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Nota Bene, Devenir plus fort en transformant chaque citoyen en soldat ?

Devenir plus fort en transformant chaque citoyen en soldat ?

Mes chers camarades bien le bonjour ! Citoyen, soldat. Deux termes qui sont pour

nous aujourd'hui complètement séparés. Et pour cause, le service militaire n'existe

plus,en tout cas en France, et porter les armes ne correspond plus vraiment à notre

idéal de la vie citoyenne. Ces deux fonctions pourtant, citoyen et soldat ont été intimement

liées durant toute l'existence de la citoyenneté. Dans l'Histoire, le citoyen c'est celui

qui vote mais c'est surtout celui qui se bat.

Pour comprendre l'origine de cette association entre le citoyen et le combattant, il faut

retourner aux origines de la vie civique, loin, très loin dans la méditerranée, où

l'air sent bon l'huile d'olive et les torses musclés !

C'est un secret pour personne,

la citoyenneté, c'est-à-dire le fait d'appartenir et de participer à la vie politique d'une

cité, est né il y a plus de 2 500 ans en Grèce.

Le territoire de la Grèce au V et IVe siècle avant notre ère est composé d'une tonne

de cités, un millier disent certains. Et ces cités entretiennent des rapports… changeants

dirons-nous… L'histoire grecque est en effet jalonnée

d'une multitude de conflits, avec des alliances qui se font et se défont, des invasions extérieures,

des expéditions punitives, etc. Bref, un état de guerre quasi-permanent qui demande

à ces petits territoires d'entretenir une force de défense efficace et rapidement mobilisable.

C'est là que le citoyens interviennent. Les citoyens sont la classe supérieure des

habitants de la cité. Au Ve siècle avant notre ère, ils étaient sans doute à peine

10 % des habitants d'Athènes, l'exemple que nous connaissons le mieux. Ils vivent

surtout de leur travail agricole, aidés par leurs esclaves, certains sont immensément

riches, d'autres beaucoup plus modestes, mais tous ont le privilège de pouvoir prendre

part aux institutions. Alors, pourquoi choisir ces personnes d'importance, ces propriétaires

terriens impliqués dans la vie politique pour aller mourir au combat ?

Et bien pour trois raisons principales. Déjà, parce que mourir au combat justement,

ça n'arrive pas si souvent que ça. Bien aidés par des péplums du genre « 300 » montrant

des cascades d'hémoglobine, ou bien par les images des guerres mondiales plus proches

de nous, on imagine souvent que la guerre de l'Antiquité devait être aussi une sorte

de chaos de soldats engagés dans une boucherie effroyable. En réalité, les Grecs étaient

plutôt des gens civilisés, ou du moins ils essayaient de l'être. Et les guerres intestines

se réglaient souvent en batailles de quelques centaines d'hommes, consistant plus à contrôler

le terrain qu'à massacrer l'ennemi. Lors de ces batailles on ne dénombre généralement

que quelques morts. Un seul exemple suffit pour comprendre cette idée, la bataille de

Marathon. Légendaire entre toutes, victoire épique de 10 000 Grecs menés par les Athéniens

contre l'envahisseur perse ayant réuni plus de 40 000 hommes. L'affrontement le

plus énorme de l'époque. Nombre de tués chez les Grecs ? 192. Moins

de 2 % de l'effectif. On ne craint pas tellement la dépopulation.

La deuxième raison pour laquelle les citoyens sont utilisés comme soldats est tout simplement

une question financière. L'équipement de soldat coûte cher. Enfin, plus ou moins,

mais les citoyens sont les seuls à pouvoir se payer de quoi se battre et entretenir le

matériel. Le degré de richesse du citoyen détermine ensuite quel corps d'armée il

intègre. Les plus aisés, capables d'entretenir un cheval et les armes qui vont avec seront

cavaliers, le poste le plus prestigieux. Le gros de l'effectif, ce qu'on pourrait

appeler la « classe moyenne » des citoyens occupe le poste d'hoplite, c'est-à-dire

l'infanterie lourde, équipée d'armures de bronze : casque, bouclier et jambières

(cnémides). Les plus pauvres se battent soit comme fantassins légers ou archers soit deviennent

rameurs dans la flotte. Ce dernier rôle peut plus facilement être

attribué à des non-citoyens voire des esclaves en cas de mobilisation générale.

Enfin, on préfère les citoyens pour intégrer l'armée car ce sont les seuls qui ont le

temps de s'entraîner. En effet, les formations d'infanterie grecque sont très ordonnées.

Les soldats forment un rang solidaire où chacun protège le flanc droit de son voisin

grâce à son bouclier. Cette tactique appelée phalange est redoutablement efficace mais

assez complexe à manœuvrer. Les citoyens suivent donc un service militaire assez long

et contraignant. A Athènes, il nous est connu grâce à Aristote (dans La Constitution d'Athènes)

qui décrit un cursus de deux ans, l'éphébie, dans lequel le jeune citoyen apprend le maniement

des armes et intègre progressivement l'armée régulière.

Dans la Grèce antique, n'est donc pas soldat qui veut, et l'honneur de la citoyenneté

s'accompagne de devoirs militaires. Pour des raisons logiques, et d'efficacité,

le métier de soldat est couplé à celui de citoyen. Le citoyen, comme le soldat des

phalanges se plie à l'effort collectif, anonyme et ordonné.

Les Romains sont très influencés par la culture grecque et se disent d'ailleurs

être descendants des Troyens. Se foutant régulièrement sur la tronche avec les cités

grecques de leur voisinage, ils décident de reprendre ni plus ni moins que le même

système, en y apportant toutefois quelques subtilités.

Les Romains considèrent tout d'abord la citoyenneté comme un modèle universel. L'impérialisme

romain voit même dans sa diffusion une sorte de mission civilisatrice. Rome reconnaît

dans l'ensemble des territoires conquis, en Italie puis ailleurs, des cités, où les

hommes libres sont considérés comme des citoyens. Toutefois, ces hommes fraîchement

conquis sont appelés pérégrins, ils ne sont pas encore citoyens romains. Le summum

de la citoyenneté en quelque sorte. C'est justement ces derniers qui vont être appelés

à intégrer l'armée. Lors d'une cérémonie nommée « dilectus

», et qui permet de vérifier le statut de citoyen, la richesse nécessaire pour s'équiper

et les aptitudes physiques et intellectuelles, les hommes sont recrutés pour l'année

à venir. A l'époque républicaine tous les citoyens doivent le service militaire.

Il existe également le « tumultus » qui est un recrutement dans l'urgence, en cas

d'invasion. On sera peut-être un peu moins regardant

dans ce cas-là pour savoir si les papiers sont en règle…

En Italie, les guerres sociales qui sont des guerres entre Rome et ses alliés Italiens

et qui s'achèvent en 89 av. notre ère., tournent justement autour de cette question.

Les alliés, quitte à servir Rome aimeraient tant qu'à faire obtenir la citoyenneté.

Après une série de bastons et de négociations, ils obtiennent gain de cause. Tous les Italiens

sont désormais citoyens romains, ce qui a pour effet de doubler le nombre d'hommes

disponibles. Au milieu du Ier siècle avant notre ère. Rome aligne 24 légions de 4200

hommes. Pendant longtemps, l'afflux de volontaires

a permis de maintenir les effectifs de l'armée romaine. En effet, le métier de soldat attire

de plus en plus de citoyens pérégrins en raison des avantages qu'il donne : solde

importante, retraite (praemia), distribution de terres, sans oublier que le pérégrin

reçoit la citoyenneté romaine après son service.

Rome fait donc largement appel à ses citoyens non-romains dans les troupes auxiliaires,

pour constituer les flancs des légions romaines. Cela permet de profiter au passage des spécialités

militaires des peuples conquis : archers orientaux, cavaliers numides, etc. qui complètent à

merveille les manipules d'infanterie lourde au centre du dispositif.

À partir d'Auguste, le premier empereur de Rome, un service militaire de 25 ans dans

les troupes auxiliaires devient obligatoire. En prenant sa retraite après 25 ans dans

l'armée, le soldat devient citoyen romain. Une belle manière de s'assurer des troupes

nombreuses, professionnelles qui plus est, et de diffuser la citoyenneté et l'attachement

à l'Empire. Ce recrutement est certes très efficace,

mais il peut aussi comporter des dangers. Engager des citoyens éduqués et avertis

de leurs droits n'est pas la même chose que d'asservir des hordes d'esclaves illettrés

et ne parlant pas la langue. Les armées romaines ont donc eu, au cours du temps, une fâcheuse

tendance à se politiser. Lors des guerres civiles entre César et Pompée,

mais surtout par la suite pendant la période impériale, les légions sont de véritables

faiseuses d'empereurs. Elles acclament leurs généraux, qui se déclarent donc légitimement

élus par les citoyens. Le citoyen-soldat permet certes la défense de l'Empire, mais

il peut aussi favoriser les coups d'état…

Un peu passé de mode au Moyen-âge dans une

Europe majoritairement féodale, le modèle de la cité et de la citoyenneté réapparaît

cependant à la Renaissance. La redécouverte des auteurs anciens, et des théories politiques

grecques notamment, remet au goût du jour l'idéal de la vie civique, et avec lui,

celui du soldat-citoyen. Ce qui n'est pendant longtemps qu'un doux

rêve de philosophe, apparaît avec la Révolution française et la fin de l'absolutisme, comme

un projet plausible. Sous l'Ancien Régime, les armées des souverains

étaient en effet composées de professionnels et complétées par des milices provinciales,

ainsi que par des compagnies de mercenaires, à l'efficacité aléatoire. Le système

de privilèges réservait par ailleurs le commandement aux membres de l'aristocratie,

seuls habilités traditionnellement à diriger des troupes.

L'abolition de ces privilèges en 1789 puis la proclamation de la République modifient

cette organisation. L'ensemble de la carrière militaire devient accessible aux hommes de

basse extraction, passés qui plus est, du statut de sujets de Sa Majesté à celui de

citoyens de la République Française. Dès l'été 1789, l'une des priorités

des révolutionnaires est logiquement de contester au roi le monopole de la force. L'article

12 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen, précise d'ailleurs que « la

garantie des droits de l'homme et du citoyen nécessite une force publique ». La constitution

de la Garde Nationale, d'abord créée spontanément comme une sorte de cohorte parisienne réservée

aux bourgeois, remplit peu à peu ce rôle et devient un acquis primordial.

Entre 1790 et 1791, la Garde Nationale devient en effet une forme d'armée parallèle citoyenne,

prête si besoin à contrecarrer les actions des armées royales.

Constituée d'hommes instruits, citoyens actifs, c'est-à-dire riches et payant le

droit de voter, la Garde Nationale prend parti pour la Révolution, par exemple en escortant

jusqu'à Paris le roi en fuite démasqué à Varennes. A partir du 30 juillet 1792,

elle est ouverte à tous, citoyens pauvres compris. Les événements s'accélèrent

alors : les Gardes Nationaux prennent d'assaut des Tuileries en août, surveillent l'exécution

du roi et participent à la répression des royalistes.

Les citoyens de toutes origines, en servant dans ce corps d'armée, avaient désormais

la possibilité d'œuvrer à la défense de leurs intérêts et de leur nation, et

non plus de servir les désirs d'un tyran !

Le meilleur exemple pour voir ce changement est tout simplement le refrain de La Marseillaise

: « Aux armes, citoyens ! Formez vos bataillons ! Marchons, marchons ! Qu'un sang impur...

Abreuve nos sillons ! ». Il appelle les « citoyens », et évoque un « sang impur » souvent

mal interprété. Ce « sang impur », c'est en réalité celui des citoyens lambda par

opposition à celui des nobles réputés purs et seuls habilités à mener l'armée.

Le sang des citoyens est donc versé pour la défense de leurs « sillons », leurs

champs, leurs terres, gagnées avec la fin du servage et de la féodalité. Rouget de

Lisle, l'auteur de La Marseillaise, montre dans son chant de guerre les espoirs de ces

nouveaux citoyens pour qui intégrer l'armée nationale représente une reconnaissance et

l'égalité tant souhaitée. Avec la Révolution, renait donc le mythe

du citoyen-soldat : une élite instruite et policée œuvrant au bien de la communauté

à la fois par son travail et son engagement civique, et même prête à prendre les armes

contre les oppresseurs si besoin. En 1792, la République accentue encore cet

idéal en associant potentiellement tous les hommes à ce rôle autrefois réservé aux

plus riches. Avec la fin des événements révolutionnaires, la Garde Nationale est

peu à peu utilisée comme une réserve d'hommes pour l'armée régulière. Les régiments

de volontaires sont, par une série de réformes, intégrés à l'armée.

Après s'être d'abord basé sur les levées en masse, comme celle de 1793 dont nous avons

déjà parlé lors de l'épisode sur la guerre de Vendée, le système du citoyen-soldat

volontaire et tenu par l'honneur est finalement transformé en 1798 avec l'instauration

du service militaire par tirage au sort. La loi qui le crée précise : « Tout Français

est soldat et se doit à la défense de la patrie ». Les citoyens tirés au sort (environ

un tiers d'une classe d'âge) doivent alors effectuer un service militaire entre

leurs 20 et 25 ans. Après la Révolution, le tirage au sort sera

abandonné en 1905, et 91 ans plus tard, Jacques Chirac annonce finalement la « suspension

» du service militaire. Fin de carrière pour le citoyen-soldat, retour à l'armée

de métier, comme sous l'Ancien Régime. Cette double fonction du citoyen-soldat s'est

donc transformée au cours de l'Histoire, les Grecs y voyaient une évidence pratique

en même temps qu'un idéal démocratique, les Romains une manière de soutenir leur

effort de conquête et de pacification, et les révolutionnaires français une revendication

d'égalité et un moyen d'émancipation. Le choix de la plupart des États démocratiques

contemporains est celui d'une population très largement instruite mais désarmée.

Pouvoir supprimer son rôle militaire au citoyen témoigne est en fait d'une chose : que

nos sociétés sont largement pacifiées ! Et puis on ne va pas se le cacher, les moyens

technologiques à notre disposition, missiles nucléaires en tête, rendent inutiles la

mobilisation en masse. Tu as beau envoyer 300 000 types tête baissée à travers les

champs, s'ils se prennent une belle Tsar Bomb sur la tronche, ils font moins les malins...

En tout cas, on peut dire que l'évolution des moyens militaires a donc aussi fait évoluer

la citoyenneté de manière assez définitive.

Voilà les amis, j'espère que ce petit topo sur les citoyens-soldats vous aura appris

quelques trucs ! Merci à Lucas Pacotte qui m'a aidé à préparer cette émission et

merci à tous les internautes qui soutiennent l'émission via Tipeee, Utip ou directement

sur Youtube avec le bouton “Rejoindre”. On compte sur vous pour répandre la bonne

parole en partageant l'émission, à très vite sur Nota Bene !

Devenir plus fort en transformant chaque citoyen en soldat ? Stärker werden, indem jeder Bürger zum Soldaten gemacht wird? Become stronger by turning every citizen into a soldier? ¿Para hacernos más fuertes convirtiendo a todos los ciudadanos en soldados? با تبدیل هر شهروند به یک سرباز قوی تر شوید؟ Om sterker te worden door van elke burger een soldaat te maken? Stać się silniejszym, zmieniając każdego obywatela w żołnierza? Para nos tornarmos mais fortes, transformando cada cidadão num soldado? Att bli starkare genom att göra varje medborgare till en soldat? Her vatandaşı bir askere dönüştürerek daha güçlü olmak için mi? 通过将每个公民都变成士兵来变得更强大?

Mes chers camarades bien le bonjour ! Citoyen, soldat. Deux termes qui sont pour Hello my dear comrades! Citizen, soldier. Two terms that are for

nous aujourd'hui complètement séparés. Et pour cause, le service militaire n'existe us today completely separated. And for good reason, military service does not exist

plus,en tout cas en France, et porter les armes ne correspond plus vraiment à notre more, in any case in France, and bearing arms no longer really corresponds to our

idéal de la vie citoyenne. Ces deux fonctions pourtant, citoyen et soldat ont été intimement

liées durant toute l'existence de la citoyenneté. Dans l'Histoire, le citoyen c'est celui

qui vote mais c'est surtout celui qui se bat.

Pour comprendre l'origine de cette association entre le citoyen et le combattant, il faut

retourner aux origines de la vie civique, loin, très loin dans la méditerranée, où

l'air sent bon l'huile d'olive et les torses musclés ! the air smells of olive oil and muscular torsos!

C'est un secret pour personne, It's a secret to no one,

la citoyenneté, c'est-à-dire le fait d'appartenir et de participer à la vie politique d'une

cité, est né il y a plus de 2 500 ans en Grèce. quoted, was born more than 2,500 years ago in Greece.

Le territoire de la Grèce au V et IVe siècle avant notre ère est composé d'une tonne

de cités, un millier disent certains. Et ces cités entretiennent des rapports… changeants of cities, a thousand some say. And these cities maintain… changing relationships

dirons-nous… L'histoire grecque est en effet jalonnée shall we say… Greek history is indeed marked

d'une multitude de conflits, avec des alliances qui se font et se défont, des invasions extérieures, of a multitude of conflicts, with alliances that are made and broken, external invasions,

des expéditions punitives, etc. Bref, un état de guerre quasi-permanent qui demande

à ces petits territoires d'entretenir une force de défense efficace et rapidement mobilisable.

C'est là que le citoyens interviennent. Les citoyens sont la classe supérieure des

habitants de la cité. Au Ve siècle avant notre ère, ils étaient sans doute à peine inhabitants of the city. In the 5th century BC, they were probably barely

10 % des habitants d'Athènes, l'exemple que nous connaissons le mieux. Ils vivent

surtout de leur travail agricole, aidés par leurs esclaves, certains sont immensément

riches, d'autres beaucoup plus modestes, mais tous ont le privilège de pouvoir prendre

part aux institutions. Alors, pourquoi choisir ces personnes d'importance, ces propriétaires

terriens impliqués dans la vie politique pour aller mourir au combat ?

Et bien pour trois raisons principales. Déjà, parce que mourir au combat justement,

ça n'arrive pas si souvent que ça. Bien aidés par des péplums du genre « 300 » montrant it doesn't happen that often. Well helped by peplums like "300" showing

des cascades d'hémoglobine, ou bien par les images des guerres mondiales plus proches

de nous, on imagine souvent que la guerre de l'Antiquité devait être aussi une sorte

de chaos de soldats engagés dans une boucherie effroyable. En réalité, les Grecs étaient

plutôt des gens civilisés, ou du moins ils essayaient de l'être. Et les guerres intestines

se réglaient souvent en batailles de quelques centaines d'hommes, consistant plus à contrôler were often settled in battles of a few hundred men, consisting more of controlling

le terrain qu'à massacrer l'ennemi. Lors de ces batailles on ne dénombre généralement the ground than to massacre the enemy. During these battles there are generally only

que quelques morts. Un seul exemple suffit pour comprendre cette idée, la bataille de

Marathon. Légendaire entre toutes, victoire épique de 10 000 Grecs menés par les Athéniens

contre l'envahisseur perse ayant réuni plus de 40 000 hommes. L'affrontement le against the Persian invader having gathered more than 40,000 men. The clash on

plus énorme de l'époque. Nombre de tués chez les Grecs ? 192. Moins

de 2 % de l'effectif. On ne craint pas tellement la dépopulation.

La deuxième raison pour laquelle les citoyens sont utilisés comme soldats est tout simplement

une question financière. L'équipement de soldat coûte cher. Enfin, plus ou moins,

mais les citoyens sont les seuls à pouvoir se payer de quoi se battre et entretenir le

matériel. Le degré de richesse du citoyen détermine ensuite quel corps d'armée il

intègre. Les plus aisés, capables d'entretenir un cheval et les armes qui vont avec seront

cavaliers, le poste le plus prestigieux. Le gros de l'effectif, ce qu'on pourrait riders, the most prestigious position. The bulk of the workforce, what we could

appeler la « classe moyenne » des citoyens occupe le poste d'hoplite, c'est-à-dire calling the "middle class" of citizens holds the position of hoplite, that is,

l'infanterie lourde, équipée d'armures de bronze : casque, bouclier et jambières

(cnémides). Les plus pauvres se battent soit comme fantassins légers ou archers soit deviennent (cnemids). The poorest fight either as light infantry or archers or become

rameurs dans la flotte. Ce dernier rôle peut plus facilement être rowers in the fleet. This latter role can more easily be

attribué à des non-citoyens voire des esclaves en cas de mobilisation générale. attributed to non-citizens or even slaves in the event of general mobilization.

Enfin, on préfère les citoyens pour intégrer l'armée car ce sont les seuls qui ont le

temps de s'entraîner. En effet, les formations d'infanterie grecque sont très ordonnées. time to train. Indeed, Greek infantry formations are very orderly.

Les soldats forment un rang solidaire où chacun protège le flanc droit de son voisin

grâce à son bouclier. Cette tactique appelée phalange est redoutablement efficace mais

assez complexe à manœuvrer. Les citoyens suivent donc un service militaire assez long quite difficult to operate. Citizens therefore follow a fairly long military service

et contraignant. A Athènes, il nous est connu grâce à Aristote (dans La Constitution d'Athènes) and binding. In Athens, it is known to us thanks to Aristotle (in The Constitution of Athens)

qui décrit un cursus de deux ans, l'éphébie, dans lequel le jeune citoyen apprend le maniement

des armes et intègre progressivement l'armée régulière.

Dans la Grèce antique, n'est donc pas soldat qui veut, et l'honneur de la citoyenneté In ancient Greece, therefore, is not a soldier who wants, and the honor of citizenship

s'accompagne de devoirs militaires. Pour des raisons logiques, et d'efficacité,

le métier de soldat est couplé à celui de citoyen. Le citoyen, comme le soldat des

phalanges se plie à l'effort collectif, anonyme et ordonné.

Les Romains sont très influencés par la culture grecque et se disent d'ailleurs The Romans are very influenced by the Greek culture and say themselves besides

être descendants des Troyens. Se foutant régulièrement sur la tronche avec les cités to be descendants of the Trojans. Fucking regularly on the face with the cities

grecques de leur voisinage, ils décident de reprendre ni plus ni moins que le même Greeks in their neighborhood, they decide to take over neither more nor less than the same

système, en y apportant toutefois quelques subtilités. system, while adding some subtleties.

Les Romains considèrent tout d'abord la citoyenneté comme un modèle universel. L'impérialisme

romain voit même dans sa diffusion une sorte de mission civilisatrice. Rome reconnaît

dans l'ensemble des territoires conquis, en Italie puis ailleurs, des cités, où les in all of the conquered territories, in Italy and then elsewhere, cities, where the

hommes libres sont considérés comme des citoyens. Toutefois, ces hommes fraîchement

conquis sont appelés pérégrins, ils ne sont pas encore citoyens romains. Le summum

de la citoyenneté en quelque sorte. C'est justement ces derniers qui vont être appelés citizenship in some way. It is precisely the latter who will be called

à intégrer l'armée. Lors d'une cérémonie nommée « dilectus

», et qui permet de vérifier le statut de citoyen, la richesse nécessaire pour s'équiper

et les aptitudes physiques et intellectuelles, les hommes sont recrutés pour l'année

à venir. A l'époque républicaine tous les citoyens doivent le service militaire.

Il existe également le « tumultus » qui est un recrutement dans l'urgence, en cas

d'invasion. On sera peut-être un peu moins regardant

dans ce cas-là pour savoir si les papiers sont en règle…

En Italie, les guerres sociales qui sont des guerres entre Rome et ses alliés Italiens

et qui s'achèvent en 89 av. notre ère., tournent justement autour de cette question.

Les alliés, quitte à servir Rome aimeraient tant qu'à faire obtenir la citoyenneté.

Après une série de bastons et de négociations, ils obtiennent gain de cause. Tous les Italiens

sont désormais citoyens romains, ce qui a pour effet de doubler le nombre d'hommes

disponibles. Au milieu du Ier siècle avant notre ère. Rome aligne 24 légions de 4200

hommes. Pendant longtemps, l'afflux de volontaires

a permis de maintenir les effectifs de l'armée romaine. En effet, le métier de soldat attire

de plus en plus de citoyens pérégrins en raison des avantages qu'il donne : solde more and more Peregrine citizens due to the benefits it gives: balance

importante, retraite (praemia), distribution de terres, sans oublier que le pérégrin

reçoit la citoyenneté romaine après son service.

Rome fait donc largement appel à ses citoyens non-romains dans les troupes auxiliaires,

pour constituer les flancs des légions romaines. Cela permet de profiter au passage des spécialités to form the flanks of the Roman legions. This allows you to take advantage of the specialties

militaires des peuples conquis : archers orientaux, cavaliers numides, etc. qui complètent à soldiers of the conquered peoples: oriental archers, Numidian horsemen, etc. which complement to

merveille les manipules d'infanterie lourde au centre du dispositif. the heavy infantry maneuvers in the center of the device marvel.

À partir d'Auguste, le premier empereur de Rome, un service militaire de 25 ans dans

les troupes auxiliaires devient obligatoire. En prenant sa retraite après 25 ans dans

l'armée, le soldat devient citoyen romain. Une belle manière de s'assurer des troupes

nombreuses, professionnelles qui plus est, et de diffuser la citoyenneté et l'attachement

à l'Empire. Ce recrutement est certes très efficace,

mais il peut aussi comporter des dangers. Engager des citoyens éduqués et avertis

de leurs droits n'est pas la même chose que d'asservir des hordes d'esclaves illettrés

et ne parlant pas la langue. Les armées romaines ont donc eu, au cours du temps, une fâcheuse and not speaking the language. The Roman armies therefore had, over time, an unfortunate

tendance à se politiser. Lors des guerres civiles entre César et Pompée,

mais surtout par la suite pendant la période impériale, les légions sont de véritables

faiseuses d'empereurs. Elles acclament leurs généraux, qui se déclarent donc légitimement

élus par les citoyens. Le citoyen-soldat permet certes la défense de l'Empire, mais

il peut aussi favoriser les coups d'état…

Un peu passé de mode au Moyen-âge dans une

Europe majoritairement féodale, le modèle de la cité et de la citoyenneté réapparaît

cependant à la Renaissance. La redécouverte des auteurs anciens, et des théories politiques

grecques notamment, remet au goût du jour l'idéal de la vie civique, et avec lui,

celui du soldat-citoyen. Ce qui n'est pendant longtemps qu'un doux

rêve de philosophe, apparaît avec la Révolution française et la fin de l'absolutisme, comme

un projet plausible. Sous l'Ancien Régime, les armées des souverains

étaient en effet composées de professionnels et complétées par des milices provinciales,

ainsi que par des compagnies de mercenaires, à l'efficacité aléatoire. Le système

de privilèges réservait par ailleurs le commandement aux membres de l'aristocratie, of privileges also reserved the command to members of the aristocracy,

seuls habilités traditionnellement à diriger des troupes.

L'abolition de ces privilèges en 1789 puis la proclamation de la République modifient The abolition of these privileges in 1789 followed by the proclamation of the Republic modified

cette organisation. L'ensemble de la carrière militaire devient accessible aux hommes de

basse extraction, passés qui plus est, du statut de sujets de Sa Majesté à celui de

citoyens de la République Française. Dès l'été 1789, l'une des priorités

des révolutionnaires est logiquement de contester au roi le monopole de la force. L'article revolutionaries is logically to challenge the king's monopoly of force. The article

12 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen, précise d'ailleurs que « la 12 of the Declaration of the Rights of Man and of the Citizen, specifies moreover that "the

garantie des droits de l'homme et du citoyen nécessite une force publique ». La constitution

de la Garde Nationale, d'abord créée spontanément comme une sorte de cohorte parisienne réservée

aux bourgeois, remplit peu à peu ce rôle et devient un acquis primordial. to the bourgeois, fills this role little by little and becomes an essential achievement.

Entre 1790 et 1791, la Garde Nationale devient en effet une forme d'armée parallèle citoyenne,

prête si besoin à contrecarrer les actions des armées royales.

Constituée d'hommes instruits, citoyens actifs, c'est-à-dire riches et payant le

droit de voter, la Garde Nationale prend parti pour la Révolution, par exemple en escortant right to vote, the National Guard sided with the Revolution, for example by escorting

jusqu'à Paris le roi en fuite démasqué à Varennes. A partir du 30 juillet 1792, to Paris the fleeing king unmasked at Varennes. From July 30, 1792,

elle est ouverte à tous, citoyens pauvres compris. Les événements s'accélèrent

alors : les Gardes Nationaux prennent d'assaut des Tuileries en août, surveillent l'exécution

du roi et participent à la répression des royalistes.

Les citoyens de toutes origines, en servant dans ce corps d'armée, avaient désormais

la possibilité d'œuvrer à la défense de leurs intérêts et de leur nation, et

non plus de servir les désirs d'un tyran !

Le meilleur exemple pour voir ce changement est tout simplement le refrain de La Marseillaise

: « Aux armes, citoyens ! Formez vos bataillons ! Marchons, marchons ! Qu'un sang impur... : " To arms, citizens ! Form your battalions! Let's walk, let's walk! Only an impure blood...

Abreuve nos sillons ! ». Il appelle les « citoyens », et évoque un « sang impur » souvent Water our furrows ! ". He calls the "citizens", and evokes an "impure blood" often

mal interprété. Ce « sang impur », c'est en réalité celui des citoyens lambda par

opposition à celui des nobles réputés purs et seuls habilités à mener l'armée. opposition to that of the nobles reputed to be pure and alone qualified to lead the army.

Le sang des citoyens est donc versé pour la défense de leurs « sillons », leurs

champs, leurs terres, gagnées avec la fin du servage et de la féodalité. Rouget de

Lisle, l'auteur de La Marseillaise, montre dans son chant de guerre les espoirs de ces

nouveaux citoyens pour qui intégrer l'armée nationale représente une reconnaissance et new citizens for whom joining the national army represents recognition and

l'égalité tant souhaitée. Avec la Révolution, renait donc le mythe the longed-for equality. With the Revolution, the myth was reborn

du citoyen-soldat : une élite instruite et policée œuvrant au bien de la communauté of the citizen-soldier: an educated and policed elite working for the good of the community

à la fois par son travail et son engagement civique, et même prête à prendre les armes

contre les oppresseurs si besoin. En 1792, la République accentue encore cet

idéal en associant potentiellement tous les hommes à ce rôle autrefois réservé aux

plus riches. Avec la fin des événements révolutionnaires, la Garde Nationale est

peu à peu utilisée comme une réserve d'hommes pour l'armée régulière. Les régiments

de volontaires sont, par une série de réformes, intégrés à l'armée.

Après s'être d'abord basé sur les levées en masse, comme celle de 1793 dont nous avons After initially relying on levies en masse, like that of 1793, of which we have

déjà parlé lors de l'épisode sur la guerre de Vendée, le système du citoyen-soldat

volontaire et tenu par l'honneur est finalement transformé en 1798 avec l'instauration

du service militaire par tirage au sort. La loi qui le crée précise : « Tout Français

est soldat et se doit à la défense de la patrie ». Les citoyens tirés au sort (environ

un tiers d'une classe d'âge) doivent alors effectuer un service militaire entre

leurs 20 et 25 ans. Après la Révolution, le tirage au sort sera

abandonné en 1905, et 91 ans plus tard, Jacques Chirac annonce finalement la « suspension

» du service militaire. Fin de carrière pour le citoyen-soldat, retour à l'armée

de métier, comme sous l'Ancien Régime. Cette double fonction du citoyen-soldat s'est

donc transformée au cours de l'Histoire, les Grecs y voyaient une évidence pratique

en même temps qu'un idéal démocratique, les Romains une manière de soutenir leur

effort de conquête et de pacification, et les révolutionnaires français une revendication

d'égalité et un moyen d'émancipation. Le choix de la plupart des États démocratiques

contemporains est celui d'une population très largement instruite mais désarmée.

Pouvoir supprimer son rôle militaire au citoyen témoigne est en fait d'une chose : que Being able to remove his military role from the citizen testifies is in fact of one thing: that

nos sociétés sont largement pacifiées ! Et puis on ne va pas se le cacher, les moyens

technologiques à notre disposition, missiles nucléaires en tête, rendent inutiles la

mobilisation en masse. Tu as beau envoyer 300 000 types tête baissée à travers les

champs, s'ils se prennent une belle Tsar Bomb sur la tronche, ils font moins les malins... Champs, if they take a nice Tsar Bomb on the face, they are less clever...

En tout cas, on peut dire que l'évolution des moyens militaires a donc aussi fait évoluer

la citoyenneté de manière assez définitive.

Voilà les amis, j'espère que ce petit topo sur les citoyens-soldats vous aura appris

quelques trucs ! Merci à Lucas Pacotte qui m'a aidé à préparer cette émission et

merci à tous les internautes qui soutiennent l'émission via Tipeee, Utip ou directement

sur Youtube avec le bouton “Rejoindre”. On compte sur vous pour répandre la bonne

parole en partageant l'émission, à très vite sur Nota Bene !