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Bram Stoker - Dracula, Part (73)

Part (73)

Songez, mon amour, qu'il y eut des temps où des hommes braves ont tué leurs femmes et leurs enfants, pour les empêcher de tomber aux mains de l'ennemi. Leurs mains n'ont pas faibli le moins du monde, parce que ceux qu'ils aimaient les imploraient de les tuer. C'est le devoir des hommes envers ceux qu'ils aiment, dans ces temps de sombres menaces. Et, oh, mon chéri, s'il doit se faire que je doive trouver la mort de la main de quelqu'un, que ce soit de la main de celui que j'aime le plus au monde. Dr. Van Helsing, je n'ai pas oublié votre pitié, quand il s'agissait de la pauvre Lucy, envers celui qui l'aimait » - elle fit une pause et rougit fugitivement, puis changea sa phrase : « envers celui qui avait plus qu'un autre le droit de lui apporter la paix. Si cela devait se reproduire, je compte que vous ferez en sorte que toute sa vie durant, mon mari se souvienne que c'est sa main qui, par amour, m'aura libérée de la terrible menace qui pesait sur moi. » « A nouveau, je le jure ! » clama le Professeur de sa voix puissante. Mrs. Harker sourit, sourit vraiment, et avec un soupir de soulagement, elle s'allongea à nouveau et dit : « Et maintenant, un mot d'avertissement ; un avertissement que vous ne devrez jamais oublier : ce moment, s'il doit jamais arriver, peut arriver rapidement, et sans qu'on s'y attende, et dans un tel cas vous ne devrez pas perdre de temps pour saisir l'opportunité. En un tel moment, je pourrais être moi-même – non, si ce moment arrive, je serai l'alliée de votre ennemi, et je combattrai contre vous. » « Encore une requête. » Elle était devenue très solennelle. « Elle n'est pas aussi vitale et nécessaire que l'autre, mais je veux que vous fassiez une chose pour moi, si vous le voulez bien. » Nous acquiesçâmes, mais aucun d'entre nous ne parla ; il n'était pas nécessaire de parler.

« Je voudrais que vous lisiez l'office des morts ». Elle fut interrompue par un gémissement de son mari. Elle prit ses mains dans les siennes, les tint placées sur son cœur, et continua : « Vous devrez bien le lire un jour devant mon tombeau. Quelle que soit l'issue de cette terrible situation, ce sera une douce pensée pour chacun, ou tout au moins pour certains d'entre nous. Vous, mon amour, le lirez je l'espère, car alors il sera pour toujours associé à votre voix, – quoi qu'il arrive ! » « Mais, oh, ma chérie » implora-t-il, « la mort est encore loin de vous. » « Non », répondit-elle, levant une main en signe d'avertissement. Je suis plus proche de la mort en ce moment que si je reposais sous terre sous le poids d'un tombeau ! » « Oh, ma femme, dois-je le lire ? » dit-il, avant de commencer. « Cela me réconforterait, mon époux ! ». Elle n'en dit pas plus, et il commença à lire quand elle lui eut tendu le livre. Comment pourrais-je, comment qui que ce soit pourrait-il, dépeindre cette scène étrange, sa solennité, sa sombre tristesse, son horreur, et pourtant, sa douceur. Même l'un de ces sceptiques, qui ne peuvent voir dans tout ce qui est sain et émouvant qu'un travestissement de l'amère vérité, aurait été touché au cœur s'il avait vu ce petit groupe d'amis fidèles et dévoués, à genoux autour de cette femme brisée et pleine d'angoisse, ou s'il avait entendu la voix tendre et passionnée de son mari, tellement envahi par l'émotion qu'il devait souvent s'arrêter, tandis qu'il lisait le si simple et si bel Office des Morts. Je – je ne puis plus – parler – et la voix me –manque… ! » Son instinct ne l'avait pas trompée. Aussi étrange que fut cette scène, même lorsque nous y repensâmes plus tard, nous qui étions sous l'influence de l'émotion du moment, elle nous apporta du réconfort, et le silence qui annonçait que Mrs. Harker allait de nouveau perdre la liberté de son âme, ne sembla plus aussi terrible, pour aucun d'entre nous, que nous aurions pu le craindre. Journal de Jonathan Harker 15 octobre, Varna. Nous avons quitté Charing Cross le matin du 12, avons gagné Paris cette même nuit, puis pris l'Orient-Express où des places nous avaient été réservées. Nous voyageâmes nuit et jour, et arrivâmes ici à environ cinq heures. Lord Godalming est allé au consulat pour voir si un télégramme à son adresse n'y était pas arrivé, tandis que les autres ont gagné cet hôtel – « l'Odessus ». Il se peut que le voyage ait connu quelques incidents ; toutefois j'étais trop impatient d'arriver pour m'en soucier. Jusqu'à ce que le Czarina Catherine arrive au port, rien dans le vaste monde ne pourra présenter le moindre intérêt pour moi. Dieu merci ! Mina va bien, et semble reprendre des forces et des couleurs. Elle dort énormément ; pendant le voyage, elle a pratiquement dormi tout le temps. Avant le lever et le coucher du soleil, toutefois, elle est tout à fait alerte et éveillée, et c'est devenu une habitude pour Van Helsing de l'hypnotiser à ce moment-là. Au début, il fallait fournir un effort, et il devait accomplir de nombreuses passes, mais maintenant, elle semble s'abandonner immédiatement, comme par habitude, et il n'a presque rien à faire. Il semble qu'à ces moments particuliers il ait tout pouvoir sur elle, et que les pensées de la jeune femme lui obéissent. Il lui demande toujours ce qu'elle peut voir et entendre. A la première question, elle répond : « Rien ; tout est noir » et à la seconde : « Je puis entendre les vagues contre la coque du navire, et l'eau qui se brise. Les toiles et les cordages se tendent, et les mâts et les vergues craquent. Le vent est fort – je l'entends souffler dans les haubans, et la proue fend l'écume. » Il est évident que la Czarina Catherine est toujours en mer, se hâtant vers Varna. Lord Godalming vient tout juste de rentrer. Il a quatre télégrammes, un pour chaque jour depuis que nous sommes partis, et tous avec la même information : le Czarina Catherine n'a été aperçu nulle part à la connaissance de la Lloyd's. Lord Godalming a pris des arrangements avant de quitter Londres afin que son agent lui envoie chaque jour un télégramme pour lui dire si le navire avait été vu quelque part. Il devait recevoir un message chaque jour même si le navire n'avait pas été vu, afin d'être certain qu'on restait vigilant à l'autre bout de la ligne.

Nous avons dîné et sommes allés nous coucher tôt. Demain, nous devons voir le Vice-Consul, et nous débrouiller, si nous pouvons, pour monter à bord du navire dès son arrivée. Van Helsing dit que nous aurons toutes nos chances si nous pouvons monter à bord entre le lever et le coucher du soleil. Le Conte, même s'il prend la forme d'une chauve-souris, ne peut franchir une eau vive de sa propre volonté ; en conséquence il ne peut donc quitter le navire. Et comme il ne peut quitter sa forme humaine sans éveiller les soupçons – ce qu'il doit naturellement éviter – il doit rester dans sa caisse. Donc si nous pouvons monter sur le navire après le lever du soleil, alors il sera à notre merci, car nous pourrons ouvrir la caisse et nous occuper de lui, comme nous l'avons fait pour la pauvre Lucy, avant qu'il ne s'éveille. Il n'aura pas à attendre beaucoup de pitié de nous. Nous pensons que nous n'aurons pas de difficultés avec les fonctionnaires ou avec les marins. Dieu merci ! Voici un pays où la corruption peut tout accomplir, et nous sommes très bien pourvus en matière d'argent. Nous devons seulement nous assurer que le navire n'entre pas au port entre le coucher et le lever du soleil, sans que nous en soyons avertis, et alors nous n'aurons rien à craindre. Le Dieu Argent règlera cela, je crois bien ! 16 octobre. Mina nous rapporte toujours la même chose : vagues, ténèbres et vents favorables. Nous sommes évidemment dans les temps, et lorsqu'on annoncera la Czarina Catherine, nous serons prêts. Comme le navire doit passer les Dardanelles, nous sommes certains d'avoir de ses nouvelles. 17 octobre. Tout est maintenant parfaitement organisé, je pense, pour souhaiter la bienvenue au Comte à son retour de voyage. Godalming a dit aux armateurs qu'il pensait que la caisse envoyée depuis l'étranger pouvait contenir quelque chose qui avait été volé à un de ses amis, et il a obtenu une demi-autorisation d'ouvrir la caisse à ses propres risques. Le propriétaire du navire lui a remis un document recommandant au capitaine de lui accorder toute facilité pour faire tout ce qu'il jugera bon à bord du navire, et il dispose aussi d'une autorisation similaire pour son agent de Varna. Nous avons vu cet agent, qui a été fortement impressionné par les manières aimables de Godalming à son égard, et nous sommes tous pleinement convaincus qu'il fera tout ce qu'il pourra pour aider à la réalisation de nos projets. Nous avons déjà prévu ce que nous ferons si nous parvenons à ouvrir la caisse. Si le Comte s'y trouve, Van Helsing et Seward lui couperont la tête sans attendre et lui planteront un pieu dans le cœur. Morris, Godalming et moi-même empêcherons quiconque d'intervenir, même si nous devons pour cela utiliser les armes que nous avons préparées à cet effet. Le Professeur dit que si nous pouvons disposer ainsi du corps du Comte, il tombera en poussière peu après. Dans ce cas, il n'y aura aucune preuve contre nous, si nous venions à être soupçonnés de meurtre. Mais même si ce n'était pas le cas, nous assumerions nos actes, et peut-être un jour ce manuscrit lui-même pourrait-il sauver certains d'entre nous de la corde. Quant à moi, c'est avec gratitude que je saisirai cette opportunité si elle s'offre à moi. Nous avons l'intention de remuer ciel et terre pour atteindre notre objectif. Nous nous sommes assurés auprès de certains fonctionnaires que dès que le Czarina Catherine sera en vue, nous en serons informés par un messager spécial. 24 octobre. Toute une semaine d'attente. Un télégramme par jour à Godalming, mais toujours la même histoire : « Toujours pas signalé ». Les réponses sous hypnose de Mina chaque matin et chaque soir sont toujours les mêmes : vagues et eau vive, et mâts qui grincent. 24 octobre. Télégramme de Rufus Smith, Lloyd's, Londres, à Lord Godalming, aux bons soins du Vice-Consul de Sa Majesté Britannique, Varna Czarina Catherine signalé ce matin aux Dardanelles.

Journal du Docteur Seward 25 octobre. Comme mon phonographe me manque ! Ecrire un journal à l'aide d'un crayon est vraiment agaçant, mais Van Helsing affirme qu'il le faut. Nous étions tous très excités hier quand Godalming a reçu son télégramme de la Lloyd's. Je sais maintenant ce que ressentent les hommes au milieu de la bataille lorsque retentit le signal de l'action. Seule Mrs. Harker ne montre aucun signe d'émotion. Après tout, ce n'est pas surprenant, car nous avons pris de grandes précautions afin qu'elle n'en sache rien, et nous nous sommes efforcés de ne montrer aucun signe d'excitation lorsque nous étions en sa présence. Avant, je suis certain qu'elle s'en serait rendue compte, quelles que soient les précautions prises pour lui dissimuler la chose, mais à cet égard elle a beaucoup changé ces trois dernières semaines. La léthargie la gagne, et même si elle semble forte et bien portante, et retrouve un peu de ses couleurs, Van Helsing et moi-même ne sommes pas satisfaits. Nous parlons souvent d'elle, mais nous n'avons toutefois encore rien dit aux autres. Cela briserait le cœur de ce pauvre Harker – et certainement aussi ses nerfs – s'il savait que nous avons le moindre doute sur ce sujet. Van Helsing surveille très attentivement les dents de la jeune femme, à ce qu'il me dit, quand elle est sous influence hypnotique ; il prétend que tant qu'elles ne commencent pas à devenir plus pointues, il n'y a pas de risque de changement dangereux en elle. Si cela devait arriver, il serait nécessaire de prendre des mesures ! … Nous savons tous deux quelles devraient être ces mesures, même si nous ne partageons pas ces réflexions à haute voix. Aucun de nous ne reculera devant cette tâche – quelque affreuse qu'elle puisse être.

Part (73) Anteil (73) Part (73) Parte (73) Parte (73)

Songez, mon amour, qu'il y eut des temps où des hommes braves ont tué leurs femmes et leurs enfants, pour les empêcher de tomber aux mains de l'ennemi. Leurs mains n'ont pas faibli le moins du monde, parce que ceux qu'ils aimaient les imploraient de les tuer. C'est le devoir des hommes envers ceux qu'ils aiment, dans ces temps de sombres menaces. Et, oh, mon chéri, s'il doit se faire que je doive trouver la mort de la main de quelqu'un, que ce soit de la main de celui que j'aime le plus au monde. Dr. Van Helsing, je n'ai pas oublié votre pitié, quand il s'agissait de la pauvre Lucy, envers celui qui l'aimait » - elle fit une pause et rougit fugitivement, puis changea sa phrase : « envers celui qui avait plus qu'un autre le droit de lui apporter la paix. Si cela devait se reproduire, je compte que vous ferez en sorte que toute sa vie durant, mon mari se souvienne que c'est sa main qui, par amour, m'aura libérée de la terrible menace qui pesait sur moi. » « A nouveau, je le jure ! » clama le Professeur de sa voix puissante. Mrs. Harker sourit, sourit vraiment, et avec un soupir de soulagement, elle s'allongea à nouveau et dit : « Et maintenant, un mot d'avertissement ; un avertissement que vous ne devrez jamais oublier : ce moment, s'il doit jamais arriver, peut arriver rapidement, et sans qu'on s'y attende, et dans un tel cas vous ne devrez pas perdre de temps pour saisir l'opportunité. En un tel moment, je pourrais être moi-même – non, si ce moment arrive, je serai l'alliée de votre ennemi, et je combattrai contre vous. » « Encore une requête. » Elle était devenue très solennelle. « Elle n'est pas aussi vitale et nécessaire que l'autre, mais je veux que vous fassiez une chose pour moi, si vous le voulez bien. » Nous acquiesçâmes, mais aucun d'entre nous ne parla ; il n'était pas nécessaire de parler.

« Je voudrais que vous lisiez l'office des morts ». Elle fut interrompue par un gémissement de son mari. Elle prit ses mains dans les siennes, les tint placées sur son cœur, et continua : « Vous devrez bien le lire un jour devant mon tombeau. Quelle que soit l'issue de cette terrible situation, ce sera une douce pensée pour chacun, ou tout au moins pour certains d'entre nous. Vous, mon amour, le lirez je l'espère, car alors il sera pour toujours associé à votre voix, – quoi qu'il arrive ! » « Mais, oh, ma chérie » implora-t-il, « la mort est encore loin de vous. » « Non », répondit-elle, levant une main en signe d'avertissement. Je suis plus proche de la mort en ce moment que si je reposais sous terre sous le poids d'un tombeau ! » « Oh, ma femme, dois-je le lire ? » dit-il, avant de commencer. « Cela me réconforterait, mon époux ! ». Elle n'en dit pas plus, et il commença à lire quand elle lui eut tendu le livre. Comment pourrais-je, comment qui que ce soit pourrait-il, dépeindre cette scène étrange, sa solennité, sa sombre tristesse, son horreur, et pourtant, sa douceur. Même l'un de ces sceptiques, qui ne peuvent voir dans tout ce qui est sain et émouvant qu'un travestissement de l'amère vérité, aurait été touché au cœur s'il avait vu ce petit groupe d'amis fidèles et dévoués, à genoux autour de cette femme brisée et pleine d'angoisse, ou s'il avait entendu la voix tendre et passionnée de son mari, tellement envahi par l'émotion qu'il devait souvent s'arrêter, tandis qu'il lisait le si simple et si bel Office des Morts. Je – je ne puis plus – parler – et la voix me –manque… ! » Son instinct ne l'avait pas trompée. Aussi étrange que fut cette scène, même lorsque nous y repensâmes plus tard, nous qui étions sous l'influence de l'émotion du moment, elle nous apporta du réconfort, et le silence qui annonçait que Mrs. Harker allait de nouveau perdre la liberté de son âme, ne sembla plus aussi terrible, pour aucun d'entre nous, que nous aurions pu le craindre. Journal de Jonathan Harker 15 octobre, Varna. Nous avons quitté Charing Cross le matin du 12, avons gagné Paris cette même nuit, puis pris l'Orient-Express où des places nous avaient été réservées. Nous voyageâmes nuit et jour, et arrivâmes ici à environ cinq heures. Lord Godalming est allé au consulat pour voir si un télégramme à son adresse n'y était pas arrivé, tandis que les autres ont gagné cet hôtel – « l'Odessus ». Il se peut que le voyage ait connu quelques incidents ; toutefois j'étais trop impatient d'arriver pour m'en soucier. Jusqu'à ce que le Czarina Catherine arrive au port, rien dans le vaste monde ne pourra présenter le moindre intérêt pour moi. Dieu merci ! Mina va bien, et semble reprendre des forces et des couleurs. Elle dort énormément ; pendant le voyage, elle a pratiquement dormi tout le temps. Avant le lever et le coucher du soleil, toutefois, elle est tout à fait alerte et éveillée, et c'est devenu une habitude pour Van Helsing de l'hypnotiser à ce moment-là. Au début, il fallait fournir un effort, et il devait accomplir de nombreuses passes, mais maintenant, elle semble s'abandonner immédiatement, comme par habitude, et il n'a presque rien à faire. Il semble qu'à ces moments particuliers il ait tout pouvoir sur elle, et que les pensées de la jeune femme lui obéissent. Il lui demande toujours ce qu'elle peut voir et entendre. A la première question, elle répond : « Rien ; tout est noir » et à la seconde : « Je puis entendre les vagues contre la coque du navire, et l'eau qui se brise. Les toiles et les cordages se tendent, et les mâts et les vergues craquent. Le vent est fort – je l'entends souffler dans les haubans, et la proue fend l'écume. » Il est évident que la Czarina Catherine est toujours en mer, se hâtant vers Varna. Es evidente que la zarina Catalina todavía está en el mar, apresurándose hacia Varna. Lord Godalming vient tout juste de rentrer. Il a quatre télégrammes, un pour chaque jour depuis que nous sommes partis, et tous avec la même information : le Czarina Catherine n'a été aperçu nulle part à la connaissance de la Lloyd's. Lord Godalming a pris des arrangements avant de quitter Londres afin que son agent lui envoie chaque jour un télégramme pour lui dire si le navire avait été vu quelque part. Il devait recevoir un message chaque jour même si le navire n'avait pas été vu, afin d'être certain qu'on restait vigilant à l'autre bout de la ligne.

Nous avons dîné et sommes allés nous coucher tôt. Demain, nous devons voir le Vice-Consul, et nous débrouiller, si nous pouvons, pour monter à bord du navire dès son arrivée. Van Helsing dit que nous aurons toutes nos chances si nous pouvons monter à bord entre le lever et le coucher du soleil. Le Conte, même s'il prend la forme d'une chauve-souris, ne peut franchir une eau vive de sa propre volonté ; en conséquence il ne peut donc quitter le navire. Et comme il ne peut quitter sa forme humaine sans éveiller les soupçons – ce qu'il doit naturellement éviter – il doit rester dans sa caisse. Donc si nous pouvons monter sur le navire après le lever du soleil, alors il sera à notre merci, car nous pourrons ouvrir la caisse et nous occuper de lui, comme nous l'avons fait pour la pauvre Lucy, avant qu'il ne s'éveille. Il n'aura pas à attendre beaucoup de pitié de nous. Nous pensons que nous n'aurons pas de difficultés avec les fonctionnaires ou avec les marins. Dieu merci ! Voici un pays où la corruption peut tout accomplir, et nous sommes très bien pourvus en matière d'argent. Nous devons seulement nous assurer que le navire n'entre pas au port entre le coucher et le lever du soleil, sans que nous en soyons avertis, et alors nous n'aurons rien à craindre. Le Dieu Argent règlera cela, je crois bien ! 16 octobre. Mina nous rapporte toujours la même chose : vagues, ténèbres et vents favorables. Nous sommes évidemment dans les temps, et lorsqu'on annoncera la Czarina Catherine, nous serons prêts. Comme le navire doit passer les Dardanelles, nous sommes certains d'avoir de ses nouvelles. 17 octobre. Tout est maintenant parfaitement organisé, je pense, pour souhaiter la bienvenue au Comte à son retour de voyage. Godalming a dit aux armateurs qu'il pensait que la caisse envoyée depuis l'étranger pouvait contenir quelque chose qui avait été volé à un de ses amis, et il a obtenu une demi-autorisation d'ouvrir la caisse à ses propres risques. Le propriétaire du navire lui a remis un document recommandant au capitaine de lui accorder toute facilité pour faire tout ce qu'il jugera bon à bord du navire, et il dispose aussi d'une autorisation similaire pour son agent de Varna. Nous avons vu cet agent, qui a été fortement impressionné par les manières aimables de Godalming à son égard, et nous sommes tous pleinement convaincus qu'il fera tout ce qu'il pourra pour aider à la réalisation de nos projets. Nous avons déjà prévu ce que nous ferons si nous parvenons à ouvrir la caisse. Si le Comte s'y trouve, Van Helsing et Seward lui couperont la tête sans attendre et lui planteront un pieu dans le cœur. Morris, Godalming et moi-même empêcherons quiconque d'intervenir, même si nous devons pour cela utiliser les armes que nous avons préparées à cet effet. Le Professeur dit que si nous pouvons disposer ainsi du corps du Comte, il tombera en poussière peu après. Dans ce cas, il n'y aura aucune preuve contre nous, si nous venions à être soupçonnés de meurtre. Mais même si ce n'était pas le cas, nous assumerions nos actes, et peut-être un jour ce manuscrit lui-même pourrait-il sauver certains d'entre nous de la corde. Quant à moi, c'est avec gratitude que je saisirai cette opportunité si elle s'offre à moi. Nous avons l'intention de remuer ciel et terre pour atteindre notre objectif. Nous nous sommes assurés auprès de certains fonctionnaires que dès que le Czarina Catherine sera en vue, nous en serons informés par un messager spécial. 24 octobre. Toute une semaine d'attente. Un télégramme par jour à Godalming, mais toujours la même histoire : « Toujours pas signalé ». Les réponses sous hypnose de Mina chaque matin et chaque soir sont toujours les mêmes : vagues et eau vive, et mâts qui grincent. 24 octobre. Télégramme de Rufus Smith, Lloyd's, Londres, à Lord Godalming, aux bons soins du Vice-Consul de Sa Majesté Britannique, Varna Czarina Catherine signalé ce matin aux Dardanelles.

Journal du Docteur Seward 25 octobre. Comme mon phonographe me manque ! Ecrire un journal à l'aide d'un crayon est vraiment agaçant, mais Van Helsing affirme qu'il le faut. Nous étions tous très excités hier quand Godalming a reçu son télégramme de la Lloyd's. Je sais maintenant ce que ressentent les hommes au milieu de la bataille lorsque retentit le signal de l'action. Seule Mrs. Harker ne montre aucun signe d'émotion. Après tout, ce n'est pas surprenant, car nous avons pris de grandes précautions afin qu'elle n'en sache rien, et nous nous sommes efforcés de ne montrer aucun signe d'excitation lorsque nous étions en sa présence. Avant, je suis certain qu'elle s'en serait rendue compte, quelles que soient les précautions prises pour lui dissimuler la chose, mais à cet égard elle a beaucoup changé ces trois dernières semaines. La léthargie la gagne, et même si elle semble forte et bien portante, et retrouve un peu de ses couleurs, Van Helsing et moi-même ne sommes pas satisfaits. Nous parlons souvent d'elle, mais nous n'avons toutefois encore rien dit aux autres. Cela briserait le cœur de ce pauvre Harker – et certainement aussi ses nerfs – s'il savait que nous avons le moindre doute sur ce sujet. Van Helsing surveille très attentivement les dents de la jeune femme, à ce qu'il me dit, quand elle est sous influence hypnotique ; il prétend que tant qu'elles ne commencent pas à devenir plus pointues, il n'y a pas de risque de changement dangereux en elle. Si cela devait arriver, il serait nécessaire de prendre des mesures ! … Nous savons tous deux quelles devraient être ces mesures, même si nous ne partageons pas ces réflexions à haute voix. Aucun de nous ne reculera devant cette tâche – quelque affreuse qu'elle puisse être.