ton partenaire,

oui, la pénombre va m'arranger, va me rassurer par moments.

Je pense que c'est plus là-dessus que le handicap.

Je pensais plus à un truc de confort.

La luminosité pourrait être un peu plus agressive pour toi,

et tu te sens mieux dans une pénombre.

De la même manière que mes autres sens sont facilement agressés,

oui, une mauvaise lumière, je ne pourrais pas faire l'amour sous un néon.

C'est très spécifique.

Non, mais tu vois ce que je veux dire ?

Une lumière froide, dégueulasse,

qui rend tout le monde moche,

je pense que je ne pourrais pas.

À choisir, je préfère le noir.

Je ne sais pas si ça répond à ta question.

Je t'avoue que je m'étais tellement posée,

donc je cafouille un peu en la bas.

Est-ce que tu as des choses que tu organises,

que tu sais qui sont mieux pour toi pour avoir un rapport sexuel optimal ?

En rapport avec, en l'occurrence, que tu as et ton handicap.

Ce n'est pas tellement pour le rapport en tant que tel,

mais c'est plus pour tout ce qui va autour.

Honnêtement, je préfère chez moi.

Parce que tu as besoin de ton petit confort,

tu as besoin de savoir où sont tes affaires,

si tu as envie d'aller faire pipi, prendre une douche, boire un verre d'eau.

Ça me rassure d'être chez moi.

Ça me rassure d'être entourée de mes affaires.

C'est une source de stress énorme, d'être chez l'autre.

Je suis bien mieux chez moi.

C'est super charmant chez toi.

Merci beaucoup.

On va faire une deuxième petite pause.

On va parler des oeuvres qui accompagnent ton imaginaire sexuel.

On l'a un peu abordé avant dans l'émission.

Je t'ai demandé de réfléchir à quelques questions.

Le livre qui t'excite ?

Ça n'a pas été évident de trouver des réponses à ces questions-là.

Je n'accorde pas une place incroyable dans ma vie, à ma sexualité et à mon désir.

Je dis ça en préambule.

Le premier truc auquel j'ai pensé,

c'est un truc qui m'est arrivé quand j'avais 15 ou 16 ans.

J'étais dans une librairie avec ma maman.

Elle me propose de choisir un livre.

Elle me dit que je choisis la collection Librio,

avec les livres à 10 francs à l'époque.

C'est tout des classiques.

Je me dis que c'est l'occasion.

Je regarde les couvertures.

Je prends un bouquin au pif.

Ce jour-là, je décide de ne pas lire la quatrième de couverture.

Je prends un livre qui s'appelle

Le Rideau Levé ou L'Éducation de l'or.

C'est un bouquin de Mirabeau.

Je me dis que ça serait intéressant d'avoir lu.

Je prends ce livre.

Je le tends à ma maman.

Nous passons en caisse avec ses livres.

Sur le chemin du retour,

je lis la quatrième de couverture.

Je vois que Mirabeau est aussi connu pour sa littérature érotique.

Je ne savais pas.

J'ai fait acheter à ma maman un bouquin de littérature érotique

à sa fille de 15 ans.

C'est un sujet tabou dans ma famille.

J'ai eu du mal à le lire.

J'ai lu le bouquin.

Je l'ai relu il y a quelques années.

Je l'ai trouvé malaisant.

Mais à l'époque, il m'avait mise dans un état.

Je n'arrivais pas à m'en détacher.

Il m'avait complètement chamboulé.

Le film qui me fait vibrer.

Je ne parle pas de ce qui m'a fait vibrer aujourd'hui.

Je me souviens que le film La leçon de piano de John Campion.

C'est un superbe film.

Il m'a bouleversée en matière de désir.

Il m'a chamboulée.

Il n'y a pas grand chose à voir.

Ce n'est pas là-dessus que ça se situe.

Tout le prélude qui comporte une part malaisante.

Il y a cette notion de chantage.

Entre le chanteur et la chanteuse.

Je ne l'ai pas vu depuis très longtemps.

Cette idée de chantage.

Leur relation est presque violente.

Très froide.

Très dure.

Il y a un prélude.

Une tension sexuelle qui monte.

Au fur et à mesure des scènes.

Je me souviens qu'il m'a mis dans un état.

Il y a quelques années.

Il repasse à la télé.

Je passais la soirée chez une amie.

On mangeait ensemble.

Elle me dit qu'il faut absolument qu'on regarde La leçon de piano.

C'est complètement fou.

On le regarde à deux.

Je suis désolée.

C'était plus dingue que ça.

C'était la première fois.

Je me sentais prise en faute.

C'est peut-être un peu cul-cul.

Je ne sais pas.

Je cite comme référence.

J'en garde un souvenir ému.

Une des scènes dont je me souviens beaucoup.

C'est une image que j'ai.

Au fur et à mesure,

il se découvre pour les leçons.

On voit la tête qui fait le regard qui pose sur elle.

Il découvre ses avant-bras.

Il y a rien.

On ne voit pas ses jambes.

On découvre ses poignets.

C'est une sensualité incroyable.

C'est la meilleure.

C'est une sensualité qui parle aux femmes.

C'est un peu dommage.

C'est reconnu comme un grand film.

Le côté sensuel a plus marqué.

On voit ça avec les films de Selit Yama.

Les hommes comprennent avec difficulté.

C'est un langage qu'ils ne comprennent pas.

L'image qui me donne des frissons de plaisir.

J'ai séché.

L'image seule, c'est pas mon objectif.

Je ne ressens pas grand-chose.

C'est une raison valable.

On accepte toutes les réponses.

La musique qui me met le mieux dans l'ambiance.

J'en ai plusieurs.

La chanson de Juliette Gréco,

« Déshabillez-moi ».

J'ai l'impression d'être une vente.

Je ne sais pas si c'est vrai.

Je me sens hyper sensuelle.

Hyper sexy.

Je me sens dans la maîtrise.

Dans l'appropriation de ma sexualité.

De mon désir.

Je la trouve incroyable.

La façon dont elle la chante.

Cette chanson me conditionne à me sentir éveillée.

A me sentir osagée par rapport à ma sexualité.

C'est la première qui m'est venue.

Dans le film de Tarantino,

il y a une scène avec une des nanasses.

Une scène de lap dance.

Elle est tellement sexy.

La chanson qui accompagne cette scène.

A elle seule.

Je pense qu'il faut avoir vu le film avant.

A elle seule, il y a une scène.

Elle est dans la maîtrise de ce qu'elle fait.

Du désir qu'elle provoque.

Cette chanson me met dans un bon état d'esprit.

Le parfum qui réveille tes sens ?

C'est l'odeur de la transpiration.

Elle peut tout allumer ou tout éteindre.

Si il y a de la transpiration,

ça va de l'eau à l'eau.

C'est un parfum qui me fait penser à la transpiration.

C'est un parfum qui me fait penser à la transpiration.

Si il y a de la transpiration, ça va.

D'autres, ça va moins bien.

Il y a des transpirations où tu as discuté avec la personne.

Un désir a commencé à monter.

Et l'odeur de ta peau ne revient pas.

Pas forcément de transpiration.

Je suis sensible aux odeurs.

Je sens les gens.

Il y a des odeurs de peau qui ne me reviennent pas.

Je n'ai pas envie d'aller me frotter à ça.

Il y en a qui, au contraire,

je trouve rassurantes et chaleureuses.

Dans lesquels j'ai envie de me blottir.

Tu préfères les gens qui ne boirent pas de parfum ?

Oui, plutôt.

Je suis assez difficile en matière de parfum.

Il ne faut pas que ça l'emporte sur le reste.

Un déodorant trop fort, une lessive qui sent fort,

un savon qui sent très fort...

Ça vient interférer.

Ça participe de l'odeur de la personne.

Mais quand c'est trop fort, ça vient interférer

ces signaux très primaires, très animaux que je cherche.

J'ai le sentiment d'être un animal en allant sentir mes partenaires.

Mais il ne faut pas que ça interfère ces signaux.

Ça peut les compléter.

Je ne suis pas du tout séduite par un parfum.

Comme dans une pub.

Mon Dieu, quel homme a me retourné sur un mec

parce qu'il porte le parfum que j'aime ?

Non.

On va parler de ta dernière fois.

Tu es en couple depuis un an.

Avec ce jeune homme que tu as rencontré via Tinder.

La dernière fois, c'était il y a 8 jours.

C'est la dernière fois qu'on s'est vus.

J'étais pas 100% présente.

Pour être honnête,

je ne sais pas trop pourquoi.

J'avais d'autres trucs en tête.

J'en avais envie quand même.

Mais c'était pas notre meilleur.

C'était bien, mais on a fait mieux.

C'était une fois planifié ?

Oui, dans le sens où...

Quand on vit pas ensemble,

et qu'on se voit pas souvent,

on se dit que ça peut faire partie du programme.

Maintenant, c'est pas une obligation.

C'était semi-planifié.

On a passé le week-end ensemble.

On a fait plein d'autres trucs.

C'était pas le but de la rencontre.

Est-ce que tu as pris du plaisir ?

Oui, j'en ai pris.

Le plus, c'est que je n'en ai pas pris.

Je peux pas pas en prendre.

C'est quelque chose qui a pu m'arriver plus jeune.

De tolérer des rapports,

voire de les subir un peu.

Mais c'est un piège dans lequel je n'arrive plus à tomber.

Si j'en prends pas, si y'en a zéro pour moi,

on arrête tout.

C'est une très bonne résolution.

On devrait plus la prendre.

Il faut quelques années pour en arriver à se dire ça.

C'est ce qu'on dit, que c'est un chemin pour tout.

Savoir se masturber, savoir se connaître,

trouver les bonnes personnes,

et même trouver son plaisir.

Je fais une parenthèse par rapport à ça.

J'ai le souvenir d'avoir déjà discuté

avec plusieurs amis proches

avec qui je parle de sexualité de façon assez ouverte.

J'ai deux discussions qui me viennent.

Une avec une copine qui est avec la même personne

depuis plus de 15 ans.

Ils se sont connus tout jeunes,

ils ont des gamins, c'est un très bon couple.

Quand on a commencé à parler de sexualité,

je me suis rendue compte qu'en fait,

dans son esprit, elle me percevait comme une déesse du sexe.

J'avais eu vachement plus de partenaires qu'elle.

Elle en avait eu un.

Dans sa tête, c'était un coup de dingue.

Mais non, c'est le contraire.

Je pense pas être un coup de dingue.

Elle l'avait pas réalisé.

Elle a une expérience sexuelle très limitée.

Elle a perdu sa virginité tard.

Elle a pas eu d'histoire, de flirt, de trucs comme ça.

Et dans son esprit,

c'était un coup de dingue.

Elle me disait ça comme un aveu.

Mais non, moi non plus, je suis pas à l'aise du tout.

Il y a eu beaucoup de partenaires que j'ai pris pour les mauvaises raisons.

Pour me rassurer, parce que j'avais pas confiance en moi.

Il y a un âge où je me disais,

il y en a un qui est d'accord, profite,

c'est peut-être ta chance, ta seule chance.

J'ai pensé ça moi aussi.

C'était juste pour revendiquer ce que tu disais.

Ça fait partie de mon parcours aussi.

Bien sûr.

Tu as pensé que tu pouvais rester seule ou pas trouver quelqu'un ?

Oui.

J'ai un handicap.

Aujourd'hui je porte une lentille, donc mon handicap se voit à peine.

Toute mon enfance et toute mon adolescence,

je l'ai faite avec des très grosses lunettes.

Des lunettes avec des très gros verres.

Ce qui, au moment de l'adolescence,

avec le regard des autres qu'on a tous subi pour une raison ou pour une autre,

moi c'est là-dessus que je l'ai subi.

J'ai longtemps pensé que j'intéresserais personne.

C'est comme ça que je le vivais.

Ça a été hyper dur.

Le jour où j'ai pu porter des lentilles au quotidien,

ça remonte à mes 15 ans à peu près.

J'ai constaté que le regard des autres avait changé sur moi.

Mais j'avais peine à y croire.

Je pensais que c'était très fragile et que c'était un énorme coup de bol

que je puisse plaire à quelqu'un, intéresser quelqu'un sur ce plan-là.

Donc oui,

je compte pas mal de partenaires dans ma vie,

en tout cas dans mes premières années,

où c'était pas tellement parce que j'étais intéressée,

ou que j'avais des sentiments, ou que j'avais du désir,

mais c'était un peu saisie ta chance, parce que tu sais pas quand ça se représentera.

Du coup, parce que t'as été plutôt en couple et que t'as eu des relations sexuelles

avec des gens qui voyaient ?

Je n'ai eu que des partenaires valides.

Peu importe les handicaps.

Je ne suis pas malvoyante, je connais personne qui est malvoyant ou qui est aveugle.

En tout cas, j'ai pas de proches.

J'allais te demander si t'es pas...

Ça aurait pu être une piste en te disant que c'est peut-être plus simple,

que c'est quelqu'un qui comprend.

J'y ai déjà pensé, j'ai pas encore trouvé ma réponse à cette question.

Mais j'y ai déjà pensé, ouais.

J'allais te demander ton partenaire actuel, comment il aborde ça ?

Il aborde avec beaucoup de simplicité, beaucoup de gentillesse,

beaucoup de bienveillance.

Il est pas maladroit, les rares fois où il va faire une petite blague

qui va aller un tout petit peu trop loin.

En général, c'est des blagues que je m'autorise à faire.

Et quand je l'entends dans la bouche de quelqu'un d'autre,

c'est « alors par contre, non, toi t'as pas le droit, en fait.

Je suis désolée, je comprends que tu la fasses,

tu m'as entendu la faire, mais par contre toi non. »

Et toujours c'est « ah, ok, très bien, d'accord, je note »,

il est vraiment très prévenant, il pose des questions,

je me sens libre d'expliquer.

Et après, par rapport à mon handicap et dans mes relations amoureuses

et sexuelles aussi, dans ma relation à l'autre,

mieux je l'ai compris, mieux j'ai appris à le formuler,

mieux je l'ai accepté aussi.

Plus ça a été facile de le faire comprendre aux autres

et du coup d'être dans des relations

où c'était abordé de façon saine.

Il a fallu que je me l'approprie aussi, ça, forcément.

C'est un chemin qui s'est fait en parallèle de ta construction de femme, fatalement.

Oui, parce que ça touche d'autres sphères de ma vie aussi,

évidemment ça touche pas que ma relation à l'autre et ma sexualité.

Donc ça c'est pareil, c'est un autre chemin

sur lequel il a fallu se construire.

On en a tous, moi j'ai celui-là aussi.

Est-ce que tu te sens aujourd'hui sur une bonne voie ?

Tu te sens mieux ?

Donc ça c'est super chouette et super encourageant.

Il y a des jours où j'ai l'impression que tout est encore à faire,

il y a des jours où j'ai l'impression que je suis qu'au début,

il y en a d'autres où je me regarde avec un peu plus de bienveillance et de gentillesse.

Bon ça va quand même, t'as fait pas mal de trucs !

Ça dépend des moments.

Je me regarde avec plus ou moins de lucidité là-dessus.

Je peux être très dure vis-à-vis de moi-même,

parfois je suis un peu plus honnête et un peu plus gentille.

J'essaye d'être un peu plus gentille.

Tu te sens épanouie aujourd'hui ?

Oui, je crois que je l'ai jamais été plus qu'aujourd'hui.

Ça n'est qu'une progression.

Il y a les jours avec et les jours sans.

Ça se fait pas sans accident de parcours, ça se fait pas sans pause.

Et puis des fois on se casse un peu la figure.

Mais en fait je ressens une espèce d'impatience parce qu'à chaque fois,

hyper souvent je me dis wow, j'ai quand même vachement avancé sur tel sujet.

J'ai vachement avancé en 2-3 ans depuis telle dernière étape que je vois dans le rétro.

Et en fait c'est ça depuis des années.

Et du coup je suis hyper impatiente.

Je me dis que la moïe dans 5 ans, ça va être dingue où je serai.

La moïe dans 10 ans, ça va être dingue où elle sera arrivée.

Je suis plutôt impatiente.

Encore une fois, il y a des jours où c'est un petit peu plus dur.

Mais globalement j'ai le sentiment de cheminer.

Et de cheminer dans une direction qui me ressemble de plus en plus.

Je veux qu'on finisse là-dessus parce que c'est tellement positif

d'expliquer que ce n'est pas une ligne droite

et que ce n'est pas une ligne comme ça, qu'on n'est pas quelqu'un au départ

et qu'on le reste toute sa vie, qu'on chemine, qu'on évolue

et qu'on évolue dans le bon sens surtout.

Que plus on apprend à se connaître et plus on apprend à se faire plaisir dans la vie.

Merci infiniment pour ce témoignage.

Merci à toi.

C'était première et dernière fois.

Si ce podcast vous a plu, n'hésitez pas à lui mettre 5 étoiles

et à nous laisser un commentaire.

Tous les autres épisodes de première et dernière fois sont à retrouver

sur Slate.fr ou votre application de podcast préférée.

Merci à toutes et à tous et à très bientôt.

Première & Dernière fois 07 First & Last time 07 Primera y última vez 07 Pierwszy i ostatni raz 07 Primeira e última vez 07 Första och sista gången 07 第一次和最后一次 07

Nous avons tous et toutes des premières et des dernières fois. We all have firsts and lasts.

Et pour beaucoup, le cheminement entre les deux est une véritable aventure. And for many, the journey between the two is a real adventure.

J'ai décidé de rencontrer des inconnus, ou presque inconnus, de partager avec elles

et eux ces confidences intimes, et de mesurer l'évolution de leurs désirs entre la première

et la dernière fois.

Pour le premier épisode de cette deuxième saison, j'ai rencontré Cécile, une rédactrice-correctrice

freelance de 34 ans.

C'est une femme qui se définit comme cisgenre et hétérosexuelle.

Elle est malvoyante de naissance.

Cécile m'a accueillie chez elle, dans sa maison coquette et chaleureuse du nord de

la France.

Cécile, bonjour, et merci de nous accueillir chez toi.

Merci, bonjour.

Je vais commencer par la question rituelle, on se vouvoie ou on se tutoie ?

On se tutoie.

Parfait.

Alors Cécile, tu as 34 ans et tu es malvoyante.

Est-ce que tu peux définir exactement ton handicap ? On peut dire handicap ?

On peut dire handicap, c'est comme ça que ça s'appelle.

Malvoyant, c'est dans la catégorie de ce qu'on appelle les déficients visuels, donc

ça comprend les malvoyants et les personnes aveugles.

Aveugle, c'est quelqu'un qui ne voit entre guillemets rien du tout.

En réalité, une personne aveugle a quand même une perception de lumière ou de couleur

ou de choses comme ça.

C'est pas forcément le noir complet.

Moi, en tant que malvoyante, je suis la marge juste au-dessus.

C'est une très très forte myopie.

J'ai un de mes deux yeux qui est considéré comme aveugle.

J'ai un oeil qui, avec correction, avec lequel je vois un dixième de ce qu'une personne

valide voit.

Avec correction ? Une fois que je suis corrigée.

Je ne peux pas monter au-delà de ça.

Si ça peut donner une idée à des personnes qui voient, en général, ça aide à comprendre.

Du coup, c'est de naissance ? Du coup, c'est de naissance.

Ça n'a pas évolué.

Je suis née avec ça et j'ai grandi et je me suis construite avec ça.

On va parler de la façon dont tu t'es construite et en particulier au niveau sexuel.

Comment on construit son imaginaire sexuel quand on ne voit pas ou presque pas ?

Son imaginaire sexuel, c'est vrai qu'il n'est pas tellement basé sur le visuel.

Ce n'est pas là qu'il est stimulé.

Je sais que je suis très réactive aux odeurs, de manière générale, dans ma vie, dans

mon quotidien.

C'est un sens auquel je me fie beaucoup, pour beaucoup de choses, beaucoup d'actes

du quotidien et qui jouent beaucoup dans le fait que je vais ressentir du désir ou pas,

bien plus que ce à quoi va ressembler la personne en face de moi, par exemple.

Je pose la question parce que je pensais au fait que, moi, comme je pense beaucoup

de gens de notre génération, on s'est vraiment construit avec le porno.

En tout cas, on s'est construit avec, j'espère pas totalement, mais en tout cas, on a grandi

avec.

Que ce soit les magazines, que ce soit les films, est-ce que toi aussi ?

Alors, moi, j'ai commencé à en consommer assez tard, en fait.

Plutôt vers 26, 27 ans, quelque chose comme ça.

Avant ça, j'étais déjà tombée sur des images, mais ça ne m'avait vraiment pas intéressée.

Pas plus que ça.

Après, oui, je peux en consommer.

Moi, je suis capable de voir ce qu'il y a sur un écran.

C'est juste une question de distance.

Donc, je peux tout à fait accéder à ces images.

Après, c'est vrai que ce n'est pas mon canal préféré de stimulation, on va dire.

Je vais être beaucoup plus touchée par, comme je disais, une odeur.

Les voix jouent beaucoup aussi.

Et le toucher, en fin de compte, c'est les autres sens qui interviennent en premier.

On va parler de ta première fois.

Est-ce que tu t'en souviens ?

Je me souviens de ma première fois, absolument.

T'avais quel âge ?

J'avais 18 ans, et quelques mois.

Comment ça s'est passé ?

Comment ça s'est passé ?

J'étais avec un garçon depuis quelques mois.

C'était un de mes premiers petits copains.

Pas le tout premier, mais un des premiers.

Et puis, en fait, lui, c'était sa première aussi.

On était tous les deux extrêmement maladroits.

C'était pas plus que ça scénarisé ou préparé, même si ça représentait quelque chose,

que ce soit la première.

On n'a pas sorti les bougies, on l'a pas fait comme dans une série ou un mauvais film américain.

C'était relativement spontané, hyper maladroit, très douloureux en ce qui me concerne.

Mais je crois qu'en fait, avec le recul, je crois que j'étais pas prête du tout,

que j'en avais pas tellement envie.

J'étais consentante, attention, mais je crois que j'en avais pas tellement envie,

que c'était plus pour me conformer à une attente, pour me débarrasser d'une corvée,

plus que par désir.

Tu savais ce qui devait se passer ?

Oui.

Tu avais étudié la théorie ?

La théorie, je la connaissais.

Ce qu'il y avait à savoir pour une première, ça suffisait, je le savais.

Donc j'ai pas été surprise là-dessus, mais c'était pas un moment de plaisir, non.

Franchement pas.

T'as pas eu de plaisir du tout ?

Non.

Désolée.

Ah bah non, bah...

Non c'est pas toi qui le dis.

Désolée pour toi.

C'est pour ça.

Désolée pour toi franchement.

Bah c'est que je suis auprès de lui, merde.

Je suis désolée pour moi aussi.

C'est dommage.

Est-ce que t'avais déjà eu du plaisir avant, toute seule ?

Alors toute seule non, parce que c'est pareil, à ma situation, c'est un truc que j'ai commencé

très très tard, vers 24-25 ans je dirais.

Avant ça, alors je ne sais pas si c'est parce que je suis quelqu'un qui a de manière

générale pas un imaginaire sexuel très développé, je suis quelqu'un qui a pas beaucoup,

même encore aujourd'hui j'ai assez peu de désirs en fait, c'est pas du tout un moteur

dans ma vie la sexualité, c'est un truc parmi d'autres.

Alors peut-être pour ça, est-ce que l'éducation catholique un petit peu a joué ?

Sans doute que oui dans une certaine mesure, j'imagine.

Mais toujours est-il que le seul plaisir que j'avais pu avoir avant ma première fois,

c'était des espèces de...

Comment...

Enfin je décrirais ça un petit peu comme des petites décharges électriques, on ressent

un truc, on sent que ça pourrait aller plus loin, que ça pourrait être plus fort, plus

grand, mais bon, c'est vraiment ça, ça fait comme une petite décharge.

Ça, ça m'était déjà arrivé dans des moments tendres avec le copain, c'est con,

tu vas le sentir qui est excité contre toi, tu joues avec ça, ça oui.

J'avais déjà ressenti du plaisir.

Est-ce que tu t'es sentie différente après cette première fois ?

J'étais surprise de pas me sentir différente parce qu'on en fait tellement tout un foin.

À l'adolescence, on est lycéens, moi en plus comme j'avais un peu plus de 18 ans,

d'autres amis étaient passés par ça avant, c'était un gros sujet à cet âge-là entre

nous, enfin entre copains.

Et en fin de compte, il y avait un côté un peu tout ça pour ça, enfin pourquoi on

en fait tout un monde en fin de compte ? Rien n'a changé.

Je me suis pas réveillée en me disant ça y est je suis une femme, enfin pas du tout.

Tu t'es pas dit que tu voulais continuer à explorer, que c'était presque un premier

pas dans quelque chose ?

Bah non parce qu'encore une fois, je crois que j'étais pas prête pour ça, je crois

que j'étais pas mûre pour ça, pas assez mature sexuellement, j'avais pas exploré

moi mon propre désir, mon imaginaire, etc.

J'étais pas du tout allée là-dedans et je pense qu'en voulant me conformer, en fin

de compte, je me suis presque un peu tirée une balle dans le pied, il m'a fallu un moment

avant de vraiment m'approprier ma sexualité, il m'a fallu pas mal d'années.

T'es restée avec lui après ?

C'est une histoire qui a duré en tout et pour tout, je dirais 4-5 mois, donc entre

le moment où a eu lieu la première fois et le moment où on s'est séparés, y a

dû se passer un mois ou deux.

Il t'a pas redemandé pour refaire une deuxième fois ?

Si, y en a eu d'autres après, mais enfin pareil, vite fait, super maladroit, super

franchement pas plaisant pour moi, et lui en était désolé, et en même temps, forcément

c'était un mec qui avait quasiment mon âge, il était comme un dingue, et moi je

disais non mais en fait ça m'intéresse pas, ça me saoule un peu, arrête tu me

chatouilles, enfin bon, j'étais pas du tout dans le délire, l'histoire c'est fini,

pas à cause de ça, mais c'est tout.

Après c'est quelqu'un avec qui je suis très très amie aujourd'hui, le temps a

passé.

Alors ça c'est rare ?

Et ben on est encore très amie aujourd'hui, et on en rit souvent, parce que c'est notre

première à tous les deux, et dans notre bande de copains, tout le monde le sait,

on l'a raconté à tout le monde quelques années plus tard, ça nous fait tous beaucoup

rire, et parfois comme on est des amis proches, on s'en reparle de ce truc de façon vraiment

intime et hyper sincère et personnelle, et on se parle de notre cheminement depuis,

et pour le coup ça c'est inattendu, et ça c'est une belle surprise de la première

fois.

Ouais, ça t'a permis de dédramatiser du coup, parce que tu sais comment il l'a pris.

Ouais, vachement.

On va faire un petit jeu, une petite pause, c'est basé sur le jeu à boire je n'ai jamais,

qui consiste à boire des shots, sauf que comme on est dans l'après-midi, on ne boira

pas de shots, mais bon du coup si les phrases que je te dis t'inspirent, ou tu les as déjà

faites, je t'invite à me raconter ce que tu as à dire.

J'ai déjà sodomisé un de mes partenaires.

Non, jamais.

On me l'a déjà demandé, mais je ne suis pas très à l'aise avec l'idée.

Je ne suis pas opposée à l'idée.

Maintenant, moi ça ne me fait pas kiffer, donc voilà.

Pas d'urgence de ce côté-là, en ce qui me concerne.

J'ai déjà eu des soucis avec du matériel.

Je n'ai jamais tellement utilisé de matériel, je suis hyper basique.

Ça peut être aussi avec des capotes ou ce genre de trucs, ça peut être de la contraception.

Ah oui, d'accord.

J'ai eu un souci de craquage de capote, mais ça c'est relativement classique, ça m'a

permis de tester la pilule en main et de me faire juger par la pharmacienne.

C'était merveilleux.

Je pense que je ne suis pas la seule à qui ça arrive, à qui c'est arrivé.

Souci avec du matériel.

Je suis en train d'essayer de réfléchir, je ne sais pas, un liquidage ou un truc du

genre.

Non, je n'ai rien qui me vient.

Écoute, c'est plutôt une bonne chose.

Tu n'as pas une énorme galère à raconter.

Félicitations, presque j'ai envie de te dire.

Non, vraiment, je ne me blâme rien.

J'ai déjà pensé à ma liste de courses pendant le sexe.

Ah oui, bien sûr que oui.

Le cri du coeur.

Je suis désolée, mais oui, évidemment.

A ta liste de courses spécifiquement ou à des cours ou à des trucs ?

Ah oui, à autre chose, à complètement autre chose.

A ce que je dois faire demain, à j'en sais rien moi.

Mais attends, là je pense qu'il est 14h10, il faut vraiment absolument qu'à la mi-choix

partie, vite, vite, vite, il faut qu'on se dépêche, il faut que j'ai le temps de

prendre ma douche derrière, ce genre de truc.

Mais oui, la liste de courses, techniquement, oui, bien sûr.

J'ai déjà pensé à quelqu'un d'autre pendant le sexe.

Oui, oui, aussi.

Alors, une personne que tu connais ou une personne genre type acteur de cinéma ?

Je suis pas du tout dans le délire acteur de cinéma, vraiment pas.

Non, en général, c'est plus quelqu'un que je connais.

Je le confesse.

Je me suis déjà masturbée dans des endroits pas prévus pour.

Non, non, je suis très, très sage.

C'est vrai, c'est décevant, mais c'est comme ça.

Ah mais c'est pas du tout décevant, il n'y a pas de mauvaise réponse ou de bonne réponse.

Il y a tellement une injonction à être des dingos du sexe que du coup, quand tu es quelqu'un

que ça intéresse pas plus que ça.

Non, non, non.

D'accord, j'arrête de m'excuser.

C'est une invitation à raconter ce que t'as fait, mais c'est pas forcément une injonction

à avoir fait des trucs dingos.

Je peux t'assurer que non, c'est chouette.

Le plus important, c'est que tu kiffes ce que tu fais, la façon dont tu le fais.

Tu nous as raconté qu'après ta première fois, t'as eu besoin de temps pour retrouver

ton désir ou trouver ton désir, tout simplement, et être prête et mature.

Ça a mis combien de temps ?

Ça se compte en années.

Je dirais que le moment où j'ai commencé à me réapproprier mon désir vraiment, ça

s'est fait progressivement, en fait.

Ça s'est pas fait en un seul jour, je dis des bêtises.

Ça s'est fait vraiment progressivement, au gré des rencontres, au gré des partenaires,

et au gré des périodes de célibat aussi, où d'un seul coup, on se met en veille pendant

X mois, et puis d'un seul coup, même si on a personne en face, on sent qu'il y a quelque

chose qui se réveille, donc on essaie de comprendre ce qui se joue.

Donc ça s'est fait en des années, un petit peu à la fois, un petit peu à la fois.

Tu racontes que du coup, tu t'es mis à la masturbation et au porno vers 24-25 ans.

C'est encore lié à une étape que t'as passée ?

Ça en fait partie.

Je le compte comme une des étapes.

C'était pendant le moment de célibat ?

Oui, c'était pendant le moment de célibat.

Deux ans de célibat font que bon, un moment, même si t'avais pas exploré la masturbation

avant, tu finis par y arriver.

Il a fallu que je sois capable d'avoir du plaisir avec quelqu'un pour être capable

de le reproduire seul, en fait.

Étonnamment.

D'habitude, c'est plutôt l'inverse.

La plupart des parcours que j'ai pu entendre, c'est plutôt le contraire.

C'est d'abord, j'apprends à me connaître pour pouvoir ensuite guider mon partenaire

ou moi donner le tempo dans une relation.

Moi, c'était plutôt un peu l'inverse.

Je pense qu'il a fallu que quelque chose se déclenche, presque mécaniquement, en fait.

Que quelque chose se déclenche, qu'un truc se débloque, et puis qu'après je l'explore

toute seule.

Et après, une fois que je me suis appropriée ça, j'ai été plus maîtresse de mon plaisir

avec quelqu'un.

Donc t'as eu d'abord des petites prémisses de plaisir avec quelqu'un, tu l'as cherchée

toute seule, et après t'es revenue avec quelqu'un d'autre pour pousser le truc, l'expérience.

Oui, c'est un peu ça.

Qu'est-ce que t'as cherché comme porno ?

Qu'est-ce que j'ai cherché comme porno ?

Et comment ? Enfin, je peux te pas souvenir de titre de film, mais...

Je vais pas trop rentrer dans les détails, mais je vais essayer de t'expliquer le cheminement.

J'ai commencé par lire.

J'ai commencé par des espèces de petites nouvelles érotiques, de trucs comme ça.

Je n'ai pas lu 51 degrés.

Mais au départ, j'avais acheté un bouquin pour une amie.

C'était plus un peu pour la faire sourire, et parce que l'objet était très joli.

En gros, c'était des espèces de contes détournés.

Des contes bien connus, genre le Petit Chapeau en Mouge, etc.

Détournés, pour en faire des petits contes érotiques et tout.

Et c'était pendu dans un super joli petit coffret.

Je me souviens qu'on avait eu une discussion toutes les deux,

parce qu'elle aussi, à l'époque, se masturbait pas.

Et toutes les deux, on se trouvait bizarre, et en même temps, on se comprenait.

Enfin, on avait beaucoup échangé à l'époque là-dessus.

Et donc, je lui avais offert.

Et avant de lui offrir, je l'avais lu.

Et puis, ça avait vraiment éveillé un truc.

Et donc, en lui offrant, je lui ai dit...

Je lui ai dit, je l'ai déjà lu, tu me diras ce que t'en penses, on en parlera, etc.

Donc, c'est d'abord né comme ça.

Après, je suis tombée par hasard...

Avant d'aller sur les plateformes vraiment hyper mainstream

de streaming porno gratuit, machin,

j'étais tombée une fois, par mes lectures,

parce que je lis pas mal de blogs féministes, etc.

J'étais tombée sur le travail d'Erika Lust,

sur le teaser d'un de ses films.

Je te vois acquiescer, mais je pense que oui,

c'est une référence qu'on doit souvent te donner.

Et là, d'un seul coup, ça a un peu levé mes appréhensions par rapport au porno.

Moi, le souvenir que j'en avais, c'était des images sur lesquelles j'étais tombée

avec juste des très gros plans de pénétration

en mode marteau-piqueur.

Et j'étais là, mais non, ça, jamais, ça m'excitera.

C'est pas possible.

Et là, d'un seul coup, elle intègre vraiment tellement

une sensualité qui est celle qu'on a dans la vraie vie,

des corps qui ressemblent à ceux qu'on peut croiser dans la vraie vie,

des situations qui sont pas complètement clichées

de la secrétaire ou la prof qui fait tomber son stylo.

Enfin, voilà, on est vraiment loin de ce genre de scénario.

Et du coup, ça m'a pas mal titillée.

Et c'est ce qui a guidé ensuite mes recherches de porno.

Donc, j'essaye de consommer du porno le plus éthique possible

parce que j'ai un vrai problème.

Je sais que pour le coup, ça peut me couper tout en vie

si j'ai le moindre doute, en fait, si je tombe sur une vidéo

et qu'à un moment, je vois le visage de la femme

qui, je sais pas, se crispe un petit peu

ou je perçois une fraction de seconde dans son regard

un truc qui me laisse penser qu'elle est pas en train de kiffer

ce qui se passe, même si c'est une fraction de seconde,

ça me coupe tout en vie. Vraiment. Je peux pas faire abstraction de ça.

J'ai besoin que tout le monde soit consentant

et que tout ça se passe dans ce cadre-là.

On aimerait bien qu'il y ait plus de gens comme toi.

C'est pas évident, parce que c'est vrai que c'est un accès hyper facile.

Honnêtement, c'est plateforme gratuite, c'est facile, c'est rapide.

Je dis pas que je ne consomme que du porno éthique.

C'est une vraie réflexion que je mène depuis quelques années

sur ma consommation de porno.

Ça t'excite même si y a que l'aspect visuel ?

Tu as dit tout à l'heure que tu avais besoin d'odeur, de toucher.

Est-ce que le porno juste classique comme ça peut t'exciter ?

Le porno juste classique comme ça peut me faire quelque chose

parce que tu vas toujours trouver un petit truc auquel t'accrocher.

Tu vas toujours trouver, je sais pas moi,

une caresse que tu vas voir qui a l'air plus sensuelle qu'une autre.

Ça va te faire tiquer d'un seul coup,

ça va allumer une espèce d'interrupteur de désir.

Après, moi je consomme du porno,

c'est vraiment à viser, 100%, masturbatoire.

C'est utilitaire, c'est bête, mais je sais pas dormir,

j'ai besoin de me détendre, je m'ennuie un peu,

je vais aller faire une sieste.

C'est dans ce genre de contexte.

Ça dure pas longtemps.

En tout cas, la majorité de ma consommation de porno,

c'est pour ce genre de trucs.

Je suis moins exigeante que dans ma vie, dans ma sexualité à moi.

Dans ma sexualité à moi, juste le visuel suffit pas.

Mais si c'est juste pour se masturber, ça fait le job quand même.

Là, on parlait de ta phase de célibat qui avait duré 2 ans,

vers ses âges de 24-25 ans.

T'as eu plusieurs compagnons, j'ai cru comprendre.

Oui, au cours de ma vie, oui.

Tu les as trouvés comment ?

Est-ce que t'as dragué par des applis, ce genre de trucs ?

La plupart d'entre eux, je les ai rencontrés dans la vraie vie.

En cours, les amis d'amis.

La plupart de mes partenaires, c'est comme ça que ça s'est passé.

Il y a un peu plus d'un an, j'ai fait 2 rencontres sur une appli,

j'ai fait 2 rencontres sur Tinder.

Voilà.

Ça s'est bien passé ?

Ça s'est bien passé pour les 2.

Et puis après, la dernière personne que j'ai rencontrée sur une appli,

c'est la personne avec qui je suis depuis un peu plus d'un an maintenant.

Donc voilà, c'était une très belle rencontre aussi, manifestement.

Comment tu t'étais présentée sur Tinder ?

Dans ma bio, j'avais mentionné,

pour faire une espèce d'écrémage,

justement dans l'idée d'utiliser l'outil le mieux possible,

j'avais mentionné que j'étais féministe,

en me disant que ça en mettra plein de côtés.

Et en tout cas, je vais repérer tout de suite les gens avec qui je n'ai pas envie de discuter,

avec qui je n'ai pas envie de faire de pédagogie,

je ne suis pas là pour ça, donc tout ça va se mettre de côté assez vite.

Je n'ai pas mentionné mon handicap,

parce que c'est quelque chose dont je préfère parler juste après.

Je le fais très très tôt,

je le fais avant même le premier rendez-vous.

Si premier rendez-vous il y a,

mais je ne le mets pas dans mon profil.

En tout cas en photo, ça peut ne pas se voir,

dans le quotidien ça ne se voit pas trop,

en tout cas quand on me voit pour la première fois, ça ne se voit pas trop.

C'est quelque chose dont je profite un peu.

Tu l'abordes assez vite, tu l'as dit,

les réactions des gens sur Tinder ?

Je n'ai jamais eu de réaction méchante,

j'espère que ce ne serait pas horrible,

parfois un peu maladroite,

mais de la même manière que dans la vie,

c'est parfois un peu maladroit,

la plupart du temps je ne m'offusque pas,

sauf si je suis vraiment dans un mauvais jour.

Globalement ça s'est plutôt bien passé,

la façon dont je l'amène,

c'est dans l'optique d'une première rencontre,

je présente comme ça,

je vais arriver en avance,

je serai là avant toi,

histoire d'être la première,

on me cherche et je ne dois pas chercher la personne.

Pour moi arriver sur une terrasse ou dans un bar,

c'est très compliqué pour trouver un visage,

même un visage connu, même un ami de longue date,

je ne vais pas le trouver dans le bar.

J'ai pas de souvenirs qu'à ce stade-là,

il y ait eu des questions ou des remarques

particulièrement notables,

par contre, une fois que j'ai la personne en face de moi,

et qu'on réaborde le sujet,

que ce soit le mec que j'ai en face ou moi,

quand on réaborde le sujet,

dans les trucs un peu marrants,

c'est « haha, mais du coup, tu ne vois pas si je suis moche ou si je suis beau ? »

Ah d'accord, encore cette question...

Je ne sais même pas quoi y répondre,

très honnêtement, elle me désarçonne à chaque fois,

je devrais y être habituée et avoir préparé une réponse.

Mais je ne sais jamais quoi répondre à ça,

parce que je suis capable de trouver quelqu'un de beau ou de moche,

même purement visuellement,

c'est quelque chose que je sais faire.

J'ai un sens critique, un sens esthétique,

un sens physique que je n'aime pas,

qui me plaise ou non.

J'ai facilement cette question qui me désarçonne et qui m'agace.

Ce n'est pas de leur faute,

c'est juste un trait d'humour maladroit,

par mes connaissances,

donc c'est tout, je m'efforce de ne pas m'en offusquer.

Et de répondre patientement.

Oui, c'est ça, j'y penserai la prochaine fois.

Les questions qu'on me pose souvent,

ce sont des questions sur le handicap lui-même,

on va me demander de préciser ce que je vois et ce que je ne vois pas,

ce que je suis capable de faire ou non dans mon quotidien,

des questions sur est-ce que tu conduis,

ton boulot, comment ça se passe à l'école,

des trucs un peu plus pratiques.

J'ai des questions aussi sur l'évolution possible,

est-ce que ça s'empire, est-ce que c'est toujours pareil,

est-ce qu'il y a un mieux possible,

enfin tu ne portes pas de lunettes, tu devrais porter des lunettes.

Ce genre de trucs.

Et sur le sujet de la sexualité,

c'est marrant parce que c'est un truc

que je serais prête à aborder avec mes partenaires,

ils n'ont jamais montré tellement d'intérêt,

sur cet angle-là.

Sur la façon dont tu le percevais.

Sur l'impact de mon handicap sur ma sexualité.

Est-ce que c'est par timidité,

par gêne de leur part, parce que je pense que c'est un sujet

avec lequel tout le monde n'est pas à l'aise,

de parler du handicap et de parler de sexualité,

tout le monde ne l'est pas non plus.

Petit combo de gêne chez certains.

Peut-être qu'il y a de ça, je ne sais pas.

Parce qu'encore une fois j'ai la chance que ça ne se voit pas

et on a l'impression que ça ne change rien.

Je pense que quelqu'un qui vient de me rencontrer

ou qui me connaît depuis pas très longtemps,

a le sentiment que ça ne change rien.

Et si, bien sûr que ça change les choses.

Comment ça impacte ta sexualité ?

Ça l'impacte, comme je le disais,

sur cette notion de désir où je pense

que j'accorde plus d'importance aux autres sens

que quelqu'un qui aura une vue parfaite.

J'imagine, encore une fois, je ne sais pas ce que c'est,

que d'être de ce côté-là de la barrière.

Je suppose que oui.

Je pense que je suis, dans l'acte,

je pense que je suis aussi plus sensible

à ce qui se passe sur mes autres sens.

C'est con, mais si j'ai un peu froid, par exemple,

ça me déconcentre complètement.

Je ne veux pas que tous mes sens soient bien,

soient à l'aise, s'y pas stimulés,

soit pas distraits.

J'ai remarqué que j'ai quasiment toujours les yeux fermés.

Je n'ai pas besoin de regarder

pour stimuler mon désir, pour me mettre dedans.

Je n'ai pas tellement besoin de voir l'autre,

de voir la tête qu'il fait, ou de regarder son corps,

ou de regarder à quoi ressemblent nos corps l'un avec l'autre.

Je ne sollicite pas ça.

Je sais que c'est quelque chose qu'on peut faire et qu'on fait.

Ce n'est pas du tout une ficelle sur laquelle je joue.

Tu préfères le sexe dans le noir ?

Sans aller jusque-là, la lumière ne me dérange pas.

Après, oui, quand même, pour des questions de pudeur,

selon que tu es à l'aise ou pas avec ton corps,

si tu es à l'aise ou pas avec ton partenaire,

oui, la pénombre va m'arranger, va me rassurer par moments.

Je pense que c'est plus là-dessus que le handicap.

Je pensais plus à un truc de confort.

La luminosité pourrait être un peu plus agressive pour toi,

et tu te sens mieux dans une pénombre.

De la même manière que mes autres sens sont facilement agressés,

oui, une mauvaise lumière, je ne pourrais pas faire l'amour sous un néon.

C'est très spécifique.

Non, mais tu vois ce que je veux dire ?

Une lumière froide, dégueulasse,

qui rend tout le monde moche,

je pense que je ne pourrais pas.

À choisir, je préfère le noir.

Je ne sais pas si ça répond à ta question.

Je t'avoue que je m'étais tellement posée,

donc je cafouille un peu en la bas.

Est-ce que tu as des choses que tu organises,

que tu sais qui sont mieux pour toi pour avoir un rapport sexuel optimal ?

En rapport avec, en l'occurrence, que tu as et ton handicap.

Ce n'est pas tellement pour le rapport en tant que tel,

mais c'est plus pour tout ce qui va autour.

Honnêtement, je préfère chez moi.

Parce que tu as besoin de ton petit confort,

tu as besoin de savoir où sont tes affaires,

si tu as envie d'aller faire pipi, prendre une douche, boire un verre d'eau.

Ça me rassure d'être chez moi.

Ça me rassure d'être entourée de mes affaires.

C'est une source de stress énorme, d'être chez l'autre.

Je suis bien mieux chez moi.

C'est super charmant chez toi.

Merci beaucoup.

On va faire une deuxième petite pause.

On va parler des oeuvres qui accompagnent ton imaginaire sexuel.

On l'a un peu abordé avant dans l'émission.

Je t'ai demandé de réfléchir à quelques questions.

Le livre qui t'excite ?

Ça n'a pas été évident de trouver des réponses à ces questions-là.

Je n'accorde pas une place incroyable dans ma vie, à ma sexualité et à mon désir.

Je dis ça en préambule.

Le premier truc auquel j'ai pensé,

c'est un truc qui m'est arrivé quand j'avais 15 ou 16 ans.

J'étais dans une librairie avec ma maman.

Elle me propose de choisir un livre.

Elle me dit que je choisis la collection Librio,

avec les livres à 10 francs à l'époque.

C'est tout des classiques.

Je me dis que c'est l'occasion.

Je regarde les couvertures.

Je prends un bouquin au pif.

Ce jour-là, je décide de ne pas lire la quatrième de couverture.

Je prends un livre qui s'appelle

Le Rideau Levé ou L'Éducation de l'or.

C'est un bouquin de Mirabeau.

Je me dis que ça serait intéressant d'avoir lu.

Je prends ce livre.

Je le tends à ma maman.

Nous passons en caisse avec ses livres.

Sur le chemin du retour,

je lis la quatrième de couverture.

Je vois que Mirabeau est aussi connu pour sa littérature érotique.

Je ne savais pas.

J'ai fait acheter à ma maman un bouquin de littérature érotique

à sa fille de 15 ans.

C'est un sujet tabou dans ma famille.

J'ai eu du mal à le lire.

J'ai lu le bouquin.

Je l'ai relu il y a quelques années.

Je l'ai trouvé malaisant.

Mais à l'époque, il m'avait mise dans un état.

Je n'arrivais pas à m'en détacher.

Il m'avait complètement chamboulé.

Le film qui me fait vibrer.

Je ne parle pas de ce qui m'a fait vibrer aujourd'hui.

Je me souviens que le film La leçon de piano de John Campion.

C'est un superbe film.

Il m'a bouleversée en matière de désir.

Il m'a chamboulée.

Il n'y a pas grand chose à voir.

Ce n'est pas là-dessus que ça se situe.

Tout le prélude qui comporte une part malaisante.

Il y a cette notion de chantage.

Entre le chanteur et la chanteuse.

Je ne l'ai pas vu depuis très longtemps.

Cette idée de chantage.

Leur relation est presque violente.

Très froide.

Très dure.

Il y a un prélude.

Une tension sexuelle qui monte.

Au fur et à mesure des scènes.

Je me souviens qu'il m'a mis dans un état.

Il y a quelques années.

Il repasse à la télé.

Je passais la soirée chez une amie.

On mangeait ensemble.

Elle me dit qu'il faut absolument qu'on regarde La leçon de piano.

C'est complètement fou.

On le regarde à deux.

Je suis désolée.

C'était plus dingue que ça.

C'était la première fois.

Je me sentais prise en faute.

C'est peut-être un peu cul-cul.

Je ne sais pas.

Je cite comme référence.

J'en garde un souvenir ému.

Une des scènes dont je me souviens beaucoup.

C'est une image que j'ai.

Au fur et à mesure,

il se découvre pour les leçons.

On voit la tête qui fait le regard qui pose sur elle.

Il découvre ses avant-bras.

Il y a rien.

On ne voit pas ses jambes.

On découvre ses poignets.

C'est une sensualité incroyable.

C'est la meilleure.

C'est une sensualité qui parle aux femmes.

C'est un peu dommage.

C'est reconnu comme un grand film.

Le côté sensuel a plus marqué.

On voit ça avec les films de Selit Yama.

Les hommes comprennent avec difficulté.

C'est un langage qu'ils ne comprennent pas.

L'image qui me donne des frissons de plaisir.

J'ai séché.

L'image seule, c'est pas mon objectif.

Je ne ressens pas grand-chose.

C'est une raison valable.

On accepte toutes les réponses.

La musique qui me met le mieux dans l'ambiance.

J'en ai plusieurs.

La chanson de Juliette Gréco,

« Déshabillez-moi ».

J'ai l'impression d'être une vente.

Je ne sais pas si c'est vrai.

Je me sens hyper sensuelle.

Hyper sexy.

Je me sens dans la maîtrise.

Dans l'appropriation de ma sexualité.

De mon désir.

Je la trouve incroyable.

La façon dont elle la chante.

Cette chanson me conditionne à me sentir éveillée.

A me sentir osagée par rapport à ma sexualité.

C'est la première qui m'est venue.

Dans le film de Tarantino,

il y a une scène avec une des nanasses.

Une scène de lap dance.

Elle est tellement sexy.

La chanson qui accompagne cette scène.

A elle seule.

Je pense qu'il faut avoir vu le film avant.

A elle seule, il y a une scène.

Elle est dans la maîtrise de ce qu'elle fait.

Du désir qu'elle provoque.

Cette chanson me met dans un bon état d'esprit.

Le parfum qui réveille tes sens ?

C'est l'odeur de la transpiration.

Elle peut tout allumer ou tout éteindre.

Si il y a de la transpiration,

ça va de l'eau à l'eau.

C'est un parfum qui me fait penser à la transpiration.

C'est un parfum qui me fait penser à la transpiration.

Si il y a de la transpiration, ça va.

D'autres, ça va moins bien.

Il y a des transpirations où tu as discuté avec la personne.

Un désir a commencé à monter.

Et l'odeur de ta peau ne revient pas.

Pas forcément de transpiration.

Je suis sensible aux odeurs.

Je sens les gens.

Il y a des odeurs de peau qui ne me reviennent pas.

Je n'ai pas envie d'aller me frotter à ça.

Il y en a qui, au contraire,

je trouve rassurantes et chaleureuses.

Dans lesquels j'ai envie de me blottir.

Tu préfères les gens qui ne boirent pas de parfum ?

Oui, plutôt.

Je suis assez difficile en matière de parfum.

Il ne faut pas que ça l'emporte sur le reste.

Un déodorant trop fort, une lessive qui sent fort,

un savon qui sent très fort...

Ça vient interférer.

Ça participe de l'odeur de la personne.

Mais quand c'est trop fort, ça vient interférer

ces signaux très primaires, très animaux que je cherche.

J'ai le sentiment d'être un animal en allant sentir mes partenaires.

Mais il ne faut pas que ça interfère ces signaux.

Ça peut les compléter.

Je ne suis pas du tout séduite par un parfum.

Comme dans une pub.

Mon Dieu, quel homme a me retourné sur un mec

parce qu'il porte le parfum que j'aime ?

Non.

On va parler de ta dernière fois.

Tu es en couple depuis un an.

Avec ce jeune homme que tu as rencontré via Tinder.

La dernière fois, c'était il y a 8 jours.

C'est la dernière fois qu'on s'est vus.

J'étais pas 100% présente.

Pour être honnête,

je ne sais pas trop pourquoi.

J'avais d'autres trucs en tête.

J'en avais envie quand même.

Mais c'était pas notre meilleur.

C'était bien, mais on a fait mieux.

C'était une fois planifié ?

Oui, dans le sens où...

Quand on vit pas ensemble,

et qu'on se voit pas souvent,

on se dit que ça peut faire partie du programme.

Maintenant, c'est pas une obligation.

C'était semi-planifié.

On a passé le week-end ensemble.

On a fait plein d'autres trucs.

C'était pas le but de la rencontre.

Est-ce que tu as pris du plaisir ?

Oui, j'en ai pris.

Le plus, c'est que je n'en ai pas pris.

Je peux pas pas en prendre.

C'est quelque chose qui a pu m'arriver plus jeune.

De tolérer des rapports,

voire de les subir un peu.

Mais c'est un piège dans lequel je n'arrive plus à tomber.

Si j'en prends pas, si y'en a zéro pour moi,

on arrête tout.

C'est une très bonne résolution.

On devrait plus la prendre.

Il faut quelques années pour en arriver à se dire ça.

C'est ce qu'on dit, que c'est un chemin pour tout.

Savoir se masturber, savoir se connaître,

trouver les bonnes personnes,

et même trouver son plaisir.

Je fais une parenthèse par rapport à ça.

J'ai le souvenir d'avoir déjà discuté

avec plusieurs amis proches

avec qui je parle de sexualité de façon assez ouverte.

J'ai deux discussions qui me viennent.

Une avec une copine qui est avec la même personne

depuis plus de 15 ans.

Ils se sont connus tout jeunes,

ils ont des gamins, c'est un très bon couple.

Quand on a commencé à parler de sexualité,

je me suis rendue compte qu'en fait,

dans son esprit, elle me percevait comme une déesse du sexe.

J'avais eu vachement plus de partenaires qu'elle.

Elle en avait eu un.

Dans sa tête, c'était un coup de dingue.

Mais non, c'est le contraire.

Je pense pas être un coup de dingue.

Elle l'avait pas réalisé.

Elle a une expérience sexuelle très limitée.

Elle a perdu sa virginité tard.

Elle a pas eu d'histoire, de flirt, de trucs comme ça.

Et dans son esprit,

c'était un coup de dingue.

Elle me disait ça comme un aveu.

Mais non, moi non plus, je suis pas à l'aise du tout.

Il y a eu beaucoup de partenaires que j'ai pris pour les mauvaises raisons.

Pour me rassurer, parce que j'avais pas confiance en moi.

Il y a un âge où je me disais,

il y en a un qui est d'accord, profite,

c'est peut-être ta chance, ta seule chance.

J'ai pensé ça moi aussi.

C'était juste pour revendiquer ce que tu disais.

Ça fait partie de mon parcours aussi.

Bien sûr.

Tu as pensé que tu pouvais rester seule ou pas trouver quelqu'un ?

Oui.

J'ai un handicap.

Aujourd'hui je porte une lentille, donc mon handicap se voit à peine.

Toute mon enfance et toute mon adolescence,

je l'ai faite avec des très grosses lunettes.

Des lunettes avec des très gros verres.

Ce qui, au moment de l'adolescence,

avec le regard des autres qu'on a tous subi pour une raison ou pour une autre,

moi c'est là-dessus que je l'ai subi.

J'ai longtemps pensé que j'intéresserais personne.

C'est comme ça que je le vivais.

Ça a été hyper dur.

Le jour où j'ai pu porter des lentilles au quotidien,

ça remonte à mes 15 ans à peu près.

J'ai constaté que le regard des autres avait changé sur moi.

Mais j'avais peine à y croire.

Je pensais que c'était très fragile et que c'était un énorme coup de bol

que je puisse plaire à quelqu'un, intéresser quelqu'un sur ce plan-là.

Donc oui,

je compte pas mal de partenaires dans ma vie,

en tout cas dans mes premières années,

où c'était pas tellement parce que j'étais intéressée,

ou que j'avais des sentiments, ou que j'avais du désir,

mais c'était un peu saisie ta chance, parce que tu sais pas quand ça se représentera.

Du coup, parce que t'as été plutôt en couple et que t'as eu des relations sexuelles

avec des gens qui voyaient ?

Je n'ai eu que des partenaires valides.

Peu importe les handicaps.

Je ne suis pas malvoyante, je connais personne qui est malvoyant ou qui est aveugle.

En tout cas, j'ai pas de proches.

J'allais te demander si t'es pas...

Ça aurait pu être une piste en te disant que c'est peut-être plus simple,

que c'est quelqu'un qui comprend.

J'y ai déjà pensé, j'ai pas encore trouvé ma réponse à cette question.

Mais j'y ai déjà pensé, ouais.

J'allais te demander ton partenaire actuel, comment il aborde ça ?

Il aborde avec beaucoup de simplicité, beaucoup de gentillesse,

beaucoup de bienveillance.

Il est pas maladroit, les rares fois où il va faire une petite blague

qui va aller un tout petit peu trop loin.

En général, c'est des blagues que je m'autorise à faire.

Et quand je l'entends dans la bouche de quelqu'un d'autre,

c'est « alors par contre, non, toi t'as pas le droit, en fait.

Je suis désolée, je comprends que tu la fasses,

tu m'as entendu la faire, mais par contre toi non. »

Et toujours c'est « ah, ok, très bien, d'accord, je note »,

il est vraiment très prévenant, il pose des questions,

je me sens libre d'expliquer.

Et après, par rapport à mon handicap et dans mes relations amoureuses

et sexuelles aussi, dans ma relation à l'autre,

mieux je l'ai compris, mieux j'ai appris à le formuler,

mieux je l'ai accepté aussi.

Plus ça a été facile de le faire comprendre aux autres

et du coup d'être dans des relations

où c'était abordé de façon saine.

Il a fallu que je me l'approprie aussi, ça, forcément.

C'est un chemin qui s'est fait en parallèle de ta construction de femme, fatalement.

Oui, parce que ça touche d'autres sphères de ma vie aussi,

évidemment ça touche pas que ma relation à l'autre et ma sexualité.

Donc ça c'est pareil, c'est un autre chemin

sur lequel il a fallu se construire.

On en a tous, moi j'ai celui-là aussi.

Est-ce que tu te sens aujourd'hui sur une bonne voie ?

Tu te sens mieux ?

Donc ça c'est super chouette et super encourageant.

Il y a des jours où j'ai l'impression que tout est encore à faire,

il y a des jours où j'ai l'impression que je suis qu'au début,

il y en a d'autres où je me regarde avec un peu plus de bienveillance et de gentillesse.

Bon ça va quand même, t'as fait pas mal de trucs !

Ça dépend des moments.

Je me regarde avec plus ou moins de lucidité là-dessus.

Je peux être très dure vis-à-vis de moi-même,

parfois je suis un peu plus honnête et un peu plus gentille.

J'essaye d'être un peu plus gentille.

Tu te sens épanouie aujourd'hui ?

Oui, je crois que je l'ai jamais été plus qu'aujourd'hui.

Ça n'est qu'une progression.

Il y a les jours avec et les jours sans.

Ça se fait pas sans accident de parcours, ça se fait pas sans pause.

Et puis des fois on se casse un peu la figure.

Mais en fait je ressens une espèce d'impatience parce qu'à chaque fois,

hyper souvent je me dis wow, j'ai quand même vachement avancé sur tel sujet.

J'ai vachement avancé en 2-3 ans depuis telle dernière étape que je vois dans le rétro.

Et en fait c'est ça depuis des années.

Et du coup je suis hyper impatiente.

Je me dis que la moïe dans 5 ans, ça va être dingue où je serai.

La moïe dans 10 ans, ça va être dingue où elle sera arrivée.

Je suis plutôt impatiente.

Encore une fois, il y a des jours où c'est un petit peu plus dur.

Mais globalement j'ai le sentiment de cheminer.

Et de cheminer dans une direction qui me ressemble de plus en plus.

Je veux qu'on finisse là-dessus parce que c'est tellement positif

d'expliquer que ce n'est pas une ligne droite

et que ce n'est pas une ligne comme ça, qu'on n'est pas quelqu'un au départ

et qu'on le reste toute sa vie, qu'on chemine, qu'on évolue

et qu'on évolue dans le bon sens surtout.

Que plus on apprend à se connaître et plus on apprend à se faire plaisir dans la vie.

Merci infiniment pour ce témoignage.

Merci à toi.

C'était première et dernière fois.

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