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Cinq semaines en ballon de Jules Verne, CHAPITRE XIX

CHAPITRE XIX

Le Nil.—La Montagne tremblante.—Souvenir du pays.—Les récits des Arahes.—Les Nyam-Nyam.—Réflexions sensées de Joe.—Le Victoria court des bordées.—Les ascensions aérostatiques.—Madame Blanchard.

Quelle est notre direction ?

demanda Kennedy en voyant son ami consulter la boussole.

—Nord-nord-ouest.

—Diable !

mais ce n'est pas le nord, cela !

—Non, Dick, et je crois que nous aurons de la peine à gagner Gondokoro ; je le regrette, mais enfin nous avons relié les explorations de l'est à celles du nord ; il ne faut pas se plaindre.

» Le Victoria s'éloignait peu à peu du Nil. « Un dernier regard, fit le docteur, à cette infranchissable latitude que les plus intrépides voyageurs n'ont jamais pu dépasser !

Voilà bien ces intraitables tribus signalées par MM. Petherick, d'Arnaud, Miani, et ce jeune voyageur, M. Lejean, auquel nous sommes redevables des meilleurs travaux sur le haut Nil.

—Ainsi, demanda Kennedy, nos découvertes sont d'accord avec les pressentiments de la science

—Tout à fait d'accord.

Les sources du fleuve Blanc, du Bahr-el-Abiad, sont immergées dans un lac grand comme une mer ; c'est là qu'il prend naissance ; la poésie y perdra sans doute ; on aimait à supposer à ce roi des fleuves une origine céleste ; les anciens l'appelaient du nom d'Océan, et l'on n'était pas éloigné de croire qu'il découlait directement du soleil ! Mais il faut en rabattre et accepter de temps en temps ce que la science nous enseigne ; il n'y aura peut-être pas toujours des savants, il y aura toujours des poètes.

—On aperçoit encore des cataractes, dit Joe.

—Ce sont les cataractes de Makedo, par trois degrés de latitude.

Rien n'est plus exact ! Que n'avons-nous pu suivre pendant quelques heures le cours du Nil !

—Et là-bas, devant nous, dit le chasseur, j'aperçois le sommet d'une montagne.

—C'est le mont Logwek, la Montagne tremblante des Arabes ; toute cette contrée a été visitée par M. Debono, qui la parcourait sous le nom de Latif Effendi.

Les tribus voisines du Nil sont ennemies et se font une guerre d'extermination. Vous jugez sans peine des périls, qu'il a dû affronter. » Le vent portait alors le Victoria vers le nord-ouest. Pour éviter le mont Logwek, il fallut chercher un courant plus incliné.

« Mes amis, dit le docteur à ses deux compagnons, voici que nous commençons véritablement notre traversée africaine.

Jusqu'ici nous avons surtout suivi les traces de nos devanciers. Nous allons nous lancer dans l'inconnu désormais. Le courage ne nous fera pas défaut ?

—Jamais, s'écrièrent d'une seule voix Dick et Joe.

—En route donc, et que le ciel nous soit en aide !

» A dix heures du soir, par-dessus des ravins, des forêts, des villages dispersés, les voyageurs arrivaient au flanc de la Montagne tremblante, dont ils longeaient les rampes adoucies. En cette mémorable journée du 23 avril, pendant une marche de quinze heures, ils avaient, sous l'impulsion d'un vent rapide, parcouru une distance de plus de trois cent quinze milles [Plus de cent vingt-cinq lieues].

Mais cette dernière partie du voyage les avait laissés sous une impression triste.

Un silence complet régnait dans la nacelle. Le docteur Fergusson était-il absorbé par ses découvertes ? Ses deux compagnons songeaient-ils à cette traversée au milieu de régions inconnues ? Il y avait de tout cela, sans doute, mêlé à de plus vifs souvenirs de l'Angleterre et des amis éloignés. Joe seul montrait une insouciante philosophie, trouvant tout naturel que la patrie ne fût pas là du moment qu'elle était absente ; mais il respecta le silence de Samuel Fergusson et de Dick Kennedy.

A dix heures du soir, le Victoria « mouillait » par le travers de la Montagne-Tremblante [La tradition rapporte qu'elle tremble dès qu'un musulman y pose le pied] ; on prit un repas substantiel, et tous s'endormirent successivement sous la garde de chacun.

Le lendemain, des idées plus sereines revinrent au réveil ; il faisait un joli temps, et le vent soufflait du bon côté ; un déjeuner, fort égayé par Joe, acheva de remettre les esprits en belle humeur.

La contrée parcourue en ce moment est immense ; elle confiné aux montagnes de la Lune et aux montagnes du Darfour ; quelque chose de grand comme l'Europe.

Nous traversons, sans doute, dit le docteur, ce que l'on suppose être le royaume d'Usoga ; des géographes ont prétendu qu'il existait au centre de l'Afrique une vaste dépression, un immense lac central.

Nous verrons si ce système a quelque apparence de vérité.

—Mais comment a-t-on pu faire cette supposition ?

demanda Kennedy.

—Par les récits des Arabes.

Ces gens-là sont très conteurs, trop conteurs peut-être. Quelques voyageurs, arrivés à Kazeh ou aux Grands Lacs, ont vu des esclaves venus des contrées centrales, ils les ont interrogés sur leur pays, ils ont réuni un faisceau de ces documents divers, et en ont déduit des systèmes. Au fond de tout cela, il y a toujours quelque chose de vrai, et, tu le vois, on ne se trompait pas sur l'origine du Nil.

—Rien de plus juste, répondit Kennedy.

—C'est au moyen de ces documents que des essais de cartes ont été tentés.

Aussi vais-je suivre notre route sur l'une d'elles, et la rectifier au besoin.

—Est-ce que toute cette région est habitée ?

demanda Joe.

—Sans doute, et mal habitée.

—Je m'en doutais.

—Ces tribus éparses sont comprises sous la dénomination générale de Nyam-Nyam, et ce nom n'est autre chose qu'une onomatopée ; il reproduit le bruit de la mastication.

—Parfait, dit Joe ; nyam !

nyam ! —Mon brave Joe, si tu étais la cause immédiate de cette onomatopée, tu ne trouverais pas cela parfait. — Que voulez-vous dire ?

— Que ces peuplades sont considérées comme anthropophages.

— Cela est-il certain ?

—Très certain ; on avait aussi prétendu que ces indigènes étaient pourvus d'une queue comme de simples quadrupèdes ; mais on a bientôt reconnu que cet appendice appartenait aux peaux de bête dont ils sont revêtus.

—Tant pis !

une queue est fort agréable pour chasser les moustiques.

—C'est possible, Joe ; mais il faut reléguer cela au rang des fables, tout comme les têtes de chiens que le voyageur Brun-Rollet attribuait à certaines peuplades.

—Des têtes de chiens ?

Commode pour aboyer et même pour être anthropophage !

—Ce qui est malheureusement avéré, c'est la férocité de ces peuples, très avides de la chair humaine qu'ils recherchent avec passion.

—Je demande, dit Joe, qu'ils ne se passionnent pas trop pour mon individu.

—Voyez-vous cela !

dit le chasseur.

—C'est ainsi, Monsieur Dick.

Si jamais je dois être mangé dans un moment de disette, je veux que ce soit à votre profit et à celui de mon maître ! Mais nourrir ces moricauds, fi donc ! j'en mourrais de honte !

—Eh bien !

mon brave Joe, fit Kennedy, voilà qui est entendu, nous comptons sur toi à l'occasion.

—A votre service, Messieurs.

—Joe parle de la sorte, répliqua le docteur, pour que nous prenions soin de lui, en l'engraissant bien.

—Peut-être !

répondit Joe ; l'homme est un animal si égoïste ! » Dans l'après-midi, le ciel se couvrit d'un brouillard chaud qui suintait du sol ; l'embrun permettait à peine de distinguer les objets terrestres ; aussi, craignant de se heurter contre quelque pic imprévu, le docteur donna vers cinq heures le signal d'arrêt. La nuit se passa sans accident, mais il avait fallu redoubler de vigilance par cette profonde obscurité.

La mousson souffla avec une violence extrême pendant la matinée du lendemain ; le vent s'engouffrait dans les cavités inférieures du ballon ; s'agitait violemment l'appendice par lequel pénétraient les tuyaux de dilatation ; on dut les assujettir par des cordes, man uvre dont Joe s'acquitta fort adroitement.

Il constata en même temps que l'orifice de l'aérostat demeurait hermétiquement fermé.

« Ceci a un a double importance pour nous, dit le docteur Fergusson ; nous évitons d'abord la déperdition d'un gaz précieux ; ensuite, nous ne laissons point autour de nous une traînée inflammable, à laquelle nous finirions par mettre le feu.

—Ce serait un fâcheux incident de voyage, dit Joe.

—Est-ce que nous serions précipités à terre ?

demanda Dick.

—Précipités, non !

Le gaz brûlerait tranquillement, et nous descendrions peu à peu. Pareil accident est arrivé à une aéronaute française, madame Blanchard ; elle mit le feu à son ballon en 1ançant des pièces d'artifice, mais elle ne tomba pas, et elle ne se serait pas tuée, sans doute, si sa nacelle ne se fût heurtée à une cheminée, d'où elle fut jetée à terre.

—Espérons que rien de semblable ne nous arrivera, dit le chasseur ; jusqu'ici notre traversée ne me parait pas dangereuse, et je ne vois pas de raison qui nous empêche d'arriver à notre but.

—Je n'en vois pas non plus, mon cher Dick ; les accidents, d'ailleurs, ont toujours été causés par l'imprudence des aéronautes ou par la mauvaise construction de leurs appareils.

Cependant, sur plusieurs milliers d'ascensions aérostatiques, on ne compte pas vingt accidents ayant causé la mort. En général, ce sont les attérissements et les départs qui offrent le plus de dangers. Aussi, en pareil cas, ne devons-nous négliger aucune précaution.

—Voici l'heure du déjeuner, dit Joe ; nous nous contenterons de viande conservée et de café, jusqu'à ce que M. Kennedy ait trouvé moyen de nous régaler d'un bon morceau de venaison.


CHAPITRE XIX CHAPTER XIX CAPÍTULO XIX

Le Nil.—La Montagne tremblante.—Souvenir du pays.—Les récits des Arahes.—Les Nyam-Nyam.—Réflexions sensées de Joe.—Le Victoria court des bordées.—Les ascensions aérostatiques.—Madame Blanchard.

Quelle est notre direction ?

demanda Kennedy en voyant son ami consulter la boussole.

—Nord-nord-ouest.

—Diable !

mais ce n'est pas le nord, cela !

—Non, Dick, et je crois que nous aurons de la peine à gagner Gondokoro ; je le regrette, mais enfin nous avons relié les explorations de l'est à celles du nord ; il ne faut pas se plaindre. “No, Dick, and I think we will be hard pressed to win Gondokoro; I regret it, but finally we have linked explorations from the east to those from the north; you shouldn't complain.

» Le  Victoria s'éloignait peu à peu du Nil. The Victoria was gradually moving away from the Nile. « Un dernier regard, fit le docteur, à cette infranchissable latitude que les plus intrépides voyageurs n'ont jamais pu dépasser ! "One last look," said the doctor, "at this impassable latitude that the most intrepid travelers have never been able to overcome!"

Voilà bien ces intraitables tribus signalées par MM. These are the intractable tribes pointed out by MM. Petherick, d'Arnaud, Miani, et ce jeune voyageur, M. Lejean, auquel nous sommes redevables des meilleurs travaux sur le haut Nil. Petherick, d'Arnaud, Miani, and this young traveler, Mr. Lejean, to whom we are indebted for the best work on the Upper Nile.

—Ainsi, demanda Kennedy, nos découvertes sont d'accord avec les pressentiments de la science "So," asked Kennedy, "our findings agree with the forebodings of science

—Tout à fait d'accord.

Les sources du fleuve Blanc, du Bahr-el-Abiad, sont immergées dans un lac grand comme une mer ; c'est là qu'il prend naissance ; la poésie y perdra sans doute ; on aimait à supposer à ce roi des fleuves une origine céleste ; les anciens l'appelaient du nom d'Océan, et l'on n'était pas éloigné de croire qu'il découlait directement du soleil ! The sources of the White River, Bahr-el-Abiad, are immersed in a lake as big as a sea; it is there that it is born; poetry will no doubt lose; we liked to suppose that this king of rivers had a celestial origin; the ancients called it Ocean, and we were not far from believing that it came directly from the sun! Mais il faut en rabattre et accepter de temps en temps ce que la science nous enseigne ; il n'y aura peut-être pas toujours des savants, il y aura toujours des poètes. But we must turn it down and accept from time to time what science teaches us; there may not always be scholars, there will always be poets.

—On aperçoit encore des cataractes, dit Joe. "We can still see cataracts," said Joe.

—Ce sont les cataractes de Makedo, par trois degrés de latitude.

Rien n'est plus exact ! Nothing is more accurate! Que n'avons-nous pu suivre pendant quelques heures le cours du Nil ! What could we not follow for a few hours the course of the Nile!

—Et là-bas, devant nous, dit le chasseur, j'aperçois le sommet d'une montagne. "And over there in front of us," said the hunter, "I can see the top of a mountain.

—C'est le mont Logwek, la Montagne tremblante des Arabes ; toute cette contrée a été visitée par M. Debono, qui la parcourait sous le nom de Latif Effendi. “It is Mount Logwek, the trembling Mountain of the Arabs; this whole region was visited by M. Debono, who traveled through it under the name of Latif Effendi.

Les tribus voisines du Nil sont ennemies et se font une guerre d'extermination. The neighboring tribes of the Nile are enemies and wage war of extermination. Vous jugez sans peine des périls, qu'il a dû affronter. You can easily see the dangers he had to face. » Le vent portait alors le  Victoria vers le nord-ouest. The wind then carried the Victoria to the northwest. Pour éviter le mont Logwek, il fallut chercher un courant plus incliné. To avoid Mount Logwek, we had to look for a more inclined current.

« Mes amis, dit le docteur à ses deux compagnons, voici que nous commençons véritablement notre traversée africaine. "My friends," said the doctor to his two companions, "here we are really starting our African crossing.

Jusqu'ici nous avons surtout suivi les traces de nos devanciers. So far we have mostly followed in the footsteps of our predecessors. Nous allons nous lancer dans l'inconnu désormais. We are going into the unknown now. Le courage ne nous fera pas défaut ? Will we not lack courage?

—Jamais, s'écrièrent d'une seule voix Dick et Joe.

—En route donc, et que le ciel nous soit en aide ! "On the way then, and may heaven help us!"

» A dix heures du soir, par-dessus des ravins, des forêts, des villages dispersés, les voyageurs arrivaient au flanc de la Montagne tremblante, dont ils longeaient les rampes adoucies. At ten o'clock in the evening, over ravines, forests, scattered villages, the travelers arrived at the side of the trembling Mountain, whose smooth ramps they skirted. En cette mémorable journée du 23 avril, pendant une marche de quinze heures, ils avaient, sous l'impulsion d'un vent rapide, parcouru une distance de plus de trois cent quinze milles [Plus de cent vingt-cinq lieues]. On this memorable day of April 23, during a fifteen hour march, they had, under the impulse of a fast wind, covered a distance of more than three hundred and fifteen miles [More than one hundred and twenty-five leagues].

Mais cette dernière partie du voyage les avait laissés sous une impression triste. But this last part of the trip had left them with a sad impression.

Un silence complet régnait dans la nacelle. Le docteur Fergusson était-il absorbé par ses découvertes ? Was Doctor Fergusson absorbed in his discoveries? Ses deux compagnons songeaient-ils à cette traversée au milieu de régions inconnues ? Did his two companions think of this crossing in the middle of unknown regions? Il y avait de tout cela, sans doute, mêlé à de plus vifs souvenirs de l'Angleterre et des amis éloignés. There was all this, no doubt, mixed with more vivid memories of England and distant friends. Joe seul montrait une insouciante philosophie, trouvant tout naturel que la patrie ne fût pas là du moment qu'elle était absente ; mais il respecta le silence de Samuel Fergusson et de Dick Kennedy. Joe alone displayed a carefree philosophy, finding it quite natural that the country was not there as long as it was absent; but he respected the silence of Samuel Fergusson and Dick Kennedy.

A dix heures du soir, le  Victoria « mouillait » par le travers de la Montagne-Tremblante [La tradition rapporte qu'elle tremble dès qu'un musulman y pose le pied] ; on prit un repas substantiel, et tous s'endormirent successivement sous la garde de chacun. At ten o'clock in the evening, the Victoria "got wet" across the Montagne-Tremblante [Tradition reports that it trembles as soon as a Muslim sets foot there]; they took a substantial meal, and all fell asleep successively under the care of each.

Le lendemain, des idées plus sereines revinrent au réveil ; il faisait un joli temps, et le vent soufflait du bon côté ; un déjeuner, fort égayé par Joe, acheva de remettre les esprits en belle humeur. The next day, more serene ideas revived; the weather was fine, and the wind was blowing on the right side; a lunch, greatly enlivened by Joe, completed the spirits.

La contrée parcourue en ce moment est immense ; elle confiné aux montagnes de la Lune et aux montagnes du Darfour ; quelque chose de grand comme l'Europe. The country traversed at this moment is immense; it confined to the mountains of the Moon and the mountains of Darfur; something big like Europe.

Nous traversons, sans doute, dit le docteur, ce que l'on suppose être le royaume d'Usoga ; des géographes ont prétendu qu'il existait au centre de l'Afrique une vaste dépression, un immense lac central. We are crossing, no doubt, says the doctor, what we suppose to be the kingdom of Usoga; geographers have claimed that there was in the center of Africa a vast depression, an immense central lake.

Nous verrons si ce système a quelque apparence de vérité. We will see if this system has any appearance of truth.

—Mais comment a-t-on pu faire cette supposition ? "But how could we have made this supposition?"

demanda Kennedy.

—Par les récits des Arabes. —By the accounts of the Arabs.

Ces gens-là sont très conteurs, trop conteurs peut-être. These people are very storytellers, perhaps too many storytellers. Quelques voyageurs, arrivés à Kazeh ou aux Grands Lacs, ont vu des esclaves venus des contrées centrales, ils les ont interrogés sur leur pays, ils ont réuni un faisceau de ces documents divers, et en ont déduit des systèmes. Au fond de tout cela, il y a toujours quelque chose de vrai, et, tu le vois, on ne se trompait pas sur l'origine du Nil. At the bottom of it all, there is always something true, and, you see, there was no mistake about the origin of the Nile.

—Rien de plus juste, répondit Kennedy. "Nothing could be more correct," replied Kennedy.

—C'est au moyen de ces documents que des essais de cartes ont été tentés. —It was with these documents that card tests were attempted.

Aussi vais-je suivre notre route sur l'une d'elles, et la rectifier au besoin. So I will follow our route on one of them, and correct it if necessary.

—Est-ce que toute cette région est habitée ? —Is this whole region inhabited?

demanda Joe.

—Sans doute, et mal habitée. "No doubt, and badly inhabited.

—Je m'en doutais. "I suspected as much."

—Ces tribus éparses sont comprises sous la dénomination générale de Nyam-Nyam, et ce nom n'est autre chose qu'une onomatopée ; il reproduit le bruit de la mastication. - These scattered tribes are included under the general name of Nyam-Nyam, and this name is nothing other than an onomatopoeia; it reproduces the sound of chewing.

—Parfait, dit Joe ; nyam !

nyam ! —Mon brave Joe, si tu étais la cause immédiate de cette onomatopée, tu ne trouverais pas cela parfait. — Que voulez-vous dire ? “My good Joe, if you were the immediate cause of this onomatopoeia, you wouldn't find it perfect.

— Que ces peuplades sont considérées comme anthropophages.

— Cela est-il certain ? - That these peoples are considered to be anthropophagous.

—Très certain ; on avait aussi prétendu que ces indigènes étaient pourvus d'une queue comme de simples quadrupèdes ; mais on a bientôt reconnu que cet appendice appartenait aux peaux de bête dont ils sont revêtus. - Is that certain?

—Tant pis ! —Very certain; it had also been claimed that these natives were provided with a tail like simple quadrupeds; but it was soon recognized that this appendage belonged to the animal skins with which they are coated.

une queue est fort agréable pour chasser les moustiques.

—C'est possible, Joe ; mais il faut reléguer cela au rang des fables, tout comme les têtes de chiens que le voyageur Brun-Rollet attribuait à certaines peuplades.

—Des têtes de chiens ? “It's possible, Joe; but this must be relegated to the rank of fables, just like the heads of dogs that the Brun-Rollet traveler attributed to certain peoples.

Commode pour aboyer et même pour être anthropophage !

—Ce qui est malheureusement avéré, c'est la férocité de ces peuples, très avides de la chair humaine qu'ils recherchent avec passion. Convenient to bark and even to be cannibalistic!

—Je demande, dit Joe, qu'ils ne se passionnent pas trop pour mon individu. - What is unfortunately proven, is the ferocity of these people, very greedy for human flesh that they passionately seek.

—Voyez-vous cela ! "I ask," said Joe, "that they should not be too passionate about my self."

dit le chasseur. "Do you see that!"

—C'est ainsi, Monsieur Dick.

Si jamais je dois être mangé dans un moment de disette, je veux que ce soit à votre profit et à celui de mon maître ! “So it is, Mr. Dick. Mais nourrir ces moricauds, fi donc ! If I ever have to be eaten in a shortage, I want it to be for your benefit and that of my master! j'en mourrais de honte ! But feed these moricauds, fi therefore!

—Eh bien ! I would die of shame!

mon brave Joe, fit Kennedy, voilà qui est entendu, nous comptons sur toi à l'occasion. -Well !

—A votre service, Messieurs. my good Joe, said Kennedy, that's understood, we count on you on occasion.

—Joe parle de la sorte, répliqua le docteur, pour que nous prenions soin de lui, en l'engraissant bien.

—Peut-être ! "Joe is talking like that," replied the doctor, "so that we take care of him, by fattening him well."

répondit Joe ; l'homme est un animal si égoïste ! » Dans l'après-midi, le ciel se couvrit d'un brouillard chaud qui suintait du sol ; l'embrun permettait à peine de distinguer les objets terrestres ; aussi, craignant de se heurter contre quelque pic imprévu, le docteur donna vers cinq heures le signal d'arrêt. La nuit se passa sans accident, mais il avait fallu redoubler de vigilance par cette profonde obscurité. In the afternoon, the sky was covered with a warm mist that oozed from the ground; the spray hardly made it possible to distinguish terrestrial objects; also, fearing to collide with some unforeseen peak, the doctor gave the signal to stop at about five o'clock.

La mousson souffla avec une violence extrême pendant la matinée du lendemain ; le vent s'engouffrait dans les cavités inférieures du ballon ; s'agitait violemment l'appendice par lequel pénétraient les tuyaux de dilatation ; on dut les assujettir par des cordes, man uvre dont Joe s'acquitta fort adroitement. The night passed without accident, but it was necessary to redouble vigilance by this deep darkness.

Il constata en même temps que l'orifice de l'aérostat demeurait hermétiquement fermé. The monsoon blew with extreme violence the next morning; the wind rushed into the lower cavities of the balloon; the appendage through which the dilatation tubes penetrated violently moved; they had to be secured with ropes, a maneuver which Joe skillfully performed.

« Ceci a un a double importance pour nous, dit le docteur Fergusson ; nous évitons d'abord la déperdition d'un gaz précieux ; ensuite, nous ne laissons point autour de nous une traînée inflammable, à laquelle nous finirions par mettre le feu. He noted at the same time that the aerostat's opening remained hermetically closed.

—Ce serait un fâcheux incident de voyage, dit Joe. "This is of double importance to us," said Dr. Fergusson; we first avoid the loss of a precious gas; then we do not leave a flammable trail around us, which we would end up setting on fire.

—Est-ce que nous serions précipités à terre ? "It would be an unfortunate travel incident," said Joe.

demanda Dick. "Would we be rushed to the ground?"

—Précipités, non !

Le gaz brûlerait tranquillement, et nous descendrions peu à peu. “Precipitated, no! Pareil accident est arrivé à une aéronaute française, madame Blanchard ; elle mit le feu à son ballon en 1ançant des pièces d'artifice, mais elle ne tomba pas, et elle ne se serait pas tuée, sans doute, si sa nacelle ne se fût heurtée à une cheminée, d'où elle fut jetée à terre. The gas would burn quietly, and we would descend gradually.

—Espérons que rien de semblable ne nous arrivera, dit le chasseur ; jusqu'ici notre traversée ne me parait pas dangereuse, et je ne vois pas de raison qui nous empêche d'arriver à notre but.

—Je n'en vois pas non plus, mon cher Dick ; les accidents, d'ailleurs, ont toujours été causés par l'imprudence des aéronautes ou par la mauvaise construction de leurs appareils. "Hopefully nothing like this will happen to us," said the hunter; so far our crossing does not seem dangerous to me, and I do not see any reason which prevents us from reaching our goal.

Cependant, sur plusieurs milliers d'ascensions aérostatiques, on ne compte pas vingt accidents ayant causé la mort. “I don't see it either, my dear Dick; accidents, moreover, have always been caused by the imprudence of aeronauts or by the poor construction of their aircraft. En général, ce sont les attérissements et les départs qui offrent le plus de dangers. However, on several thousand aerostatic climbs, there are not twenty accidents resulting in death. Aussi, en pareil cas, ne devons-nous négliger aucune précaution.

—Voici l'heure du déjeuner, dit Joe ; nous nous contenterons de viande conservée et de café, jusqu'à ce que M. Kennedy ait trouvé moyen de nous régaler d'un bon morceau de venaison. Therefore, in such a case, we must not neglect any precaution.