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Bram Stoker - Dracula, Part (19)

Part (19)

Le second et moi sommes tombés d'accord pour avoir une arme sur nous en permanence à partir de maintenant, pour parer à toute éventualité. 30 juillet - Dernière nuit du voyage. Soulagés d'approcher des côtes anglaises. Beau temps, toutes voiles déployées. Me suis retiré, épuisé; dormi profondément; réveillé par le second disant que deux hommes de quart et le barreur sont portés disparus. Il ne reste que moi-même, le second et deux hommes d'équipage pour faire naviguer le bateau. 1er août - Deux jours de brume, et pas une voile en vue. J'avais espéré dans la Manche trouver une forme de secours ou un refuge. Comme nous manquons de bras pour manoeuvrer les voiles, nous devons naviguer vent arrière. Je n'ose les abaisser, de peur de ne pas réussir à les hisser à nouveau. Il me semble que nous nous précipitons vers un destin fatal. Le second est à présent le plus démoralisé de tous. Sa nature plus forte semble l'avoir miné de l'intérieur. Les hommes d'équipage sont au- delà de la peur, ils abattent leur travail en faisant preuve d'un grand sang-froid et et de patience, l'esprit résigné au pire. Ils sont Russes, et lui, Roumain. 2 août, minuit - Réveillé d'une courte sieste par un cri, qui semblait provenir de babord. Je n'ai rien pu voir dans le brouillard. Me suis rué sur le pont, où j'ai heurté le second. Il m'a dit avoir entendu un cri et couru, mais il n'y a aucun homme au quart. Un de plus, disparu. Seigneur, aidez-nous ! Le second dit que nous devons avoir passé Straits of Dover, parce que dans une trouée du brouillard, il a aperçu North Foreland, juste au moment où il a entendu le cri. Si c'est vrai, nous sommes maintenant dans la Mer du Nord, et Dieu seul peut nous guider à travers ce brouillard qui paraît nous coller à la peau et se déplacer avec nous; et Dieu, à ce qu'il semble, nous a abandonnés. 3 août - A minuit j'ai été relever l'homme à la barre, et quand je suis arrivé je n'ai trouvé personne. Le vent était constant, et comme nous étions vent arrière, il n'y avait pas d'embardées. Je n'ai pas osé laisser la barre, et j'ai crié pour appeler le second. Après quelques secondes il s'est précipité sur le pont dans son pantalon de flanelle. Il avait l'oeil fou et hagard, et j'ai eu grand peur qu'il n'eût perdu le sentiment. Il s'est approché de moi et a murmuré d'une voix rauque, sa bouche à mon oreille, comme s'il craignait que l'air-même pût l'entendre : « La chose est ici - Je le sais, maintenant. Pendant le quart, la nuit dernière, je l'ai vue, semblable à un homme, grand et maigre, et d'une pâleur spectrale. Elle était à la proue, et regardait dehors. Je me suis glissé derrière elle, et l'ai frappée de mon couteau, mais le couteau l'a traversée, comme un fantôme! » Tandis qu'il parlait, il a pris son couteau et l'a furieusement agité dans l'espace. Puis il a repris : « Mais elle est là, et je la trouverai. Elle est dans les cales, peut-être dans l'une des boîtes. Je les dévisserai une par une et je verrai bien. Occupez-vous du navire. » Et, avec un regard de mise en garde et le doigt sur sa lèvre, il est descendu. Un vent tourbillonnant était en train de se lever, et je ne pouvais pas laisser la barre. Je l'ai vu revenir sur le pont avec une boîte à outils et une lanterne, puis descendre l'escalier avant. Il est complètement fou, fou à lier, et il est inutile d'essayer de l'arrêter. Il ne peut pas faire de mal à ces boîtes : selon le registre elles contiennent de la glaise; s'il les soulève, ce ne sera pas dangereux. Alors je préfère rester là, veiller sur la barre, et écrire ces lignes. Je ne peux que m'en remettre à Dieu et attendre que le brouillard s'éclaircisse. Alors, si je n'arrive pas à piloter jusqu'à un port avec le vent qu'il y a, j'abaisserai les voiles en coupant tout, et j'enverrai un signal de détresse.

Tout est presque fini maintenant. Juste quand j'espérais que le second allait ressortir un peu plus calme - car je l'avais entendu marteler quelque chose, et je me disais que le travail physique lui ferait du bien - alors du fond de l'escalier monta un soudain hurlement de terreur, qui m'a glacé le sang, et il a surgi comme un boulet de canon - un fou furieux, avec les yeux roulant hors des orbites et le visage convulsé par la peur. « Sauvez-moi! Sauvez-moi! » hurla-t-il, puis il porta les yeux sur la nappe de brouillard. Son horreur se changea en désespoir, et avec une voix ferme il dit : « Vous devriez venir aussi, capitaine, avant qu'il ne soit trop tard. Il est là. Je connais le secret maintenant. La mer me sauvera de lui, et c'est tout ce qui me reste! » Avant que je pusse dire un mot, ou esquisser un mouvement pour l'attraper, il escalada le bord et se jeta délibérément dans les flots. Je suppose que je connais le secret aussi, maintenant. C'est ce fou qui a tué les hommes un par un, et maintenant il les a suivis lui-même dans la mort. Dieu me vienne en aide ! Comment vais-je justifier toutes ces horreurs quand je rentrerai au port ? Quand je rentrerai au port ! Cela arrivera-t-il jamais ? 4 août - Toujours du brouillard, que le lever de soleil n'arrive pas à percer. Je sais que c'est l'aube parce que je suis marin, sinon je ne le saurais pas. Je n'ai pas osé descendre, je n'ose pas laisser la barre; alors je suis resté ainsi toute la nuit, et au plus noir de la nuit je l'ai vu - Lui ! Dieu me pardonne, mais le second a eu raison de sauter par dessus bord, il valait mieux mourir comme un homme; mourir comme un marin dans l'eau bleue, c'est une mort qu'on peut accepter. Mais je suis capitaine, et si je ne dois pas abandonner mon bateau, au moins je serai plus malin que ce démon, ou ce monstre, car j'attacherai mes mains à la roue quand mes forces commenceront à décliner, et avec mes mains j'attacherai ce qu'Il - ce que Ça - ne peut pas toucher; et alors, que le vent me soit favorable ou non, je sauverai mon âme, et mon honneur de capitaine. Je commence à faiblir, et la nuit approche. S'Il peut me regarder en face encore une fois, je n'aurai peut-être pas le temps d'agir…. Si nous faisons naufrage, peut-être que cette bouteille sera retrouvée, et ceux qui la trouveront pourront peut-être comprendre; sinon… eh bien, tous les hommes sauront que j'ai été fidèle au poste. Que Dieu, la Sainte Vierge et tous les saints viennent en aide à une pauvre âme ignorante essayant de faire son devoir… » Bien sûr, il est difficile de se faire une opinion sur le coupable. Il n'y a aucune autre preuve; et quant à savoir si l'homme a lui- même commis les meurtres, il est impossible de rien en dire. Les gens d'ici tiennent tous pour certain que le capitaine est un héros et qu'il mérite des funérailles nationales. Il est déjà prévu que son corps soit escorté par un cortège de bateaux, le long de l'Esk, puis qu'il soit ramené à Tate Hill Pier et monté par les marches jusqu'à l'abbaye; car il doit être enterré au cimetière de la falaise. Au grand dam des gens d'ici, on n'a retrouvé aucune trace du grand chien, qui jouit actuellement d'une grande popularité auprès de l'opinion publique, et qui aurait sans doute été adopté par la ville. Demain, nous assisterons aux obsèques, et ainsi se terminera ce nouvel opus des « mystères de la mer ».

Journal de Mina Murray 8 août Lucy s'est agitée toute la nuit, et je n'ai pas fermé l'oeil non plus. La tempête était effrayante, et lorsqu'elle mugissait par la cheminée, cela me faisait trembler. Le vacarme du vent ressemblait à des coups de feu lointains. Assez curieusement, Lucy ne s'est pas réveillée; mais elle s'est levée deux fois et s'est habillée. Heureusement, à chaque fois je me suis éveillée à temps pour la déshabiller sans l'éveiller, afin de la remettre au lit. C'est une chose vraiment étrange, que ce somnambulisme, car dès que sa volonté est contrariée de manière physique, son intention - si toutefois on peut appeler ça une intention - disparaît, elle abandonne, et reprend presque exactement le cours ordinaire de sa vie. Tôt ce matin nous nous sommes levées toutes les deux et sommes descendues au port pour voir si rien n'était arrivé pendant la nuit. Il y avait très peu de gens dehors, et bien que le soleil brillât, et que l'air fût pur et frais, des vagues impressionnantes, qui paraissaient noires par le contraste de leur écume neigeuse, forçaient le passage dans l'étroite entrée du port - comme un homme brutal à travers une foule. Je me suis sentie soulagée de savoir que Jonathan n'était pas en mer la nuit dernière, mais sur la terre ferme. Mais, en fait, est-il sur terre ou en mer ? Où est-il, comment va-t-il ? Je deviens terriblement inquiète à son sujet. Si seulement je savais quoi faire, si je pouvais faire quoi que ce soit ! 10 août Les obsèques du pauvre capitaine ont été très touchantes. Tous les bateaux du port s'étaient donné le mot, et le cercueil fut porté par les capitaines, sur tout le chemin de Tate Hill Pier jusqu'au cimetière. Lucy est venue avec moi, et nous sommes allées très tôt à notre bon vieux poste d'observation, d'où nous pûmes voir le cortège de bateaux qui remontaient la rivière jusqu'au Viaduc et redescendaient ensuite. Nous avions une vue imprenable et suivîmes la procession des yeux pratiquement tout du long. Le pauvre homme fut déposé à sa dernière demeure assez près de l'endroit où nous nous tenions, si bien que nous fûmes aux premières loges. La pauvre Lucy était bouleversée. Elle était agitée et mal à l'aise, pendant toute la cérémonie, et je ne peux m'empêcher de penser qu'elle est encore sous l'emprise de son rêve. Il y a dans son attitude une chose bien étrange : elle refuse d'admettre, face à moi, qu'il existe une cause à son agitation - ou, s'il en existe une, elle prétend qu'elle ne la comprend pas elle-même. Une raison supplémentaire de cette agitation pourrait être le fait que ce pauvre Mister Swales a été retrouvé mort ce matin, sur notre banc, la nuque brisée. Il était manifestement tombé, selon les dires du médecin, la tête en arrière, sous le coup d'une grande frayeur, car il y avait une expression de peur et d'horreur sur son visage qui, à ce qu'on dit, a fait frissonner les hommes. Pauvre vieil homme ! Peut-être a-t-il vu la Mort, avec ses yeux mourants ! Lucy est si douce et si sensible qu'elle ressent toutes les influences extérieures avec une acuité supérieure à la normale. A l'instant, elle était bouleversée par une petite chose à laquelle je n'accordais pas d'importance, bien que j'aime beaucoup les animaux. L'un des hommes qui viennent souvent ici pour regarder les bateaux était toujours suivi par son chien. Le chien est toujours avec lui, ne le quitte pas d'une semelle. Ils sont tous deux des êtres tranquilles, et je n'ai jamais vu l'homme s'énerver, ni entendu le chien aboyer. Pendant la cérémonie cependant, le chien a refusé de s'approcher de son maître, qui était sur le banc avec nous, et s'est tenu à quelques mètres, couinant et aboyant. Son maître lui a parlé gentiment, puis plus fermement, et enfin il s'est énervé; mais il n'a obtenu ni que son chien le suive, ni qu'il s'arrête de faire du bruit. Il était dans une sorte de furie, les yeux sauvages, et tous les poils hérissés comme la un chat sur le pied de guerre.

Part (19) Anteil (19) Part (19) Parte (19) Deel (19) Parte (19)

Le second et moi sommes tombés d'accord pour avoir une arme sur nous en permanence à partir de maintenant, pour parer à toute éventualité. Io e l'XO abbiamo deciso di portare sempre con noi una pistola, per ogni evenienza. 30 juillet - Dernière nuit du voyage. Soulagés d'approcher des côtes anglaises. Beau temps, toutes voiles déployées. Me suis retiré, épuisé; dormi profondément; réveillé par le second disant que deux hommes de quart et le barreur sont portés disparus. Il ne reste que moi-même, le second et deux hommes d'équipage pour faire naviguer le bateau. 1er août - Deux jours de brume, et pas une voile en vue. J'avais espéré dans la Manche trouver une forme de secours ou un refuge. Comme nous manquons de bras pour manoeuvrer les voiles, nous devons naviguer vent arrière. Je n'ose les abaisser, de peur de ne pas réussir à les hisser à nouveau. Non oso abbassarli per paura di non poterli più alzare. Il me semble que nous nous précipitons vers un destin fatal. Le second est à présent le plus démoralisé de tous. Sa nature plus forte semble l'avoir miné de l'intérieur. Les hommes d'équipage sont au- delà de la peur, ils abattent leur travail en faisant preuve d'un grand sang-froid et et de patience, l'esprit résigné au pire. Ils sont Russes, et lui, Roumain. 2 août, minuit - Réveillé d'une courte sieste par un cri, qui semblait provenir de babord. Je n'ai rien pu voir dans le brouillard. Me suis rué sur le pont, où j'ai heurté le second. Mi sono precipitato sul ponte, dove ho colpito il compagno. Il m'a dit avoir entendu un cri et couru, mais il n'y a aucun homme au quart. Un de plus, disparu. Seigneur, aidez-nous ! Le second dit que nous devons avoir passé Straits of Dover, parce que dans une trouée du brouillard, il a aperçu North Foreland, juste au moment où il a entendu le cri. Si c'est vrai, nous sommes maintenant dans la Mer du Nord, et Dieu seul peut nous guider à travers ce brouillard qui paraît nous coller à la peau et se déplacer avec nous; et Dieu, à ce qu'il semble, nous a abandonnés. 3 août - A minuit j'ai été relever l'homme à la barre, et quand je suis arrivé je n'ai trouvé personne. Le vent était constant, et comme nous étions vent arrière, il n'y avait pas d'embardées. Je n'ai pas osé laisser la barre, et j'ai crié pour appeler le second. Après quelques secondes il s'est précipité sur le pont dans son pantalon de flanelle. Il avait l'oeil fou et hagard, et j'ai eu grand peur qu'il n'eût perdu le sentiment. Il s'est approché de moi et a murmuré d'une voix rauque, sa bouche à mon oreille, comme s'il craignait que l'air-même pût l'entendre : « La chose est ici - Je le sais, maintenant. Pendant le quart, la nuit dernière, je l'ai vue, semblable à un homme, grand et maigre, et d'une pâleur spectrale. Elle était à la proue, et regardait dehors. Je me suis glissé derrière elle, et l'ai frappée de mon couteau, mais le couteau l'a traversée, comme un fantôme! » Tandis qu'il parlait, il a pris son couteau et l'a furieusement agité dans l'espace. Puis il a repris : « Mais elle est là, et je la trouverai. Elle est dans les cales, peut-être dans l'une des boîtes. È nelle stive, forse in una delle scatole. Je les dévisserai une par une et je verrai bien. Occupez-vous du navire. » Et, avec un regard de mise en garde et le doigt sur sa lèvre, il est descendu. Un vent tourbillonnant était en train de se lever, et je ne pouvais pas laisser la barre. Je l'ai vu revenir sur le pont avec une boîte à outils et une lanterne, puis descendre l'escalier avant. Il est complètement fou, fou à lier, et il est inutile d'essayer de l'arrêter. Il ne peut pas faire de mal à ces boîtes : selon le registre elles contiennent de la glaise; s'il les soulève, ce ne sera pas dangereux. Non può fare alcun male a queste scatole: secondo il registro, contengono argilla; se le solleva, non sarà pericoloso. Alors je préfère rester là, veiller sur la barre, et écrire ces lignes. Je ne peux que m'en remettre à Dieu et attendre que le brouillard s'éclaircisse. Alors, si je n'arrive pas à piloter jusqu'à un port avec le vent qu'il y a, j'abaisserai les voiles en coupant tout, et j'enverrai un signal de détresse.

Tout est presque fini maintenant. Juste quand j'espérais que le second allait ressortir un peu plus calme - car je l'avais entendu marteler quelque chose, et je me disais que le travail physique lui ferait du bien - alors du fond de l'escalier monta un soudain hurlement de terreur, qui m'a glacé le sang, et il a surgi comme un boulet de canon - un fou furieux, avec les yeux roulant hors des orbites et le visage convulsé par la peur. « Sauvez-moi! " ¡Sálvame! Sauvez-moi! ¡Sálvame! » hurla-t-il, puis il porta les yeux sur la nappe de brouillard. Son horreur se changea en désespoir, et avec une voix ferme il dit : « Vous devriez venir aussi, capitaine, avant qu'il ne soit trop tard. Il est là. Je connais le secret maintenant. La mer me sauvera de lui, et c'est tout ce qui me reste! » Avant que je pusse dire un mot, ou esquisser un mouvement pour l'attraper, il escalada le bord et se jeta délibérément dans les flots. Je suppose que je connais le secret aussi, maintenant. C'est ce fou qui a tué les hommes un par un, et maintenant il les a suivis lui-même dans la mort. Dieu me vienne en aide ! Comment vais-je justifier toutes ces horreurs quand je rentrerai au port ? Quand je rentrerai au port ! Cela arrivera-t-il jamais ? 4 août - Toujours du brouillard, que le lever de soleil n'arrive pas à percer. Je sais que c'est l'aube parce que je suis marin, sinon je ne le saurais pas. Je n'ai pas osé descendre, je n'ose pas laisser la barre; alors je suis resté ainsi toute la nuit, et au plus noir de la nuit je l'ai vu - Lui ! Non osavo scendere, non osavo lasciare il timone; così rimasi lì tutta la notte, e nella parte più buia della notte lo vidi - Lui! Dieu me pardonne, mais le second a eu raison de sauter par dessus bord, il valait mieux mourir comme un homme; mourir comme un marin dans l'eau bleue, c'est une mort qu'on peut accepter. Mais je suis capitaine, et si je ne dois pas abandonner mon bateau, au moins je serai plus malin que ce démon, ou ce monstre, car j'attacherai mes mains à la roue quand mes forces commenceront à décliner, et avec mes mains j'attacherai ce qu'Il - ce que Ça - ne peut pas toucher; et alors, que le vent me soit favorable ou non, je sauverai mon âme, et mon honneur de capitaine. Je commence à faiblir, et la nuit approche. S'Il peut me regarder en face encore une fois, je n'aurai peut-être pas le temps d'agir…. Si nous faisons naufrage, peut-être que cette bouteille sera retrouvée, et ceux qui la trouveront pourront peut-être comprendre; sinon… eh bien, tous les hommes sauront que j'ai été fidèle au poste. Que Dieu, la Sainte Vierge et tous les saints viennent en aide à une pauvre âme ignorante essayant de faire son devoir… » Bien sûr, il est difficile de se faire une opinion sur le coupable. Il n'y a aucune autre preuve; et quant à savoir si l'homme a lui- même commis les meurtres, il est impossible de rien en dire. Les gens d'ici tiennent tous pour certain que le capitaine est un héros et qu'il mérite des funérailles nationales. Il est déjà prévu que son corps soit escorté par un cortège de bateaux, le long de l'Esk, puis qu'il soit ramené à Tate Hill Pier et monté par les marches jusqu'à l'abbaye; car il doit être enterré au cimetière de la falaise. Au grand dam des gens d'ici, on n'a retrouvé aucune trace du grand chien, qui jouit actuellement d'une grande popularité auprès de l'opinion publique, et qui aurait sans doute été adopté par la ville. Demain, nous assisterons aux obsèques, et ainsi se terminera ce nouvel opus des « mystères de la mer ».

Journal de Mina Murray 8 août Lucy s'est agitée toute la nuit, et je n'ai pas fermé l'oeil non plus. Diario di Mina Murray 8 agosto Lucy è stata inquieta tutta la notte e anch'io non ho chiuso occhio. La tempête était effrayante, et lorsqu'elle mugissait par la cheminée, cela me faisait trembler. Le vacarme du vent ressemblait à des coups de feu lointains. Assez curieusement, Lucy ne s'est pas réveillée; mais elle s'est levée deux fois et s'est habillée. Heureusement, à chaque fois je me suis éveillée à temps pour la déshabiller sans l'éveiller, afin de la remettre au lit. C'est une chose vraiment étrange, que ce somnambulisme, car dès que sa volonté est contrariée de manière physique, son intention - si toutefois on peut appeler ça une intention - disparaît, elle abandonne, et reprend presque exactement le cours ordinaire de sa vie. Tôt ce matin nous nous sommes levées toutes les deux et sommes descendues au port pour voir si rien n'était arrivé pendant la nuit. Il y avait très peu de gens dehors, et bien que le soleil brillât, et que l'air fût pur et frais, des vagues impressionnantes, qui paraissaient noires par le contraste de leur écume neigeuse, forçaient le passage dans l'étroite entrée du port - comme un homme brutal à travers une foule. Je me suis sentie soulagée de savoir que Jonathan n'était pas en mer la nuit dernière, mais sur la terre ferme. Mais, en fait, est-il sur terre ou en mer ? Où est-il, comment va-t-il ? Je deviens terriblement inquiète à son sujet. Si seulement je savais quoi faire, si je pouvais faire quoi que ce soit ! 10 août Les obsèques du pauvre capitaine ont été très touchantes. Tous les bateaux du port s'étaient donné le mot, et le cercueil fut porté par les capitaines, sur tout le chemin de Tate Hill Pier jusqu'au cimetière. Lucy est venue avec moi, et nous sommes allées très tôt à notre bon vieux poste d'observation, d'où nous pûmes voir le cortège de bateaux qui remontaient la rivière jusqu'au Viaduc et redescendaient ensuite. Nous avions une vue imprenable et suivîmes la procession des yeux pratiquement tout du long. Le pauvre homme fut déposé à sa dernière demeure assez près de l'endroit où nous nous tenions, si bien que nous fûmes aux premières loges. La pauvre Lucy était bouleversée. Elle était agitée et mal à l'aise, pendant toute la cérémonie, et je ne peux m'empêcher de penser qu'elle est encore sous l'emprise de son rêve. Il y a dans son attitude une chose bien étrange : elle refuse d'admettre, face à moi, qu'il existe une cause à son agitation - ou, s'il en existe une, elle prétend qu'elle ne la comprend pas elle-même. Une raison supplémentaire de cette agitation pourrait être le fait que ce pauvre Mister Swales a été retrouvé mort ce matin, sur notre banc, la nuque brisée. Il était manifestement tombé, selon les dires du médecin, la tête en arrière, sous le coup d'une grande frayeur, car il y avait une expression de peur et d'horreur sur son visage qui, à ce qu'on dit, a fait frissonner les hommes. Pauvre vieil homme ! Povero vecchio! Peut-être a-t-il vu la Mort, avec ses yeux mourants ! Lucy est si douce et si sensible qu'elle ressent toutes les influences extérieures avec une acuité supérieure à la normale. A l'instant, elle était bouleversée par une petite chose à laquelle je n'accordais pas d'importance, bien que j'aime beaucoup les animaux. Just now, she was upset about a little thing I didn't care about, although I do love animals. L'un des hommes qui viennent souvent ici pour regarder les bateaux était toujours suivi par son chien. Le chien est toujours avec lui, ne le quitte pas d'une semelle. Il cane è sempre con lui, non lo abbandona mai. Ils sont tous deux des êtres tranquilles, et je n'ai jamais vu l'homme s'énerver, ni entendu le chien aboyer. Pendant la cérémonie cependant, le chien a refusé de s'approcher de son maître, qui était sur le banc avec nous, et s'est tenu à quelques mètres, couinant et aboyant. Son maître lui a parlé gentiment, puis plus fermement, et enfin il s'est énervé; mais il n'a obtenu ni que son chien le suive, ni qu'il s'arrête de faire du bruit. Il était dans une sorte de furie, les yeux sauvages, et tous les poils hérissés comme la un chat sur le pied de guerre.