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Nota Bene, Les mérovingiens : les premiers rois du Moyen Âge ! (2)

Les mérovingiens : les premiers rois du Moyen Âge ! (2)

la valeur de l'animal et les frais de poursuite.” On peut avoir des exemples concernant les chiens,

les taureaux, les abeilles ou encore les cerfs. On y réglemente aussi les vols de céréales,

de fruits et de légumes. On y apprend également que les esclaves étaient protégés :

Article I : “Quiconque aura enlevé un esclave,

mâle ou femme, et sera convaincu de ce crime, sera condamné à payer 1400 deniers,

ou 35 sous d'or, outre la valeur de l'esclave et les frais de poursuite”.

La somme de l'amende varie en fonction des savoir-faire de l'esclave. Le montant sera

par exemple plus élevé pour celui qui travaille à la mise en forme des métaux,

qui est un métier important dans les sociétés du haut Moyen âge.

Et attention, il est très coûteux de s'en prendre à quelqu'un placé sous la protection du roi :

Article V : “Si la jeune fille enlevée avait été placé sous la protection spéciale du roi,

le ravisseur sera obligé de payer, à titre de Fred, 2500 deniers, ou 62 sous d'or et demi.”

Je le précise, un Fred sans ce cas là, c'est une somme que l'on doit,

pas un présentateur de C'est par Sorcier. Alors je vous disais que cette loi salique

était importante pour l'affirmation de l'identité des francs. Et ça se confirme clairement par

certains articles qui s'appliquent aux francs et d'autres aux gallo-romains.

L'Article II nous dit : “Si un romain a dévalisé un Franc,

il sera condamné à payer 2500 deniers, ou 62 sous d'or et demi.”

L'Article III rajoute : “Si un Franc a dévalisé un Romain,

il sera condamné à payer 1200 deniers, ou 30 sous d'or.”

On voit tout de suite à qui va la préférence de Clovis.Chez les Francs de l'époque mérovingienne,

en bon peuple guerrier, on se définit donc par son affiliation ethnique et on

s'impose avec les armes qui accompagnent l'individu jusque dans sa sépulture.

Il y a toutefois une petite différence géographique. Au sud de la Loire,

les pratiques d'inhumation sont encore fortement romanisées : les sépultures ont livré très peu

d'armement pour cette période, au contraire des nécropoles situées au nord de la Loire.

Les épées ont sans doute pris une place centrale dans certains rituels,

qu'on connaît mal, faute de sources. Par exemple, le roi franc a une garde privée,

la trustis, formée des antrustions. Ces guerriers ont prêté serment devant

témoins auprès du roi dans un rite qui les mettait en scène avec leur épée.

C'est en tout cas ce que nous dit un texte du VIIe siècle, même si on ignore le déroulement

effectif de ce rituel de fidélité. Ca nous fait une belle jambe donc...

Des chercheurs ont proposé l'hypothèse que durant ce rite, le roi remettait à

ses antrustions un anneau qu'ils faisaient ensuite fixer à leur pommeau d'épée par un

forgeron. Un des textes juridiques mérovingiens les plus connus est le formulaire de Marculf et

il ne fait aucune mention de cette pratique, les chercheurs s'appuient sur les épées dotées

de pommeaux à anneaux qui ont été mises au jour en Gaule, dans les îles britanniques,

en Scandinavie, ou encore en Allemagne. Ces anneaux pourraient exprimer le statut

privilégié des guerriers du roi, mais également les gens d'armes des seigneurs,

en symbolisant leurs faits d'armes et en les distinguant des autres dans ces

sociétés où la compétition pour la puissance est extrêmement important.

C'est à l'épée que ces anneaux seraient fixés, en tant que symboles de la puissance du guerrier.

Certains ont également avancé que cet anneau avait un but fonctionnel (comme

accrocher un élément), ou encore des vertus magiques pour les propriétaires des objets.

On a donc affaire à des Francs organisés, assez loin de l'image chaotique qu'on a pu en avoir.

Leur système de représentation social est bien rodé, et leur a permis de s'imposer

peu à peu en tant que peuple unifié en Gaule. Un autre aspect important de l'organisation

sociale des francs est l'organisation de la famille. Cette famille laïque se

définit par des liens et des groupements, qui ne sont pas seulement régis par les liens de

sang. Il existe des liens générationnels au sens large qui intègrent beaux-frères,

belles-sœurs, les adoptions, les enfants des épouses, des concubines...

Bref c'est assez large et c'est important de le souligner. Le lien social définissant la parenté,

les amitiés et les fidélités, il est essentiel durant le haut Moyen

ge puisqu'il assure le pouvoir, la sécurité des groupes et surtout celle des individus.

Le mariage est un outil stratégique pour les élites, afin de se rapprocher

d'un autre groupe familial, voire d'un autre groupe ethnique. Clovis épouse par

exemple une princesse burgonde, Clothilde, et s'assure ainsi une alliance avec sa famille.

Et plus une famille possède de richesses, plus elle est puissante. Une compétition

féroce entre les élites vise donc à acquérir de nouvelles richesses, à les accumuler voir à en

donner. Et pour obtenir de nouvelles richesses, on peut en fabriquer, en recevoir par des dons,

en prélever sur son peuple voir aller les chercher directement chez le voisin.

Lorsque deux partis s'unissent, des stratégies sont mises en place et on

observe l'importance des biens précieux et de la forte mobilité des élites sur le territoire,

avec qui ces objets vont voyager. Et tout ça nous a permis de mieux comprendre les pratiques

qui consistaient à déposer ces richesses dans les sépultures. Et oui, car nous ne pouvons pas faire

un tour d'horizon de l'époque mérovingienne sans aborder la question des funérailles.

Jusqu'au XXe siècle, les seuls vestiges de cette période que l'on arrivait à

identifier étaient les sépultures. L'habitat passait inaperçu pour diverses raisons,

dont le fait qu'il était assez dispersé sur le territoire et qu'il s'agissait la

plupart du temps de structures en matériaux périssables comme du bois, de la terre etc.

Des traces qui peuvent passer totalement inaperçues quand

on cherche seulement des structures en pierre !

Les « mérovingiens » (mais vous l'avez compris maintenant, on parle plutôt des francs ou juste

de la période du haut Moyen ge), sont connus essentiellement pour les trésors d'orfèvrerie

que l'on a retrouvé dans leurs sépultures. On a longtemps cru qu'ils inhumaient leurs morts

dans leurs plus beaux habits, accompagnés des objets auxquels ils tenaient le plus.

La recherche récente en archéologie prouve que les funérailles étaient au contraire

une véritable mise en scène du mort, destinée évidemment en premier lieu à ce que la famille

puisse débuter son deuil. Mais maintenant nous savons également que les funérailles

étaient un lieu de rencontre, un lieu où l'on pouvait afficher sa richesse,

son statut social voire son métier et ce pourquoi on était reconnu dans la communauté.

Et oui, la manipulation de la mémoire, du mythe familial,

ça fait parti de l'arsenal que peuvent déployer les élites pour affirmer leur

pouvoir. On cultive le souvenir et on efface ce que l'on veut faire tomber dans l'oubli.

Et bien évidemment, on a compris que certains objets transmis, comme des épées par exemple

pouvaient cristalliser le souvenir. On transmet, on arrange ou on réinvente l'histoire de ces

objets en créant une généalogie, quasi mythique, avec une figure du passé,

parfois très ancienne, peut-être un peu floue ou en évoquant seulement les anciens,

pour justifier sa position ou en revendiquer une. Car les objets, comme d'ailleurs les sépultures

et les lieux, sont des sources potentielles d'informations sur la famille qui les possédait.

Je parlais de ce concept dans l'épisode sur les épées légendaires justement,

c'est exactement la même chose ! Pour montrer que tu es un beau gosse qui pèse dans le game,

rien ne vaut de montrer l'épée de grand papy qui a démonté un

bataillon entier en la faisant tournoyer au dessus de sa tête.

En revanche, on a longtemps cru que les objets pouvaient nous renseigner

sur l'identité ethnique des défunts. Mais on se rend vite compte qu'entre les alliances,

les mariages ou encore les rituels de fidélité, les objets pouvaient circuler et se retrouver

loin de leur lieu de création. Lorsque les objets sont découverts dans des tombes,

on peut donc plutôt les voir comme une sorte de fiche d'identification que les défunts,

ou la famille du défunt, voulaient que l'on trouve. Peu importe si cette identité et

toutes les valeurs qui en découlent sont vraies ou pas, on est là face à une auto-représentation.

Un peu comme si moi, Benjamin Brillaud, je me faisais enterrer avec des bagouzes en or

aux doigts, un veston en soie et des chéquiers qui débordent des poches pour me faire passer

pour un type qui avait beaucoup d'argent et de pouvoir durant mon vivant... Alors

que tout le monde sait que j'aime porter des sweats à capuche hein, mais dans l'hypothèse

où des gens se pencheraient sur ma tombe, ça peut donner plus de crédit à ma famille ou

au souvenir que je veux laisser de moi. Si c'est l'image que je veux transmettre bien

sûr..ce qui n'est pas le cas...perso je me ferai enterrer avec un gros pc et un triple screen.

Alors bien évidemment, faut pas tout surinterpréter non plus,

un enterrement reste un enterrement et un objet laissé dans une tombe peut très bien l'être

pour des raisons sentimentales et pas pour des raisons symboliques de propagande post-mortem !

Durant le haut Moyen ge, les sociétés se sont donc structurées grâce à des groupements d'individus

dont le pouvoir reposait essentiellement sur la possession de la terre et les charges publiques.

A cette période, on n'avait pas une royauté telle que celle de l'époque moderne, où tout repose sur

le roi qui protège en retour tout le monde, en s'inscrivant dans une hiérarchie verticale assez

stricte. Non, même si le roi est l'autorité, les aristocrates ont des pouvoirs sur les

terres et les hommes. Ici, les liens horizontaux entre les individus structurent les sociétés,

d'où l'importance des contrats d'alliance, des échanges et de la compétition entre les

groupes à n'importe quelle occasion. Car les plus riches propriétaires, les aristocrates,

étaient appelés au palais par le roi et s'y voyaient confier des missions de justice,

d'administration et de prélèvements fiscaux. Ce palais, l'endroit qui fait donc le lien

entre l'autorité du roi et les aristocrates, va devenir sous les mérovingiens une place

politique centrale. On comprend donc pourquoi rapidement le “ trône” du maire du palais devient

une fonction très convoitée, puisqu'elle assure un pouvoir important à son occupant

qui devient de fait le major domus, le n°1 de la maison. C'est d'ailleurs grâce à cette fonction

qu'une nouvelle dynastie va peu à peu s'imposer, vous les avez reconnu : ce sont les pippinides.

Et voilà les amis. Certes on a pas autant de sources écrites sur le Haut Moyen ge que sur le

reste de la période médiévale, mais vous voyez, en creusant un peu les sources à disposition,

notamment grâce à l'archéologie, on en apprend quand même un peu !

J'espère que cet épisode sur les mérovingiens vous aura plu, n'hésitez pas le partager si

c'est le cas, ça fait vraiment plaisir ! Merci à Julie Renou, docteure spécialisé sur le Haut

Moyen ge et plus particulièrement sur la question du mobilier métallique, pour la préparation de

cette émission. On se retrouve très vite pour de nouvelles aventures sur Nota Bene, ciao !


Les mérovingiens : les premiers rois du Moyen Âge ! (2) The Merovingians: the first kings of the Middle Ages! (2) Os Merovíngios: os primeiros reis da Idade Média! (2)

la valeur de l'animal et les frais de poursuite.” On peut avoir des exemples concernant les chiens, den Wert des Tieres und die Kosten der Rechtsverfolgung.“ Wir können Beispiele für Hunde haben,

les taureaux, les abeilles ou encore les cerfs.  On y réglemente aussi les vols de céréales, Stiere, Bienen und Hirsche. Auch der Diebstahl von Getreide wird geregelt,

de fruits et de légumes. On y apprend  également que les esclaves étaient protégés : von Obst und Gemüse. Man erfährt auch, dass die Sklaven geschützt waren :

Article I : “Quiconque aura enlevé un esclave, Artikel I: "Wer einen Sklaven entführt,

mâle ou femme, et sera convaincu de ce  crime, sera condamné à payer 1400 deniers, männlich oder weiblich ist und dieses Verbrechens überführt wird, soll zu 1400 Denaren verurteilt werden,

ou 35 sous d'or, outre la valeur de  l'esclave et les frais de poursuite”.

La somme de l'amende varie en fonction des  savoir-faire de l'esclave. Le montant sera

par exemple plus élevé pour celui qui  travaille à la mise en forme des métaux,

qui est un métier important dans les sociétés du haut Moyen âge.

Et attention, il est très coûteux de s'en prendre  à quelqu'un placé sous la protection du roi :

Article V : “Si la jeune fille enlevée avait  été placé sous la protection spéciale du roi,

le ravisseur sera obligé de payer, à titre de  Fred, 2500 deniers, ou 62 sous d'or et demi.” der Entführer wird verpflichtet sein, wie Fred, 2500 Denare oder 62,5 Goldsous zu zahlen.“

Je le précise, un Fred sans ce cas  là, c'est une somme que l'on doit, Ich stelle es fest, ein Fred ohne diesen Fall, es ist eine Summe, die man schuldet,

pas un présentateur de C'est par Sorcier. Alors je vous disais que cette loi salique kein Moderator von It's by Sorcerer. Also habe ich Ihnen gesagt, dass dieses Salic-Gesetz

était importante pour l'affirmation de l'identité  des francs. Et ça se confirme clairement par

certains articles qui s'appliquent aux  francs et d'autres aux gallo-romains. einige Artikel beziehen sich auf die Franken und andere auf die Gallo-Römer.

L'Article II nous dit : “Si  un romain a dévalisé un Franc,

il sera condamné à payer 2500  deniers, ou 62 sous d'or et demi.”

L'Article III rajoute : “Si  un Franc a dévalisé un Romain,

il sera condamné à payer 1200  deniers, ou 30 sous d'or.”

On voit tout de suite à qui va la préférence de  Clovis.Chez les Francs de l'époque mérovingienne, Wir sehen sofort, wen Chlodwig bevorzugt: Unter den Franken der Merowingerzeit

en bon peuple guerrier, on se définit  donc par son affiliation ethnique et on Als gutes Kriegervolk definieren wir uns daher über unsere ethnische Zugehörigkeit und wir

s'impose avec les armes qui accompagnent  l'individu jusque dans sa sépulture.

Il y a toutefois une petite différence  géographique. Au sud de la Loire,

les pratiques d'inhumation sont encore fortement  romanisées : les sépultures ont livré très peu

d'armement pour cette période, au contraire  des nécropoles situées au nord de la Loire.

Les épées ont sans doute pris une  place centrale dans certains rituels,

qu'on connaît mal, faute de sources. Par  exemple, le roi franc a une garde privée, über die wir mangels Quellen wenig wissen. Zum Beispiel hat der fränkische König eine private Wache,

la trustis, formée des antrustions.  Ces guerriers ont prêté serment devant

témoins auprès du roi dans un rite qui  les mettait en scène avec leur épée.

C'est en tout cas ce que nous dit un texte du  VIIe siècle, même si on ignore le déroulement

effectif de ce rituel de fidélité.  Ca nous fait une belle jambe donc...

Des chercheurs ont proposé l'hypothèse  que durant ce rite, le roi remettait à

ses antrustions un anneau qu'ils faisaient  ensuite fixer à leur pommeau d'épée par un seine Antrusts einen Ring, den sie dann mit a an ihrem Schwertknauf befestigt hatten

forgeron. Un des textes juridiques mérovingiens  les plus connus est le formulaire de Marculf et

il ne fait aucune mention de cette pratique,  les chercheurs s'appuient sur les épées dotées

de pommeaux à anneaux qui ont été mises au  jour en Gaule, dans les îles britanniques,

en Scandinavie, ou encore en Allemagne.  Ces anneaux pourraient exprimer le statut

privilégié des guerriers du roi, mais  également les gens d'armes des seigneurs,

en symbolisant leurs faits d'armes et  en les distinguant des autres dans ces

sociétés où la compétition pour la  puissance est extrêmement important.

C'est à l'épée que ces anneaux seraient fixés,  en tant que symboles de la puissance du guerrier.

Certains ont également avancé que cet  anneau avait un but fonctionnel (comme

accrocher un élément), ou encore des vertus  magiques pour les propriétaires des objets.

On a donc affaire à des Francs organisés, assez  loin de l'image chaotique qu'on a pu en avoir.

Leur système de représentation social est  bien rodé, et leur a permis de s'imposer

peu à peu en tant que peuple unifié en Gaule. Un autre aspect important de l'organisation

sociale des francs est l'organisation  de la famille. Cette famille laïque se

définit par des liens et des groupements, qui  ne sont pas seulement régis par les liens de

sang. Il existe des liens générationnels  au sens large qui intègrent beaux-frères,

belles-sœurs, les adoptions, les  enfants des épouses, des concubines...

Bref c'est assez large et c'est important de le  souligner. Le lien social définissant la parenté, Kurz gesagt, es ist ziemlich weit gefasst und es ist wichtig, es zu unterstreichen. Die soziale Bindung, die Verwandtschaft definiert,

les amitiés et les fidélités, il  est essentiel durant le haut Moyen

ge puisqu'il assure le pouvoir, la sécurité  des groupes et surtout celle des individus.

Le mariage est un outil stratégique  pour les élites, afin de se rapprocher

d'un autre groupe familial, voire d'un  autre groupe ethnique. Clovis épouse par

exemple une princesse burgonde, Clothilde, et  s'assure ainsi une alliance avec sa famille.

Et plus une famille possède de richesses,  plus elle est puissante. Une compétition

féroce entre les élites vise donc à acquérir de  nouvelles richesses, à les accumuler voir à en

donner. Et pour obtenir de nouvelles richesses,  on peut en fabriquer, en recevoir par des dons, geben. Und um neues Vermögen zu erlangen, können wir es schaffen, durch Spenden erhalten,

en prélever sur son peuple voir aller  les chercher directement chez le voisin.

Lorsque deux partis s'unissent, des  stratégies sont mises en place et on

observe l'importance des biens précieux et de  la forte mobilité des élites sur le territoire,

avec qui ces objets vont voyager. Et tout ça  nous a permis de mieux comprendre les pratiques mit wem diese Objekte reisen werden. Und all dies hat es uns ermöglicht, die Praktiken besser zu verstehen

qui consistaient à déposer ces richesses dans les  sépultures. Et oui, car nous ne pouvons pas faire

un tour d'horizon de l'époque mérovingienne  sans aborder la question des funérailles.

Jusqu'au XXe siècle, les seuls vestiges  de cette période que l'on arrivait à

identifier étaient les sépultures. L'habitat  passait inaperçu pour diverses raisons,

dont le fait qu'il était assez dispersé  sur le territoire et qu'il s'agissait la

plupart du temps de structures en matériaux  périssables comme du bois, de la terre etc.

Des traces qui peuvent passer  totalement inaperçues quand

on cherche seulement des structures en pierre !

Les « mérovingiens » (mais vous l'avez compris  maintenant, on parle plutôt des francs ou juste

de la période du haut Moyen ge), sont connus  essentiellement pour les trésors d'orfèvrerie

que l'on a retrouvé dans leurs sépultures. On  a longtemps cru qu'ils inhumaient leurs morts found in their graves. It was long believed that they buried their dead

dans leurs plus beaux habits, accompagnés  des objets auxquels ils tenaient le plus. in their most beautiful clothes, accompanied by the objects they valued the most.

La recherche récente en archéologie prouve  que les funérailles étaient au contraire

une véritable mise en scène du mort, destinée  évidemment en premier lieu à ce que la famille

puisse débuter son deuil. Mais maintenant  nous savons également que les funérailles

étaient un lieu de rencontre, un lieu  où l'on pouvait afficher sa richesse,

son statut social voire son métier et ce  pourquoi on était reconnu dans la communauté.

Et oui, la manipulation de la  mémoire, du mythe familial,

ça fait parti de l'arsenal que peuvent  déployer les élites pour affirmer leur

pouvoir. On cultive le souvenir et on efface  ce que l'on veut faire tomber dans l'oubli.

Et bien évidemment, on a compris que certains  objets transmis, comme des épées par exemple

pouvaient cristalliser le souvenir. On transmet,  on arrange ou on réinvente l'histoire de ces

objets en créant une généalogie, quasi  mythique, avec une figure du passé,

parfois très ancienne, peut-être un peu  floue ou en évoquant seulement les anciens, manchmal sehr alt, vielleicht etwas vage oder nur an die alten erinnernd,

pour justifier sa position ou en revendiquer une.  Car les objets, comme d'ailleurs les sépultures

et les lieux, sont des sources potentielles  d'informations sur la famille qui les possédait.

Je parlais de ce concept dans l'épisode  sur les épées légendaires justement, Ich habe genau über dieses Konzept in der Folge über die legendären Schwerter gesprochen,

c'est exactement la même chose ! Pour montrer  que tu es un beau gosse qui pèse dans le game, es ist genau dasselbe! Um zu zeigen, dass Sie ein hübsches Kind sind, das im Spiel wiegt,

rien ne vaut de montrer l'épée  de grand papy qui a démonté un nothing beats showing grandpa's sword that dismantled a

bataillon entier en la faisant  tournoyer au dessus de sa tête. entire battalion, twirling it above his head.

En revanche, on a longtemps cru que  les objets pouvaient nous renseigner

sur l'identité ethnique des défunts. Mais on  se rend vite compte qu'entre les alliances,

les mariages ou encore les rituels de fidélité,  les objets pouvaient circuler et se retrouver

loin de leur lieu de création. Lorsque les  objets sont découverts dans des tombes,

on peut donc plutôt les voir comme une sorte  de fiche d'identification que les défunts,

ou la famille du défunt, voulaient que l'on  trouve. Peu importe si cette identité et

toutes les valeurs qui en découlent sont vraies  ou pas, on est là face à une auto-représentation. ob alle daraus resultierenden Werte wahr sind oder nicht, wir stehen vor einer Selbstdarstellung.

Un peu comme si moi, Benjamin Brillaud, je  me faisais enterrer avec des bagouzes en or

aux doigts, un veston en soie et des chéquiers  qui débordent des poches pour me faire passer fingers, a silk jacket and checkbooks overflowing from the pockets to make me pass

pour un type qui avait beaucoup d'argent  et de pouvoir durant mon vivant... Alors für einen Kerl, der zu meinen Lebzeiten viel Geld und Macht hatte... Also

que tout le monde sait que j'aime porter des  sweats à capuche hein, mais dans l'hypothèse that everyone knows i like to wear hoodies huh, but assuming

où des gens se pencheraient sur ma tombe, ça  peut donner plus de crédit à ma famille ou where people would look at my grave, it can give more credit to my family or

au souvenir que je veux laisser de moi. Si  c'est l'image que je veux transmettre bien

sûr..ce qui n'est pas le cas...perso je me ferai  enterrer avec un gros pc et un triple screen.

Alors bien évidemment, faut pas  tout surinterpréter non plus,

un enterrement reste un enterrement et un objet  laissé dans une tombe peut très bien l'être Eine Beerdigung bleibt eine Beerdigung, und ein Gegenstand, der in einem Grab zurückgelassen wird, kann sehr wohl eine Beerdigung sein

pour des raisons sentimentales et pas pour des  raisons symboliques de propagande post-mortem !

Durant le haut Moyen ge, les sociétés se sont donc  structurées grâce à des groupements d'individus Im Hochmittelalter wurden Gesellschaften daher durch Gruppen von Individuen strukturiert

dont le pouvoir reposait essentiellement sur la  possession de la terre et les charges publiques.

A cette période, on n'avait pas une royauté telle  que celle de l'époque moderne, où tout repose sur

le roi qui protège en retour tout le monde, en  s'inscrivant dans une hiérarchie verticale assez

stricte. Non, même si le roi est l'autorité,  les aristocrates ont des pouvoirs sur les

terres et les hommes. Ici, les liens horizontaux  entre les individus structurent les sociétés,

d'où l'importance des contrats d'alliance,  des échanges et de la compétition entre les

groupes à n'importe quelle occasion. Car les  plus riches propriétaires, les aristocrates,

étaient appelés au palais par le roi et s'y  voyaient confier des missions de justice,

d'administration et de prélèvements fiscaux.  Ce palais, l'endroit qui fait donc le lien

entre l'autorité du roi et les aristocrates,  va devenir sous les mérovingiens une place

politique centrale. On comprend donc pourquoi  rapidement le “ trône” du maire du palais devient

une fonction très convoitée, puisqu'elle  assure un pouvoir important à son occupant

qui devient de fait le major domus, le n°1 de la  maison. C'est d'ailleurs grâce à cette fonction

qu'une nouvelle dynastie va peu à peu s'imposer,  vous les avez reconnu : ce sont les pippinides. that a new dynasty will gradually impose itself, you have recognized them: they are the Pippinids.

Et voilà les amis. Certes on a pas autant de  sources écrites sur le Haut Moyen ge que sur le

reste de la période médiévale, mais vous voyez,  en creusant un peu les sources à disposition,

notamment grâce à l'archéologie,  on en apprend quand même un peu !

J'espère que cet épisode sur les mérovingiens  vous aura plu, n'hésitez pas le partager si

c'est le cas, ça fait vraiment plaisir ! Merci  à Julie Renou, docteure spécialisé sur le Haut

Moyen ge et plus particulièrement sur la question  du mobilier métallique, pour la préparation de

cette émission. On se retrouve très vite pour  de nouvelles aventures sur Nota Bene, ciao !