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Histoire d'Europe et du monde: "Nota Bene", Les Elfes : du Moyen Âge à la pop Culture (1)

Les Elfes : du Moyen Âge à la pop Culture (1)

Cet épisode est sponsorisé par les éditions Hachette Heroes qui viennent de sortir un

nouvel ouvrage dédié à Tolkien et plus particulièrement aux Hobbits,

“Les hobbits de Tolkien”, par David Day qui est déjà l'auteur de plusieurs ouvrages sur

Tolkien comme les batailles de Tolkien ou encore les Héros de Tolkien. Pour tout savoir sur les

fumeurs de pipe aux pieds poilus, et je ne parle pas de moi, cliquez sur le lien en description

pour commander l'ouvrage ou retrouvez les en librairie. On se retrouve en fin de

vidéo pour en savoir plus ! Très bon épisode ! Mes chers camarades bien le bonjour ! Quand on

évoque les elfes, on pense tous directement à ceux inventés par Tolkien, notamment de

fiers archers comme Legolas , qui bravent de nombreux dangers aux côtés d'Aragorn et de

Gimli et qui font du surf sur des boucliers en tuant moultes orcs. Pourtant, les elfes,

c'est pas que ça. D'ailleurs leurs représentations ont constamment évolué depuis le Moyen âge et même

encore aujourd'hui ils ne sont pas exactement pareil suivant les auteurs et les univers de

fantasy. Ouvrez bien vos oreilles pointues parce qu'on embarque dans un épisode assez dense !

Comme nous l'avons vu durant un précédent épisode consacré aux nains, il existe une

grande proximité dans les sources médiévales entre les nains et les elfes. Dans l'Edda en

Prose rédigée au XIIIe siècle en Islande par Snorri Sturluson, les nains vivent au pays

des elfes noirs . Les elfes ont aussi été confondus dans les textes anglais

tardifs avec les fées, un terme d'ancien français apparu au XIIe siècle, notamment à cause du succès

de la littérature épique en langue d'oïl dans les îles britanniques à partir de la conquête normande.

Dans Les Contes de Canterbury écrit par l'anglais Geoffrey Chaucer entre 1387 et 1400,

un chevalier flamand appelé sire Topaze part à la recherche d'une créature merveilleuse qui

est qualifiée soit de « reine des elfes », soit de « reine de la féerie ». Au XVIe siècle, dans

son poème La Reine des fées l'anglais Edmund Spenser emploie indifféremment

« elfe » et « fée » pour désigner la même chose. En Français, le substantif « elfe » reste pendant

longtemps mal connu, et on le traduit le plus souvent par fée. Publié en anglais en 1667 par

John Milton, “Le Paradis perdu” est adapté en français au XVIIIe siècle par Chateaubriand

pour le public français. Il traduit alors le binôme « faery elves » par « fée ».

Bref, tout ça est un peu confus et cette confusion perdure jusqu'au XXe siècle.

C'est Tolkien qui va à nouveau faire une nette distinction

entre les fées et les elfes après avoir hésité entre les deux termes.

Ce n'est en fin de compte qu'avec les traductions du Hobbit puis du Seigneur

des Anneaux dans les années 1970 et la diffusion de la fantasy en France que

le mot « elfe » s'impose alors en français et que l'on distingue nettement cette créature des fées.

Pour essayer de comprendre ce que sont les elfes sans la brouiller avec l'image des fées,

il faut d'abord se plonger dans les sources germaniques, scandinaves et surtout anglo-saxonnes.

Mais les œuvres littéraires les plus anciennes rédigées dans cette langue ne nous donnent que peu de

renseignements. Tout au plus on apprend dans le poème épique Beowulf, composé au

Xe siècle de notre ère, que les ylfe sont des êtres maléfiques qui accompagnent le monstre

Grendel en compagnie des orcneas, dont le noms inspirera les orques. Ce sont surtout les sources

médicinales qui nous renseignent le plus sur les elfes et leur caractère. La British Library

conserve plusieurs ouvrages des IX et Xe siècle appelés leechbook et qui

décrivent un mélange de remèdes naturels et de prières pour soigner des maladies.

L'un d'entre eux, le Lacnunga, présente un remède en ces termes :

"Voilà un breuvage saint contre la magie des elfes et contre les tribulations de l'Ennemi".

Un autre leechbook explique que :

Mais c'est quoi cette magie des elfes ? Bonne question ! Plusieurs autres

textes associent en tout cas la magie des elfes à des flèches provoquant la douleur.

Dans un passage du Lacnunga on peut ainsi lire :

On le voit bien, ce texte tisse un lien entre les elfes, les anciennes

religions païennes et les femmes. Au fur et à mesure que le christianisme s'impose,

ces éléments vont se combiner pour dresser un portrait assez négatif des elfes dont les

traits provoqueraient des douleurs et des maladies.

À partir du XVIe siècle, les autorités responsables de la chasse des sorcières les

associent aux jeteuses de sorts. À cette époque en Écosse on qualifie les pointes de flèches en

pierre datant de la Préhistoire de « traits d'elfe ». Pensant qu'elles étaient tombées du

ciel et envoyées par des créatures surnaturelles, on les employait de diverses manières. Certaines

étaient serties dans une monture en argent et, sans doute portées en pendentifs, servaient

d'amulette protectrice. D'autres étaient utilisées dans des rituels de magie noire.

En 1590, Katherene Ross, une femme noble, est accusée d'avoir tenté d'ensorceler

deux membres de sa famille en faisant, dit le résumé du procès, deux figurines d'argile sur

lequel elle jetait des flèches d'elfes. Pour l'aider dans la préparation de ce maléfice,

Katherene était assistée d'une autre femme, Marion, qui lui a conseillé « d'aller dans

les collines pour parler avec le peuple des elfes. » Des pratiques que l'on retrouve aussi

en Allemagne à la même période. En 1573, dans la ville de Nordhausen en Thuringe,

Katharina Wille confesse avoir envoyé six pairs d'elfes tourmenter un garçon.

Vous l'imaginez bien, ce lien entre les elfes et la magie noire inspire

des auteurs célèbres, comme Shakespeare par exemple !

Dans sa pièce Macbeth écrite en 1606, Hecate, la reine des sorcières, ordonne à d'autres jeteuses

de sorts de se placer : « Maintenant, tout autour du chaudron, — entonnez

une ronde comme les elfes et les fées, — pour enchanter ce que vous y avez mis. »

Le nom d'Hecate renvoie directement à la divinité païenne antique de la Lune et fait

écho à l'habitude qu'ont prise beaucoup d'auteurs dès le Moyen âge d'associer les elfes aux mythes

gréco-latins. Par exemple, dans le Fasciculus morum, un manuel du début du XIVe rédigé à

destination des prêtres, on peut lire que : « des souillons superstitieux […] affirment

voir en pleine nuit, dansant des rondes avec Dame Diane, déesse des païens,

les plus belles reines et d'autres filles que l'on appelle vulgairement des elfes. »

Mais en vrai ce lien apparaît avant l'An mil, où des auteurs chrétiens,

principalement issus des milieux ecclésiastiques,

avaient déjà tenté d'établir des correspondances entre les êtres merveilleux décrits par les poètes

gréco-latins et ceux évoquées dans les légendes nordiques, germaniques ou anglo-saxonnes.

Un glossaire rédigé sans doute au IXe siècle dresse un parallèle entre les nymphes et les

elfes communs, les dryades et les elfes des bois, les hamadryades et les elfes de l'eau,

les oréades et les elfes des montagnes et les naïades et les elfes des mers.

Dès le Moyen âge, les elfes sont donc associés à des temps et à des espaces bien précis.

Liées à la nuit, à travers l'évocation des déesses lunaires Hecate et Diane,

ces créatures apparaissent nettement dans des lieux sauvages et naturels (bois, montagnes),

loin de villages et des villes construits par l'homme. Des caractéristiques que l'on

retrouve dans le procès de Katherene Ross qui doit chercher la compagnie des elfes dans les collines.

En fait il n'y a rien de vraiment étonnant là dedans, dans l'imaginaire médiéval,

on associe très facilement les espaces naturels non dédiés à la culture, comme les forêts,

et les créatures merveilleuses et monstrueuses que vont devoir affronter les chevaliers des récits

épiques. On a un trio “elfe-nuit-forêt” qui va ensuite revenir régulièrement.

On retrouve par exemple ce trio dans la traduction allemande du terme cauchemars : albtraum,

qui littéralement, signifie « rêve d'elfe ». On l'aperçoit aussi dans

Le Paradis perdu de John Milton dans lequel ce dernier évoque :

« des fées [« faery elves »] dans leur orgie de minuit, à la lisière d'une forêt ou au bord

d'une fontaine, que quelque paysan en retard voit ou rêve qu'il voit,

tandis que sur sa tête la lune siège arbitre et incline plus près de la terre sa pâle course. »

Dans les années 1860, le peintre suédois August Malmström [PRONONCER Malmstreum ] réalise une

série de toiles qui montre des elfes dansants soit au crépuscule dans

une forêt , soit à la tombée de la nuit, entre des arbres tortueux et un marécage.

Mais au-delà des forêts, les elfes sont aussi associés aux îles.

l'Edda Poétique islandaise décrit le destin du forgeron Völund, qualifié de « prince des

Alfes ». Bien sûr les alfes ne font pas référence à un extraterrestre poilu qui mange des chats

mais bien aux elfes ! Ce forgeron est retenu prisonnier sur une île par le roi Nidudr afin

qu'il lui fabrique des objets magiques. Seul le souverain est autorisé à aller le voir. À raison,

car, lorsque ses fils rendent visite à l'elfe qui leur a promis de l'or, celui-ci les tue et

transforme leurs crânes en coupe avant de violer la fille du monarque, la princesse Bödvildr,

qui a elle aussi osé poser le pied sur l'îlot afin de faire réparer un bijou précieux.

Les gosses pensent que quand on leur dit non c'est pour jouer les relous,

mais pas du tout. La prochaine fois que vos enfants ne vous écoute pas,

racontez leur l'Histoire du roi Nidudr histoire de les calmer un peu !

Bref, un peu comme dans les mythologies gréco-latines, les îles, comme les forêts,

sont des endroits merveilleux plein de magies, fascinants, dangereux...et donc forcément les

elfes, tout comme les fées, y habitent ! Se déplacer sur une île pour obtenir leur faveur

c'est donc prendre des risques. Prendre un navire pour s'y rendre c'est même passer

symboliquement du monde des humains et vivants à celui des créatures surnaturelles et des morts.

Tout ça rappelle les légendes antiques,

avec la barque de Charon, mais aussi certains récits arthuriens ou le souverain de Camelot,

après une ultime bataille, se rend sur l'île d'Avalon où vit Morgane.

Le fait qu'on lie les elfes avec la mythologie gréco-latine amène aussi à

les considérer comme des créatures qui auraient vécu durant des temps anciens et révolus. Une

idée qu'on retrouve assez bien dans Les Contes de Canterbury où on peut lire que :

Dans ce texte, les elfes sont associés à la fois aux elfes et aux maléfices,

et le fait qu'ils ne soient pas là garantit la sécurité des femmes. On y aperçoit aussi, encore,

un lien fort entre la féminité et les elfes : c'est une femme qui assure la narration du conte,

et ce sont les femmes qui sont le plus à même d'être séduites par les charmes des créatures des

bois. D'ailleurs les elfes sont aussi féminisés : ils sont dirigées par une reine et ils ont été

peu à peu chassés par des prêtres masculins. Et là on a donc un message de fond qui se dégage.

L'auteur des contes de Canterbury oppose ici le temps des fées, du paganisme, des créatures

féminines, de la sauvagerie, à la civilisation chrétienne masculine qui finit par triompher.

Cette féminisation amène vite à sexualiser les elfes en les dotant d'une beauté à

la fois fascinante et dangereuse. Outre Morgane, qualifié de nymphe puis de fée,

on peut citer en exemple la ballade populaire danoise Elveskud (que l'on peut traduire par

« flèche d'elfe ») qui apparaît pour la première fois par écrit en 1570. Celle-ci raconte comment,

en allant à son mariage, sir Olof (ou Olaf) est séduit par la fille du roi des elfes dans

un bosquet. Celle-ci veut l'entraîner dans une danse, mais, devant son refus,

elle le frappe entre les épaules d'un trait qui le rend malade. Au matin, Olof est retrouvé

mort par sa mère. Ce récit qui existe, avec des variantes, dans d'autres pays scandinaves, montre

que le portrait des elfes s'est féminisé avec le temps. Si, dans les textes nordiques médiévaux,

Les Elfes : du Moyen Âge à la pop Culture (1) Elfen: Vom Mittelalter bis zur Popkultur (1) Ξωτικά: από τον Μεσαίωνα στην ποπ κουλτούρα (1) Elves: from the Middle Ages to pop culture (1) Elfos: de la Edad Media a la cultura pop (1) الف ها: از قرون وسطی تا فرهنگ پاپ (1) エルフ:中世からポップカルチャーまで (1) Elfos: da Idade Média à cultura popular (1) Эльфы: от средневековья до поп-культуры (1) Älvor: från medeltiden till populärkulturen (1) Elfler: Orta Çağ'dan popüler kültüre (1) 精靈:從中世紀到流行文化(1)

Cet épisode est sponsorisé par les éditions  Hachette Heroes qui viennent de sortir un This episode is sponsored by Hachette Heroes, who have just released a Questo episodio è sponsorizzato dalle edizioni Hachette Heroes che hanno appena pubblicato un

nouvel ouvrage dédié à Tolkien et  plus particulièrement aux Hobbits, a new book dedicated to Tolkien and, more specifically, the Hobbits,

“Les hobbits de Tolkien”, par David Day qui  est déjà l'auteur de plusieurs ouvrages sur "Tolkien's hobbits", by David Day, who has already written several books on the subject.

Tolkien comme les batailles de Tolkien ou encore  les Héros de Tolkien. Pour tout savoir sur les Tolkien, such as Tolkien's Battles or Tolkien's Heroes. To find out more about

fumeurs de pipe aux pieds poilus, et je ne parle  pas de moi, cliquez sur le lien en description pipe smokers with hairy feet, and I'm not talking about me, click on the link in the description.

pour commander l'ouvrage ou retrouvez les  en librairie. On se retrouve en fin de to order the book or find them in bookshops. See you at the end of

vidéo pour en savoir plus ! Très bon épisode ! Mes chers camarades bien le bonjour ! Quand on video to find out more! Great episode! Greetings, dear friends! When we

évoque les elfes, on pense tous directement  à ceux inventés par Tolkien, notamment de elves, we all think directly of those invented by Tolkien, notably from

fiers archers comme Legolas , qui bravent de  nombreux dangers aux côtés d'Aragorn et de proud archers like Legolas , who brave many dangers alongside Aragorn and

Gimli et qui font du surf sur des boucliers  en tuant moultes orcs. Pourtant, les elfes, Gimli and surfing on shields, killing countless orcs. But elves,

c'est pas que ça. D'ailleurs leurs représentations  ont constamment évolué depuis le Moyen âge et même it's not just that. In fact, their representations have been constantly evolving since the Middle Ages.

encore aujourd'hui ils ne sont pas exactement  pareil suivant les auteurs et les univers de even today they are not exactly the same, depending on the authors and the

fantasy. Ouvrez bien vos oreilles pointues parce  qu'on embarque dans un épisode assez dense ! fantasy. Keep your sharp ears peeled, because we're in for a dense episode!

Comme nous l'avons vu durant un précédent  épisode consacré aux nains, il existe une As we saw in a previous episode devoted to dwarves, there is a

grande proximité dans les sources médiévales  entre les nains et les elfes. Dans l'Edda en medieval sources between dwarves and elves. In the Edda in

Prose rédigée au XIIIe siècle en Islande par  Snorri Sturluson, les nains vivent au pays Prose written in 13th-century Iceland by Snorri Sturluson, dwarves live in the land

des elfes noirs . Les elfes  ont aussi été confondus dans les textes anglais dark elves. Elves have also been confused in English texts.

tardifs avec les fées, un terme d'ancien français  apparu au XIIe siècle, notamment à cause du succès with fairies, an Old French term that first appeared in the 12th century, largely due to the success of the

de la littérature épique en langue d'oïl dans  les îles britanniques à partir de la conquête normande. epic literature in the langue d'oïl in the British Isles from the Norman Conquest onwards.

Dans Les Contes de Canterbury écrit par  l'anglais Geoffrey Chaucer entre 1387 et 1400, In The Canterbury Tales, written by Englishman Geoffrey Chaucer between 1387 and 1400,

un chevalier flamand appelé sire Topaze part  à la recherche d'une créature merveilleuse qui a Flemish knight called Sire Topaze sets off in search of a marvellous creature that

est qualifiée soit de « reine des elfes », soit  de « reine de la féerie ». Au XVIe siècle, dans

son poème La Reine des fées l'anglais Edmund Spenser emploie indifféremment

« elfe » et « fée » pour désigner la même chose.  En Français, le substantif « elfe » reste pendant

longtemps mal connu, et on le traduit le plus  souvent par fée. Publié en anglais en 1667 par

John Milton, “Le Paradis perdu” est adapté en  français au XVIIIe siècle par Chateaubriand

pour le public français. Il traduit alors  le binôme « faery elves » par « fée ».

Bref, tout ça est un peu confus et  cette confusion perdure jusqu'au XXe siècle.

C'est Tolkien qui va à  nouveau faire une nette distinction

entre les fées et les elfes après  avoir hésité entre les deux termes.

Ce n'est en fin de compte qu'avec les  traductions du Hobbit puis du Seigneur

des Anneaux dans les années 1970 et la  diffusion de la fantasy en France que

le mot « elfe » s'impose alors en français et que  l'on distingue nettement cette créature des fées.

Pour essayer de comprendre ce que sont les elfes  sans la brouiller avec l'image des fées,

il faut d'abord se plonger dans les sources germaniques,  scandinaves et surtout anglo-saxonnes.

Mais les œuvres littéraires les plus anciennes rédigées  dans cette langue ne nous donnent que peu de

renseignements. Tout au plus on apprend  dans le poème épique Beowulf, composé au

Xe siècle de notre ère, que les ylfe sont des  êtres maléfiques qui accompagnent le monstre

Grendel en compagnie des orcneas, dont le noms  inspirera les orques. Ce sont surtout les sources

médicinales qui nous renseignent le plus sur  les elfes et leur caractère. La British Library

conserve plusieurs ouvrages des IX et Xe siècle  appelés leechbook et qui

décrivent un mélange de remèdes naturels  et de prières pour soigner des maladies.

L'un d'entre eux, le Lacnunga, présente  un remède en ces termes :

"Voilà un breuvage saint contre la magie des elfes  et contre les tribulations de l'Ennemi". "Here's a holy brew against the magic of the elves and the tribulations of the Enemy".

Un autre leechbook explique que :

Mais c'est quoi cette magie des elfes ? Bonne question ! Plusieurs autres

textes associent en tout cas la magie des  elfes à des flèches provoquant la douleur.

Dans un passage du Lacnunga on peut ainsi lire :

On le voit bien, ce texte tisse un  lien entre les elfes, les anciennes

religions païennes et les femmes. Au fur  et à mesure que le christianisme s'impose,

ces éléments vont se combiner pour dresser  un portrait assez négatif des elfes dont les these elements combine to paint a rather negative picture of elves, whose

traits provoqueraient des  douleurs et des maladies.

À partir du XVIe siècle, les autorités  responsables de la chasse des sorcières les

associent aux jeteuses de sorts. À cette époque  en Écosse on qualifie les pointes de flèches en associated with spellcasters. At that time in Scotland, arrowheads were referred to as

pierre datant de la Préhistoire de « traits  d'elfe ». Pensant qu'elles étaient tombées du

ciel et envoyées par des créatures surnaturelles,  on les employait de diverses manières. Certaines

étaient serties dans une monture en argent et,  sans doute portées en pendentifs, servaient were set in a silver frame and, probably worn as pendants, were used to

d'amulette protectrice. D'autres étaient utilisées  dans des rituels de magie noire.

En 1590,  Katherene Ross, une femme  noble, est accusée d'avoir tenté d'ensorceler

deux membres de sa famille en faisant, dit le  résumé du procès, deux figurines d'argile sur

lequel elle jetait des flèches d'elfes. Pour  l'aider dans la préparation de ce maléfice,

Katherene était assistée d'une autre femme,  Marion, qui lui a conseillé « d'aller dans

les collines pour parler avec le peuple des  elfes. » Des pratiques que l'on retrouve aussi

en Allemagne à la même période. En 1573,  dans la ville de Nordhausen en Thuringe,

Katharina Wille confesse avoir envoyé  six pairs d'elfes tourmenter un garçon.

Vous l'imaginez bien, ce lien entre  les elfes et la magie noire inspire

des auteurs célèbres, comme  Shakespeare par exemple !

Dans sa pièce Macbeth écrite en 1606, Hecate, la  reine des sorcières, ordonne à d'autres jeteuses

de sorts de se placer : « Maintenant,  tout autour du chaudron, — entonnez

une ronde comme les elfes et les fées, —  pour enchanter ce que vous y avez mis. » a round like the elves and fairies, - to enchant what you put there."

Le nom d'Hecate renvoie directement à la  divinité païenne antique de la Lune et fait

écho à l'habitude qu'ont prise beaucoup d'auteurs  dès le Moyen âge d'associer les elfes aux mythes

gréco-latins. Par exemple, dans le Fasciculus  morum, un manuel du début du XIVe rédigé à

destination des prêtres, on peut lire que :  « des souillons superstitieux […] affirment

voir en pleine nuit, dansant des rondes  avec Dame Diane, déesse des païens,

les plus belles reines et d'autres filles  que l'on appelle vulgairement des elfes. »

Mais en vrai ce lien apparaît avant  l'An mil, où des auteurs chrétiens,

principalement issus des milieux ecclésiastiques,

avaient déjà tenté d'établir des correspondances  entre les êtres merveilleux décrits par les poètes

gréco-latins et ceux évoquées dans les légendes  nordiques, germaniques ou anglo-saxonnes.

Un glossaire rédigé sans doute au IXe siècle  dresse un parallèle entre les nymphes et les

elfes communs, les dryades et les elfes des  bois, les hamadryades et les elfes de l'eau,

les oréades et les elfes des montagnes  et les naïades et les elfes des mers.

Dès le Moyen âge, les elfes sont donc associés  à des temps et à des espaces bien précis. Since the Middle Ages, elves have been associated with specific times and places.

Liées à la nuit, à travers l'évocation  des déesses lunaires Hecate et Diane,

ces créatures apparaissent nettement dans des  lieux sauvages et naturels (bois, montagnes),

loin de villages et des villes construits  par l'homme. Des caractéristiques que l'on

retrouve dans le procès de Katherene Ross qui doit  chercher la compagnie des elfes dans les collines.

En fait il n'y a rien de vraiment étonnant  là dedans, dans l'imaginaire médiéval,

on associe très facilement les espaces naturels  non dédiés à la culture, comme les forêts,

et les créatures merveilleuses et monstrueuses que  vont devoir affronter les chevaliers des récits

épiques. On a un trio “elfe-nuit-forêt”  qui va ensuite revenir régulièrement.

On retrouve par exemple ce trio dans la traduction  allemande du terme cauchemars : albtraum,

qui littéralement, signifie « rêve  d'elfe ». On l'aperçoit aussi dans

Le Paradis perdu de John Milton  dans lequel ce dernier évoque :

« des fées [« faery elves »] dans leur orgie  de minuit, à la lisière d'une forêt ou au bord

d'une fontaine, que quelque paysan  en retard voit ou rêve qu'il voit,

tandis que sur sa tête la lune siège arbitre et  incline plus près de la terre sa pâle course. » while on her head the moon sits referee and inclines her pale course closer to the earth."

Dans les années 1860, le peintre suédois August  Malmström [PRONONCER Malmstreum ] réalise une

série de toiles qui montre des elfes  dansants soit au crépuscule dans

une forêt , soit à la tombée de la nuit,  entre des arbres tortueux et un marécage. a forest, or at dusk, between twisted trees and a swamp.

Mais au-delà des forêts, les elfes  sont aussi associés aux îles.

l'Edda Poétique islandaise décrit le destin  du forgeron Völund, qualifié de « prince des

Alfes ». Bien sûr les alfes ne font pas référence  à un extraterrestre poilu qui mange des chats

mais bien aux elfes ! Ce forgeron est retenu  prisonnier sur une île par le roi Nidudr afin

qu'il lui fabrique des objets magiques. Seul le  souverain est autorisé à aller le voir. À raison, to make magic objects for him. Only the sovereign is allowed to visit him. And rightly so,

car, lorsque ses fils rendent visite à l'elfe  qui leur a promis de l'or, celui-ci les tue et because when his sons visit the elf who promised them gold, the elf kills them and

transforme leurs crânes en coupe avant de violer  la fille du monarque, la princesse Bödvildr, turns their skulls into cups before raping the monarch's daughter, Princess Bödvildr,

qui a elle aussi osé poser le pied sur l'îlot  afin de faire réparer un bijou précieux. who also dared to set foot on the island to have a precious piece of jewelry repaired.

Les gosses pensent que quand on leur  dit non c'est pour jouer les relous,

mais pas du tout. La prochaine fois  que vos enfants ne vous écoute pas,

racontez leur l'Histoire du roi  Nidudr histoire de les calmer un peu !

Bref, un peu comme dans les mythologies  gréco-latines, les îles, comme les forêts,

sont des endroits merveilleux plein de magies,  fascinants, dangereux...et donc forcément les

elfes, tout comme les fées, y habitent ! Se  déplacer sur une île pour obtenir leur faveur

c'est donc prendre des risques. Prendre un  navire pour s'y rendre c'est même passer

symboliquement du monde des humains et vivants à  celui des créatures surnaturelles et des morts.

Tout ça rappelle les légendes antiques,

avec la barque de Charon, mais aussi certains  récits arthuriens ou le souverain de Camelot,

après une ultime bataille, se rend  sur l'île d'Avalon où vit Morgane.

Le fait qu'on lie les elfes avec la  mythologie gréco-latine amène aussi à The fact that elves are linked to Greco-Latin mythology also leads to

les considérer comme des créatures qui auraient  vécu durant des temps anciens et révolus. Une to think of them as creatures that lived in ancient, bygone times. A

idée qu'on retrouve assez bien dans Les  Contes de Canterbury où on peut lire que :

Dans ce texte, les elfes sont associés  à la fois aux elfes et aux maléfices,

et le fait qu'ils ne soient pas là garantit la  sécurité des femmes. On y aperçoit aussi, encore,

un lien fort entre la féminité et les elfes :  c'est une femme qui assure la narration du conte,

et ce sont les femmes qui sont le plus à même  d'être séduites par les charmes des créatures des

bois. D'ailleurs les elfes sont aussi féminisés  : ils sont dirigées par une reine et ils ont été

peu à peu chassés par des prêtres masculins. Et  là on a donc un message de fond qui se dégage. gradually driven out by male priests. And that's where a fundamental message emerges.

L'auteur des contes de Canterbury oppose ici  le temps des fées, du paganisme, des créatures

féminines, de la sauvagerie, à la civilisation  chrétienne masculine qui finit par triompher.

Cette féminisation amène vite à sexualiser  les elfes en les dotant d'une beauté à

la fois fascinante et dangereuse. Outre  Morgane, qualifié de nymphe puis de fée,

on peut citer en exemple la ballade populaire  danoise Elveskud (que l'on peut traduire par

« flèche d'elfe ») qui apparaît pour la première  fois par écrit en 1570. Celle-ci raconte comment,

en allant à son mariage, sir Olof (ou Olaf)  est séduit par la fille du roi des elfes dans

un bosquet. Celle-ci veut l'entraîner  dans une danse, mais, devant son refus, a grove. She wants to dance with him, but he refuses,

elle le frappe entre les épaules d'un trait  qui le rend malade. Au matin, Olof est retrouvé

mort par sa mère. Ce récit qui existe, avec des  variantes, dans d'autres pays scandinaves, montre

que le portrait des elfes s'est féminisé avec le  temps. Si, dans les textes nordiques médiévaux,