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Alice au pays des merveilles - Alice in Wonderland, Part (4,5,6)

Part (4,5,6)

CHAPITRE IV.

L'HABITATION DU LAPIN BLANC.

C'était le Lapin Blanc qui revenait en trottinant, et qui cherchait de tous côtés, d'un air inquiet, comme s'il avait perdu quelque chose ; Alice l'entendit qui marmottait : « La Duchesse !

La Duchesse ! Oh ! mes pauvres pattes ; oh ! ma robe et mes moustaches ! Elle me fera guillotiner aussi vrai que des furets sont des furets ! Où pourrais-je bien les avoir perdus ? » Alice devina tout de suite qu'il cherchait l'éventail et la paire de gants paille, et, comme elle avait bon cœur, elle se mit à les chercher aussi ; mais pas moyen de les trouver.

Du reste, depuis son bain dans la mare aux larmes, tout était changé : la salle, la table de verre, et la petite porte avaient complétement disparu.

Bientôt le Lapin aperçut Alice qui furetait ; il lui cria d'un ton d'impatience : « Eh bien !

Marianne, que faites-vous ici ? Courez vite à la maison me chercher une paire de gants et un éventail ! Allons, dépêchons-nous. » Alice eut si grand' peur qu'elle se mit aussitôt à courir dans la direction qu'il indiquait, sans chercher à lui expliquer qu'il se trompait. « Il m'a pris pour sa bonne, » se disait-elle en courant.

« Comme il sera étonné quand il saura qui je suis ! Mais je ferai bien de lui porter ses gants et son éventail ; c'est-à-dire, si je les trouve. » Ce disant, elle arriva en face d'une petite maison, et vit sur la porte une plaque en cuivre avec ces mots, « JEAN LAPIN. » Elle monta l'escalier, entra sans frapper, tout en tremblant de rencontrer la vraie Marianne, et d'être mise à la porte avant d'avoir trouvé les gants et l'éventail.

« Que c'est drôle, » se dit Alice, « de faire des commissions pour un lapin !

Bientôt ce sera Dinah qui m'enverra en commission. » Elle se prit alors à imaginer comment les choses se passeraient. — « « Mademoiselle Alice, venez ici tout de suite vous apprêter pour la promenade. » « Dans l'instant, ma bonne ! Il faut d'abord que je veille sur ce trou jusqu'à ce que Dinah revienne, pour empêcher que la souris ne sorte. » Mais je ne pense pas, » continua Alice, « qu'on garderait Dinah à la maison si elle se mettait dans la tête de commander comme cela aux gens. » Tout en causant ainsi, Alice était entrée dans une petite chambre bien rangée, et, comme elle s'y attendait, sur une petite table dans l'embrasure de la fenêtre, elle vit un éventail et deux ou trois paires de gants de chevreau tout petits. Elle en prit une paire, ainsi que l'éventail, et allait quitter la chambre lorsqu'elle aperçut, près du miroir, une petite bouteille. Cette fois il n'y avait pas l'inscription BUVEZ-MOI — ce qui n'empêcha pas Alice de la déboucher et de la porter à ses lèvres. « Il m'arrive toujours quelque chose d'intéressant, » se dit-elle, « lorsque je mange ou que je bois. Je vais voir un peu l'effet de cette bouteille. J'espère bien qu'elle me fera regrandir, car je suis vraiment fatiguée de n'être qu'une petite nabote ! » C'est ce qui arriva en effet, et bien plus tôt qu'elle ne s'y attendait. Elle n'avait pas bu la moitié de la bouteille, que sa tête touchait au plafond et qu'elle fut forcée de se baisser pour ne pas se casser le cou. Elle remit bien vite la bouteille sur la table en se disant : « En voilà assez ; j'espère ne pas grandir davantage. Je ne puis déjà plus passer par la porte. Oh ! je voudrais bien n'avoir pas tant bu ! » Hélas ! il était trop tard ; elle grandissait, grandissait, et eut bientôt à se mettre à genoux sur le plancher. Mais un instant après, il n'y avait même plus assez de place pour rester dans cette position, et elle essaya de se tenir étendue

par terre, un coude contre la porte et l'autre bras passé autour de sa tête.

Cependant, comme elle grandissait toujours, elle fut obligée, comme dernière ressource, de laisser pendre un de ses bras par la fenêtre et d'enfoncer un pied dans la cheminée en disant : « À présent c'est tout ce que je peux faire, quoi qu'il arrive. Que vais-je devenir ? » Heureusement pour Alice, la petite bouteille magique avait alors produit tout son effet, et elle cessa de grandir. Cependant sa position était bien gênante, et comme il ne semblait pas y avoir la moindre chance qu'elle pût jamais sortir de cette chambre, il n'y a pas à s'étonner qu'elle se trouvât bien malheureuse.

« C'était bien plus agréable chez nous, » pensa la pauvre enfant.

« Là du moins je ne passais pas mon temps à grandir et à rapetisser, et je n'étais pas la domestique des lapins et des souris. Je voudrais bien n'être jamais descendue dans ce terrier ; et pourtant c'est assez drôle cette manière de vivre ! Je suis curieuse de savoir ce que c'est qui m'est arrivé. Autrefois, quand je lisais des contes de fées, je m'imaginais que rien de tout cela ne pouvait être, et maintenant me voilà en pleine féerie. On devrait faire un livre sur mes aventures ; il y aurait de quoi ! Quand je serai grande j'en ferai un, moi. — Mais je suis déjà bien grande ! » dit-elle tristement. « Dans tous les cas, il n'y a plus de place ici pour grandir davantage. » « Mais alors, » pensa Alice, « ne serai-je donc jamais plus vieille que je ne le suis maintenant ? D'un côté cela aura ses avantages, ne jamais être une vieille femme. Mais alors avoir toujours des leçons à apprendre ! Oh, je n'aimerais pas cela du tout. » « Oh ! Alice, petite folle, » se répondit-elle. « Comment pourriez-vous apprendre des leçons ici ? Il y a à peine de la place pour vous, et il n'y en a pas du tout pour vos livres de leçons. » Et elle continua ainsi, faisant tantôt les demandes et tantôt les réponses, et établissant sur ce sujet toute une conversation ; mais au bout de quelques instants elle entendit une voix au dehors, et s'arrêta pour écouter. « Marianne !

Marianne ! » criait la voix ; « allez chercher mes gants bien vite ! » Puis Alice entendit des piétinements dans l'escalier. Elle savait que c'était le Lapin qui la cherchait ; elle trembla si fort qu'elle en ébranla la maison, oubliant que maintenant elle était mille fois plus grande que le Lapin, et n'avait rien à craindre de lui.

Le Lapin, arrivé à la porte, essaya de l'ouvrir ; mais, comme elle s'ouvrait en dedans et que le coude d'Alice était fortement appuyé contre la porte, la tentative fut vaine.

Alice entendit le Lapin qui murmurait : « C'est bon, je vais faire le tour et j'entrerai par la fenêtre. » « Je t'en défie ! » pensa Alice.

Elle attendit un peu ; puis, quand elle crut que le Lapin était sous la fenêtre, elle étendit le bras tout à coup pour le saisir ; elle ne prit que du vent. Mais elle entendit un petit cri, puis le bruit d'une chute et de vitres cassées (ce qui lui fit penser que le Lapin était tombé sur les châssis de quelque serre à concombre), puis une voix colère, celle du Lapin : « Patrice ! Patrice ! où es-tu ? » Une voix qu'elle ne connaissait pas répondit : « Me v'là, not' maître ! J'bêchons la terre pour trouver des pommes ! » « Pour trouver des pommes ! » dit le Lapin furieux. « Viens m'aider à me tirer d'ici. » (Nouveau bruit de vitres cassées. ) « Dis-moi un peu, Patrice, qu'est-ce qu'il y a là à la fenêtre ? » « Ça, not' maître, c'est un bras. » « Un bras, imbécile ! Qui a jamais vu un bras de cette dimension ? Ça bouche toute la fenêtre. » « Bien sûr, not' maître, mais c'est un bras tout de même. » « Dans tous les cas il n'a rien à faire ici. Enlève-moi ça bien vite. » Il se fit un long silence, et Alice n'entendait plus que des chuchotements de temps à autre, comme : « Maître, j'osons point. » — « Fais ce que je te dis, capon ! » Alice étendit le bras de nouveau comme pour agripper quelque chose ; cette fois il y eut deux petits cris et encore un bruit de vitres cassées. « Que de châssis il doit y avoir là ! » pensa Alice. « Je me demande ce qu'ils vont faire à présent. Quant à me retirer par la fenêtre, je le souhaite de tout mon cœur, car je n'ai pas la moindre envie de rester ici plus longtemps ! » Il se fit quelques instants de silence. À la fin, Alice entendit un bruit de petites roues, puis le son d'un grand nombre de voix ; elle distingua ces mots : « Où est l'autre échelle ? — Je n'avais point qu'à en apporter une ; c'est Jacques qui a l'autre. — Allons, Jacques, apporte ici, mon garçon ! — Dressez-les là au coin. — Non, attachez-les d'abord l'une au bout de l'autre. — Elles ne vont pas encore moitié assez haut. — Ça fera l'affaire ; ne soyez pas si difficile. — Tiens, Jacques, attrape ce bout de corde. — Le toit portera-t-il bien ? — Attention à cette tuile qui ne tient pas. — Bon ! la voilà qui dégringole. Gare les têtes ! » (Il se fit un grand fracas.) « Qui a fait cela ? — Je crois bien que c'est Jacques. — Qui est-ce qui va descendre par la cheminée ? — Pas moi, bien sûr ! Allez-y, vous. — Non pas, vraiment. — C'est à vous, Jacques, à descendre. — Hohé, Jacques, not' maître dit qu'il faut que tu descendes par la cheminée ! » « Ah ! » se dit Alice, « c'est donc Jacques qui va descendre. Il paraît qu'on met tout sur le dos de Jacques. Je ne voudrais pas pour beaucoup être Jacques. Ce foyer est étroit certainement, mais je crois bien que je pourrai tout de même lui lancer un coup de pied. » Elle retira son pied aussi bas que possible, et ne bougea plus jusqu'à ce qu'elle entendît le bruit d'un petit animal (elle ne pouvait deviner de quelle espèce) qui grattait et cherchait à descendre dans la cheminée, juste au-dessus d'elle ; alors se disant : « Voilà Jacques sans doute, » elle lança un bon coup de pied, et attendit pour voir ce qui allait arriver. La première chose qu'elle entendit fut un cri général de : « Tiens, voilà Jacques en l'air !

» Puis la voix du Lapin, qui criait : « Attrapez-le, vous là-bas, près de la haie ! » Puis un long silence ; ensuite un mélange confus de voix : « Soutenez-lui la tête. — De l'eau-de-vie maintenant. — Ne le faites pas engouer. — Qu'est-ce donc, vieux camarade ? — Que t'est-il arrivé ? Raconte-nous ça ! » Enfin une petite voix faible et flûtée se fit entendre. (« C'est la voix de Jacques, » pensa Alice.) « Je n'en sais vraiment rien. Merci, c'est assez ; je me sens mieux maintenant ; mais je suis encore trop bouleversé pour vous conter la chose. Tout ce que je sais, c'est que j'ai été poussé comme par un ressort, et que je suis parti en l'air comme une fusée. » « Ça, c'est vrai, vieux camarade, » disaient les autres. « Il faut mettre le feu à la maison, » dit le Lapin.

Alors Alice cria de toutes ses forces : « Si vous osez faire cela, j'envoie Dinah à votre poursuite.

» Il se fit tout à coup un silence de mort. « Que vont-ils faire à présent ? » pensa Alice. « S'ils avaient un peu d'esprit, ils enlèveraient le toit. » Quelques minutes après, les allées et venues recommencèrent, et Alice entendit le Lapin, qui disait : « Une brouettée d'abord, ça suffira. » « Une brouettée de quoi ? » pensa Alice. Il ne lui resta bientôt plus de doute, car, un instant après, une grêle de petits cailloux vint battre contre la fenêtre, et quelques-uns même l'atteignirent au visage. « Je vais bientôt mettre fin à cela, » se dit-elle ; puis elle cria : « Vous ferez bien de ne pas recommencer. » Ce qui produisit encore un profond silence.

Alice remarqua, avec quelque surprise, qu'en tombant sur le plancher les cailloux se changeaient en petits gâteaux, et une brillante idée lui traversa l'esprit.

« Si je mange un de ces gâteaux, » pensa-t-elle, « cela ne manquera pas de me faire ou grandir ou rapetisser ; or, je ne puis plus grandir, c'est impossible, donc je rapetisserai ! » Elle avala un des gâteaux, et s'aperçut avec joie qu'elle diminuait rapidement. Aussitôt qu'elle fut assez petite pour passer par la porte, elle s'échappa de la maison, et trouva toute une foule d'oiseaux et d'autres petits animaux qui attendaient dehors. Le pauvre petit lézard, Jacques, était au milieu d'eux, soutenu par des cochons d'Inde, qui le faisaient boire à une bouteille. Tous se précipitèrent sur Alice aussitôt qu'elle parut ; mais elle se mit à courir de toutes ses forces, et se trouva bientôt en sûreté dans un bois touffu.

« La première chose que j'aie à faire, » dit Alice en errant çà et là dans les bois, « c'est de revenir à ma première grandeur ; la seconde, de chercher un chemin qui me conduise dans ce ravissant jardin.

C'est là, je crois, ce que j'ai de mieux à faire ! » En effet c'était un plan de campagne excellent, très-simple et très-habilement combiné. Toute la difficulté était de savoir comment s'y prendre pour l'exécuter. Tandis qu'elle regardait en tapinois et avec précaution à travers les arbres, un petit aboiement sec, juste au-dessus de sa tête, lui fit tout à coup lever les yeux.

Un jeune chien (qui lui parut énorme) la regardait avec de grands yeux ronds, et étendait légèrement la patte pour tâcher de la toucher.

« Pauvre petit ! » dit Alice d'une voix caressante et essayant de siffler. Elle avait une peur terrible cependant, car elle pensait qu'il pouvait bien avoir faim, et que dans ce cas il était probable qu'il la mangerait, en dépit de toutes ses câlineries. Sans trop savoir ce qu'elle faisait, elle ramassa une petite baguette et la présenta au petit chien qui bondit des quatre pattes à la fois, aboyant de joie, et se jeta sur le bâton comme pour jouer avec. Alice passa de l'autre côté d'un gros chardon pour n'être pas foulée aux pieds. Sitôt qu'elle reparut, le petit chien se précipita de nouveau sur le bâton, et, dans son empressement de le saisir, butta et fit une cabriole. Mais Alice, trouvant que cela ressemblait beaucoup à une partie qu'elle ferait avec un cheval de charrette, et craignant à chaque instant d'être écrasée par le chien, se remit à tourner autour du chardon. Alors le petit chien fit une série de charges contre le bâton. Il avançait un peu chaque fois, puis reculait bien loin en faisant des aboiements rauques ; puis enfin il se coucha à une grande distance de là, tout haletant, la langue pendante, et ses grands yeux à moitié fermés.

Alice jugea que le moment était venu de s'échapper.

Elle prit sa course aussitôt, et ne s'arrêta que lorsqu'elle se sentit fatiguée et hors d'haleine, et qu'elle n'entendit plus que faiblement dans le lointain les aboiements du petit chien.

« C'était pourtant un bien joli petit chien, » dit Alice, en s'appuyant sur un bouton d'or pour se reposer, et en s'éventant avec une des feuilles de la plante.

« Je lui aurais volontiers enseigné tout plein de jolis tours si — si j'avais été assez grande pour cela ! Oh ! mais j'oubliais que j'avais encore à grandir ! Voyons. Comment faire ? Je devrais sans doute boire ou manger quelque chose ; mais quoi ? Voilà la grande question. » En effet, la grande question était bien de savoir quoi ? Alice regarda tout autour d'elle les fleurs et les brins d'herbes ; mais elle ne vit rien qui lui parût bon à boire ou à manger dans les circonstances présentes.

Près d'elle poussait un large champignon, à peu près haut comme elle.

Lorsqu'elle l'eut examiné par-dessous, d'un côté et de l'autre, par-devant et par-derrière, l'idée lui vint qu'elle ferait bien de regarder ce qu'il y avait dessus.

Elle se dressa sur la pointe des pieds, et, glissant les yeux par-dessus le bord du champignon, ses regards rencontrèrent ceux d'une grosse chenille bleue assise au sommet, les bras croisés, fumant tranquillement une longue pipe turque sans faire la moindre attention à elle ni à quoi que ce fût.

CHAPITRE V. CONSEILS D'UNE CHENILLE.

La Chenille et Alice se considérèrent un instant en silence.

Enfin la Chenille sortit le houka de sa bouche, et lui adressa la parole d'une voix endormie et traînante.

« Qui êtes-vous ?

» dit la Chenille.

Ce n'était pas là une manière encourageante d'entamer la conversation. Alice répondit, un peu confuse : « Je — je le sais à peine moi-même quant à présent. Je sais bien ce que j'étais en me levant ce matin, mais je crois avoir changé plusieurs fois depuis. » « Qu'entendez-vous par là ? » dit la Chenille d'un ton sévère. « Expliquez-vous. » « Je crains bien de ne pouvoir pas m'expliquer, » dit Alice, « car, voyez-vous, je ne suis plus moi-même. » « Je ne vois pas du tout, » répondit la Chenille. « J'ai bien peur de ne pouvoir pas dire les choses plus clairement, » répliqua Alice fort poliment ; « car d'abord je n'y comprends rien moi-même.

Grandir et rapetisser si souvent en un seul jour, cela embrouille un peu les idées. » « Pas du tout, » dit la Chenille. « Peut-être ne vous en êtes-vous pas encore aperçue, » dit Alice.

« Mais quand vous deviendrez chrysalide, car c'est ce qui vous arrivera, sachez-le bien, et ensuite papillon, je crois bien que vous vous sentirez un peu drôle, qu'en dites-vous ? » « Pas du tout, » dit la Chenille. « Vos sensations sont peut-être différentes des miennes, » dit Alice. « Tout ce que je sais, c'est que cela me semblerait bien drôle à moi. » « À vous ! » dit la Chenille d'un ton de mépris. « Qui êtes-vous ? » Cette question les ramena au commencement de la conversation. Alice, un peu irritée du parler bref de la Chenille, se redressa de toute sa hauteur et répondit bien gravement : « Il me semble que vous devriez d'abord me dire qui vous êtes vous-même.

» « Pourquoi ? » dit la Chenille. C'était encore là une question bien embarrassante ; et comme Alice ne trouvait pas de bonne raison à donner, et que la Chenille avait l'air de très-mauvaise humeur, Alice lui tourna le dos et s'éloigna. « Revenez, » lui cria la Chenille.

« J'ai quelque chose d'important à vous dire ! » L'invitation était engageante assurément ; Alice revint sur ses pas. « Ne vous emportez pas, » dit la Chenille.

« Est-ce tout ?

» dit Alice, cherchant à retenir sa colère.

« Non, » répondit la Chenille.

Alice pensa qu'elle ferait tout aussi bien d'attendre, et qu'après tout la Chenille lui dirait peut-être quelque chose de bon à savoir.

La Chenille continua de fumer pendant quelques minutes sans rien dire. Puis, retirant enfin la pipe de sa bouche, elle se croisa les bras et dit : « Ainsi vous vous figurez que vous êtes changée, hein ? » « Je le crains bien, » dit Alice. « Je ne peux plus me souvenir des choses comme autrefois, et je ne reste pas dix minutes de suite de la même grandeur ! » « De quoi est-ce que vous ne pouvez pas vous souvenir ? » dit la Chenille. « J'ai essayé de réciter la fable de Maître Corbeau, mais ce n'était plus la même chose, » répondit Alice d'un ton chagrin. « Récitez : « Vous êtes vieux, Père Guillaume, » » dit la Chenille.

Alice croisa les mains et commença :

« Vous êtes vieux, Père Guillaume.

Vous avez des cheveux tout gris… La tête en bas ! Père Guillaume ; À votre âge, c'est peu permis !

— Étant jeune, pour ma cervelle Je craignais fort, mon cher enfant ; Je n'en ai plus une parcelle, J'en suis bien certain maintenant.

— Vous êtes vieux, je vous l'ai dit, Mais comment donc par cette porte, Vous, dont la taille est comme un muid !

Cabriolez-vous de la sorte ?

— Étant jeune, mon cher enfant, J'avais chaque jointure bonne ; Je me frottais de cet onguent ; Si vous payez je vous en donne.

— Vous êtes vieux, et vous mangez Les os comme de la bouillie ; Et jamais rien ne me laissez.

Comment faites-vous, je vous prie ?

— Étant jeune, je disputais Tous les jours avec votre mère ; C'est ainsi que je me suis fait Un si puissant os maxillaire.

— Vous êtes vieux, par quelle adresse Tenez-vous debout sur le nez Une anguille qui se redresse Droit comme un I quand vous sifflez ?

— Cette question est trop sotte !

Cessez de babiller ainsi, Ou je vais, du bout de ma botte, Vous envoyer bien loin d'ici. » « Ce n'est pas cela, » dit la Chenille. « Pas tout à fait, je le crains bien, » dit Alice timidement.

« Tous les mots ne sont pas les mêmes. » « C'est tout de travers d'un bout à l'autre, » dit la Chenille d'un ton décidé ; et il se fit un silence de quelques minutes. La Chenille fut la première à reprendre la parole.

« De quelle grandeur voulez-vous être ?

» demanda-t-elle.

« Oh ! je ne suis pas difficile, quant à la taille, » reprit vivement Alice. « Mais vous comprenez bien qu'on n'aime pas à en changer si souvent. » « Je ne comprends pas du tout, » dit la Chenille. Alice se tut ; elle n'avait jamais de sa vie été si souvent contredite, et elle sentait qu'elle allait perdre patience.

« Êtes-vous satisfaite maintenant ?

» dit la Chenille. « J'aimerais bien à être un petit peu plus grande, si cela vous était égal, » dit Alice. « Trois pouces de haut, c'est si peu ! » « C'est une très-belle taille, » dit la Chenille en colère, se dressant de toute sa hauteur. (Elle avait tout juste trois pouces de haut. ) « Mais je n'y suis pas habituée, » répliqua Alice d'un ton piteux, et elle fit cette réflexion : « Je voudrais bien que ces gens-là ne fussent pas si susceptibles. » « Vous finirez par vous y habituer, » dit la Chenille. Elle remit la pipe à sa bouche, et fuma de plus belle.

Cette fois Alice attendit patiemment qu'elle se décidât à parler.

Au bout de deux ou trois minutes la Chenille sortit le houka de sa bouche, bâilla une ou deux fois et se secoua ; puis elle descendit de dessus le champignon, glissa dans le gazon, et dit tout simplement en s'en allant : « Un côté vous fera grandir, et l'autre vous fera rapetisser. » « Un côté de quoi, l'autre côté de quoi ? » pensa Alice. « Du champignon, » dit la Chenille, comme si Alice avait parlé tout haut ; et un moment après la Chenille avait disparu. Alice contempla le champignon d'un air pensif pendant un instant, essayant de deviner quels en étaient les côtés ; et comme le champignon était tout rond, elle trouva la question fort embarrassante.

Enfin elle étendit ses bras tout autour, en les allongeant autant que possible, et, de chaque main, enleva une petite partie du bord du champignon.

« Maintenant, lequel des deux ?

» se dit-elle, et elle grignota un peu du morceau de la main droite pour voir quel effet il produirait. Presque aussitôt elle reçut un coup violent sous le menton ; il venait de frapper contre son pied.

Ce brusque changement lui fit grand' peur, mais elle comprit qu'il n'y avait pas de temps à perdre, car elle diminuait rapidement.

Elle se mit donc bien vite à manger un peu de l'autre morceau. Son menton était si rapproché de son pied qu'il y avait à peine assez de place pour qu'elle pût ouvrir la bouche. Elle y réussit enfin, et parvint à avaler une partie du morceau de la main gauche.

« Voilà enfin ma tête libre, » dit Alice d'un ton joyeux qui se changea bientôt en cris d'épouvante, quand elle s'aperçut de l'absence de ses épaules.

Tout ce qu'elle pouvait voir en regardant en bas, c'était un cou long à n'en plus finir qui semblait se dresser comme une tige, du milieu d'un océan de verdure s'étendant bien loin au-dessous d'elle,

« Qu'est-ce que c'est que toute cette verdure ?

» dit Alice. « Et où donc sont mes épaules ? Oh ! mes pauvres mains ! Comment se fait-il que je ne puis vous voir ? » Tout en parlant elle agitait les mains, mais il n'en résulta qu'un petit mouvement au loin parmi les feuilles vertes.

Comme elle ne trouvait pas le moyen de porter ses mains à sa tête, elle tâcha de porter sa tête à ses mains, et s'aperçut avec joie que son cou se repliait avec aisance de tous côtés comme un serpent.

Elle venait de réussir à le plier en un gracieux zigzag, et allait plonger parmi les feuilles, qui étaient tout simplement le haut des arbres sous lesquels elle avait erré, quand un sifflement aigu la força de reculer promptement ; un gros pigeon venait de lui voler à la figure, et lui donnait de grands coups d'ailes.

« Serpent !

» criait le Pigeon.

« Je ne suis pas un serpent, » dit Alice, avec indignation.

« Laissez-moi tranquille. » « Serpent ! Je le répète, » dit le Pigeon, mais d'un ton plus doux ; puis il continua avec une espèce de sanglot : « J'ai essayé de toutes les façons, rien ne semble les satisfaire. » « Je n'ai pas la moindre idée de ce que vous voulez dire, » répondit Alice. « J'ai essayé des racines d'arbres ; j'ai essayé des talus ; j'ai essayé des haies, » continua le Pigeon sans faire attention à elle.

« Mais ces serpents ! il n'y a pas moyen de les satisfaire. » Alice était de plus en plus intriguée, mais elle pensa que ce n'était pas la peine de rien dire avant que le Pigeon eût fini de parler. « Je n'ai donc pas assez de mal à couver mes œufs, » dit le Pigeon.

« Il faut encore que je guette les serpents nuit et jour. Je n'ai pas fermé l'œil depuis trois semaines ! » « Je suis fâchée que vous ayez été tourmenté, » dit Alice, qui commençait à comprendre. « Au moment où je venais de choisir l'arbre le plus haut de la forêt, » continua le Pigeon en élevant la voix jusqu'à crier, — « au moment où je me figurais que j'allais en être enfin débarrassé, les voilà qui tombent du ciel « en replis tortueux.

» Oh ! le vilain serpent ! » « Mais je ne suis pas un serpent, » dit Alice. « Je suis une — Je suis — »

« Eh bien !

qu'êtes-vous ! » dit le Pigeon « Je vois que vous cherchez à inventer quelque chose. » « Je — je suis une petite fille, » répondit Alice avec quelque hésitation, car elle se rappelait combien de changements elle avait éprouvés ce jour-là. « Voilà une histoire bien vraisemblable !

» dit le Pigeon d'un air de profond mépris. « J'ai vu bien des petites filles dans mon temps, mais je n'en ai jamais vu avec un cou comme cela. Non, non ; vous êtes un serpent ; il est inutile de le nier. Vous allez sans doute me dire que vous n'avez jamais mangé d'œufs. » « Si fait, j'ai mangé des œufs, » dit Alice, qui ne savait pas mentir ; « mais vous savez que les petites filles mangent des œufs aussi bien que les serpents. » « Je n'en crois rien, » dit le Pigeon, « mais s'il en est ainsi, elles sont une espèce de serpent ; c'est tout ce que j'ai à vous dire. » Cette idée était si nouvelle pour Alice qu'elle resta muette pendant une ou deux minutes, ce qui donna au Pigeon le temps d'ajouter : « Vous cherchez des œufs, ça j'en suis bien sûr, et alors que m'importe que vous soyez une petite fille ou un serpent ? » « Cela m'importe beaucoup à moi, » dit Alice vivement ; « mais je ne cherche pas d'œufs justement, et quand même j'en chercherais je ne voudrais pas des vôtres ; je ne les aime pas crus. » « Eh bien ! allez-vous-en alors, » dit le Pigeon d'un ton boudeur en se remettant dans son nid. Alice se glissa parmi les arbres du mieux qu'elle put en se baissant, car son cou s'entortillait dans les branches, et à chaque instant il lui fallait s'arrêter et le désentortiller. Au bout de quelque temps, elle se rappela qu'elle tenait encore dans ses mains les morceaux de champignon, et elle se mit à l'œuvre avec grand soin, grignotant tantôt l'un, tantôt l'autre, et tantôt grandissant, tantôt rapetissant, jusqu'à ce qu'enfin elle parvint à se ramener à sa grandeur naturelle.

Il y avait si longtemps qu'elle n'avait été d'une taille raisonnable que cela lui parut d'abord tout drôle, mais elle finit par s'y accoutumer, et commença à se parler à elle-même, comme d'habitude.

« Allons, voilà maintenant la moitié de mon projet exécuté. Comme tous ces changements sont embarrassants ! Je ne suis jamais sûre de ce que je vais devenir d'une minute à l'autre. Toutefois, je suis redevenue de la bonne grandeur ; il me reste maintenant à pénétrer dans ce magnifique jardin. Comment faire ? » En disant ces mots elle arriva tout à coup à une clairière, où se trouvait une maison d'environ quatre pieds de haut. « Quels que soient les gens qui demeurent là, » pensa Alice, « il ne serait pas raisonnable de se présenter à eux grande comme je suis. Ils deviendraient fous de frayeur. » Elle se mit de nouveau à grignoter le morceau qu'elle tenait dans sa main droite, et ne s'aventura pas près de la maison avant d'avoir réduit sa taille à neuf pouces.

CHAPITRE VI.

PORC ET POIVRE.

Alice resta une ou deux minutes à regarder à la porte ; elle se demandait ce qu'il fallait faire, quand tout à coup un laquais en livrée sortit du bois en courant.

(Elle le prit pour un laquais à cause de sa livrée ; sans cela, à n'en juger que par la figure, elle l'aurait pris pour un poisson.) Il frappa fortement avec son doigt à la porte. Elle fut ouverte par un autre laquais en livrée qui avait la face toute ronde et de gros yeux comme une grenouille. Alice remarqua que les deux laquais avaient les cheveux poudrés et tout frisés. Elle se sentit piquée de curiosité, et, voulant savoir ce que tout cela signifiait, elle se glissa un peu en dehors du bois afin d'écouter. Le Laquais-Poisson prit de dessous son bras une lettre énorme, presque aussi grande que lui, et la présenta au Laquais-Grenouille en disant d'un ton solennel : « Pour Madame la Duchesse, une invitation de la Reine à une partie de croquet. » Le Laquais-Grenouille répéta sur le même ton solennel, en changeant un peu l'ordre des mots : « De la part de la Reine une invitation pour Madame la Duchesse à une partie de croquet ; » puis tous deux se firent un profond salut et les boucles de leurs chevelures s'entremêlèrent.

Cela fit tellement rire Alice qu'elle eut à rentrer bien vite dans le bois de peur d'être entendue ; et quand elle avança la tête pour regarder de nouveau, le Laquais-Poisson était parti, et l'autre était assis par terre près de la route, regardant niaisement en l'air.

Alice s'approcha timidement de la porte et frappa.

« Cela ne sert à rien du tout de frapper, » dit le Laquais, « et cela pour deux raisons : premièrement, parce que je suis du même côté de la porte que vous ; deuxièmement, parce qu'on fait là-dedans un tel bruit que personne ne peut vous entendre.

» En effet, il se faisait dans l'intérieur un bruit extraordinaire, des hurlements et des éternuements continuels, et de temps à autre un grand fracas comme si on brisait de la vaisselle.

« Eh bien ! comment puis-je entrer, s'il vous plaît ? » demanda Alice.

« Il y aurait quelque bon sens à frapper à cette porte, » continua le Laquais sans l'écouter, « si nous avions la porte entre nous deux.

Par exemple, si vous étiez à l'intérieur vous pourriez frapper et je pourrais vous laisser sortir. » Il regardait en l'air tout le temps qu'il parlait, et Alice trouvait cela très-impoli. « Mais peut-être ne peut-il pas s'en empêcher, » dit-elle ; « il a les yeux presque sur le sommet de la tête. Dans tous les cas il pourrait bien répondre à mes questions. — Comment faire pour entrer ? » répéta-t-elle tout haut.

« Je vais rester assis ici, » dit le Laquais, « jusqu'à demain — »

Au même instant la porte de la maison s'ouvrit, et une grande assiette vola tout droit dans la direction de la tête du Laquais ; elle lui effleura le nez, et alla se briser contre un arbre derrière lui.

« — ou le jour suivant peut-être, » continua le Laquais sur le même ton, tout comme si rien n'était arrivé.

« Comment faire pour entrer ?

» redemanda Alice en élevant la voix.

« Mais devriez-vous entrer ?

» dit le Laquais. « C'est ce qu'il faut se demander, n'est-ce pas ? » Bien certainement, mais Alice trouva mauvais qu'on le lui dît. « C'est vraiment terrible, » murmura-t-elle, « de voir la manière dont ces gens-là discutent, il y a de quoi rendre fou. » Le Laquais trouva l'occasion bonne pour répéter son observation avec des variantes. « Je resterai assis ici, » dit-il, « l'un dans l'autre, pendant des jours et des jours ! » « Mais que faut-il que je fasse ? » dit Alice. « Tout ce que vous voudrez, » dit le Laquais ; et il se mit à siffler. « Oh ! ce n'est pas la peine de lui parler, » dit Alice, désespérée ; « c'est un parfait idiot.

» Puis elle ouvrit la porte et entra.

La porte donnait sur une grande cuisine qui était pleine de fumée d'un bout à l'autre.

La Duchesse était assise sur un tabouret à trois pieds, au milieu de la cuisine, et dorlotait un bébé ; la cuisinière, penchée sur le feu, brassait quelque chose dans un grand chaudron qui paraissait rempli de soupe.

« Bien sûr, il y a trop de poivre dans la soupe, » se dit Alice, tout empêchée par les éternuements.

Il y en avait certainement trop dans l'air.

La Duchesse elle-même éternuait de temps en temps, et quant au bébé il éternuait et hurlait alternativement sans aucune interruption. Les deux seules créatures qui n'éternuassent pas, étaient la cuisinière et un gros chat assis sur l'âtre et dont la bouche grimaçante était fendue d'une oreille à l'autre.

« Pourriez-vous m'apprendre, » dit Alice un peu timidement, car elle ne savait pas s'il était bien convenable qu'elle parlât la première, « pourquoi votre chat grimace ainsi ?

» « C'est un Grimaçon, » dit la Duchesse ; « voilà pourquoi. — Porc ! » Elle prononça ce dernier mot si fort et si subitement qu'Alice en frémit. Mais elle comprit bientôt que cela s'adressait au bébé et non pas à elle ; elle reprit donc courage et continua :

« J'ignorais qu'il y eût des chats de cette espèce.

Au fait j'ignorais qu'un chat pût grimacer. » « Ils le peuvent tous, » dit la Duchesse ; « et la plupart le font. » « Je n'en connais pas un qui grimace, » dit Alice poliment, bien contente d'être entrée en conversation. « Le fait est que vous ne savez pas grand'chose, » dit la Duchesse.

Le ton sur lequel fut faite cette observation ne plut pas du tout à Alice, et elle pensa qu'il serait bon de changer la conversation.

Tandis qu'elle cherchait un autre sujet, la cuisinière retira de dessus le feu le chaudron plein de soupe, et se mit aussitôt à jeter tout ce qui lui tomba sous la main à la Duchesse et au bébé — la pelle et les pincettes d'abord, à leur suite vint une pluie de casseroles, d'assiettes et de plats. La Duchesse n'y faisait pas la moindre attention, même quand elle en était atteinte, et l'enfant hurlait déjà si fort auparavant qu'il était impossible de savoir si les coups lui faisaient mal ou non.

« Oh ! je vous en prie, prenez garde à ce que vous faites, » criait Alice, sautant ça et là et en proie à la terreur. « Oh ! son cher petit nez ! » Une casserole d'une grandeur peu ordinaire venait de voler tout près du bébé, et avait failli lui emporter le nez.

« Si chacun s'occupait de ses affaires, » dit la Duchesse avec un grognement rauque, « le monde n'en irait que mieux.

» « Ce qui ne serait guère avantageux, » dit Alice, enchantée qu'il se présentât une occasion de montrer un peu de son savoir. « Songez à ce que deviendraient le jour et la nuit ; vous voyez bien, la terre met vingt-quatre heures à faire sa révolution. » « Ah ! vous parlez de faire des révolutions ! » dit la Duchesse. « Qu'on lui coupe la tête ! » Alice jeta un regard inquiet sur la cuisinière pour voir si elle allait obéir ; mais la cuisinière était tout occupée à brasser la soupe et paraissait ne pas écouter. Alice continua donc : « Vingt-quatre heures, je crois, ou bien douze ? Je pense — »

« Oh ! laissez-moi la paix, » dit la Duchesse, « je n'ai jamais pu souffrir les chiffres. » Et là-dessus elle recommença à dorloter son enfant, lui chantant une espèce de chanson pour l'endormir et lui donnant une forte secousse au bout de chaque vers.

« Grondez-moi ce vilain garçon !

Battez-le quand il éternue ; À vous taquiner, sans façon Le méchant enfant s'évertue. » Refrain (que reprirent en chœur la cuisinière et le bébé). « Brou, Brou, Brou ! » (bis. ) En chantant le second couplet de la chanson la Duchesse faisait sauter le bébé et le secouait violemment, si bien que le pauvre petit être hurlait au point qu'Alice put à peine entendre ces mots : « Oui, oui, je m'en vais le gronder, Et le battre, s'il éternue ; Car bientôt à savoir poivrer, Je veux que l'enfant s'habitue.

» Refrain. « Brou, Brou, Brou ! » (bis. ) « Tenez, vous pouvez le dorloter si vous voulez ! » dit la Duchesse à Alice : et à ces mots elle lui jeta le bébé. « Il faut que j'aille m'apprêter pour aller jouer au croquet avec la Reine. » Et elle se précipita hors de la chambre. La cuisinière lui lança une poêle comme elle s'en allait, mais elle la manqua tout juste.

Alice eut de la peine à attraper le bébé.

C'était un petit être d'une forme étrange qui tenait ses bras et ses jambes étendus dans toutes les directions ; « Tout comme une étoile de mer, » pensait Alice. La pauvre petite créature ronflait comme une machine à vapeur lorsqu'elle l'attrapa, et ne cessait de se plier en deux, puis de s'étendre tout droit, de sorte qu'avec tout cela, pendant les premiers instants, c'est tout ce qu'elle pouvait faire que de le tenir.

Sitôt qu'elle eut trouvé le bon moyen de le bercer, (qui était d'en faire une espèce de nœud, et puis de le tenir fermement par l'oreille droite et le pied gauche afin de l'empêcher de se dénouer,) elle le porta dehors en plein air.

« Si je n'emporte pas cet enfant avec moi, » pensa Alice, « ils le tueront bien sûr un de ces jours. Ne serait-ce pas un meurtre de l'abandonner ? » Elle dit ces derniers mots à haute voix, et la petite créature répondit en grognant (elle avait cessé d'éternuer alors). « Ne grogne pas ainsi, » dit Alice ; « ce n'est pas là du tout une bonne manière de s'exprimer. » Le bébé grogna de nouveau. Alice le regarda au visage avec inquiétude pour voir ce qu'il avait. Sans contredit son nez était très-retroussé, et ressemblait bien plutôt à un groin qu'à un vrai nez. Ses yeux aussi devenaient très-petits pour un bébé. Enfin Alice ne trouva pas du tout de son goût l'aspect de ce petit être. « Mais peut-être sanglotait-il tout simplement, » pensa-t-elle, et elle regarda de nouveau les yeux du bébé pour voir s'il n'y avait pas de larmes. « Si tu vas te changer en porc, » dit Alice très-sérieusement, « je ne veux plus rien avoir à faire avec toi. Fais-y bien attention ! » La pauvre petite créature sanglota de nouveau, ou grogna (il était impossible de savoir lequel des deux), et ils continuèrent leur chemin un instant en silence. Alice commençait à dire en elle-même, « Mais, que faire de cette créature quand je l'aurai portée à la maison ?

» lorsqu'il grogna de nouveau si fort qu'elle regarda sa figure avec quelque inquiétude. Cette fois il n'y avait pas à s'y tromper, c'était un porc, ni plus ni moins, et elle comprit qu'il serait ridicule de le porter plus loin.

Elle déposa donc par terre le petit animal, et se sentit toute soulagée de le voir trotter tranquillement vers le bois.

« S'il avait grandi, » se dit-elle, « il serait devenu un bien vilain enfant ; tandis qu'il fait un assez joli petit porc, il me semble. » Alors elle se mit à penser à d'autres enfants qu'elle connaissait et qui feraient d'assez jolis porcs, si seulement on savait la manière de s'y prendre pour les métamorphoser. Elle était en train de faire ces réflexions, lorsqu'elle tressaillit en voyant tout à coup le Chat assis à quelques pas de là sur la branche d'un arbre.

Le Chat grimaça en apercevant Alice.

Elle trouva qu'il avait l'air bon enfant, et cependant il avait de très-longues griffes et une grande rangée de dents ; aussi comprit-elle qu'il fallait le traiter avec respect.

« Grimaçon !

» commença-t-elle un peu timidement, ne sachant pas du tout si cette familiarité lui serait agréable ; toutefois il ne fit qu'allonger sa grimace.

« Allons, il est content jusqu'à présent, » pensa Alice, et elle continua : « Dites-moi, je vous prie, de quel côté faut-il me diriger ?

» « Cela dépend beaucoup de l'endroit où vous voulez aller, » dit le Chat. « Cela m'est assez indifférent, » dit Alice.

« Alors peu importe de quel côté vous irez, » dit le Chat.

« Pourvu que j'arrive quelque part, » ajouta Alice en explication.

« Cela ne peut manquer, pourvu que vous marchiez assez longtemps.

» Alice comprit que cela était incontestable ; elle essaya donc d'une autre question : « Quels sont les gens qui demeurent par ici ? » « De ce côté-ci, » dit le Chat, décrivant un cercle avec sa patte droite, « demeure un chapelier ; de ce côté-là, » faisant de même avec sa patte gauche, « demeure un lièvre. Allez voir celui que vous voudrez, tous deux sont fous. » « Mais je ne veux pas fréquenter des fous, » fit observer Alice.

« Vous ne pouvez pas vous en défendre, tout le monde est fou ici.

Je suis fou, vous êtes folle. » « Comment savez-vous que je suis folle ? » dit Alice. « Vous devez l'être, » dit le Chat, « sans cela ne seriez pas venue ici. » Alice pensa que cela ne prouvait rien. Toutefois elle continua : « Et comment savez-vous que vous êtes fou ? » « D'abord, » dit le Chat, « un chien n'est pas fou ; vous convenez de cela. » « Je le suppose, » dit Alice. « Eh bien ! » continua le Chat, « un chien grogne quand il se fâche, et remue la queue lorsqu'il est content. Or, moi, je grogne quand je suis content, et je remue la queue quand je me fâche. Donc je suis fou. » « J'appelle cela faire le rouet, et non pas grogner, » dit Alice. « Appelez cela comme vous voudrez, » dit le Chat.

« Jouez-vous au croquet avec la Reine aujourd'hui ? » « Cela me ferait grand plaisir, » dit Alice, « mais je n'ai pas été invitée. » « Vous m'y verrez, » dit le Chat ; et il disparut. Alice ne fut pas très-étonnée, tant elle commençait à s'habituer aux événements extraordinaires.

Tandis qu'elle regardait encore l'endroit que le Chat venait de quitter, il reparut tout à coup.

« À propos, qu'est devenu le bébé ?

J'allais oublier de le demander. » « Il a été changé en porc, » dit tranquillement Alice, comme si le Chat était revenu d'une manière naturelle. « Je m'en doutais, » dit le Chat ; et il disparut de nouveau.

Alice attendit quelques instants, espérant presque le revoir, mais il ne reparut pas ; et une ou deux minutes après, elle continua son chemin dans la direction où on lui avait dit que demeurait le Lièvre.

« J'ai déjà vu des chapeliers, » se dit-elle ; « le Lièvre sera de beaucoup le plus intéressant. » À ces mots elle leva les yeux, et voilà que le Chat était encore là assis sur une branche d'arbre.

« M'avez-vous dit porc, ou porte ?

» demanda le Chat.

« J'ai dit porc, » répéta Alice.

« Ne vous amusez donc pas à paraître et à disparaître si

subitement, vous faites tourner la tête aux gens.

» « C'est bon, » dit le Chat, et cette fois il s'évanouit tout doucement à commencer par le bout de la queue, et finissant par sa grimace qui demeura quelque temps après que le reste fut disparu. « Certes, » pensa Alice, « j'ai souvent vu un chat sans grimace, mais une grimace sans chat, je n'ai jamais de ma vie rien vu de si drôle.

» Elle ne fit pas beaucoup de chemin avant d'arriver devant la maison du Lièvre. Elle pensa que ce devait bien être là la maison, car les cheminées étaient en forme d'oreilles et le toit était couvert de fourrure. La maison était si grande qu'elle n'osa s'approcher avant d'avoir grignoté encore un peu du morceau de champignon qu'elle avait dans la main gauche, et d'avoir atteint la taille de deux pieds environ ; et même alors elle avança timidement en se disant : « Si après tout il était fou furieux ! Je voudrais presque avoir été faire visite au Chapelier plutôt que d'être venue ici.

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CHAPITRE IV.

L’HABITATION DU LAPIN BLANC.

C’était le Lapin Blanc qui revenait en trottinant, et qui cherchait de tous côtés, d’un air inquiet, comme s’il avait perdu quelque chose ; Alice l’entendit qui marmottait : « La Duchesse ! It was the White Rabbit, trotting back, looking around with a worried expression, as if he'd lost something; Alice heard him muttering: "The Duchess!

La Duchesse ! Oh ! mes pauvres pattes ; oh ! my poor legs; oh! ma robe et mes moustaches ! Elle me fera guillotiner aussi vrai que des furets sont des furets ! She'll have me guillotined as sure as ferrets are ferrets! Où pourrais-je bien les avoir perdus ? Where could I have lost them? » Alice devina tout de suite qu’il cherchait l’éventail et la paire de gants paille, et, comme elle avait bon cœur, elle se mit à les chercher aussi ; mais pas moyen de les trouver. "Alice guessed at once that he was looking for the fan and the pair of straw gloves, and, as she had a good heart, she started looking for them too; but no way to find them.

Du reste, depuis son bain dans la mare aux larmes, tout était changé : la salle, la table de verre, et la petite porte avaient complétement disparu. Moreover, since his bath in the pool of tears, everything had changed: the room, the glass table and the little door had completely disappeared.

Bientôt le Lapin aperçut Alice qui furetait ; il lui cria d’un ton d’impatience : « Eh bien ! Soon the Rabbit spotted Alice snooping around, and shouted impatiently: "Well!

Marianne, que faites-vous ici ? Marianne, what are you doing here? Courez vite à la maison me chercher une paire de gants et un éventail ! Allons, dépêchons-nous. » Alice eut si grand' peur qu’elle se mit aussitôt à courir dans la direction qu’il indiquait, sans chercher à lui expliquer qu’il se trompait. "Alice was so frightened that she immediately ran in the direction he was pointing, without trying to explain to him that he was wrong. « Il m’a pris pour sa bonne, » se disait-elle en courant. "He took me for his maid," she told herself running.

« Comme il sera étonné quand il saura qui je suis ! Mais je ferai bien de lui porter ses gants et son éventail ; c’est-à-dire, si je les trouve. » Ce disant, elle arriva en face d’une petite maison, et vit sur la porte une plaque en cuivre avec ces mots, « JEAN LAPIN. » Elle monta l’escalier, entra sans frapper, tout en tremblant de rencontrer la vraie Marianne, et d’être mise à la porte avant d’avoir trouvé les gants et l’éventail.

« Que c’est drôle, » se dit Alice, « de faire des commissions pour un lapin !

Bientôt ce sera Dinah qui m’enverra en commission. » Elle se prit alors à imaginer comment les choses se passeraient. — « « Mademoiselle Alice, venez ici tout de suite vous apprêter pour la promenade. » « Dans l’instant, ma bonne ! Il faut d’abord que je veille sur ce trou jusqu’à ce que Dinah revienne, pour empêcher que la souris ne sorte. » Mais je ne pense pas, » continua Alice, « qu’on garderait Dinah à la maison si elle se mettait dans la tête de commander comme cela aux gens. » Tout en causant ainsi, Alice était entrée dans une petite chambre bien rangée, et, comme elle s’y attendait, sur une petite table dans l’embrasure de la fenêtre, elle vit un éventail et deux ou trois paires de gants de chevreau tout petits. Elle en prit une paire, ainsi que l’éventail, et allait quitter la chambre lorsqu’elle aperçut, près du miroir, une petite bouteille. Cette fois il n’y avait pas l’inscription BUVEZ-MOI — ce qui n’empêcha pas Alice de la déboucher et de la porter à ses lèvres. « Il m’arrive toujours quelque chose d’intéressant, » se dit-elle, « lorsque je mange ou que je bois. Je vais voir un peu l’effet de cette bouteille. J’espère bien qu’elle me fera regrandir, car je suis vraiment fatiguée de n’être qu’une petite nabote ! » C’est ce qui arriva en effet, et bien plus tôt qu’elle ne s’y attendait. Elle n’avait pas bu la moitié de la bouteille, que sa tête touchait au plafond et qu’elle fut forcée de se baisser pour ne pas se casser le cou. Elle remit bien vite la bouteille sur la table en se disant : « En voilà assez ; j’espère ne pas grandir davantage. Je ne puis déjà plus passer par la porte. Oh ! je voudrais bien n’avoir pas tant bu ! » Hélas ! il était trop tard ; elle grandissait, grandissait, et eut bientôt à se mettre à genoux sur le plancher. Mais un instant après, il n’y avait même plus assez de place pour rester dans cette position, et elle essaya de se tenir étendue

par terre, un coude contre la porte et l’autre bras passé autour de sa tête.

Cependant, comme elle grandissait toujours, elle fut obligée, comme dernière ressource, de laisser pendre un de ses bras par la fenêtre et d’enfoncer un pied dans la cheminée en disant : « À présent c’est tout ce que je peux faire, quoi qu’il arrive. Que vais-je devenir ? » Heureusement pour Alice, la petite bouteille magique avait alors produit tout son effet, et elle cessa de grandir. Cependant sa position était bien gênante, et comme il ne semblait pas y avoir la moindre chance qu’elle pût jamais sortir de cette chambre, il n’y a pas à s’étonner qu’elle se trouvât bien malheureuse.

« C’était bien plus agréable chez nous, » pensa la pauvre enfant.

« Là du moins je ne passais pas mon temps à grandir et à rapetisser, et je n’étais pas la domestique des lapins et des souris. Je voudrais bien n’être jamais descendue dans ce terrier ; et pourtant c’est assez drôle cette manière de vivre ! Je suis curieuse de savoir ce que c’est qui m’est arrivé. Autrefois, quand je lisais des contes de fées, je m’imaginais que rien de tout cela ne pouvait être, et maintenant me voilà en pleine féerie. On devrait faire un livre sur mes aventures ; il y aurait de quoi ! Quand je serai grande j’en ferai un, moi. — Mais je suis déjà bien grande ! » dit-elle tristement. « Dans tous les cas, il n’y a plus de place ici pour grandir davantage. "In any case, there's no room here for further growth. » « Mais alors, » pensa Alice, « ne serai-je donc jamais plus vieille que je ne le suis maintenant ? D’un côté cela aura ses avantages, ne jamais être une vieille femme. Mais alors avoir toujours des leçons à apprendre ! Oh, je n’aimerais pas cela du tout. » « Oh ! Alice, petite folle, » se répondit-elle. « Comment pourriez-vous apprendre des leçons ici ? Il y a à peine de la place pour vous, et il n’y en a pas du tout pour vos livres de leçons. » Et elle continua ainsi, faisant tantôt les demandes et tantôt les réponses, et établissant sur ce sujet toute une conversation ; mais au bout de quelques instants elle entendit une voix au dehors, et s’arrêta pour écouter. « Marianne !

Marianne ! » criait la voix ; « allez chercher mes gants bien vite ! » Puis Alice entendit des piétinements dans l’escalier. Elle savait que c’était le Lapin qui la cherchait ; elle trembla si fort qu’elle en ébranla la maison, oubliant que maintenant elle était mille fois plus grande que le Lapin, et n’avait rien à craindre de lui.

Le Lapin, arrivé à la porte, essaya de l’ouvrir ; mais, comme elle s’ouvrait en dedans et que le coude d’Alice était fortement appuyé contre la porte, la tentative fut vaine.

Alice entendit le Lapin qui murmurait : « C’est bon, je vais faire le tour et j’entrerai par la fenêtre. » « Je t’en défie ! » pensa Alice.

Elle attendit un peu ; puis, quand elle crut que le Lapin était sous la fenêtre, elle étendit le bras tout à coup pour le saisir ; elle ne prit que du vent. Mais elle entendit un petit cri, puis le bruit d’une chute et de vitres cassées (ce qui lui fit penser que le Lapin était tombé sur les châssis de quelque serre à concombre), puis une voix colère, celle du Lapin : « Patrice ! Patrice ! où es-tu ? » Une voix qu’elle ne connaissait pas répondit : « Me v’là, not' maître ! J’bêchons la terre pour trouver des pommes ! » « Pour trouver des pommes ! » dit le Lapin furieux. « Viens m’aider à me tirer d’ici. » (Nouveau bruit de vitres cassées. ) « Dis-moi un peu, Patrice, qu’est-ce qu’il y a là à la fenêtre ? » « Ça, not' maître, c’est un bras. » « Un bras, imbécile ! Qui a jamais vu un bras de cette dimension ? Ça bouche toute la fenêtre. » « Bien sûr, not' maître, mais c’est un bras tout de même. » « Dans tous les cas il n’a rien à faire ici. Enlève-moi ça bien vite. » Il se fit un long silence, et Alice n’entendait plus que des chuchotements de temps à autre, comme : « Maître, j’osons point. » — « Fais ce que je te dis, capon ! » Alice étendit le bras de nouveau comme pour agripper quelque chose ; cette fois il y eut deux petits cris et encore un bruit de vitres cassées. « Que de châssis il doit y avoir là ! » pensa Alice. « Je me demande ce qu’ils vont faire à présent. Quant à me retirer par la fenêtre, je le souhaite de tout mon cœur, car je n’ai pas la moindre envie de rester ici plus longtemps ! » Il se fit quelques instants de silence. À la fin, Alice entendit un bruit de petites roues, puis le son d’un grand nombre de voix ; elle distingua ces mots : « Où est l’autre échelle ? — Je n’avais point qu’à en apporter une ; c’est Jacques qui a l’autre. — Allons, Jacques, apporte ici, mon garçon ! — Dressez-les là au coin. — Non, attachez-les d’abord l’une au bout de l’autre. — Elles ne vont pas encore moitié assez haut. — Ça fera l’affaire ; ne soyez pas si difficile. — Tiens, Jacques, attrape ce bout de corde. — Le toit portera-t-il bien ? — Attention à cette tuile qui ne tient pas. — Bon ! la voilà qui dégringole. Gare les têtes ! » (Il se fit un grand fracas.) « Qui a fait cela ? — Je crois bien que c’est Jacques. — Qui est-ce qui va descendre par la cheminée ? — Pas moi, bien sûr ! Allez-y, vous. — Non pas, vraiment. — C’est à vous, Jacques, à descendre. — Hohé, Jacques, not' maître dit qu’il faut que tu descendes par la cheminée ! » « Ah ! » se dit Alice, « c’est donc Jacques qui va descendre. Il paraît qu’on met tout sur le dos de Jacques. Je ne voudrais pas pour beaucoup être Jacques. Ce foyer est étroit certainement, mais je crois bien que je pourrai tout de même lui lancer un coup de pied. » Elle retira son pied aussi bas que possible, et ne bougea plus jusqu’à ce qu’elle entendît le bruit d’un petit animal (elle ne pouvait deviner de quelle espèce) qui grattait et cherchait à descendre dans la cheminée, juste au-dessus d’elle ; alors se disant : « Voilà Jacques sans doute, » elle lança un bon coup de pied, et attendit pour voir ce qui allait arriver. La première chose qu’elle entendit fut un cri général de : « Tiens, voilà Jacques en l’air !

» Puis la voix du Lapin, qui criait : « Attrapez-le, vous là-bas, près de la haie ! » Puis un long silence ; ensuite un mélange confus de voix : « Soutenez-lui la tête. — De l’eau-de-vie maintenant. — Ne le faites pas engouer. — Qu’est-ce donc, vieux camarade ? — Que t’est-il arrivé ? Raconte-nous ça ! » Enfin une petite voix faible et flûtée se fit entendre. (« C’est la voix de Jacques, » pensa Alice.) « Je n’en sais vraiment rien. Merci, c’est assez ; je me sens mieux maintenant ; mais je suis encore trop bouleversé pour vous conter la chose. Tout ce que je sais, c’est que j’ai été poussé comme par un ressort, et que je suis parti en l’air comme une fusée. » « Ça, c’est vrai, vieux camarade, » disaient les autres. « Il faut mettre le feu à la maison, » dit le Lapin.

Alors Alice cria de toutes ses forces : « Si vous osez faire cela, j’envoie Dinah à votre poursuite.

» Il se fit tout à coup un silence de mort. « Que vont-ils faire à présent ? » pensa Alice. « S’ils avaient un peu d’esprit, ils enlèveraient le toit. » Quelques minutes après, les allées et venues recommencèrent, et Alice entendit le Lapin, qui disait : « Une brouettée d’abord, ça suffira. » « Une brouettée de quoi ? » pensa Alice. Il ne lui resta bientôt plus de doute, car, un instant après, une grêle de petits cailloux vint battre contre la fenêtre, et quelques-uns même l’atteignirent au visage. « Je vais bientôt mettre fin à cela, » se dit-elle ; puis elle cria : « Vous ferez bien de ne pas recommencer. » Ce qui produisit encore un profond silence.

Alice remarqua, avec quelque surprise, qu’en tombant sur le plancher les cailloux se changeaient en petits gâteaux, et une brillante idée lui traversa l’esprit.

« Si je mange un de ces gâteaux, » pensa-t-elle, « cela ne manquera pas de me faire ou grandir ou rapetisser ; or, je ne puis plus grandir, c’est impossible, donc je rapetisserai ! » Elle avala un des gâteaux, et s’aperçut avec joie qu’elle diminuait rapidement. Aussitôt qu’elle fut assez petite pour passer par la porte, elle s’échappa de la maison, et trouva toute une foule d’oiseaux et d’autres petits animaux qui attendaient dehors. Le pauvre petit lézard, Jacques, était au milieu d’eux, soutenu par des cochons d’Inde, qui le faisaient boire à une bouteille. Die arme kleine Eidechse Jacques war mitten unter ihnen, gestützt von Meerschweinchen, die ihn aus einer Flasche trinken ließen. Tous se précipitèrent sur Alice aussitôt qu’elle parut ; mais elle se mit à courir de toutes ses forces, et se trouva bientôt en sûreté dans un bois touffu.

« La première chose que j’aie à faire, » dit Alice en errant çà et là dans les bois, « c’est de revenir à ma première grandeur ; la seconde, de chercher un chemin qui me conduise dans ce ravissant jardin.

C’est là, je crois, ce que j’ai de mieux à faire ! » En effet c’était un plan de campagne excellent, très-simple et très-habilement combiné. Toute la difficulté était de savoir comment s’y prendre pour l’exécuter. Tandis qu’elle regardait en tapinois et avec précaution à travers les arbres, un petit aboiement sec, juste au-dessus de sa tête, lui fit tout à coup lever les yeux.

Un jeune chien (qui lui parut énorme) la regardait avec de grands yeux ronds, et étendait légèrement la patte pour tâcher de la toucher.

« Pauvre petit ! » dit Alice d’une voix caressante et essayant de siffler. Elle avait une peur terrible cependant, car elle pensait qu’il pouvait bien avoir faim, et que dans ce cas il était probable qu’il la mangerait, en dépit de toutes ses câlineries. Sans trop savoir ce qu’elle faisait, elle ramassa une petite baguette et la présenta au petit chien qui bondit des quatre pattes à la fois, aboyant de joie, et se jeta sur le bâton comme pour jouer avec. Alice passa de l’autre côté d’un gros chardon pour n’être pas foulée aux pieds. Sitôt qu’elle reparut, le petit chien se précipita de nouveau sur le bâton, et, dans son empressement de le saisir, butta et fit une cabriole. Mais Alice, trouvant que cela ressemblait beaucoup à une partie qu’elle ferait avec un cheval de charrette, et craignant à chaque instant d’être écrasée par le chien, se remit à tourner autour du chardon. Alors le petit chien fit une série de charges contre le bâton. Il avançait un peu chaque fois, puis reculait bien loin en faisant des aboiements rauques ; puis enfin il se coucha à une grande distance de là, tout haletant, la langue pendante, et ses grands yeux à moitié fermés.

Alice jugea que le moment était venu de s’échapper.

Elle prit sa course aussitôt, et ne s’arrêta que lorsqu’elle se sentit fatiguée et hors d’haleine, et qu’elle n’entendit plus que faiblement dans le lointain les aboiements du petit chien. Sie lief sofort los und hielt erst an, als sie sich müde und außer Atem fühlte und in der Ferne nur noch leise das Bellen des kleinen Hundes hörte.

« C’était pourtant un bien joli petit chien, » dit Alice, en s’appuyant sur un bouton d’or pour se reposer, et en s’éventant avec une des feuilles de la plante.

« Je lui aurais volontiers enseigné tout plein de jolis tours si — si j’avais été assez grande pour cela ! Oh ! mais j’oubliais que j’avais encore à grandir ! Voyons. Comment faire ? Je devrais sans doute boire ou manger quelque chose ; mais quoi ? Voilà la grande question. » En effet, la grande question était bien de savoir quoi ? Alice regarda tout autour d’elle les fleurs et les brins d’herbes ; mais elle ne vit rien qui lui parût bon à boire ou à manger dans les circonstances présentes.

Près d’elle poussait un large champignon, à peu près haut comme elle.

Lorsqu’elle l’eut examiné par-dessous, d’un côté et de l’autre, par-devant et par-derrière, l’idée lui vint qu’elle ferait bien de regarder ce qu’il y avait dessus.

Elle se dressa sur la pointe des pieds, et, glissant les yeux par-dessus le bord du champignon, ses regards rencontrèrent ceux d’une grosse chenille bleue assise au sommet, les bras croisés, fumant tranquillement une longue pipe turque sans faire la moindre attention à elle ni à quoi que ce fût.

CHAPITRE V. CONSEILS D’UNE CHENILLE.

La Chenille et Alice se considérèrent un instant en silence. Chenille and Alice looked at each other for a moment in silence.

Enfin la Chenille sortit le houka de sa bouche, et lui adressa la parole d’une voix endormie et traînante. At last the Caterpillar took the houka out of her mouth, and spoke to her in a sleepy, sluggish voice.

« Qui êtes-vous ?

» dit la Chenille.

Ce n’était pas là une manière encourageante d’entamer la conversation. This was not an encouraging way to start the conversation. Alice répondit, un peu confuse : « Je — je le sais à peine moi-même quant à présent. Alice answered, a little confused: "I - I hardly know it myself now. Je sais bien ce que j’étais en me levant ce matin, mais je crois avoir changé plusieurs fois depuis. I know what I was getting up this morning, but I think I've changed a lot since then. » « Qu’entendez-vous par là ? " " What do you mean ? » dit la Chenille d’un ton sévère. The Caterpillar said harshly. « Expliquez-vous. » « Je crains bien de ne pouvoir pas m’expliquer, » dit Alice, « car, voyez-vous, je ne suis plus moi-même. "I'm afraid I can not explain myself," Alice said, "because, you see, I'm not myself anymore. » « Je ne vois pas du tout, » répondit la Chenille. "I do not see at all," replied the Caterpillar. « J’ai bien peur de ne pouvoir pas dire les choses plus clairement, » répliqua Alice fort poliment ; « car d’abord je n’y comprends rien moi-même. "I'm afraid I can not say things more clearly," replied Alice politely; "Because first I do not understand anything myself.

Grandir et rapetisser si souvent en un seul jour, cela embrouille un peu les idées. Growing up and shrinking so often in a single day, it confuses ideas a little. » « Pas du tout, » dit la Chenille. "Not at all," said the Caterpillar. « Peut-être ne vous en êtes-vous pas encore aperçue, » dit Alice. "Maybe you have not seen it yet," Alice said.

« Mais quand vous deviendrez chrysalide, car c’est ce qui vous arrivera, sachez-le bien, et ensuite papillon, je crois bien que vous vous sentirez un peu drôle, qu’en dites-vous ? "But when you become a chrysalis, because that's what will happen to you, know it well, and then butterfly, I think you'll feel a little funny, what do you say? » « Pas du tout, » dit la Chenille. « Vos sensations sont peut-être différentes des miennes, » dit Alice. "Not at all," said the Caterpillar. "Your feelings may be different from mine," Alice said. « Tout ce que je sais, c’est que cela me semblerait bien drôle à moi. "All I know is that it would seem very funny to me. » « À vous ! " " To you ! » dit la Chenille d’un ton de mépris. The Caterpillar said scornfully. « Qui êtes-vous ? » Cette question les ramena au commencement de la conversation. " Who are you ? This question brought them back to the beginning of the conversation. Alice, un peu irritée du parler bref de la Chenille, se redressa de toute sa hauteur et répondit bien gravement : « Il me semble que vous devriez d’abord me dire qui vous êtes vous-même. Alice, a little irritated by the brief talk of the Caterpillar, straightened to her full height and replied gravely: "It seems to me that you should first tell me who you are.

» « Pourquoi ? » dit la Chenille. C’était encore là une question bien embarrassante ; et comme Alice ne trouvait pas de bonne raison à donner, et que la Chenille avait l’air de très-mauvaise humeur, Alice lui tourna le dos et s’éloigna. Said the Caterpillar. It was still a very embarrassing question; and as Alice could not find a good reason to give, and the caterpillar looked very ill-tempered, Alice turned her back on him and went away. « Revenez, » lui cria la Chenille. "Come back," shouted the Caterpillar.

« J’ai quelque chose d’important à vous dire ! » L’invitation était engageante assurément ; Alice revint sur ses pas. The invitation was certainly binding; Alice came back. « Ne vous emportez pas, » dit la Chenille. "Do not get carried away," said the Caterpillar.

« Est-ce tout ? " Is that all ?

» dit Alice, cherchant à retenir sa colère. Alice said, trying to hold back her anger.

« Non, » répondit la Chenille.

Alice pensa qu’elle ferait tout aussi bien d’attendre, et qu’après tout la Chenille lui dirait peut-être quelque chose de bon à savoir. Alice thought that she would just as well wait, and that after all the Caterpillar might tell her something good to know.

La Chenille continua de fumer pendant quelques minutes sans rien dire. The Caterpillar continued to smoke for a few minutes without saying anything. Puis, retirant enfin la pipe de sa bouche, elle se croisa les bras et dit : « Ainsi vous vous figurez que vous êtes changée, hein ? Then finally taking the pipe out of her mouth, she folded her arms and said, "So you think you're changed, huh? » « Je le crains bien, » dit Alice. "I'm afraid so," Alice said. « Je ne peux plus me souvenir des choses comme autrefois, et je ne reste pas dix minutes de suite de la même grandeur ! "I can not remember things like before, and I do not stay ten minutes in a row of the same size! » « De quoi est-ce que vous ne pouvez pas vous souvenir ? "What can not you remember? » dit la Chenille. « J’ai essayé de réciter la fable de Maître Corbeau, mais ce n’était plus la même chose, » répondit Alice d’un ton chagrin. Said the Caterpillar. "I tried to recite Master Raven's fable, but it was not the same anymore," Alice replied in a sorrowful tone. « Récitez : « Vous êtes vieux, Père Guillaume, » » dit la Chenille. "Recite, 'You are old, Father William,'" said the Caterpillar.

Alice croisa les mains et commença : Alice folded her hands and started:

« Vous êtes vieux, Père Guillaume.

Vous avez des cheveux tout gris… La tête en bas ! You have gray hair ... upside down! Père Guillaume ; À votre âge, c’est peu permis ! Father Guillaume; At your age, it's not allowed!

— Étant jeune, pour ma cervelle Je craignais fort, mon cher enfant ; Je n’en ai plus une parcelle, J’en suis bien certain maintenant. - Being young, for my brain I feared very much, my dear child; I do not have a plot anymore, I'm sure of that now.

— Vous êtes vieux, je vous l’ai dit, Mais comment donc par cette porte, Vous, dont la taille est comme un muid ! - You are old, I told you, But how by this door, You, whose size is like a muid!

Cabriolez-vous de la sorte ? Do you roam like this?

— Étant jeune, mon cher enfant, J’avais chaque jointure bonne ; Je me frottais de cet onguent ; Si vous payez je vous en donne. "Being young, my dear child, I had every good seam; I rubbed this ointment; If you pay, I give you some.

— Vous êtes vieux, et vous mangez Les os comme de la bouillie ; Et jamais rien ne me laissez. "You are old, and you eat Bones like porridge; And never anything leave me.

Comment faites-vous, je vous prie ? How are you doing, please?

— Étant jeune, je disputais Tous les jours avec votre mère ; C’est ainsi que je me suis fait Un si puissant os maxillaire. - Being young, I disputed Everyday with your mother; That's how I made myself such a powerful maxillary bone.

— Vous êtes vieux, par quelle adresse Tenez-vous debout sur le nez Une anguille qui se redresse Droit comme un I quand vous sifflez ? - You are old, by what address Do you stand up on the nose An eel that straightens straight Like an I when you whistle?

— Cette question est trop sotte ! - This question is too stupid!

Cessez de babiller ainsi, Ou je vais, du bout de ma botte, Vous envoyer bien loin d’ici. Stop babbling like that, or I'll go to the end of my boot and send you far away from here. » « Ce n’est pas cela, » dit la Chenille. "That's not it," said the Caterpillar. « Pas tout à fait, je le crains bien, » dit Alice timidement. "Not quite, I'm afraid," said Alice shyly.

« Tous les mots ne sont pas les mêmes. "Not all words are the same. » « C’est tout de travers d’un bout à l’autre, » dit la Chenille d’un ton décidé ; et il se fit un silence de quelques minutes. "It's all wrong from one end to the other," said the Caterpillar decisively; and he was silent for a few minutes. La Chenille fut la première à reprendre la parole. The Caterpillar was the first to speak again.

« De quelle grandeur voulez-vous être ? "How big do you want to be?

» demanda-t-elle.

« Oh ! je ne suis pas difficile, quant à la taille, » reprit vivement Alice. " Oh ! I'm not difficult, as for size, "Alice said eagerly. « Mais vous comprenez bien qu’on n’aime pas à en changer si souvent. "But you understand that we do not like to change it so often. » « Je ne comprends pas du tout, » dit la Chenille. "I do not understand at all," said the Caterpillar. Alice se tut ; elle n’avait jamais de sa vie été si souvent contredite, et elle sentait qu’elle allait perdre patience. Alice was silent; she had never in her life been so often contradicted, and she felt she was going to lose patience.

« Êtes-vous satisfaite maintenant ?

» dit la Chenille. « J’aimerais bien à être un petit peu plus grande, si cela vous était égal, » dit Alice. Said the Caterpillar. "I'd like to be a little bigger, if you do not care," Alice said. « Trois pouces de haut, c’est si peu ! "Three inches high, it's so little! » « C’est une très-belle taille, » dit la Chenille en colère, se dressant de toute sa hauteur. (Elle avait tout juste trois pouces de haut. ) « Mais je n’y suis pas habituée, » répliqua Alice d’un ton piteux, et elle fit cette réflexion : « Je voudrais bien que ces gens-là ne fussent pas si susceptibles. "But I'm not used to it," Alice said pitifully, and she thought, "I wish these people were not so likely. » « Vous finirez par vous y habituer, » dit la Chenille. "You'll get used to it," said the Caterpillar. Elle remit la pipe à sa bouche, et fuma de plus belle. She put the pipe back to her mouth, and smoked again.

Cette fois Alice attendit patiemment qu’elle se décidât à parler. This time Alice waited patiently for her to decide to speak.

Au bout de deux ou trois minutes la Chenille sortit le houka de sa bouche, bâilla une ou deux fois et se secoua ; puis elle descendit de dessus le champignon, glissa dans le gazon, et dit tout simplement en s’en allant : « Un côté vous fera grandir, et l’autre vous fera rapetisser. At the end of two or three minutes the Caterpillar took the houka out of its mouth, yawned once or twice, and shook itself; then she came down from the mushroom, slipped into the grass, and said simply as she went away: "One side will make you grow, and the other will make you smaller. » « Un côté de quoi, l’autre côté de quoi ? » pensa Alice. « Du champignon, » dit la Chenille, comme si Alice avait parlé tout haut ; et un moment après la Chenille avait disparu. Alice contempla le champignon d’un air pensif pendant un instant, essayant de deviner quels en étaient les côtés ; et comme le champignon était tout rond, elle trouva la question fort embarrassante. Alice stared at the mushroom thoughtfully for a moment, trying to guess what the sides were; and as the mushroom was all round, she found the question very embarrassing.

Enfin elle étendit ses bras tout autour, en les allongeant autant que possible, et, de chaque main, enleva une petite partie du bord du champignon. At last she stretched out her arms around them, stretching them as far as she could, and with each hand removed a small part of the edge of the mushroom.

« Maintenant, lequel des deux ? "Now, which of the two?

» se dit-elle, et elle grignota un peu du morceau de la main droite pour voir quel effet il produirait. She said to herself, and nibbled a little of the piece with her right hand to see what effect it would produce. Presque aussitôt elle reçut un coup violent sous le menton ; il venait de frapper contre son pied. Almost immediately she received a violent blow under the chin; he had just hit his foot.

Ce brusque changement lui fit grand' peur, mais elle comprit qu’il n’y avait pas de temps à perdre, car elle diminuait rapidement. This sudden change made her very afraid, but she realized that there was no time to lose, because she was rapidly diminishing.

Elle se mit donc bien vite à manger un peu de l’autre morceau. Son menton était si rapproché de son pied qu’il y avait à peine assez de place pour qu’elle pût ouvrir la bouche. Her chin was so close to her foot that there was barely enough room for her to open her mouth. Elle y réussit enfin, et parvint à avaler une partie du morceau de la main gauche. She finally succeeded, and managed to swallow part of the piece with her left hand.

« Voilà enfin ma tête libre, » dit Alice d’un ton joyeux qui se changea bientôt en cris d’épouvante, quand elle s’aperçut de l’absence de ses épaules. "Here at last my head is free," said Alice, in a cheerful tone that soon changed into cries of terror when she saw the absence of her shoulders.

Tout ce qu’elle pouvait voir en regardant en bas, c’était un cou long à n’en plus finir qui semblait se dresser comme une tige, du milieu d’un océan de verdure s’étendant bien loin au-dessous d’elle, All she could see looking down was a long, endless neck that seemed to stand up like a stalk, from the middle of an ocean of greenery stretching far below. she,

« Qu’est-ce que c’est que toute cette verdure ? "What is all this greenery?

» dit Alice. « Et où donc sont mes épaules ? Alice said. "And where are my shoulders? Oh ! mes pauvres mains ! Oh ! my poor hands! Comment se fait-il que je ne puis vous voir ? How is it that I can not see you? » Tout en parlant elle agitait les mains, mais il n’en résulta qu’un petit mouvement au loin parmi les feuilles vertes. As she spoke, she waved her hands, but there was only a slight movement in the distance among the green leaves.

Comme elle ne trouvait pas le moyen de porter ses mains à sa tête, elle tâcha de porter sa tête à ses mains, et s’aperçut avec joie que son cou se repliait avec aisance de tous côtés comme un serpent. As she could not find a way to put her hands to her head, she tried to carry her head to her hands, and was glad to see that her neck was folding like a snake on all sides.

Elle venait de réussir à le plier en un gracieux zigzag, et allait plonger parmi les feuilles, qui étaient tout simplement le haut des arbres sous lesquels elle avait erré, quand un sifflement aigu la força de reculer promptement ; un gros pigeon venait de lui voler à la figure, et lui donnait de grands coups d’ailes. She had just managed to fold it into a graceful zigzag, and was about to plunge among the leaves, which were simply the top of the trees under which she had wandered, when a sharp whistle compelled her to retreat promptly; a big pigeon had just stolen him in the face, and gave him great shots of wings.

« Serpent ! "Snake!

» criait le Pigeon. Shouted the Pigeon.

« Je ne suis pas un serpent, » dit Alice, avec indignation.

« Laissez-moi tranquille. " Leave me alone. » « Serpent ! Je le répète, » dit le Pigeon, mais d’un ton plus doux ; puis il continua avec une espèce de sanglot : « J’ai essayé de toutes les façons, rien ne semble les satisfaire. "Snake! I repeat it, "said the Pigeon, but with a softer tone; then he continued with a kind of sob: "I've tried anyway, nothing seems to satisfy them. » « Je n’ai pas la moindre idée de ce que vous voulez dire, » répondit Alice. "I do not have a clue what you mean," Alice replied. « J’ai essayé des racines d’arbres ; j’ai essayé des talus ; j’ai essayé des haies, » continua le Pigeon sans faire attention à elle. "I tried tree roots; I tried embankments; I tried hedges, "continued the Pigeon without paying any attention to her.

« Mais ces serpents ! il n’y a pas moyen de les satisfaire. there is no way to satisfy them. » Alice était de plus en plus intriguée, mais elle pensa que ce n’était pas la peine de rien dire avant que le Pigeon eût fini de parler. « Je n’ai donc pas assez de mal à couver mes œufs, » dit le Pigeon. "I do not have enough trouble hatching my eggs," said the Pigeon.

« Il faut encore que je guette les serpents nuit et jour. "I still have to watch for snakes day and night. Je n’ai pas fermé l’œil depuis trois semaines ! » « Je suis fâchée que vous ayez été tourmenté, » dit Alice, qui commençait à comprendre. "I'm sorry you were tormented," said Alice, who was beginning to understand. « Au moment où je venais de choisir l’arbre le plus haut de la forêt, » continua le Pigeon en élevant la voix jusqu’à crier, — « au moment où je me figurais que j’allais en être enfin débarrassé, les voilà qui tombent du ciel « en replis tortueux. "At the moment when I had just chosen the tallest tree in the forest," continued the Pigeon, raising his voice to the point of shouting, - "at the moment when I imagined that I was going to be finally rid of them, here they are who fall from the sky "in crooked folds.

» Oh ! le vilain serpent ! » « Mais je ne suis pas un serpent, » dit Alice. « Je suis une — Je suis — »

« Eh bien !

qu’êtes-vous ! » dit le Pigeon « Je vois que vous cherchez à inventer quelque chose. » « Je — je suis une petite fille, » répondit Alice avec quelque hésitation, car elle se rappelait combien de changements elle avait éprouvés ce jour-là. "I - I'm a little girl," Alice said hesitantly, remembering how many changes she had made that day. « Voilà une histoire bien vraisemblable ! "This is a very likely story!

» dit le Pigeon d’un air de profond mépris. « J’ai vu bien des petites filles dans mon temps, mais je n’en ai jamais vu avec un cou comme cela. Non, non ; vous êtes un serpent ; il est inutile de le nier. Vous allez sans doute me dire que vous n’avez jamais mangé d’œufs. You will probably tell me that you have never eaten eggs. » « Si fait, j’ai mangé des œufs, » dit Alice, qui ne savait pas mentir ; « mais vous savez que les petites filles mangent des œufs aussi bien que les serpents. » « Je n’en crois rien, » dit le Pigeon, « mais s’il en est ainsi, elles sont une espèce de serpent ; c’est tout ce que j’ai à vous dire. "I do not believe it," said the Pigeon, "but if it is so, they are a kind of serpent; that's all I have to tell you. » Cette idée était si nouvelle pour Alice qu’elle resta muette pendant une ou deux minutes, ce qui donna au Pigeon le temps d’ajouter : « Vous cherchez des œufs, ça j’en suis bien sûr, et alors que m’importe que vous soyez une petite fille ou un serpent ? This idea was so novel to Alice that she was silent for a minute or two, which gave the Pigeon time to add, "You're looking for eggs, that I'm sure of, and so what does it matter to me?" whether you are a little girl or a snake? » « Cela m’importe beaucoup à moi, » dit Alice vivement ; « mais je ne cherche pas d’œufs justement, et quand même j’en chercherais je ne voudrais pas des vôtres ; je ne les aime pas crus. » « Eh bien ! allez-vous-en alors, » dit le Pigeon d’un ton boudeur en se remettant dans son nid. " " Well ! go away then, "said the Pigeon sulkily as he went back to his nest. Alice se glissa parmi les arbres du mieux qu’elle put en se baissant, car son cou s’entortillait dans les branches, et à chaque instant il lui fallait s’arrêter et le désentortiller. Η Αλίκη γλίστρησε μέσα από τα δέντρα όσο καλύτερα μπορούσε, σκύβοντας, γιατί ο λαιμός της ήταν μπλεγμένος στα κλαδιά, και κάθε στιγμή έπρεπε να σταματήσει και να τον λύσει. Alice slipped among the trees as best she could by stooping down, for her neck was twisting in the branches, and at every moment he had to stop and untie him. Au bout de quelque temps, elle se rappela qu’elle tenait encore dans ses mains les morceaux de champignon, et elle se mit à l’œuvre avec grand soin, grignotant tantôt l’un, tantôt l’autre, et tantôt grandissant, tantôt rapetissant, jusqu’à ce qu’enfin elle parvint à se ramener à sa grandeur naturelle. After a while she remembered that she still held the pieces of mushroom in her hands, and she set to work with great care, sometimes nibbling at one, now at another, and sometimes growing, sometimes shrinking, until finally she managed to reduce herself to her natural size.

Il y avait si longtemps qu’elle n’avait été d’une taille raisonnable que cela lui parut d’abord tout drôle, mais elle finit par s’y accoutumer, et commença à se parler à elle-même, comme d’habitude. It had been so long since she was a reasonable size that at first it seemed very funny, but eventually she got used to it, and started talking to herself, as usual. .

« Allons, voilà maintenant la moitié de mon projet exécuté. "Come on, that's half of my project now. Comme tous ces changements sont embarrassants ! Like all these changes are embarrassing! Je ne suis jamais sûre de ce que je vais devenir d’une minute à l’autre. I'm never sure what I will become from minute to minute. Toutefois, je suis redevenue de la bonne grandeur ; il me reste maintenant à pénétrer dans ce magnifique jardin. However, I have returned to goodness; I now have to enter this beautiful garden. Comment faire ? » En disant ces mots elle arriva tout à coup à une clairière, où se trouvait une maison d’environ quatre pieds de haut. How to do ? In saying these words she suddenly arrived at a clearing, where was a house about four feet high. « Quels que soient les gens qui demeurent là, » pensa Alice, « il ne serait pas raisonnable de se présenter à eux grande comme je suis. "Whatever people stay there," Alice thought, "it would not be reasonable to present themselves to them as I am. Ils deviendraient fous de frayeur. They would go mad with fear. » Elle se mit de nouveau à grignoter le morceau qu’elle tenait dans sa main droite, et ne s’aventura pas près de la maison avant d’avoir réduit sa taille à neuf pouces.

CHAPITRE VI.

PORC ET POIVRE.

Alice resta une ou deux minutes à regarder à la porte ; elle se demandait ce qu’il fallait faire, quand tout à coup un laquais en livrée sortit du bois en courant. Η Άλις στάθηκε ένα ή δύο λεπτά κοιτάζοντας την πόρτα. αναρωτιόταν τι να κάνει, όταν ξαφνικά βγήκε τρέχοντας από το ξύλο ένας λακές με λιβερία. Alice waited a minute or two to look at the door; she wondered what to do, when suddenly a lackey in livery ran out of the wood.

(Elle le prit pour un laquais à cause de sa livrée ; sans cela, à n’en juger que par la figure, elle l’aurait pris pour un poisson.) (She took him for a lackey because of his livery, without which, to judge only by the figure, she would have taken for a fish.) Il frappa fortement avec son doigt à la porte. Elle fut ouverte par un autre laquais en livrée qui avait la face toute ronde et de gros yeux comme une grenouille. It was opened by another lackey in livery who had a round face and big eyes like a frog. Alice remarqua que les deux laquais avaient les cheveux poudrés et tout frisés. Alice noticed that the two lackeys had powdered and curly hair. Elle se sentit piquée de curiosité, et, voulant savoir ce que tout cela signifiait, elle se glissa un peu en dehors du bois afin d’écouter. She felt piqued with curiosity, and, wanting to know what all that meant, she slipped out of the woods a bit to listen. Le Laquais-Poisson prit de dessous son bras une lettre énorme, presque aussi grande que lui, et la présenta au Laquais-Grenouille en disant d’un ton solennel : « Pour Madame la Duchesse, une invitation de la Reine à une partie de croquet. Laquais-Poisson took from under his arm an enormous letter, almost as large as he was, and presented it to La Grocer-Frog, solemnly saying: "For Madame la Duchesse, an invitation from the Queen to a game of croquet . » Le Laquais-Grenouille répéta sur le même ton solennel, en changeant un peu l’ordre des mots : « De la part de la Reine une invitation pour Madame la Duchesse à une partie de croquet ; » puis tous deux se firent un profond salut et les boucles de leurs chevelures s’entremêlèrent. The Laquais-Grenouille repeated in the same solemn tone, changing a little the order of the words: "On the part of the Queen an invitation for Madame la Duchesse to a game of croquet; Then they both gave each other a deep bow, and the curls of their hair intermingled.

Cela fit tellement rire Alice qu’elle eut à rentrer bien vite dans le bois de peur d’être entendue ; et quand elle avança la tête pour regarder de nouveau, le Laquais-Poisson était parti, et l’autre était assis par terre près de la route, regardant niaisement en l’air. This made Alice laugh so much that she had to go back to the woods very quickly for fear of being heard; and when she put her head down to look again, Laquais-Poisson was gone, and the other was sitting on the ground near the road, looking stupidly up in the air.

Alice s’approcha timidement de la porte et frappa.

« Cela ne sert à rien du tout de frapper, » dit le Laquais, « et cela pour deux raisons : premièrement, parce que je suis du même côté de la porte que vous ; deuxièmement, parce qu’on fait là-dedans un tel bruit que personne ne peut vous entendre. "It is useless to strike at all," said the Laquais, "and this for two reasons: first, because I am on the same side of the door as you; secondly, because it makes such a noise that no one can hear you.

» En effet, il se faisait dans l’intérieur un bruit extraordinaire, des hurlements et des éternuements continuels, et de temps à autre un grand fracas comme si on brisait de la vaisselle.

« Eh bien ! comment puis-je entrer, s’il vous plaît ? » demanda Alice.

« Il y aurait quelque bon sens à frapper à cette porte, » continua le Laquais sans l’écouter, « si nous avions la porte entre nous deux. "There would be some sense in knocking on this door," continued Laquais without listening, "if we had the door between us.

Par exemple, si vous étiez à l’intérieur vous pourriez frapper et je pourrais vous laisser sortir. » Il regardait en l’air tout le temps qu’il parlait, et Alice trouvait cela très-impoli. « Mais peut-être ne peut-il pas s’en empêcher, » dit-elle ; « il a les yeux presque sur le sommet de la tête. Dans tous les cas il pourrait bien répondre à mes questions. — Comment faire pour entrer ? » répéta-t-elle tout haut.

« Je vais rester assis ici, » dit le Laquais, « jusqu’à demain — »

Au même instant la porte de la maison s’ouvrit, et une grande assiette vola tout droit dans la direction de la tête du Laquais ; elle lui effleura le nez, et alla se briser contre un arbre derrière lui. At the same moment the door of the house opened, and a large plate flew straight in the direction of the head of Laquais; she touched his nose, and went to break against a tree behind him.

« — ou le jour suivant peut-être, » continua le Laquais sur le même ton, tout comme si rien n’était arrivé. "- or the next day, perhaps," Laquais continued in the same tone, as if nothing had happened.

« Comment faire pour entrer ?

» redemanda Alice en élevant la voix.

« Mais devriez-vous entrer ? "Aber sollten Sie reingehen? "But should you come in?

» dit le Laquais. « C’est ce qu’il faut se demander, n’est-ce pas ? " Das ist die Frage, die man sich stellen muss, nicht wahr? "That's the question, is not it? » Bien certainement, mais Alice trouva mauvais qu’on le lui dît. "Sicherlich, aber Alice fand es nicht gut, dass man es ihr gesagt hat. Certainly, but Alice did not think it was said to her. « C’est vraiment terrible, » murmura-t-elle, « de voir la manière dont ces gens-là discutent, il y a de quoi rendre fou. "Es ist wirklich schrecklich", murmelte sie, "zu sehen, wie diese Leute diskutieren, da kann man schon mal verrückt werden. "It's really terrible," she whispered, "to see the way these people are talking, it's crazy. » Le Laquais trouva l’occasion bonne pour répéter son observation avec des variantes. « Je resterai assis ici, » dit-il, « l’un dans l’autre, pendant des jours et des jours ! » « Mais que faut-il que je fasse ? "But what must I do? » dit Alice. « Tout ce que vous voudrez, » dit le Laquais ; et il se mit à siffler. Alice said. "Whatever you wish," said the Laquais; and he whistled. « Oh ! ce n’est pas la peine de lui parler, » " Oh ! it's not worth talking to him, " dit Alice, désespérée ; « c’est un parfait idiot.

» Puis elle ouvrit la porte et entra.

La porte donnait sur une grande cuisine qui était pleine de fumée d’un bout à l’autre. The door led to a large kitchen that was full of smoke from one end to the other.

La Duchesse était assise sur un tabouret à trois pieds, au milieu de la cuisine, et dorlotait un bébé ; la cuisinière, penchée sur le feu, brassait quelque chose dans un grand chaudron qui paraissait rempli de soupe. The Duchess sat on a three-legged stool in the middle of the kitchen and pampered a baby; the cook, bending over the fire, was stirring something in a large cauldron which seemed to be full of soup.

« Bien sûr, il y a trop de poivre dans la soupe, » se dit Alice, tout empêchée par les éternuements.

Il y en avait certainement trop dans l’air. There was certainly too much in the air.

La Duchesse elle-même éternuait de temps en temps, et quant au bébé il éternuait et hurlait alternativement sans aucune interruption. The Duchess herself sneezed from time to time, and as for the baby he sneezed and screamed alternately without any interruption. Les deux seules créatures qui n’éternuassent pas, étaient la cuisinière et un gros chat assis sur l’âtre et dont la bouche grimaçante était fendue d’une oreille à l’autre. Τα μόνα δύο πλάσματα που δεν φτερνίστηκαν ήταν η μαγείρισσα και μια χοντρή γάτα που κάθεται στην εστία με ένα μορφασμό στόμα χωρισμένο από αυτί σε αυτί. The only two creatures that did not sneeze were the cook and a big cat sitting on the hearth and whose grimacing mouth was slit from ear to ear.

« Pourriez-vous m’apprendre, » dit Alice un peu timidement, car elle ne savait pas s’il était bien convenable qu’elle parlât la première, « pourquoi votre chat grimace ainsi ? "Could you teach me," Alice said a little timidly, for she did not know if it was okay for her to speak first, "why does your cat wince like that?"

» « C’est un Grimaçon, » dit la Duchesse ; « voilà pourquoi. "It's a Grimson," said the Duchess; " that's why. — Porc ! » Elle prononça ce dernier mot si fort et si subitement qu’Alice en frémit. She uttered that last word so loudly and so suddenly that Alice shuddered at it. Mais elle comprit bientôt que cela s’adressait au bébé et non pas à elle ; elle reprit donc courage et continua : But she soon realized that it was for the baby and not for her; she therefore took courage and continued:

« J’ignorais qu’il y eût des chats de cette espèce. "I did not know there were cats of this kind.

Au fait j’ignorais qu’un chat pût grimacer. By the way, I did not know a cat could wince. » « Ils le peuvent tous, » dit la Duchesse ; « et la plupart le font. "They can all," said the Duchess; "And most do it. » « Je n’en connais pas un qui grimace, » dit Alice poliment, bien contente d’être entrée en conversation. "I do not know one who grimaces," Alice said politely, glad to be in conversation. « Le fait est que vous ne savez pas grand’chose, » dit la Duchesse. "The fact is, you do not know much," said the Duchess.

Le ton sur lequel fut faite cette observation ne plut pas du tout à Alice, et elle pensa qu’il serait bon de changer la conversation.

Tandis qu’elle cherchait un autre sujet, la cuisinière retira de dessus le feu le chaudron plein de soupe, et se mit aussitôt à jeter tout ce qui lui tomba sous la main à la Duchesse et au bébé — la pelle et les pincettes d’abord, à leur suite vint une pluie de casseroles, d’assiettes et de plats. Während sie nach einem anderen Thema suchte, nahm die Köchin den Topf mit der Suppe vom Herd und begann sofort, alles, was ihr in die Hände fiel, auf die Herzogin und das Baby zu werfen. Ενώ έψαχνε για άλλο θέμα, η μαγείρισσα πήρε το καζάνι γεμάτο με σούπα από τη φωτιά και αμέσως άρχισε να πετάει ό,τι ήρθε στο χέρι στη δούκισσα και το μωρό - το φτυάρι και τη λαβίδα. πρώτα, ακολουθώντας τους ήρθε ένα ντους από γλάστρες, πιάτα και πιατέλες. While she was looking for another subject, the cook removed from the fire the cauldron full of soup, and immediately began to throw everything that came to hand to the Duchess and the baby - the shovel and tweezers of first, after them came a shower of pots, plates and dishes. La Duchesse n’y faisait pas la moindre attention, même quand elle en était atteinte, et l’enfant hurlait déjà si fort auparavant qu’il était impossible de savoir si les coups lui faisaient mal ou non. The Duchess paid no attention to it, even when she had it, and the child was already screaming so loudly before that it was impossible to know if the blows were hurting her or not.

« Oh ! je vous en prie, prenez garde à ce que vous faites, » criait Alice, sautant ça et là et en proie à la terreur. " Oh ! I beg you, take care what you do, "cried Alice, jumping here and there and in terror. « Oh ! son cher petit nez ! " Oh ! his dear little nose! » Une casserole d’une grandeur peu ordinaire venait de voler tout près du bébé, et avait failli lui emporter le nez. A saucepan of unusual size had just flown close to the baby, and had almost taken away his nose.

« Si chacun s’occupait de ses affaires, » dit la Duchesse avec un grognement rauque, « le monde n’en irait que mieux. "Wenn sich jeder um seine eigenen Angelegenheiten kümmern würde", sagte die Herzogin mit einem rauen Knurren, "würde es der Welt nur besser gehen. "If everyone were doing their business," said the Duchess with a hoarse grunt, "the world would be better.

» « Ce qui ne serait guère avantageux, » dit Alice, enchantée qu’il se présentât une occasion de montrer un peu de son savoir. "Das wäre nicht sehr vorteilhaft", sagte Alice, die erfreut war, dass sich eine Gelegenheit bot, etwas von ihrem Wissen zu zeigen. "That would not be a good thing," said Alice, delighted that he had an opportunity to show some of his knowledge. « Songez à ce que deviendraient le jour et la nuit ; vous voyez bien, la terre met vingt-quatre heures à faire sa révolution. "Sie sehen, die Erde braucht vierundzwanzig Stunden, um sich zu drehen. "Think of what would become of day and night; you see, the earth takes twenty-four hours to make its revolution. » « Ah ! vous parlez de faire des révolutions ! "Ach, ihr redet davon, Revolutionen zu machen! "Ah! you speak of making revolutions! » dit la Duchesse. « Qu’on lui coupe la tête ! "sagte die Herzogin. "Man soll ihm den Kopf abschlagen! Said the Duchess. " Cut off his head ! » Alice jeta un regard inquiet sur la cuisinière pour voir si elle allait obéir ; mais la cuisinière était tout occupée à brasser la soupe et paraissait ne pas écouter. Alice continua donc : «  Vingt-quatre heures, je crois, ou bien douze ? Alice continued, "Twenty-four hours, I believe, or twelve? Je pense — » I think - "

« Oh ! laissez-moi la paix, » dit la Duchesse, « je n’ai jamais pu souffrir les chiffres. " Oh ! leave me alone, "said the Duchess," I have never been able to suffer the numbers. » Et là-dessus elle recommença à dorloter son enfant, lui chantant une espèce de chanson pour l’endormir et lui donnant une forte secousse au bout de chaque vers. And on that she began to pamper her child, singing a kind of song to make him fall asleep and giving him a strong jolt at the end of each verse.

« Grondez-moi ce vilain garçon ! «Μάλισέ με αυτό το άτακτο αγόρι!» "Scold me this ugly boy!

Battez-le quand il éternue ; À vous taquiner, sans façon Le méchant enfant s’évertue. Κτυπήστε τον όταν φτερνίζεται. Να σε πειράζουν, χωρίς τελετή Το άτακτο παιδί πασχίζει. Beat him when he sneezes; To tease you, without ceremony The bad child strives. » Refrain (que reprirent en chœur la cuisinière et le bébé). Chorus (which the cook and the baby took up in chorus). « Brou, Brou, Brou ! «Μπροου, Μπρου, Μπρου! » (bis. ) En chantant le second couplet de la chanson la Duchesse faisait sauter le bébé et le secouait violemment, si bien que le pauvre petit être hurlait au point qu’Alice put à peine entendre ces mots : Singing the second verse of the song, the Duchess blew the baby and shook him violently, so that the poor little being screamed so much that Alice could barely hear these words: « Oui, oui, je m’en vais le gronder, Et le battre, s’il éternue ; Car bientôt à savoir poivrer, Je veux que l’enfant s’habitue. "Yes, yes, I am going to scold him, And beat him, if he sneezes; Because soon to pepper, I want the child to get used to.

» Refrain. « Brou, Brou, Brou ! » (bis. ) « Tenez, vous pouvez le dorloter si vous voulez ! » dit la Duchesse à Alice : et à ces mots elle lui jeta le bébé. « Il faut que j’aille m’apprêter pour aller jouer au croquet avec la Reine. "I have to get ready to play croquet with the Queen. » Et elle se précipita hors de la chambre. And she rushed out of the room. La cuisinière lui lança une poêle comme elle s’en allait, mais elle la manqua tout juste. The cook threw a pan at her as she was leaving, but she just missed it.

Alice eut de la peine à attraper le bébé. Alice had trouble catching the baby.

C’était un petit être d’une forme étrange qui tenait ses bras et ses jambes étendus dans toutes les directions ; « Tout comme une étoile de mer, » pensait Alice. He was a strange little being with arms and legs stretched out in all directions; "Just like a starfish," Alice thought. La pauvre petite créature ronflait comme une machine à vapeur lorsqu’elle l’attrapa, et ne cessait de se plier en deux, puis de s’étendre tout droit, de sorte qu’avec tout cela, pendant les premiers instants, c’est tout ce qu’elle pouvait faire que de le tenir. The poor little creature was snoring like a steam engine when she grabbed it, and kept bending in half, then spreading straight, so that with all that, during the first moments, it was all she could do was hold it.

Sitôt qu’elle eut trouvé le bon moyen de le bercer, (qui était d’en faire une espèce de nœud, et puis de le tenir fermement par l’oreille droite et le pied gauche afin de l’empêcher de se dénouer,) elle le porta dehors en plein air. As soon as she found the right way to rock it, (which was to make it a kind of knot, and then hold it firmly by the right ear and left foot to prevent it from being unraveled) she carried him outside in the open air.

« Si je n’emporte pas cet enfant avec moi, » pensa Alice, « ils le tueront bien sûr un de ces jours. Ne serait-ce pas un meurtre de l’abandonner ? Would not it be a murder to abandon him? » Elle dit ces derniers mots à haute voix, et la petite créature répondit en grognant (elle avait cessé d’éternuer alors). She said these last words aloud, and the little creature replied grunting (she had stopped sneezing then). « Ne grogne pas ainsi, » dit Alice ; « ce n’est pas là du tout une bonne manière de s’exprimer. "Do not complain like that," said Alice; "That's not a good way to express yourself. » Le bébé grogna de nouveau. Alice le regarda au visage avec inquiétude pour voir ce qu’il avait. Alice looked at him anxiously to see what he had. Sans contredit son nez était très-retroussé, et ressemblait bien plutôt à un groin qu’à un vrai nez. Without a doubt his nose was very upturned, and looked more like a snout than a real nose. Ses yeux aussi devenaient très-petits pour un bébé. His eyes also became very small for a baby. Enfin Alice ne trouva pas du tout de son goût l’aspect de ce petit être. At last Alice did not find the aspect of this little being at all to her liking. « Mais peut-être sanglotait-il tout simplement, » pensa-t-elle, et elle regarda de nouveau les yeux du bébé pour voir s’il n’y avait pas de larmes. "But maybe it was sobbing," she thought, and she looked back at the baby's eyes to see if there were any tears. « Si tu vas te changer en porc, » dit Alice très-sérieusement, « je ne veux plus rien avoir à faire avec toi. "If you're going to change into a pig," Alice said very seriously, "I do not want to have anything to do with you anymore. Fais-y bien attention ! Be careful! » La pauvre petite créature sanglota de nouveau, ou grogna (il était impossible de savoir lequel des deux), et ils continuèrent leur chemin un instant en silence. The poor little creature sobbed again, or groaned (it was impossible to know which one), and they continued their way for a moment in silence. Alice commençait à dire en elle-même, « Mais, que faire de cette créature quand je l’aurai portée à la maison ? Alice began to say in herself, "But what about this creature when I brought it home?

» lorsqu’il grogna de nouveau si fort qu’elle regarda sa figure avec quelque inquiétude. When he grunted again so hard that she looked at his face with some anxiety. Cette fois il n’y avait pas à s’y tromper, c’était un porc, ni plus ni moins, et elle comprit qu’il serait ridicule de le porter plus loin. This time there was no mistake, it was a pig, no more and no less, and she realized that it would be ridiculous to carry it further.

Elle déposa donc par terre le petit animal, et se sentit toute soulagée de le voir trotter tranquillement vers le bois.

« S’il avait grandi, » se dit-elle, « il serait devenu un bien vilain enfant ; tandis qu’il fait un assez joli petit porc, il me semble. "If he had grown up," she said to herself, "he would have become a very ugly child; while he makes a pretty little pig, I think. » Alors elle se mit à penser à d’autres enfants qu’elle connaissait et qui feraient d’assez jolis porcs, si seulement on savait la manière de s’y prendre pour les métamorphoser. Elle était en train de faire ces réflexions, lorsqu’elle tressaillit en voyant tout à coup le Chat assis à quelques pas de là sur la branche d’un arbre. She was doing these reflections when she flinched at the sight of the cat sitting a few steps away on the branch of a tree.

Le Chat grimaça en apercevant Alice. Die Katze grinste, als sie Alice erblickte.

Elle trouva qu’il avait l’air bon enfant, et cependant il avait de très-longues griffes et une grande rangée de dents ; aussi comprit-elle qu’il fallait le traiter avec respect.

« Grimaçon !

» commença-t-elle un peu timidement, ne sachant pas du tout si cette familiarité lui serait agréable ; toutefois il ne fit qu’allonger sa grimace. "begann sie etwas schüchtern, da sie nicht wusste, ob ihm diese Vertrautheit gefallen würde; dennoch machte er sein Grinsen nur noch länger.

« Allons, il est content jusqu’à présent, » pensa Alice, et elle continua : « Dites-moi, je vous prie, de quel côté faut-il me diriger ?

» « Cela dépend beaucoup de l’endroit où vous voulez aller, » dit le Chat. « Cela m’est assez indifférent, » dit Alice.

« Alors peu importe de quel côté vous irez, » dit le Chat.

« Pourvu que j’arrive quelque part, » ajouta Alice en explication.

« Cela ne peut manquer, pourvu que vous marchiez assez longtemps.

» Alice comprit que cela était incontestable ; elle essaya donc d’une autre question : « Quels sont les gens qui demeurent par ici ? » « De ce côté-ci, » dit le Chat, décrivant un cercle avec sa patte droite, « demeure un chapelier ; de ce côté-là, » faisant de même avec sa patte gauche, « demeure un lièvre. Allez voir celui que vous voudrez, tous deux sont fous. » « Mais je ne veux pas fréquenter des fous, » fit observer Alice.

« Vous ne pouvez pas vous en défendre, tout le monde est fou ici.

Je suis fou, vous êtes folle. » « Comment savez-vous que je suis folle ? » dit Alice. « Vous devez l’être, » dit le Chat, « sans cela ne seriez pas venue ici. » Alice pensa que cela ne prouvait rien. Toutefois elle continua : « Et comment savez-vous que vous êtes fou ? » « D’abord, » dit le Chat, « un chien n’est pas fou ; vous convenez de cela. "Erstens", sagte die Katze, "ist ein Hund nicht verrückt; da sind Sie sich einig. » « Je le suppose, » dit Alice. « Eh bien ! » continua le Chat, « un chien grogne quand il se fâche, et remue la queue lorsqu’il est content. Or, moi, je grogne quand je suis content, et je remue la queue quand je me fâche. Donc je suis fou. » « J’appelle cela faire le rouet, et non pas grogner, » dit Alice. « Appelez cela comme vous voudrez, » dit le Chat.

« Jouez-vous au croquet avec la Reine aujourd’hui ? » « Cela me ferait grand plaisir, » dit Alice, « mais je n’ai pas été invitée. » « Vous m’y verrez, » dit le Chat ; et il disparut. Alice ne fut pas très-étonnée, tant elle commençait à s’habituer aux événements extraordinaires.

Tandis qu’elle regardait encore l’endroit que le Chat venait de quitter, il reparut tout à coup.

« À propos, qu’est devenu le bébé ?

J’allais oublier de le demander. » « Il a été changé en porc, » dit tranquillement Alice, comme si le Chat était revenu d’une manière naturelle. « Je m’en doutais, » dit le Chat ; et il disparut de nouveau.

Alice attendit quelques instants, espérant presque le revoir, mais il ne reparut pas ; et une ou deux minutes après, elle continua son chemin dans la direction où on lui avait dit que demeurait le Lièvre.

« J’ai déjà vu des chapeliers, » se dit-elle ; « le Lièvre sera de beaucoup le plus intéressant. » À ces mots elle leva les yeux, et voilà que le Chat était encore là assis sur une branche d’arbre.

« M’avez-vous dit porc, ou porte ?

» demanda le Chat.

« J’ai dit porc, » répéta Alice.

« Ne vous amusez donc pas à paraître et à disparaître si "Machen Sie sich also nicht den Spaß, zu erscheinen und zu verschwinden, wenn

subitement, vous faites tourner la tête aux gens.

» « C’est bon, » dit le Chat, et cette fois il s’évanouit tout doucement à commencer par le bout de la queue, et finissant par sa grimace qui demeura quelque temps après que le reste fut disparu. « Certes, » pensa Alice, « j’ai souvent vu un chat sans grimace, mais une grimace sans chat, je n’ai jamais de ma vie rien vu de si drôle.

» Elle ne fit pas beaucoup de chemin avant d’arriver devant la maison du Lièvre. Elle pensa que ce devait bien être là la maison, car les cheminées étaient en forme d’oreilles et le toit était couvert de fourrure. Σκέφτηκε ότι αυτό πρέπει να ήταν το σπίτι, γιατί οι καμινάδες είχαν σχήμα αυτιών και η στέγη ήταν καλυμμένη με γούνα. La maison était si grande qu’elle n’osa s’approcher avant d’avoir grignoté encore un peu du morceau de champignon qu’elle avait dans la main gauche, et d’avoir atteint la taille de deux pieds environ ; et même alors elle avança timidement en se disant : « Si après tout il était fou furieux ! Το σπίτι ήταν τόσο μεγάλο που δεν τόλμησε να πλησιάσει μέχρι να τσιμπήσει λίγο ακόμα το κομμάτι του μανιταριού που είχε στο αριστερό της χέρι και είχε φτάσει σε ύψος περίπου δύο ποδιών. και ακόμη και τότε προχώρησε δειλά μπροστά, λέγοντας στον εαυτό της, "Μακάρι να ήταν τρελός!" Je voudrais presque avoir été faire visite au Chapelier plutôt que d’être venue ici.