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Nota Bene, Le Graal ne ressemble peut-être pas à ce que vous pensez... (1)

Le Graal ne ressemble peut-être pas à ce que vous pensez... (1)

Cet épisode est sponsorisé par Rhinoshield, le site spécialisé dans la protection de

votre téléphone portable ! Parce que quand vous partez à la recherche du Graal, c'est

toujours mieux de le faire avec les bons équipements ! Et faut en profiter puisque s'ils m'ont

contacté, c'est parce qu'en ce moment et jusqu'au 2 décembre 2020, c'est les

promotions Black Friday vous avez jusqu'à 60% de réduction sur leur site et 10% supplémentaire

avec le code NOTABENE. Et en plus de ça, ils viennent de sortir toute une gamme de

produits dédiés à Assassin's Creed Valhalla et vous savez que j'ai un petit faible pour

cet univers ! On se retrouve dans la description ou à la fin de l'épisode pour en savoir

plus, bon visionnage !

Mes chers camarades bien le bonjour !

Aujourd'hui on va consacrer un épisode entier à la quête la plus célèbre de l'Histoire

du cinéma et de la littérature : non, je ne vais pas parler de faire péter un building

après avoir trouvé l'amour au détour d'une fusillade mais bien de la quête du

Graal. Le terme est devenu tellement commun qu'il est entré dans le langage courant.

Dans un article de 2019, un journaliste de La Croix titre ainsi que « League of Legends »

est « le Graal de l'e-sport » ! Mais d'où ça vient le Graal ? Et surtout,

c'est quoi ? Pour ceux qui ont suivi le livre I de Kaamelott,

d'Alexandre Astier, vous vous souvenez sans doute de cet épisode dans lequel les chevaliers

de la Table ronde débattent pour savoir si le Graal est soit un vase, une coupe, un « ré-ci-pient

», une pierre incandescente ou, selon Perceval, un bocal à anchois. Ce qui est vraiment drôle

là dedans, c'est que ce sketch humoristique ne repose pas sur du vide, il pose une vraie

question qui a bien un fondement historique. Aujourd'hui encore, qu'on se le dise,

il est difficile de définir ce qu'est réellement le Graal. En fait, chaque époque, et peut-être

même chaque auteur, s'invente un Graal à sa mesure, et fonction de ce qu'il veut

dire et des attentes de son public, et ce dès le Moyen âge.

Autant vous dire qu'on est pas sorti de l'Auberge et pour comprendre tout ça, il

faut revenir à la création même du Graal !

Le Graal apparaît pour la première fois dans le dernier roman de l'écrivain Chrétien

de Troyes, Le conte du Graal, rédigé à la fin du XIIe siècle. Le titre, choisi par

Chrétien lui-même, montre bien que l'objet joue un rôle central dans les aventures du

jeune chevalier Perceval. Celui-ci l'aperçoit tout d'abord au cours d'une mystérieuse

assemblée. Reçu par un souverain blessé aux jambes, le roi Pêcheur, il assiste à

un banquet durant lequel sont présentés trois objets : une lance qui saigne, un plat

en argent, et « un graal » fait d'or et de « pierres précieuses » qui émet

une grande lumière. Bouleversé par ce spectacle, il n'interroge pas son hôte sur le sens

de ses objets. Au bout de cinq années d'errance, il comprend qu'il a commis une faute terrible.

5 années...c'est pas une flèche le Perceval…

En ne posant pas la question de la finalité de ses objets, il n'a pas permis au souverain

d'être soigné. C'est d'autant plus grave qu'il a oublié pendant tout ce temps

de prier Dieu. Rongé par le doute, il interroge un ermite, qui s'avère être son oncle.

Et celui-ci lui explique alors ce qui est servi au Roi Pêcheur dans le graal :

« Ne va pas croire qu'il y trouve brochet ni lamproie ni saumon : c'est une simple

hostie qu'on lui apporte dans ce graal et cela lui suffit pour soutenir et conserver

sa vie tant le graal est une sainte chose. Cet homme est à ce point pur esprit, qu'il

ne lui faut pas autre chose que l'hostie qui vient dans le graal pour se maintenir

en vie. »

Voilà...c'est tout ce qu'on sait sur le fameux Graal...parce que Chrétien de Troyes

claque avant de finir son oeuvre. Du coup on aura jamais l'occasion de définir plus

précisément ce qu'est un “Graal”, ce qui rend le terme un peu compliqué à

expliquer je ne vous le cache pas...D'autant que l'auteur médiéval a très certainement

inventé ce mot, au point qu'encore aujourd'hui, personne n'est bien sûr de sa provenance.

Certains y voient une version occitane du substantif latin gradalis, qui désigne un

plat large et creux. D'autres pensent (et c'est l'hypothèse

la plus communément admise) qu'il s'agit d'un dérivé du latin cratis (transformé

en cratalis) qui désigne une claie, sorte de plat en osier, et plus largement un récipient.

Il existe aussi des théories supplémentaires tournant autour des mots latins crater, sorte

de vase antique en céramique ou gradus, car il s'agirait d'un objet à pied.

Les imprécisions de Chrétien de Troyes vont être complétés par les auteurs médiévaux

qui, tout au long du XIIIe siècle, tentent soit de rédiger de nouvelles aventures de

Perceval (ce que l'on appelle les Continuations), soit d'inventer une origine plus ancienne

au Graal.

Problème majeur que dis-je “Couille dans le potage” comme on dit : ces écrivains

vont, chacun de leur côté, créer leur version du Graal sans se mettre d'accord avec les

autres.

Par exemple, Wolfram von Eschenbach, auteur allemand du XIIIe, affirme dans son roman

Parzival que le Graal est une pierre merveilleuse, grardé par des Templiers. Dans Peredur, réécriture

galloise du texte de Chrétien de Troyes, le Graal est un plateau d'argent que portent

deux jeunes filles dans lequel la tête d'un homme baigne dans son sang.

Vous remarquerez que ça reste des trucs hyper fins quoi qu'il arrive !

Mais de toutes les versions de l'histoire du Graal, c'est sans doute celle de Robert

de Boron qui est la plus connue. En s'appuyant sur, l'Évangile de Nicodème, un récit

apocryphe de la Passion du Christ (c'est-à-dire qui n'est pas considéré comme un des quatre

évangiles du Nouveau Testament reconnus par l'Église), Robert de Boron écrit au début

du XIIIe siècle une sorte de préquel au roman de Chrétien de Troyes. Il y explique

que le Graal est en fait la coupe qui aurait servi à Jésus lors de la Cène, le dernier

repas avec ses disciples. L'objet aurait par la suite été récupéré par Joseph

d'Arimathie qui s'en serait servit pour recueillir le sang du Christ sur la Croix.

Après maintes pérégrinations, Joseph se retrouve finalement sur l'île de Bretagne,

amenant avec lui l'objet merveilleux.

Et on le comprend bien car qui n'aimerait pas que sa quête le mène en Bretagne ? Qui

? Ce récit est le premier qui tisse un lien

direct entre la légende arthurienne et l'histoire biblique et religieuse. Le roi Arthur et ses

chevaliers ne sont donc plus seulement des guerriers épiques et courtois, mais des héros

s'inscrivant dans la quête du salut chrétien. Et c'est pourquoi nombre de représentations

de la Table ronde présentes dans des manuscrits semblent directement s'inspirer du dernier

repas du Christ (la Cène). Sur celle-ci, datant du XIVe siècle, la Table ronde comprend

ainsi treize places, nombre qui renvoie aux douze apôtres et à Jésus. Mais Robert de

Boron n'est pas le seul à innover avec le Graal. D'autres auteurs anonymes, brodant

toujours sur le récit de Chrétien de Troyes, imaginent même les chevaliers de Camelot

partant dans une vaste quête pour retrouver la coupe sacrée. Ce récit, que l'on aperçoit

pour la première fois dans le cycle de la Vulgate, composé aux environs des années

1220 par un auteur anonyme, met en scène les aventures de membres de Table ronde créés

pour l'occasion : Bohort, et aussi Galaad, fils de Lancelot, qui seuls, en compagnie

de Perceval, trouveront le Graal . Pour mieux comprendre ces nouvelles versions

du mythe arthurien il faut absolument s'intéresser au contexte de l'époque de leur création.

En effet, durant les XIIe et XIIIe, l'Eglise affirme de plus en plus son pouvoir sur la

société, particulièrement sur l'aristocratie chevaleresque. Les ecclésiastiques se voient

à la tête des deux autres ordres du monde féodal, au-dessus des combattants et des

paysans, et les papes affirment leur primauté sur les souverains.

En gros, l'église domine quoi…

Evidemment, cette domination de l'Eglise influence la légende arthurienne. Le texte

de Geoffroi de Monmouth mettait en avant la figure monarchique d'Arthur au début du

XIIe siècle, pour valoriser l'image du roi. Quatre-vingts ans plus tard, on préfère

pousser sur le devant de la scène des chevaliers incarnant les idéaux chrétiens, qui deviennent

alors les héros centraux du récit. Sur cette enluminure de la fin du XVe siècle montrant

l'apparition du Graal à la Table ronde, les souverains (que l'on distingue grâce

à leur couronne), sauf Arthur, sont représentés de dos, au premier plan, comme s'ils étaient,

à l'instar du lecteur, de simples spectateurs de l'image. Ils sont donc presque extérieurs

à l'action. A contrario, la scène, qui évoque là encore le dernier repas de Jésus

avec ses disciples, n'est pas présidée par un monarque, mais par des chevaliers,

et notamment Galaad qui occupe la place centrale, appelée le siège périlleux, réservée

au meilleur chevalier du monde.

Comme on peut le constater, la quête du Graal est accomplie par des personnages créés

au XIIIe siècle. Les héros de la première génération, comme Gauvain ou Arthur, n'auront

jamais accès à la coupe sacrée, pas plus que Lancelot, coupable, pour des auteurs de

plus en plus préoccupés d'écrire une version de la légende conforme aux dogmes

de l'Église, du péché d'adultère avec la reine Guenièvre.

En fait, la création de Galaad au XIIIe siècle obéit elle aussi à des impératifs religieux

et politiques. Les ordres monastiques, notamment les cisterciens, mettent en avant depuis le

XIIe siècle un modèle chrétien de chevalerie, symbolisé par les templiers. Aux yeux des

moines de Citeaux, comme saint Bernard qui les soutient dès leur création, les membres

du Temple représentent une caste de guerriers parfaits. Débarrassés de ce qu'ils estiment

être des vices comme le goût de l'aventure, l'attrait pour le combat et les rançons

ou une sexualité exprimée à travers la culture courtoise, ils obéissent à une règle

stricte qui les obligent notamment au célibat et sont surtout totalement soumis à la hiérarchie

catholique. Et Galaad, c'est ce qu'il incarne totalement

! C'est cet idéal là, c'est un templier quoi !

D'ailleurs, son écu, que l'on peut voir dans divers manuscrits médiévaux, reprend

en tout point celui des chevaliers du temple : il est d'argent à la croix de gueules

c'est à dire une croix rouge sur fond blanc. Le blason de Perceval porte de son côté

des croix d'or sur un fond de pourpre, dit le texte de cet armorial du XVe siècle conservé

à la Bibliothèque nationale de France.

Au même titre dans le roman Parzival de Wolfram von Eschenbach, la coupe est gardée par des

templiers et ça doit se comprendre comme une volonté de faire des récits de la table

ronde une entreprise de promotion de la chevalerie chrétienne alors que le mouvement des croisades

bat son plein en Europe occidentale. D'ailleurs, le nom même de Galaad renvoie à des plusieurs

personnages bibliques et à un lieu cité dans l'Ancien Testament, les monts Galaad,

non loin des États latins d'Orient où combattent les ordres militaires.

En gros dites vous bien que si aujourd'hui vous avez des pubs dans le métro pour vous

vanter les mérites d'écoles de commerces plus ou moins brillantes, à l'époque,

si y'avait le métro, vous auriez eu des grandes affiches avec marqué dessus “les

récits de la table ronde : devenez un véritable templier ! La première année à moitié

prix”!

le fait que l'on insiste autant sur le Graal comme objet lié à la passion du Christ s'explique

aussi par un dernier changement important qui survient au cœur de l'Église. C'est

en effet durant le concile de Latran IV qui se tient en 1215, c'est-à-dire entre la

composition du texte de Robert de Boron et celui de la Vulgate, que la hiérarchie ecclésiastique

affirme le dogme de la transsubstantiation. Le mot à l'air un peu barbare je suis d'accord,

Le Graal ne ressemble peut-être pas à ce que vous pensez... (1) Der Gral sieht vielleicht nicht so aus, wie Sie denken... (1) The Grail may not be what you think... (1) El Grial puede no ser lo que crees que es... (1) جام ممکن است شبیه آن چیزی نباشد که شما فکر می کنید... (1) 聖杯はあなたが考えているようなものではないかもしれない...(1) O Graal pode não ser o que pensas que é... (1) Грааль может оказаться не тем, чем вы его считаете... (1) Kase düşündüğünüz şey olmayabilir... (1)

Cet épisode est sponsorisé par Rhinoshield, le site spécialisé dans la protection de

votre téléphone portable ! Parce que quand vous partez à la recherche du Graal, c'est

toujours mieux de le faire avec les bons équipements ! Et faut en profiter puisque s'ils m'ont

contacté, c'est parce qu'en ce moment et jusqu'au 2 décembre 2020, c'est les

promotions Black Friday vous avez jusqu'à 60% de réduction sur leur site et 10% supplémentaire

avec le code NOTABENE. Et en plus de ça, ils viennent de sortir toute une gamme de

produits dédiés à Assassin's Creed Valhalla et vous savez que j'ai un petit faible pour

cet univers ! On se retrouve dans la description ou à la fin de l'épisode pour en savoir

plus, bon visionnage !

Mes chers camarades bien le bonjour !

Aujourd'hui on va consacrer un épisode entier à la quête la plus célèbre de l'Histoire

du cinéma et de la littérature : non, je ne vais pas parler de faire péter un building cinema and literature: no, I'm not going to talk about blowing up a building

après avoir trouvé l'amour au détour d'une fusillade mais bien de la quête du after having found love at the turn of a shooting but well of the quest for

Graal. Le terme est devenu tellement commun qu'il est entré dans le langage courant.

Dans un article de 2019, un journaliste de La Croix titre ainsi que « League of Legends »

est « le Graal de l'e-sport » ! Mais d'où ça vient le Graal ? Et surtout,

c'est quoi ? Pour ceux qui ont suivi le livre I de Kaamelott,

d'Alexandre Astier, vous vous souvenez sans doute de cet épisode dans lequel les chevaliers

de la Table ronde débattent pour savoir si le Graal est soit un vase, une coupe, un « ré-ci-pient

», une pierre incandescente ou, selon Perceval, un bocal à anchois. Ce qui est vraiment drôle

là dedans, c'est que ce sketch humoristique ne repose pas sur du vide, il pose une vraie

question qui a bien un fondement historique. Aujourd'hui encore, qu'on se le dise,

il est difficile de définir ce qu'est réellement le Graal. En fait, chaque époque, et peut-être

même chaque auteur, s'invente un Graal à sa mesure, et fonction de ce qu'il veut

dire et des attentes de son public, et ce dès le Moyen âge.

Autant vous dire qu'on est pas sorti de l'Auberge et pour comprendre tout ça, il

faut revenir à la création même du Graal !

Le Graal apparaît pour la première fois dans le dernier roman de l'écrivain Chrétien

de Troyes, Le conte du Graal, rédigé à la fin du XIIe siècle. Le titre, choisi par

Chrétien lui-même, montre bien que l'objet joue un rôle central dans les aventures du

jeune chevalier Perceval. Celui-ci l'aperçoit tout d'abord au cours d'une mystérieuse

assemblée. Reçu par un souverain blessé aux jambes, le roi Pêcheur, il assiste à

un banquet durant lequel sont présentés trois objets : une lance qui saigne, un plat

en argent, et « un graal » fait d'or et de « pierres précieuses » qui émet

une grande lumière. Bouleversé par ce spectacle, il n'interroge pas son hôte sur le sens

de ses objets. Au bout de cinq années d'errance, il comprend qu'il a commis une faute terrible.

5 années...c'est pas une flèche le Perceval…

En ne posant pas la question de la finalité de ses objets, il n'a pas permis au souverain By not asking the question of the finality of its objects, it did not allow the sovereign

d'être soigné. C'est d'autant plus grave qu'il a oublié pendant tout ce temps to be cared for. It's all the more serious that he forgot all this time

de prier Dieu. Rongé par le doute, il interroge un ermite, qui s'avère être son oncle.

Et celui-ci lui explique alors ce qui est servi au Roi Pêcheur dans le graal : And he then explains to him what is served to the Fisher King in the grail:

« Ne va pas croire qu'il y trouve brochet ni lamproie ni saumon : c'est une simple

hostie qu'on lui apporte dans ce graal et cela lui suffit pour soutenir et conserver

sa vie tant le graal est une sainte chose. Cet homme est à ce point pur esprit, qu'il

ne lui faut pas autre chose que l'hostie qui vient dans le graal pour se maintenir it does not need anything other than the host that comes into the grail to maintain itself

en vie. »

Voilà...c'est tout ce qu'on sait sur le fameux Graal...parce que Chrétien de Troyes

claque avant de finir son oeuvre. Du coup on aura jamais l'occasion de définir plus

précisément ce qu'est un “Graal”, ce qui rend le terme un peu compliqué à

expliquer je ne vous le cache pas...D'autant que l'auteur médiéval a très certainement

inventé ce mot, au point qu'encore aujourd'hui, personne n'est bien sûr de sa provenance.

Certains y voient une version occitane du substantif latin gradalis, qui désigne un

plat large et creux. D'autres pensent (et c'est l'hypothèse

la plus communément admise) qu'il s'agit d'un dérivé du latin cratis (transformé

en cratalis) qui désigne une claie, sorte de plat en osier, et plus largement un récipient.

Il existe aussi des théories supplémentaires tournant autour des mots latins crater, sorte

de vase antique en céramique ou gradus, car il s'agirait d'un objet à pied.

Les imprécisions de Chrétien de Troyes vont être complétés par les auteurs médiévaux

qui, tout au long du XIIIe siècle, tentent soit de rédiger de nouvelles aventures de

Perceval (ce que l'on appelle les Continuations), soit d'inventer une origine plus ancienne

au Graal.

Problème majeur que dis-je “Couille dans le potage” comme on dit : ces écrivains

vont, chacun de leur côté, créer leur version du Graal sans se mettre d'accord avec les

autres.

Par exemple, Wolfram von Eschenbach, auteur allemand du XIIIe, affirme dans son roman

Parzival que le Graal est une pierre merveilleuse, grardé par des Templiers. Dans Peredur, réécriture

galloise du texte de Chrétien de Troyes, le Graal est un plateau d'argent que portent

deux jeunes filles dans lequel la tête d'un homme baigne dans son sang.

Vous remarquerez que ça reste des trucs hyper fins quoi qu'il arrive !

Mais de toutes les versions de l'histoire du Graal, c'est sans doute celle de Robert

de Boron qui est la plus connue. En s'appuyant sur, l'Évangile de Nicodème, un récit

apocryphe de la Passion du Christ (c'est-à-dire qui n'est pas considéré comme un des quatre

évangiles du Nouveau Testament reconnus par l'Église), Robert de Boron écrit au début

du XIIIe siècle une sorte de préquel au roman de Chrétien de Troyes. Il y explique

que le Graal est en fait la coupe qui aurait servi à Jésus lors de la Cène, le dernier

repas avec ses disciples. L'objet aurait par la suite été récupéré par Joseph

d'Arimathie qui s'en serait servit pour recueillir le sang du Christ sur la Croix.

Après maintes pérégrinations, Joseph se retrouve finalement sur l'île de Bretagne,

amenant avec lui l'objet merveilleux.

Et on le comprend bien car qui n'aimerait pas que sa quête le mène en Bretagne ? Qui And we understand it well because who would not like his quest to take him to Brittany? who

? Ce récit est le premier qui tisse un lien

direct entre la légende arthurienne et l'histoire biblique et religieuse. Le roi Arthur et ses

chevaliers ne sont donc plus seulement des guerriers épiques et courtois, mais des héros

s'inscrivant dans la quête du salut chrétien. Et c'est pourquoi nombre de représentations

de la Table ronde présentes dans des manuscrits semblent directement s'inspirer du dernier

repas du Christ (la Cène). Sur celle-ci, datant du XIVe siècle, la Table ronde comprend

ainsi treize places, nombre qui renvoie aux douze apôtres et à Jésus. Mais Robert de

Boron n'est pas le seul à innover avec le Graal. D'autres auteurs anonymes, brodant

toujours sur le récit de Chrétien de Troyes, imaginent même les chevaliers de Camelot

partant dans une vaste quête pour retrouver la coupe sacrée. Ce récit, que l'on aperçoit

pour la première fois dans le cycle de la Vulgate, composé aux environs des années

1220 par un auteur anonyme, met en scène les aventures de membres de Table ronde créés

pour l'occasion : Bohort, et aussi Galaad, fils de Lancelot, qui seuls, en compagnie

de Perceval, trouveront le Graal . Pour mieux comprendre ces nouvelles versions

du mythe arthurien il faut absolument s'intéresser au contexte de l'époque de leur création.

En effet, durant les XIIe et XIIIe, l'Eglise affirme de plus en plus son pouvoir sur la

société, particulièrement sur l'aristocratie chevaleresque. Les ecclésiastiques se voient

à la tête des deux autres ordres du monde féodal, au-dessus des combattants et des

paysans, et les papes affirment leur primauté sur les souverains.

En gros, l'église domine quoi…

Evidemment, cette domination de l'Eglise influence la légende arthurienne. Le texte

de Geoffroi de Monmouth mettait en avant la figure monarchique d'Arthur au début du

XIIe siècle, pour valoriser l'image du roi. Quatre-vingts ans plus tard, on préfère

pousser sur le devant de la scène des chevaliers incarnant les idéaux chrétiens, qui deviennent

alors les héros centraux du récit. Sur cette enluminure de la fin du XVe siècle montrant

l'apparition du Graal à la Table ronde, les souverains (que l'on distingue grâce

à leur couronne), sauf Arthur, sont représentés de dos, au premier plan, comme s'ils étaient,

à l'instar du lecteur, de simples spectateurs de l'image. Ils sont donc presque extérieurs

à l'action. A contrario, la scène, qui évoque là encore le dernier repas de Jésus

avec ses disciples, n'est pas présidée par un monarque, mais par des chevaliers,

et notamment Galaad qui occupe la place centrale, appelée le siège périlleux, réservée

au meilleur chevalier du monde.

Comme on peut le constater, la quête du Graal est accomplie par des personnages créés

au XIIIe siècle. Les héros de la première génération, comme Gauvain ou Arthur, n'auront

jamais accès à la coupe sacrée, pas plus que Lancelot, coupable, pour des auteurs de

plus en plus préoccupés d'écrire une version de la légende conforme aux dogmes

de l'Église, du péché d'adultère avec la reine Guenièvre.

En fait, la création de Galaad au XIIIe siècle obéit elle aussi à des impératifs religieux

et politiques. Les ordres monastiques, notamment les cisterciens, mettent en avant depuis le

XIIe siècle un modèle chrétien de chevalerie, symbolisé par les templiers. Aux yeux des

moines de Citeaux, comme saint Bernard qui les soutient dès leur création, les membres

du Temple représentent une caste de guerriers parfaits. Débarrassés de ce qu'ils estiment

être des vices comme le goût de l'aventure, l'attrait pour le combat et les rançons

ou une sexualité exprimée à travers la culture courtoise, ils obéissent à une règle

stricte qui les obligent notamment au célibat et sont surtout totalement soumis à la hiérarchie

catholique. Et Galaad, c'est ce qu'il incarne totalement

! C'est cet idéal là, c'est un templier quoi !

D'ailleurs, son écu, que l'on peut voir dans divers manuscrits médiévaux, reprend

en tout point celui des chevaliers du temple : il est d'argent à la croix de gueules

c'est à dire une croix rouge sur fond blanc. Le blason de Perceval porte de son côté

des croix d'or sur un fond de pourpre, dit le texte de cet armorial du XVe siècle conservé

à la Bibliothèque nationale de France.

Au même titre dans le roman Parzival de Wolfram von Eschenbach, la coupe est gardée par des

templiers et ça doit se comprendre comme une volonté de faire des récits de la table

ronde une entreprise de promotion de la chevalerie chrétienne alors que le mouvement des croisades

bat son plein en Europe occidentale. D'ailleurs, le nom même de Galaad renvoie à des plusieurs

personnages bibliques et à un lieu cité dans l'Ancien Testament, les monts Galaad,

non loin des États latins d'Orient où combattent les ordres militaires.

En gros dites vous bien que si aujourd'hui vous avez des pubs dans le métro pour vous

vanter les mérites d'écoles de commerces plus ou moins brillantes, à l'époque,

si y'avait le métro, vous auriez eu des grandes affiches avec marqué dessus “les

récits de la table ronde : devenez un véritable templier ! La première année à moitié

prix”!

le fait que l'on insiste autant sur le Graal comme objet lié à la passion du Christ s'explique

aussi par un dernier changement important qui survient au cœur de l'Église. C'est

en effet durant le concile de Latran IV qui se tient en 1215, c'est-à-dire entre la

composition du texte de Robert de Boron et celui de la Vulgate, que la hiérarchie ecclésiastique

affirme le dogme de la transsubstantiation. Le mot à l'air un peu barbare je suis d'accord,