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Histoire d'Europe et du monde: "Nota Bene", La mythique histoire des 3 royaumes - Histoire de la Chine

La mythique histoire des 3 royaumes - Histoire de la Chine

Mes chers camarades, bien le bonjour !

Pour ceux d'entre vous qui ont beaucoup joué aux jeux vidéo, jadis, dans des temps lointain...quand

on avait encore le temps...C'était bien...Bref...pour beaucoup de joueurs,

le simple fait d'évoquer l'Histoire de la Chine vous fait replonger inévitablement dans la saga

Dynasty Warriors : un jeu de baston où tu incarnes un général et donc le but est principalement de

taper sur tout ce qui bouge en pleine période des trois royaumes, au 3eme siècle de notre ère !

D'ailleurs cette période a souvent servi de trame de fond pour d'autres jeux vidéo,

des séries et des films comme Falaise rouge de John Woo. Les Trois royaumes,

c'est aussi un roman de cape et d'épée du quatorzième siècle de Luo Guanzhong,

qui est à la littérature chinoise ce que les Trois mousquetaires sont à la française. Les

Trois royaumes, c'est encore d'innombrables expressions passées dans la langue courante.

Par exemple l'expression française « quand on parle du loup » se dit en chinois « quand

on parle de Cao Cao », du nom du protagoniste principal du future royaume du Nord, le Wei,

durant cette période. Les Trois royaumes, c'est enfin des cultes, rendus en divers endroits

du monde chinois, à plusieurs héros, dont Guan Yu et Zhang Fei, du royaume méridional du Shu.

C'est tout ça, mais c'est surtout une période historique, courte et intense,

à laquelle sont associés des personnages charismatiques qui sont passés, en presque

deux millénaires, de l'histoire à la légende. Je vous propose donc aujourd'hui une première

approche des Trois royaumes où l'on va découvrir le contexte général bien sûr,

mais aussi l'écriture et l'interprétation de cette période complexe ! C'est parti !

Avant de rentrer dans le dur du sujet, je vous propose de faire un petit point

sur les sources que l'on a à propos de la période des trois royaumes.

Aujourd'hui l'histoire officielle de la période est la Monographie des Trois royaumes,

écrite par Chen Shou à la fin du troisième siècle. Mais elle ne fut pas la seule,

et Chen Shou s'est sans doute inspiré d'autres histoires contemporaines,

bien que la plupart aient été perdues avec le temps. Comme les deux premières

histoires dynastiques chinoises que sont les Mémoires historiques de Sima Qian et le

Livre des Han de Ban Gu, la Monographie des Trois royaumes est une œuvre individuelle,

et cela nous permet de suivre la prose de l'auteur et ses interrogations au plus près.

Et ça c'est super important, parce que ça nous laisse une trace sans le vernis bureaucratique qui

va venir recouvrir beaucoup d'œuvres collectives qui seront issues du bureau de l'histoire,

une institution en charge de la compilation officielle des histoires dynastiques qui

sera mise en place au septième siècle. Une sorte de fabrique à Roman National quoi.

L'ouvrage est divisé en trois parties, chaque royaume se voyant accorder au

moins une quinzaine de chapitres, et Chen Shou fait une sorte d'inventaire de tous les

personnages de la période et des actions qu'ils peuvent faire. Mais le livre est

relativement court et sera complétée plus d'un siècle plus tard, sur initiative impériale,

par les commentaires de Pei Songzhi qui enrichissent et approfondissent le texte initial.

Et c'est cette forme là qui est parvenue

jusqu'à nous pour y voir plus clair ! Outre la production littéraire de certains

acteurs comme Cao Cao et ses fils Cao Pi et Cao Zhi qui étaient de grands poètes,

on bénéficie depuis une vingtaine d'année de la mise au jour d'archives administratives déposées

dans des puits, notamment à Changsha, une ville méridionale située dans la province actuelle du

Hunan, et qui était à l'époque entre les royaumes de Wu et de Shu. Des documents qui nous permettent

d'affiner notre compréhension de l'histoire de la période, notamment au niveau local.

L'autre truc paradoxal qu'on doit absolument dire pour comprendre un peu la période, c'est un truc

assez paradoxal. Les trois royaumes, c'est une période qui s'étale de la chute de la dynastie

des Han en 220 à la réunification éphémère par celle des Jin en 280. Pourtant, la plupart des

événements que l'on connait aujourd'hui des trois royaumes se sont déroulés avant, au cours des

trente années de la lente et douloureuse fin de règne des Han. Bizarre non ? Et bah oui et non !

En fait ça pose la question de la périodisation : Pour certains les

trois royaumes c'est tout autant la fin de l'Antiquité chinoise avec le

déclin de la dynastie de Han que le début des Six Dynasties, qui se déroule durant

le haut Moyen âge chinois que l'on fait aujourd'hui débuter avec la chute des Han,

et qui s'achève à la fin du sixième siècle avec la réunification impériale réalisée par les Sui.

En tout cas ce qui est sûr c'est que cette histoire des trois royaumes est écrite après coup,

à partir de 280, soit la date de la fin desdits royaumes. Et puis vous imaginez bien qu'on appelle

ça les « Trois Royaumes » mais que chaque royaume de l'époque se considérait chacun comme les seuls

restaurateurs de l'unité impériale. Ils étaient là pour gagner hein !

Tout ça pose aussi une autre question, d'où est écrite cette histoire ? Il est

assez évident que selon la cour dont dépendent les scribes et les historiens, on va légitimer

telle ou telle dynastie plutôt qu'une autre. Du coup même si on a l'impression d'avoir une

écriture en apparence factuelle d'événements, ce n'est pas tellement le cas ! Et d'ailleurs on

le détecte notamment quand certains souverains se font appeler par leur nom personnel au lieu

d'employer leur nom de temple, c'est à dire le titre honorifique qu'on leur donne après

leur mort. Généralement si vous lisez ça, c'est qu'il y a anguille sous roche dans le texte !

Voilà, on posé le cadre, maintenant on va enfin pouvoir rentrer dans le vif du sujet : la BASTON !

La première étincelle qui marque le déclin des Han est la Révolte des Turbans jaunes en

184. Une sorte de secte taoïste qui profite d'une grande crise agraire pour fédérer des centaines de milliers d'adeptes partout sur le territoire avant d'organiser un soulèvement contre l'empereur.

Le pouvoir parvient à mater ce mouvement en mobilisant plusieurs généraux et leurs troupes.

Problème : quand ils s'imposent par les armes, ces généraux ont souvent des idées derrière la tête…

C'est le cas de Dong Zhuo qui se rebelle à son tour et fait alors peser une menace terrible

sur le nord. En 189, les puissants eunuques de l'empereur sont assassinés à Luoyang,

la cour de la capitale des Han de l'Est, et la ville est ensuite mise

à feu et à sang sous l'action des troupes commandées par Dong Zhuo.

Cao Cao, un autre général ambitieux qui est également sorti victorieux de ses

combats contre les Turbans jaunes, a la présence d'esprit de ne pas se retourner contre l'empire,

et il prend au contraire la tête des forces loyalistes pour contenir le traitre Dong Zhuo. Une

dizaine d'années et de combats plus tard, Cao Cao finit par contrôler la cour et le Nord du pays,

mais il préfère ne pas déposer l'empereur, qui lui sert de symbole de légitimité.

Mais c'est vraiment pour la façade hein ! Derrière, c'est bien lui qui est aux manettes !

Dans le sud-est, la situation est différente. Suite à la mort soudaine de son frère ainé en 200,

Sun Quan , qui n'a que dix-huit ans, prend le pouvoir dans la zone du cours inférieur

du fleuve Bleu, le Yang-tzeu. Il doit à la fois faire face aux ambitions de

ses propres généraux et se prémunir face aux envies expansionnistes de

Cao Cao qui lorgne sur son territoire. Au prix de plusieurs succès militaires,

il consolide son pouvoir et organise son royaume à partir de l'actuelle ville de Nankin,

qui restera la capitale des autres États dits des Six dynasties, jusqu'au sixième siècle.

Au sud-ouest, Liu Bei contrôle à partir de l'épisode des Turbans jaunes une région

rayonnant autour de la province actuelle du Sichuan. Il bénéficie, dans ce qui ressemble

à une entreprise collective, de l'aide de ses fidèles amis et généraux Zhang Fei et Guan Yu,

ainsi que du conseiller Zhuge Liang qui le pousse à affirmer ses ambitions politiques.

En 208, les deux futurs royaumes méridionaux de Liu Bei et de Sun Quan s'allient après d'intenses

échanges pour combattre Cao Cao lors de la fameuse bataille de la falaise rouge.

Sans doute LA bataille qui m'a marqué dans tous les dynasty warriors.

Mais c'est pas une info qui apporte vraiment du contexte à l'épisode...donc euh...voilà.

La coalition remporte en tout cas la victoire et sera marqué à la fois par le génie stratégie

de Zhuge Liang et les prouesses intrépides des généraux du sud à la tête de quelques dizaines

de milliers de soldats, face à la puissance de feu et à l'assurance de Cao Cao, qui ne s'imaginait

pas perdre, surtout avec un contingent évalué par certaines sources à huit cent mille hommes ! La

défaite est dure à avaler pour les armées du nord et fige la répartition du territoire entre les

différents acteurs du conflit, privant Cao Cao de son rêve : réunifier les royaumes.

En 220, c'est paradoxalement la mort de Cao Cao qui marque la fin officielle des Han. En effet,

Cao Pi, le fils aîné de Cao Cao, profite de succéder à son père pour déposer le

dernier empereur des Han et fonde l'État de Wei, dont il prend la tête. La proclamation

du Wei en 220 est donc la date retenue pour faire débuter les Trois Royaumes.

Et évidemment tout le monde veut se placer au-dessus des autres.

Cao Pi se déclare empereur et récipiendaire du mandat céleste, il se considère comme le

souverain unique de tout ce que l'on trouve « Sous-le-Ciel », soit le monde connu. Liu

Bei lui emboîte le pas et se déclare empereur dans la foulée, en 221. Il tire quant à lui sa

légitimité d'une filiation avec le clan régnant des Han, dont le nom de famille était Liu et

dont il propose ainsi la continuation, bien que dans une région différente. L'année suivante,

c'est au tour de Sun Quan à l'est de se proclamer roi, avant de prendre le titre d'empereur, en 229.

On a donc à cette époque une partition de l'Empire chinois en trois. Mais à part ça,

est ce qu'il se passe beaucoup de choses au niveau social ou institutionnel ? Et bien

Oui et non : les différents souverains mettent en place certaines politiques agricoles relativement

efficaces, ils entretiennent et améliorent les infrastructures routières, mais les conflits

internes aux royaumes ont forcé de nombreuses migrations de populations en plus d'affaiblir

chacune de ces entités face aux menaces extérieures, principalement face aux populations

non chinoises du nord, qui contrôleront le nord du pays dans les siècles suivants.

Politiquement, la période est marquée par la montée en puissance au nord du clan des Sima,

qui vont faire au clan Cao du Wei, ce que ces mêmes Cao avaient fait aux Han. Cette période

transitoire s'achève en 280, lorsque le Wu succombe, après le Wei et le Shu,

aux mains des Jin, dont la prise de pouvoir s'inscrit dans la continuité impériale des Han.

Pour résumer, c'est une période brève mais qui, dans les siècles suivants,

a un impact politique et culturel assez important ! Mais pourquoi ? On pourrait

comparer ça à la crise qui parcourt l'empire romain au troisième siècle. Au final les Trois

royaumes c'est une longue crise qui ébranle l'empire chinois mais qui s'achève par la

restauration impériale des Jin en 280. Et les Jin, ça change pas beaucoup de Han en

réalité ! Le véritable changement a plus sûrement lieu au quatrième siècle avec la chute des Jin,

et le rééquilibrage spatial et économique de l'empire vers le sud-est de l'empire,

qui deviendra le centre de gravité du monde chinois jusqu'à aujourd'hui.

Politiquement, avec la fin de l'unité impériale des Han, on prend finalement conscience que la

division est possible, et la volonté de revenir à l'unité impériale va tarauder

tous les monarques suivants. Et quand l'unité se réalise de nouveau avec la réunification des Jin,

elle ne dure pas. Le célèbre roman des Trois Royaumes commence d'ailleurs par une phrase

devenue célèbre : « Ce qui fut longtemps divisé doit assurément, un jour, retrouver

son unité. Et ce qui, longtemps, fut uni, doit un jour, fatalement, se diviser à nouveau ».

Culturellement en tout cas, les batailles et les intrigues de la période des trois

royaumes nourrissent l'imaginaire des auteurs et de la population. On assiste à la naissance

de véritables super-héros, des archétypes, inspirés directement des personnages historiques.

On trouve le souverain brillant et féroce incarné par Cao Cao, le héros téméraire sous les traits

de Zhang Fei et Guan Yu, le stratège de génie avec Zhuge Liang. Au delà de ça,

si on a beaucoup insisté sur le côté guerrier de ces protagonistes,

ils ont également pu faire évoluer l'art. Il ne faut pas oublier que Cao Cao a aussi été un

immense poète ! La multiplication des peintures, des statues, des œuvres littéraires et finalement

même de cultes religieux consacrés aux généraux comme Guan Yu et Zhang Fei signale l'importance

grandissante à ce type de personnages, qui finissent par être tellement populaire

qu'ils finissent pas dépasser la figure de certains des souverains qu'ils servaient.

Le célèbre Guan Yu, c'est carrément devenu une figure divine qui en

Chine est célébré des policiers jusqu'aux malfrats. Quand même !

Ce qui est sûr c'est que la perception des trois royaumes, de nos jours,

est un peu faussée par les légendes qui entourent la période et par ce côté super héros qu'on a

donné aux différentes protagonistes de l'histoire. Liu Bei, qui était carré,

très martial, devient bienveillant mais faible ; Zhuge Liang, avait beaucoup de qualité mais

elles ont sans doute été exagérées avec le temps en partie parce qu'il a choisit de

rester à sa place de conseiller sans tenter de prendre le pouvoir. Enfin, l'importance réelle

de la bataille de la falaise rouge a éclipsé d'autres conflits, au moins aussi importants,

comme la bataille du mont Dingjun de 219 entre le Shu et le Wei. Mais quoi qu'on en dise,

les Trois Royaumes ont eu et continuent de tenir une place unique dans l'histoire chinoise.

Merci à tous d'avoir suivi cet épisode écrit avec Alexis Lycas, maître de conférences en histoire de

la Chine médiévale à l'école pratique des hautes études. Merci à Tianci Media une nouvelle fois

qui permet à cette série autour de l'Histoire de la Chine d'exister. N'oubliez pas de vous partager

et de commenter si ça vous a plu, de me suivre ici ou sur ma chaîne bonus Nota

Bonus sur laquelle vous pouvez retrouver plein de vidéos supplémentaires dont des entretiens

avec des historiens et des archéologues. On se revoit très vite par ici ! Ciao !

La mythique histoire des 3 royaumes - Histoire de la Chine Die mythische Geschichte der drei Königreiche - Geschichte Chinas The mythical story of the 3 kingdoms - History of China A história mítica dos 3 reinos - História da China Мифическая история 3 царства - История Китая Den mytiska berättelsen om de tre kungadömena - Kinas historia

Mes chers camarades, bien le bonjour !

Pour ceux d'entre vous qui ont beaucoup joué aux  jeux vidéo, jadis, dans des temps lointain...quand

on avait encore le temps...C'était  bien...Bref...pour beaucoup de joueurs,

le simple fait d'évoquer l'Histoire de la Chine  vous fait replonger inévitablement dans la saga

Dynasty Warriors : un jeu de baston où tu incarnes  un général et donc le but est principalement de Dynasty Warriors: a fighting game where you play the role of a general and the goal is to

taper sur tout ce qui bouge en pleine période  des trois royaumes, au 3eme siècle de notre ère !

D'ailleurs cette période a souvent servi  de trame de fond pour d'autres jeux vidéo, In fact, this period has often served as a backdrop for other video games,

des séries et des films comme Falaise  rouge de John Woo. Les Trois royaumes, series and films such as John Woo's Red Cliff. The Three Kingdoms,

c'est aussi un roman de cape et d'épée  du quatorzième siècle de Luo Guanzhong, is also a fourteenth-century cloak-and-dagger novel by Luo Guanzhong,

qui est à la littérature chinoise ce que les  Trois mousquetaires sont à la française. Les

Trois royaumes, c'est encore d'innombrables  expressions passées dans la langue courante.

Par exemple l'expression française « quand  on parle du loup » se dit en chinois « quand

on parle de Cao Cao », du nom du protagoniste  principal du future royaume du Nord, le Wei,

durant cette période. Les Trois royaumes, c'est  enfin des cultes, rendus en divers endroits

du monde chinois, à plusieurs héros, dont Guan  Yu et Zhang Fei, du royaume méridional du Shu.

C'est tout ça, mais c'est surtout une  période historique, courte et intense,

à laquelle sont associés des personnages  charismatiques qui sont passés, en presque

deux millénaires, de l'histoire à la légende.  Je vous propose donc aujourd'hui une première

approche des Trois royaumes où l'on va  découvrir le contexte général bien sûr,

mais aussi l'écriture et l'interprétation  de cette période complexe ! C'est parti !

Avant de rentrer dans le dur du sujet,  je vous propose de faire un petit point

sur les sources que l'on a à propos  de la période des trois royaumes.

Aujourd'hui l'histoire officielle de la  période est la Monographie des Trois royaumes,

écrite par Chen Shou à la fin du troisième  siècle. Mais elle ne fut pas la seule,

et Chen Shou s'est sans doute inspiré  d'autres histoires contemporaines,

bien que la plupart aient été perdues  avec le temps. Comme les deux premières

histoires dynastiques chinoises que sont  les Mémoires historiques de Sima Qian et le

Livre des Han de Ban Gu, la Monographie des  Trois royaumes est une œuvre individuelle,

et cela nous permet de suivre la prose de  l'auteur et ses interrogations au plus près.

Et ça c'est super important, parce que ça nous  laisse une trace sans le vernis bureaucratique qui

va venir recouvrir beaucoup d'œuvres collectives  qui seront issues du bureau de l'histoire,

une institution en charge de la compilation  officielle des histoires dynastiques qui

sera mise en place au septième siècle. Une  sorte de fabrique à Roman National quoi.

L'ouvrage est divisé en trois parties,  chaque royaume se voyant accorder au

moins une quinzaine de chapitres, et Chen  Shou fait une sorte d'inventaire de tous les

personnages de la période et des actions  qu'ils peuvent faire. Mais le livre est

relativement court et sera complétée plus d'un  siècle plus tard, sur initiative impériale,

par les commentaires de Pei Songzhi qui  enrichissent et approfondissent le texte initial.

Et c'est cette forme là qui est parvenue

jusqu'à nous pour y voir plus clair ! Outre la production littéraire de certains

acteurs comme Cao Cao et ses fils Cao Pi  et Cao Zhi qui étaient de grands poètes,

on bénéficie depuis une vingtaine d'année de la  mise au jour d'archives administratives déposées

dans des puits, notamment à Changsha, une ville  méridionale située dans la province actuelle du

Hunan, et qui était à l'époque entre les royaumes  de Wu et de Shu. Des documents qui nous permettent

d'affiner notre compréhension de l'histoire  de la période, notamment au niveau local.

L'autre truc paradoxal qu'on doit absolument dire  pour comprendre un peu la période, c'est un truc

assez paradoxal. Les trois royaumes, c'est une  période qui s'étale de la chute de la dynastie

des Han en 220 à la réunification éphémère par  celle des Jin en 280. Pourtant, la plupart des

événements que l'on connait aujourd'hui des trois  royaumes se sont déroulés avant, au cours des

trente années de la lente et douloureuse fin de  règne des Han. Bizarre non ? Et bah oui et non !

En fait ça pose la question de la  périodisation : Pour certains les

trois royaumes c'est tout autant la  fin de l'Antiquité chinoise avec le

déclin de la dynastie de Han que le début  des Six Dynasties, qui se déroule durant

le haut Moyen âge chinois que l'on fait  aujourd'hui débuter avec la chute des Han,

et qui s'achève à la fin du sixième siècle avec  la réunification impériale réalisée par les Sui.

En tout cas ce qui est sûr c'est que cette  histoire des trois royaumes est écrite après coup,

à partir de 280, soit la date de la fin desdits  royaumes. Et puis vous imaginez bien qu'on appelle

ça les « Trois Royaumes » mais que chaque royaume  de l'époque se considérait chacun comme les seuls

restaurateurs de l'unité impériale.  Ils étaient là pour gagner hein !

Tout ça pose aussi une autre question,  d'où est écrite cette histoire ? Il est

assez évident que selon la cour dont dépendent  les scribes et les historiens, on va légitimer

telle ou telle dynastie plutôt qu'une autre.  Du coup même si on a l'impression d'avoir une

écriture en apparence factuelle d'événements,  ce n'est pas tellement le cas ! Et d'ailleurs on

le détecte notamment quand certains souverains  se font appeler par leur nom personnel au lieu

d'employer leur nom de temple, c'est à dire  le titre honorifique qu'on leur donne après

leur mort. Généralement si vous lisez ça, c'est  qu'il y a anguille sous roche dans le texte !

Voilà, on posé le cadre, maintenant on va enfin  pouvoir rentrer dans le vif du sujet : la BASTON !

La première étincelle qui marque le déclin  des Han est la Révolte des Turbans jaunes en

184\\. Une sorte de secte taoïste qui profite d'une  grande crise agraire pour fédérer des centaines de milliers d'adeptes partout sur le territoire avant  d'organiser un soulèvement contre l'empereur.

Le pouvoir parvient à mater ce mouvement en  mobilisant plusieurs généraux et leurs troupes.

Problème : quand ils s'imposent par les armes, ces  généraux ont souvent des idées derrière la tête…

C'est le cas de Dong Zhuo qui se rebelle à son  tour et fait alors peser une menace terrible

sur le nord. En 189, les puissants eunuques  de l'empereur sont assassinés à Luoyang,

la cour de la capitale des Han de  l'Est, et la ville est ensuite mise

à feu et à sang sous l'action des  troupes commandées par Dong Zhuo.

Cao Cao, un autre général ambitieux qui  est également sorti victorieux de ses

combats contre les Turbans jaunes, a la présence  d'esprit de ne pas se retourner contre l'empire,

et il prend au contraire la tête des forces  loyalistes pour contenir le traitre Dong Zhuo. Une

dizaine d'années et de combats plus tard, Cao Cao  finit par contrôler la cour et le Nord du pays,

mais il préfère ne pas déposer l'empereur,  qui lui sert de symbole de légitimité.

Mais c'est vraiment pour la façade hein !  Derrière, c'est bien lui qui est aux manettes !

Dans le sud-est, la situation est différente.  Suite à la mort soudaine de son frère ainé en 200,

Sun Quan , qui n'a que dix-huit ans, prend  le pouvoir dans la zone du cours inférieur

du fleuve Bleu, le Yang-tzeu. Il doit  à la fois faire face aux ambitions de

ses propres généraux et se prémunir  face aux envies expansionnistes de

Cao Cao qui lorgne sur son territoire.  Au prix de plusieurs succès militaires,

il consolide son pouvoir et organise son  royaume à partir de l'actuelle ville de Nankin,

qui restera la capitale des autres États dits  des Six dynasties, jusqu'au sixième siècle.

Au sud-ouest, Liu Bei contrôle à partir  de l'épisode des Turbans jaunes une région

rayonnant autour de la province actuelle du  Sichuan. Il bénéficie, dans ce qui ressemble

à une entreprise collective, de l'aide de ses  fidèles amis et généraux Zhang Fei et Guan Yu,

ainsi que du conseiller Zhuge Liang qui le  pousse à affirmer ses ambitions politiques.

En 208, les deux futurs royaumes méridionaux de  Liu Bei et de Sun Quan s'allient après d'intenses

échanges pour combattre Cao Cao lors de  la fameuse bataille de la falaise rouge.

Sans doute LA bataille qui m'a marqué  dans tous les dynasty warriors.

Mais c'est pas une info qui apporte vraiment  du contexte à l'épisode...donc euh...voilà.

La coalition remporte en tout cas la victoire  et sera marqué à la fois par le génie stratégie

de Zhuge Liang et les prouesses intrépides des  généraux du sud à la tête de quelques dizaines

de milliers de soldats, face à la puissance de feu  et à l'assurance de Cao Cao, qui ne s'imaginait

pas perdre, surtout avec un contingent évalué par  certaines sources à huit cent mille hommes ! La

défaite est dure à avaler pour les armées du nord  et fige la répartition du territoire entre les

différents acteurs du conflit, privant Cao  Cao de son rêve : réunifier les royaumes.

En 220, c'est paradoxalement la mort de Cao Cao  qui marque la fin officielle des Han. En effet,

Cao Pi, le fils aîné de Cao Cao, profite  de succéder à son père pour déposer le

dernier empereur des Han et fonde l'État de  Wei, dont il prend la tête. La proclamation

du Wei en 220 est donc la date retenue  pour faire débuter les Trois Royaumes.

Et évidemment tout le monde veut  se placer au-dessus des autres.

Cao Pi se déclare empereur et récipiendaire  du mandat céleste, il se considère comme le

souverain unique de tout ce que l'on trouve  « Sous-le-Ciel », soit le monde connu. Liu

Bei lui emboîte le pas et se déclare empereur  dans la foulée, en 221. Il tire quant à lui sa

légitimité d'une filiation avec le clan régnant  des Han, dont le nom de famille était Liu et

dont il propose ainsi la continuation, bien que  dans une région différente. L'année suivante,

c'est au tour de Sun Quan à l'est de se proclamer  roi, avant de prendre le titre d'empereur, en 229.

On a donc à cette époque une partition de  l'Empire chinois en trois. Mais à part ça,

est ce qu'il se passe beaucoup de choses au  niveau social ou institutionnel ? Et bien

Oui et non : les différents souverains mettent en  place certaines politiques agricoles relativement

efficaces, ils entretiennent et améliorent les  infrastructures routières, mais les conflits

internes aux royaumes ont forcé de nombreuses  migrations de populations en plus d'affaiblir

chacune de ces entités face aux menaces  extérieures, principalement face aux populations

non chinoises du nord, qui contrôleront  le nord du pays dans les siècles suivants.

Politiquement, la période est marquée par la  montée en puissance au nord du clan des Sima,

qui vont faire au clan Cao du Wei, ce que ces  mêmes Cao avaient fait aux Han. Cette période

transitoire s'achève en 280, lorsque  le Wu succombe, après le Wei et le Shu,

aux mains des Jin, dont la prise de pouvoir  s'inscrit dans la continuité impériale des Han.

Pour résumer, c'est une période brève  mais qui, dans les siècles suivants,

a un impact politique et culturel assez  important ! Mais pourquoi ? On pourrait

comparer ça à la crise qui parcourt l'empire  romain au troisième siècle. Au final les Trois

royaumes c'est une longue crise qui ébranle  l'empire chinois mais qui s'achève par la

restauration impériale des Jin en 280. Et  les Jin, ça change pas beaucoup de Han en

réalité ! Le véritable changement a plus sûrement  lieu au quatrième siècle avec la chute des Jin,

et le rééquilibrage spatial et économique  de l'empire vers le sud-est de l'empire,

qui deviendra le centre de gravité  du monde chinois jusqu'à aujourd'hui.

Politiquement, avec la fin de l'unité impériale  des Han, on prend finalement conscience que la

division est possible, et la volonté de  revenir à l'unité impériale va tarauder

tous les monarques suivants. Et quand l'unité se  réalise de nouveau avec la réunification des Jin,

elle ne dure pas. Le célèbre roman des Trois  Royaumes commence d'ailleurs par une phrase

devenue célèbre : « Ce qui fut longtemps  divisé doit assurément, un jour, retrouver

son unité. Et ce qui, longtemps, fut uni, doit  un jour, fatalement, se diviser à nouveau ».

Culturellement en tout cas, les batailles  et les intrigues de la période des trois

royaumes nourrissent l'imaginaire des auteurs  et de la population. On assiste à la naissance

de véritables super-héros, des archétypes,  inspirés directement des personnages historiques.

On trouve le souverain brillant et féroce incarné  par Cao Cao, le héros téméraire sous les traits

de Zhang Fei et Guan Yu, le stratège de  génie avec Zhuge Liang. Au delà de ça,

si on a beaucoup insisté sur le  côté guerrier de ces protagonistes,

ils ont également pu faire évoluer l'art. Il  ne faut pas oublier que Cao Cao a aussi été un

immense poète ! La multiplication des peintures,  des statues, des œuvres littéraires et finalement

même de cultes religieux consacrés aux généraux  comme Guan Yu et Zhang Fei signale l'importance

grandissante à ce type de personnages,  qui finissent par être tellement populaire

qu'ils finissent pas dépasser la figure de  certains des souverains qu'ils servaient.

Le célèbre Guan Yu, c'est carrément  devenu une figure divine qui en

Chine est célébré des policiers  jusqu'aux malfrats. Quand même !

Ce qui est sûr c'est que la perception  des trois royaumes, de nos jours,

est un peu faussée par les légendes qui entourent  la période et par ce côté super héros qu'on a

donné aux différentes protagonistes de  l'histoire. Liu Bei, qui était carré,

très martial, devient bienveillant mais faible  ; Zhuge Liang, avait beaucoup de qualité mais

elles ont sans doute été exagérées avec le  temps en partie parce qu'il a choisit de

rester à sa place de conseiller sans tenter de  prendre le pouvoir. Enfin, l'importance réelle

de la bataille de la falaise rouge a éclipsé  d'autres conflits, au moins aussi importants,

comme la bataille du mont Dingjun de 219 entre  le Shu et le Wei. Mais quoi qu'on en dise,

les Trois Royaumes ont eu et continuent de  tenir une place unique dans l'histoire chinoise.

Merci à tous d'avoir suivi cet épisode écrit avec  Alexis Lycas, maître de conférences en histoire de

la Chine médiévale à l'école pratique des hautes  études. Merci à Tianci Media une nouvelle fois

qui permet à cette série autour de l'Histoire de  la Chine d'exister. N'oubliez pas de vous partager

et de commenter si ça vous a plu, de me  suivre ici ou sur ma chaîne bonus Nota

Bonus sur laquelle vous pouvez retrouver plein  de vidéos supplémentaires dont des entretiens

avec des historiens et des archéologues.  On se revoit très vite par ici ! Ciao !