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Le Mystère de la chambre jaune, Chapitre 27. (2 de 2) Où Joseph Rouletabille apparaît dans toute sa gloire

Chapitre 27. (2 de 2) Où Joseph Rouletabille apparaît dans toute sa gloire

Chapitre 27. (2 de 2) Où Joseph Rouletabille apparaît dans toute sa gloire

Rouletabille fut appelé immédiatement à la barre et son interrogatoire, car il s'agissait là plutôt d'un interrogatoire que d'une déposition, reprit. Le président :

« Vous nous avez dit tout à l'heure, monsieur, qu'il était impossible de s'enfuir du bout de cour. J'admets, avec vous, je veux bien admettre que, puisque Frédéric Larsan se trouvait penché à sa fenêtre, au-dessus de vous, il fût encore dans ce bout de cour ; mais, pour se trouver à sa fenêtre, il lui avait fallu quitter ce bout de cour. Il s'était donc enfui ! Et comment ? Rouletabille :

« J'ai dit qu'il n'avait pu s'enfuir « normalement... » Il s'est donc enfui « anormalement » ! Car le bout de cour, je l'ai dit aussi, n'était que « quasi » fermé tandis que la « Chambre Jaune » l'était tout à fait. On pouvait grimper au mur, chose impossible dans la « Chambre Jaune », se jeter sur la terrasse et de là, pendant que nous étions penchés sur le cadavre du garde, pénétrer de la terrasse dans la galerie par la fenêtre qui donne juste au-dessus. Larsan n'avait plus qu'un pas à faire pour être dans sa chambre, ouvrir sa fenêtre et nous parler. Ceci n'était qu'un jeu d'enfant pour un acrobate de la force de Ballmeyer. Et, monsieur le président, voici la preuve de ce que j'avance. Ici, Rouletabille tira de la poche de son veston, un petit paquet qu'il ouvrit, et dont il tira une cheville. « Tenez, monsieur le président, voici une cheville qui s'adapte parfaitement dans un trou que l'on trouve encore dans le« corbeau » de droite qui soutient la terrasse en encorbellement. Larsan, qui prévoyait tout et qui songeait à tous les moyens de fuite autour de sa chambre — chose nécessaire quand on joue son jeu — avait enfoncé préalablement cette cheville dans ce « corbeau ». Un pied sur la borne qui est au coin du château, un autre pied sur la cheville, une main à la corniche de la porte du garde, l'autre main à la terrasse, et Frédéric Larsan disparaît dans les airs... d'autant mieux qu'il est fort ingambe et que, ce soir-là, il n'était nullement endormi par un narcotique, comme il avait voulu nous le faire croire. Nous avions dîné avec lui, monsieur le président, et, au dessert, il nous joua le coup du monsieur qui tombe de sommeil, car il avait besoin d'être, lui aussi, endormi, pour que, le lendemain, on ne s'étonnât point que moi, Joseph Rouletabille, j'aie été victime d'un narcotique en dînant avec Larsan. Du moment que nous avions subi le même sort, les soupçons ne l'atteignaient point et s'égaraient ailleurs. Car, moi, monsieur le président, moi, j'ai été bel et bien endormi, et par Larsan lui-même, et comment ! ... Si je n'avais pas été dans ce triste état, jamais Larsan ne se serait introduit dans la chambre de Mlle Stangerson ce soir-là, et le malheur ne serait pas arrivé ! ... »

On entendit un gémissement. C'était M. Darzac qui n'avait pu retenir sa douloureuse plainte... « Vous comprenez, ajouta Rouletabille, que, couchant à côté de lui, je gênais particulièrement Larsan, cette nuit-là, car il savait ou du moins il pouvait se douter « que, cette nuit-là, je veillais » ! Naturellement il ne pouvait pas croire une seconde que je le soupçonnais, lui ! Mais je pouvais le découvrir au moment où il sortait de sa chambre pour se rendre dans celle de Mlle Stangerson. Il attendit, cette nuit-là, pour pénétrer chez Mlle Stangerson, que je fusse endormi et que mon ami Sainclair fût occupé dans ma propre chambre à me réveiller. Dix minutes plus tard Mlle Stangerson criait à la mort !

— Comment étiez-vous arrivé à soupçonner, alors, Frédéric Larsan ? demanda le président.

— « Le bon bout de ma raison » me l'avait indiqué, m'sieur le président ; aussi j'avais l'oeil sur lui ; mais c'est un homme terriblement fort, et je n'avais pas prévu le coup du narcotique. Oui, oui, le bon bout de ma raison me l'avait montré ! Mais il me fallait une preuve palpable ; comme qui dirait : « Le voir au bout de mes yeux après l'avoir vu au bout de ma raison ! — Qu'est-ce que vous entendez par « le bon bout de votre raison » ? — Eh ! m'sieur le président, la raison a deux bouts : le bon et le mauvais. Il n'y en a qu'un sur lequel vous puissiez vous appuyer avec solidité : c'est le bon ! On le reconnaît à ce que rien ne peut le faire craquer, ce bout-là, quoi que vous fassiez ! quoi que vous disiez ! Au lendemain de la « galerie inexplicable », alors que j'étais comme le dernier des derniers des misérables hommes qui ne savent point se servir de leur raison parce qu'ils ne savent par où la prendre, que j'étais courbé sur la terre et sur les fallacieuses traces sensibles, je me suis relevé soudain, en m'appuyant sur le bon bout de ma raison et je suis monté dans la galerie. « Là, je me suis rendu compte que l'assassin que nous avions poursuivi n'avait pu, cette fois, « ni normalement, ni anormalement » quitter la galerie. Alors, avec le bon bout de ma raison, j'ai tracé un cercle dans lequel j'ai enfermé le problème, et autour du cercle, j'ai déposé mentalement ces lettres flamboyantes : « Puisque l'assassin ne peut être en dehors du cercle, il est dedans ! » Qui vois-je donc, dans ce cercle ? Le bon bout de ma raison me montre, outre l'assassin qui doit nécessairement s'y trouver : le père Jacques, M. Stangerson, Frédéric Larsan et moi ! Cela devait donc faire, avec l'assassin, cinq personnages. Or, quand je cherche dans le cercle, ou si vous préférez, dans la galerie, pour parler « matériellement », je ne trouve que quatre personnages. Et il est démontré que le cinquième n'a pu s'enfuir, n'a pu sortir du cercle ! Donc, j'ai, dans le cercle, un personnage qui est deux, c'est-à-dire qui est, outre son personnage, le personnage de l'assassin ! ... Pourquoi ne m'en étais-je pas aperçu déjà ? Tout simplement parce que le phénomène du doublement du personnage ne s'était pas passé sous mes yeux. Avec qui, des quatre personnes enfermées dans le cercle, l'assassin a-t-il pu se doubler sans que je l'aperçoive ? Certainement pas avec les personnes qui me sont apparues à un moment, dédoublées de l'assassin . Ainsi ai-je vu, en même temps , dans la galerie, M. Stangerson et l'assassin, le père Jacques et l'assassin, moi et l'assassin. L'assassin ne saurait donc être ni M. Stangerson, ni le père Jacques, ni moi ! Et puis, si c'était moi l'assassin, je le saurais bien, n'est-ce pas, m'sieur le président ? ... Avais-je vu, en même temps, Frédéric Larsan et l'assassin ? Non ! ... Non ! Il s'était passé deux secondes pendant lesquelles j'avais perdu de vue l'assassin, car celui-ci était arrivé, comme je l'ai du reste noté dans mes papiers, deux secondes avant M. Stangerson, le père Jacques et moi, au carrefour des deux galeries. Cela avait suffi à Larsan pour enfiler la galerie tournante, enlever sa fausse barbe d'un tour de main, se retourner et se heurter à nous, comme s'il poursuivait l'assassin ! ... Ballmeyer en a fait bien d'autres ! et vous pensez bien que ce n'était qu'un jeu pour lui de se grimer de telle sorte qu'il apparût tantôt avec sa barbe rouge à Mlle Stangerson, tantôt à un employé de poste avec un collier de barbe châtain qui le faisait ressembler à M. Darzac, dont il avait juré la perte ! Oui, le bon bout de ma raison me rapprochait ces deux personnages, ou plutôt ces deux moitiés de personnage que je n'avais pas vues en même temps : Frédéric Larsan et l'inconnu que je poursuivais... pour en faire l'être mystérieux et formidable que je cherchais : « l'assassin ». « Cette révélation me bouleversa. J'essayai de me ressaisir en m'occupant un peu des traces sensibles, des signes extérieurs qui m'avaient, jusqu'alors, égaré, et qu'il fallait, normalement, « faire entrer dans le cercle tracé par le bon bout de ma raison ! « Quels étaient, tout d'abord, les principaux signes extérieurs, cette nuit-là, qui m'avaient éloigné de l'idée d'un Frédéric Larsan assassin : « 1° J'avais vu l'inconnu dans la chambre de Mlle Stangerson, et, courant à la chambre de Frédéric Larsan, j'y avais trouvé Frédéric Larsan, bouffi de sommeil. « 2° L'échelle ; « 3° J'avais placé Frédéric Larsan au bout de la galerie tournante en lui disant que j'allais sauter dans la chambre de Mlle Stangerson pour essayer de prendre l'assassin. Or, j'étais retourné dans la chambre de Mlle Stangerson où j'avais retrouvé mon inconnu. « Le premier signe extérieur ne m'embarrassa guère. Il est probable que, lorsque je descendis de mon échelle, après avoir vu l'inconnu dans la chambre de Mlle Stangerson, celui-ci avait déjà fini ce qu'il avait à y faire. Alors, pendant que je rentrais dans le château, il rentrait, lui, dans la chambre de Frédéric Larsan, se déshabillait en deux temps, trois mouvements, et, quand je venais frapper à sa porte, montrait un visage de Frédéric Larsan ensommeillé à plaisir...

« Le second signe : l'échelle, ne m'embarrassa pas davantage. Il était évident que, si l'assassin était Larsan, il n'avait pas besoin d'échelle pour s'introduire dans le château, puisque Larsan couchait à côté de moi ; mais cette échelle devait faire croire à la venue de l'assassin, « de l'extérieur », chose nécessaire au système de Larsan puisque, cette nuit-là, M. Darzac n'était pas au château. Enfin, cette échelle, en tout état de cause, pouvait faciliter la fuite de Larsan.

« Mais le troisième signe extérieur me déroutait tout à fait. Ayant placé Larsan au bout de la galerie tournante, je ne pouvais expliquer qu'il eût profité du moment où j'allais dans l'aile gauche du château trouver M. Stangerson et le père Jacques, pour retourner dans la chambre de Mlle Stangerson ! C'était là un geste bien dangereux ! Il risquait de se faire prendre... Et il le savait ! ... Et il a failli se faire prendre... n'ayant pas eu le temps de regagner son poste, comme il l'avait certainement espéré... Il fallait qu'il eût, pour retourner dans la chambre, une raison bien nécessaire qui lui fût apparue tout à coup, après mon départ, car il n'aurait pas sans cela prêté son revolver ! Quant à moi, quand « j'envoyai » le père Jacques au bout de la galerie droite, je croyais naturellement que Larsan était toujours à son poste au bout de la galerie tournante et le père Jacques lui-même, à qui, du reste, je n'avais point donné de détails, en se rendant à son poste, ne regarda pas, lorsqu'il passa à l'intersection des deux galeries, si Larsan était au sien. Le père Jacques ne songeait alors qu'à exécuter mes ordres rapidement. Quelle était donc cette raison imprévue qui avait pu conduire Larsan une seconde fois dans la chambre ? Quelle était-elle ? ... Je pensai que ce ne pouvait être qu'une marque sensible de son passage qui le dénonçait ! Il avait oublié quelque chose de très important dans la chambre ! Quoi ? ... Avait-il retrouvé cette chose ? ... Je me rappelai la bougie sur le parquet et l'homme courbé... Je priai Mme Bernier, qui faisait la chambre, de chercher... et elle trouva un binocle... Ce binocle, m'sieur le président ! Et Rouletabille sortit de son petit paquet le binocle que nous connaissons déjà...

« Quand je vis ce binocle, je fus épouvanté... Je n'avais jamais vu de binocle à Larsan... S'il n'en mettait pas, c'est donc qu'il n'en avait pas besoin... Il en avait moins besoin encore alors dans un moment où la liberté de ses mouvements lui était chose si précieuse... Que signifiait ce binocle ? ... Il n'entrait point dans mon cercle. À moins qu'il ne fût celui d'un presbyte, m'exclamai-je, tout à coup ! ... En effet, je n'avais jamais vu écrire Larsan, je ne l'avais jamais vu lire. Il « pouvait » donc être presbyte ! On savait certainement à la Sûreté qu'il était presbyte, « s'il l'était... » on connaissait sans doute son binocle... Le binocle du « presbyte Larsan » trouvé dans la chambre de Mlle Stangerson, après le mystère de la galerie inexplicable, cela devenait terrible pour Larsan ! Ainsi s'expliquait le retour de Larsan dans la chambre ! ... Et, en effet, Larsan-Ballmeyer est bien presbyte, et ce binocle, que l'on reconnaîtra « peut-être » à la Sûreté, est bien le sien... « Vous voyez, monsieur, quel est mon système, continua Rouletabille ; je ne demande pas aux signes extérieurs de m'apprendre la vérité ; je leur demande simplement de ne pas aller contre la vérité que m'a désignée le bon bout de ma raison ! ...

« Pour être tout à fait sûr de la vérité sur Larsan, car Larsan assassin était une exception qui méritait que l'on s'entourât de quelque garantie, j'eus le tort de vouloir voir sa « figure ». J'en ai été bien puni ! Je crois que c'est le bon bout de ma raison qui s'est vengé de ce que, depuis la galerie inexplicable, je ne me sois pas appuyé solidement, définitivement et en toute confiance, sur lui... négligeant magnifiquement de trouver d'autres preuves de la culpabilité de Larsan que celle de ma raison ! Alors, Mlle Stangerson a été frappée... »

Rouletabille s'arrêta... se mouche... vivement ému. « Mais qu'est-ce que Larsan, demanda le président, venait faire dans cette chambre ? Pourquoi a-t-il tenté d'assassiner à deux reprises Mlle Stangerson ? — Parce qu'il l'adorait, m'sieur le président... — Voilà évidemment une raison...

— Oui, m'sieur, une raison péremptoire. Il était amoureux fou... et à cause de cela, et de bien d'autres choses aussi, capable de tous les crimes. — Mlle Stangerson le savait ?

— Oui, m'sieur, mais elle ignorait, naturellement, que l'individu qui la poursuivait ainsi fût Frédéric Larsan... sans quoi Frédéric Larsan ne serait pas venu s'installer au château, et n'aurait pas, la nuit de la galerie inexplicable, pénétré avec nous auprès de Mlle Stangerson, « après l'affaire ». J'ai remarqué du reste qu'il s'était tenu dans l'ombre et qu'il avait continuellement la face baissée... ses yeux devaient chercher le binocle perdu... Mlle Stangerson a eu à subir les poursuites et les attaques de Larsan sous un nom et sous un déguisement que nous ignorions mais qu'elle pouvait connaître déjà. — Et vous, monsieur Darzac ! demanda le président... vous avez peut-être, à ce propos, reçu les confidences de Mlle Stangerson... Comment se fait-il que Mlle Stangerson n'ait parlé de cela à personne ? ... Cela aurait pu mettre la justice sur les traces de l'assassin... et si vous êtes innocent, vous aurait épargné la douleur d'être accusé ! — Mlle Stangerson ne m'a rien dit, fit M. Darzac. — Ce que dit le jeune homme vous paraît-il possible ? » demanda encore le président.

Imperturbablement, M. Robert Darzac répondit :

« Mlle Stangerson ne m'a rien dit... — Comment expliquez-vous que, la nuit de l'assassinat du garde, reprit le président, en se tournant vers Rouletabille, l'assassin ait rapporté les papiers volés à M. Stangerson ? ... Comment expliquez-vous que l'assassin se soit introduit dans la chambre fermée de Mlle Stangerson ? — Oh ! quant à cette dernière question, il est facile, je crois, d'y répondre. Un homme comme Larsan-Ballmeyer devait se procurer ou faire faire facilement les clefs qui lui étaient nécessaires... Quant au vol des documents, « je crois » que Larsan n'y avait pas d'abord songé. Espionnant partout Mlle Stangerson, bien décidé à empêcher son mariage avec M. Robert Darzac, il suit un jour Mlle Stangerson et M. Robert Darzac dans les grands magasins de la Louve, s'empare du réticule de Mlle Stangerson, que celle-ci perd ou se laisse prendre. Dans ce réticule, il y a une clef à tête de cuivre. Il ne sait pas l'importance qu'a cette clef. Elle lui est révélée par la note que fait paraître Mlle Stangerson dans les journaux. Il écrit à Mlle Stangerson poste restante, comme la note l'en prie. Il demande sans doute un rendez-vous en faisant savoir que celui qui a le réticule et la clef est celui qui la poursuit, depuis quelque temps, de son amour. Il ne reçoit pas de réponse. Il va constater au bureau 40 que la lettre n'est plus là. Il y va, ayant pris déjà l'allure et autant que possible l'habit de M. Darzac, car, décidé à tout pour avoir Mlle Stangerson, il a tout préparé, pour que, quoi qu'il arrive, M. Darzac, aimé de Mlle Stangerson, M. Darzac qu'il déteste et dont il veut la perte, passe pour le coupable. « Je dis : quoi qu'il arrive, mais je pense que Larsan ne pensait pas encore qu'il en serait réduit à l'assassinat. Dans tous les cas, ses précautions sont prises pour compromettre Mlle Stangerson sous le déguisement Darzac. Larsan a, du reste, à peu près la taille de Darzac et quasi le même pied. Il ne lui serait pas difficile, s'il est nécessaire, après avoir dessiné l'empreinte du pied de M. Darzac, de se faire faire, sur ce dessin, des chaussures qu'il chaussera. Ce sont là trucs enfantins pour Larsan-Ballmeyer.

« Donc, pas de réponse à sa lettre, pas de rendez-vous, et il a toujours la petite clef précieuse dans sa poche. Eh bien, puisque Mlle Stangerson ne vient pas à lui, il ira à elle ! Depuis longtemps son plan est fait. Il s'est documenté sur le Glandier et sur le pavillon. Un après-midi, alors que M. et Mlle Stangerson viennent de sortir pour la promenade et que le père Jacques lui- même est parti, il s'introduit dans le pavillon par la fenêtre du vestibule. Il est seul, pour le moment, il a des loisirs... il regarde les meubles... l'un d'eux, fort curieux, et ressemblant à un coffre-fort, a une toute petite serrure... Tiens ! Tiens ! Cela l'intéresse... Comme il a sur lui la petite clef de cuivre... il y pense... liaison d'idées. Il essaye la clef dans la serrure ; la porte s'ouvre... Des papiers ! Il faut que ces papiers soient bien précieux pour qu'on les ait enfermés dans un meuble aussi particulier... pour qu'on tienne tant à la clef qui ouvre ce meuble... Eh ! Eh ! cela peut toujours servir... à un petit chantage... cela l'aidera peut-être dans ses desseins amoureux... Vite, il fait un paquet de ces paperasses et va le déposer dans le lavatory du vestibule. Entre l'expédition du pavillon et la nuit de l'assassinat du garde, Larsan a eu le temps de voir ce qu'étaient ces papiers. Qu'en ferait-il ? Ils sont plutôt compromettants... Cette nuit-là, il les rapporta au château... Peut-être a-t-il espéré du retour de ces papiers, qui représentaient vingt ans de travaux, une reconnaissance quelconque de Mlle Stangerson... Tout est possible, dans un cerveau comme celui-là ! ... Enfin, quelle qu'en soit la raison, il a rapporté les papiers et il en était bien débarrassé ! Rouletabille toussa et je compris ce que signifiait cette toux. Il était évidemment embarrassé, à ce point de ses explications, par la volonté qu'il avait de ne point donner le véritable motif de l'attitude effroyable de Larsan vis-à-vis de Mlle Stangerson. Son raisonnement était trop incomplet pour satisfaire tout le monde, et le président lui en eut certainement fait l'observation, si, malin comme un singe, Rouletabille ne s'était écrié : « Maintenant, nous arrivons à l'explication du mystère de la Chambre Jaune ! Il y eut, dans la salle, des remuements de chaises, de légères bousculades, des « chut ! » énergiques. La curiosité était poussée à son comble.

« Mais, fit le président, il me semble, d'après votre hypothèse, monsieur Rouletabille, que le mystère de la « Chambre Jaune » est tout expliqué. Et c'est Frédéric Larsan qui nous l'a expliqué lui- même en se contentant de tromper sur le personnage, en mettant M. Robert Darzac à sa propre place. Il est évident que la porte de la « Chambre Jaune » s'est ouverte quand M. Stangerson était seul, et que le professeur a laissé passer l'homme qui sortait de la chambre de sa fille, sans l'arrêter, peut-être même sur la prière de sa fille , pour éviter tout scandale ! ...

— Non, m'sieur le président, protesta avec force le jeune homme. Vous oubliez que Mlle Stangerson, assommée, ne pouvait plus faire de prière, qu'elle ne pouvait plus refermer sur elle ni le verrou ni la serrure... Vous oubliez aussi que M. Stangerson a juré sur la tête de sa fille à l'agonie que la porte ne s'était pas ouverte ! — C'est pourtant, monsieur, la seule façon d'expliquer les choses ! La Chambre Jaune' était close comme un coffre-fort. Pour me servir de vos expressions, il était impossible à l'assassin de s'en échapper « normalement ou anormalement ». Quand on pénètre dans la chambre, on ne le trouve pas ! Il faut bien pourtant qu'il s'échappe ! ...

— C'est tout à fait inutile, m'sieur le président... — Comment cela ?

— Il n'avait pas besoin de s'échapper, s'il n'y était pas ! Rumeurs dans la salle...

« Comment, il n'y était pas ? — Évidemment non ! Puisqu'il ne pouvait pas y être, c'est qu'il n'y était pas ! Il faut toujours, m'sieur l'président, s'appuyer sur le bon bout de sa raison ! — Mais toutes les traces de son passage ! protesta le président.

— Ça, m'sieur le président, c'est le mauvais bout de la raison ! ... Le bon bout nous indique ceci : depuis le moment où Mlle Stangerson s'est enfermée dans sa chambre jusqu'au moment où l'on a défoncé la porte, il est impossible que l'assassin se soit échappé de cette chambre ; et, comme on ne l'y trouve pas, c'est que, depuis le moment de la fermeture de la porte jusqu'au moment où on la défonce, l'assassin n'était pas dans la chambre ! — Mais les traces ?

— Eh ! m'sieur le président... Ça, c'est les marques sensibles, encore une fois... les marques sensibles avec lesquelles on commet tant d'erreurs judiciaires parce qu'elles vous font dire ce qu'elles veulent ! Il ne faut point, je vous le répète, s'en servir pour raisonner ! Il faut raisonner d'abord ! Et voir ensuite si les marques sensibles peuvent entrer dans le cercle de votre raisonnement... J'ai un tout petit cercle de vérité incontestable : l'assassin n'était point dans la Chambre Jaune ! Pourquoi a-t-on cru qu'il y était ? À cause des marques de son passage ! Mais il peut être passé avant ! Que dis-je : il « doit » être passé avant. La raison me dit qu'il faut qu'il soit passé là, avant ! Examinons les marques et ce que nous savons de l'affaire, et voyons si ces marques vont à l'encontre de ce passage avant... avant que Mlle Stangerson s'enferme dans sa chambre, devant son père et le père Jacques ! « Après la publication de l'article du Matin et une conversation que j'eus dans le trajet de Paris à Épinay-sur-Orge avec le juge d'instruction, la preuve me parut faite que la « Chambre Jaune » était mathématiquement close et que, par conséquent, l'assassin en avait disparu avant l'entrée de Mlle Stangerson dans sa chambre, à minuit. « Les marques extérieures se trouvaient alors être terriblement « contre ma raison ». Mlle Stangerson ne s'était pas assassinée toute seule, et ces marques attestaient qu'il n'y avait pas eu suicide. L'assassin était donc venu avant ! Mais comment Mlle Stangerson n'avait-elle été assassinée qu'après ? ou plutôt « ne paraissait-elle » avoir été assassinée qu'après ? Il me fallait naturellement reconstituer l'affaire en deux phases, deux phases bien distinctes l'une de l'autre de quelques heures : la première phase pendant laquelle on avait réellement tenté d'assassiner Mlle Stangerson, tentative qu'elle avait dissimulée ; la seconde phase pendant laquelle, à la suite d'un cauchemar qu'elle avait eu, ceux qui étaient dans le laboratoire avaient cru qu'on l'assassinait ! « Je n'avais pas encore, alors, pénétré dans la « Chambre Jaune ». Quelles étaient les blessures de Mlle Stangerson ? Des marques de strangulation et un coup formidable à la tempe... Les marques de strangulation ne me gênaient pas. Elles pouvaient avoir été faites « avant » et Mlle Stangerson les avait dissimulées sous une collerette, un boa, n'importe quoi ! Car, du moment que je créais, que j'étais obligé de diviser l'affaire en deux phases, j'étais acculé à la nécessité de me dire que Mlle Stangerson avait caché tous les événements de la première phase ; elle avait des raisons, sans doute, assez puissantes pour cela, puisqu'elle n'avait rien dit à son père et qu'elle dut raconter naturellement au juge d'instruction l'agression de l'assassin dont elle ne pouvait nier le passage, comme si cette agression avait eu lieu la nuit, pendant la seconde phase ! Elle y était forcée, sans quoi son père lui eût dit : « Que nous as-tu caché là ? Que signifie « ton silence après une pareille agression » ? « Elle avait donc dissimulé les marques de la main de l'homme à son cou. Mais il y avait le coup formidable de la tempe ! Ça, je ne le comprenais pas ! Surtout quand j'appris que l'on avait trouvé dans la chambre un os de mouton, arme du crime... Elle ne pouvait avoir dissimulé qu'on l'avait assommée, et cependant cette blessure apparaissait évidemment comme ayant dû être faite pendant la première phase puisqu'elle nécessitait la présence de l'assassin ! J'imaginai que cette blessure était beaucoup moins forte qu'on ne le disait — en quoi j'avais tort — et je pensai que Mlle Stangerson avait caché la blessure de la tempe sous une coiffure en bandeaux ! « Quant à la marque, sur le mur, de la main de l'assassin blessée par le revolver de Mlle Stangerson, cette marque avait été faite évidemment « avant » et l'assassin avait été nécessairement blessé pendant la première phase, c'est-à-dire pendant qu'il était là ! Toutes les traces du passage de l'assassin avaient été naturellement laissées pendant la première phase : L'os de mouton, les pas noirs, le béret, le mouchoir, le sang sur le mur, sur la porte et par terre... De toute évidence, si ces traces étaient encore là, c'est que Mlle Stangerson, qui désirait qu'on ne sût rien et qui agissait pour qu'on ne sût rien de cette affaire, n'avait pas encore eu le temps de les faire disparaître ! Ce qui me conduisait à chercher la première phase de l'affaire dans un temps très rapproché de la seconde. Si, après la première phase, c'est-à-dire après que l'assassin se fût échappé, après qu'elle-même eût en hâte regagné le laboratoire où son père la retrouvait, travaillant, — si elle avait pu pénétrer à nouveau un instant dans la chambre, elle aurait au moins fait disparaître, tout de suite, l'os de mouton, le béret et le mouchoir qui traînaient par terre. Mais elle ne le tenta pas, son père ne l'ayant pas quittée. Après, donc, cette première phase, elle n'est entrée dans sa chambre qu'à minuit. Quelqu'un y était entré à dix heures : le père Jacques, qui fit sa besogne de tous les soirs, ferma les volets et alluma la veilleuse. Dans son anéantissement sur le bureau du laboratoire où elle feignait de travailler, Mlle Stangerson avait sans doute oublié que le père Jacques allait entrer dans sa chambre ! Aussi elle a un mouvement : elle prie le père Jacques de ne pas se déranger ! De ne pas pénétrer dans la chambre ! Ceci est en toutes lettres dans l'article du Matin . Le père Jacques entre tout de même et ne s'aperçoit de rien, tant la « Chambre Jaune » est obscure ! ... Mlle Stangerson a dû vivre là deux minutes affreuses ! Cependant, je crois qu'elle ignorait qu'il y avait tant de marques du passage de l'assassin dans sa chambre ! Elle n'avait sans doute, après la première phase, eu le temps que de dissimuler les traces des doigts de l'homme à son cou et de sortir de sa chambre ! ... Si elle avait su que l'os, le béret et le mouchoir fussent sur le parquet, elle les aurait également ramassés quand elle est rentrée à minuit dans sa chambre... Elle ne les a pas vus, elle s'est déshabillée à la clarté douteuse de la veilleuse... Elle s'est couchée, brisée par tant d'émotions, et par la terreur, la terreur qui ne l'avait fait regagner cette chambre que le plus tard possible... « Ainsi étais-je obligé d'arriver de la sorte à la seconde phase du drame, avec Mlle Stangerson seule dans la chambre, du moment qu'on n'avait pas trouvé l'assassin dans la chambre... Ainsi devais-je naturellement faire entrer dans le cercle de mon raisonnement les marques extérieures. « Mais il y avait d'autres marques extérieures à expliquer. Des coups de revolver avaient été tirés, pendant la seconde phase. Des cris : « Au secours ! À l'assassin ! » avaient été proférés ! ... Que pouvait me désigner, en une telle occurrence, le bon bout de ma raison ? Quant aux cris, d'abord : du moment où il n'y a pas d'assassin dans la chambre, il y avait forcément cauchemar dans la chambre ! « On entend un grand bruit de meubles renversés. J'imagine... je suis obligé d'imaginer ceci : Mlle Stangerson s'est endormie, hantée par l'abominable scène de l'après-midi... elle rêve... le cauchemar précise ses images rouges... elle revoit l'assassin qui se précipite sur elle, elle crie : « À l'assassin ! Au secours ! » et son geste désordonné va chercher le revolver qu'elle a posé, avant de se coucher, sur sa table de nuit. Mais cette main heurte la table de nuit avec une telle force qu'elle la renverse. Le revolver roule par terre, un coup part et va se loger dans le plafond... Cette balle dans le plafond me parut, dès l'abord, devoir être la balle de l'accident... Elle révélait la possibilité de l'accident et arrivait si bien avec mon hypothèse de cauchemar qu'elle fut une des raisons pour lesquelles je commençai à ne plus douter que le crime avait eu lieu avant, et que Mlle Stangerson, douée d'un caractère d'une énergie peu commune, l'avait caché... Cauchemar, coup de revolver... Mlle Stangerson, dans un état moral affreux, est réveillée ; elle essaye de se lever ; elle roule par terre, sans force, renversant les meubles, râlant même...« À l'assassin ! Au secours ! » et s'évanouit... « Cependant, on parlait de deux coups de revolver, la nuit, lors de la seconde phase. À moi aussi, pour ma thèse — ce n'était plus, déjà, une hypothèse — il en fallait deux ; mais « un » dans chacune des phases et non pas deux dans la dernière... un coup pour blesser l'assassin, avant , et un coup lors du cauchemar, après ! Or, était-il bien sûr que, la nuit, deux coups de revolver eussent été tirés ? Le revolver s'était fait entendre au milieu du fracas de meubles renversés. Dans un interrogatoire, M. Stangerson parle d'un coup sourd d'abord, d'un coup éclatant ensuite ! Si le coup sourd avait été produit par la chute de la table de nuit en marbre sur le plancher ? Il est nécessaire que cette explication soit la bonne. Je fus certain qu'elle était la bonne, quand je sus que les concierges, Bernier et sa femme, n'avaient entendu, eux qui étaient tout près du pavillon, qu'un seul coup de revolver. Ils l'ont déclaré au juge d'instruction. « Ainsi, j'avais presque reconstitué les deux phases du drame quand je pénétrai, pour la première fois, dans la « Chambre Jaune ». Cependant la gravité de la blessure à la tempe n'entrait pas dans le cercle de mon raisonnement. Cette blessure n'avait donc pas été faite par l'assassin avec l'os de mouton, lors de la première phase, parce qu'elle était trop grave, que Mlle Stangerson n'aurait pu la dissimuler et qu'elle ne l'avait pas dissimulée sous une coiffure en bandeaux ! Alors, cette blessure avait été « nécessairement » faite lors de la seconde phase, au moment du cauchemar ? C'est ce que je suis allé demander à la « Chambre Jaune » et la « Chambre Jaune » m'a répondu ! Rouletabille tira, toujours de son petit paquet, un morceau de papier blanc plié en quatre, et, de ce morceau de papier blanc, sortit un objet invisible, qu'il tint entre le pouce et l'index et qu'il porta au président : « Ceci, monsieur le président, est un cheveu, un cheveu blond maculé de sang, un cheveu de Mlle Stangerson... Je l'ai trouvé collé à l'un des coins de marbre de la table de nuit renversée... Ce coin de marbre était lui-même maculé de sang. Oh ! un petit carré rouge de rien du tout ! mais fort important ! car il m'apprenait, ce petit carré de sang, qu'en se levant, affolée, de son lit, Mlle Stangerson était tombée de tout son haut et fort brutalement sur ce coin de marbre qui l'avait blessée à la tempe, et qui avait retenu ce cheveu, ce cheveu que Mlle Stangerson devait avoir sur le front, bien qu'elle ne portât pas la coiffure en bandeaux ! Les médecins avaient déclaré que Mlle Stangerson avait été assommée avec un objet contondant et, comme l'os de mouton était là, le juge d'instruction avait immédiatement accusé l'os de mouton mais le coin d'une table de nuit en marbre est aussi un objet contondant auquel ni les médecins ni le juge d'instruction n'avaient songé, et que je n'eusse peut-être point découvert moi -même si le bon bout de ma raison ne me l'avait indiqué, ne me l'avait fait pressentir. La salle faillit partir, une fois de plus, en applaudissements ; mais, comme Rouletabille reprenait tout de suite sa déposition, le silence se rétablit sur-le-champ.

« Il me restait à savoir, en dehors du nom de l'assassin que je ne devais connaître que quelques jours plus tard, à quel moment avait eu lieu la première phase du drame. L'interrogatoire de Mlle Stangerson, bien qu'arrangé pour tromper le juge d'instruction, et celui de M. Stangerson, devaient me le révéler. Mlle Stangerson a donné exactement l'emploi de son temps, ce jour-là. Nous avons établi que l'assassin s'est introduit entre cinq et six dans le pavillon ; mettons qu'il fût six heures et quart quand le professeur et sa fille se sont remis au travail. C'est donc entre cinq heures et six heures et quart qu'il faut chercher. Que dis- je, cinq heures ! mais le professeur est alors avec sa fille... Le drame ne pourra s'être passé que loin du professeur ! Il me faut donc, dans ce court espace de temps, chercher le moment où le professeur et sa fille seront séparés ! ... Eh bien, ce moment, je le trouve dans l'interrogatoire qui eut lieu dans la chambre de Mlle Stangerson, en présence de M. Stangerson. Il y est marqué que le professeur et sa fille rentrent vers six heures au laboratoire. M. Stangerson dit : « À ce moment, je fus abordé par mon garde qui me retint un instant. » il y a donc conversation avec le garde. Le garde parle à M. Stangerson de coupe de bois ou de braconnage ; Mlle Stangerson n'est plus là ; elle a déjà regagné le laboratoire puisque le professeur dit encore : « Je quittai le garde et je rejoignis ma fille qui était déjà au travail ! « C'est donc dans ces courtes minutes que le drame se déroula. C'est nécessaire ! Je vois très bien Mlle Stangerson rentrer dans le pavillon, pénétrer dans sa chambre pour poser son chapeau et se trouver en face du bandit qui la poursuit. Le bandit était là, dans le pavillon, depuis un certain temps. Il devait avoir arrangé son affaire pour que tout se passât la nuit. Il avait alors déchaussé les chaussures du père Jacques qui le gênaient, dans les conditions que j'ai dites au juge d'instruction, il avait opéré la rafle des papiers, comme je vous l'ai dit tout à l'heure, et il s'était ensuite glissé sous le lit quand le père Jacques était revenu laver le vestibule et le laboratoire... Le temps lui avait paru long... il s'était relevé, après le départ du père Jacques, avait à nouveau erré dans le laboratoire, était venu dans le vestibule, avait regardé dans le jardin, et avait vu venir, vers le pavillon — car, à ce moment-là, la nuit qui commençait était très claire — Mlle Stangerson, toute seule ! Jamais il n'eût osé l'attaquer à cette heure-là s'il n'avait cru être certain que Mlle Stangerson était seule ! Et, pour qu'elle lui apparût seule, il fallait que la conversation entre M. Stangerson et le garde qui le retenait eût lieu à un coin détourné du sentier, coin où se trouve un bouquet d'arbres qui les cachait aux yeux du misérable. Alors, son plan est fait. Il va être plus tranquille, seul avec Mlle Stangerson dans ce pavillon, qu'il ne l'aurait été, en pleine nuit, avec le père Jacques dormant dans son grenier. Et il dut fermer la fenêtre du vestibule ! ce qui explique aussi que ni M. Stangerson, ni le garde, du reste assez éloignés encore du pavillon, n'ont entendu le coup de revolver. « Puis il regagna la « Chambre Jaune ». Mlle Stangerson arrive. Ce qui s'est passé a dû être rapide comme l'éclair ! ... Mlle Stangerson a dû crier... ou plutôt a voulu crier son effroi ; l'homme l'a saisie à la gorge... Peut-être va-t-il l'étouffer, l'étrangler... Mais la main tâtonnante de Mlle Stangerson a saisi, dans le tiroir de la table de nuit, le revolver qu'elle y a caché depuis qu'elle redoute les menaces de l'homme. L'assassin brandit déjà, sur la tête de la malheureuse, cette arme terrible dans les mains de Larsan-Ballmeyer, un os de mouton... Mais elle tire... le coup part, blesse la main qui abandonne l'arme. L'os de mouton roule par terre, ensanglanté par la blessure de l'assassin... l'assassin chancelle, va s'appuyer à la muraille, y imprime ses doigts rouges, craint une autre balle et s'enfuit... « Elle le voit traverser le laboratoire... Elle écoute... Que fait- il dans le vestibule ? ... Il est bien long à sauter par cette fenêtre... Enfin, il saute ! Elle court à la fenêtre et la referme ! ... Et maintenant, est-ce que son père a vu ? a entendu ? Maintenant que le danger a disparu, toute sa pensée va à son père... douée d'une énergie surhumaine, elle lui cachera tout, s'il en est temps encore ! ... Et, quand M. Stangerson reviendra, il trouvera la porte de la « Chambre Jaune » fermée, et sa fille, dans le laboratoire, penchée sur son bureau, attentive, au travail, déjà ! Rouletabille se tourne alors vers M. Darzac :

« Vous savez la vérité, s'écria-t-il, dites-nous donc si la chose ne s'est pas passée ainsi ? — Je ne sais rien, répond M. Darzac.

— Vous êtes un héros ! fait Rouletabille, en se croisant les bras... Mais si Mlle Stangerson était, hélas ! en état de savoir que vous êtes accusé, elle vous relèverait de votre parole... elle vous prierait de dire tout ce qu'elle vous a confié... que dis-je, elle viendrait vous défendre elle-même ! ... »

M. Darzac ne fit pas un mouvement, ne prononça pas un mot. Il regarda tristement Rouletabille.

« Enfin, fit celui-ci, puisque Mlle Stangerson n'est pas là, il faut bien que j'y sois, moi ! Mais, croyez-moi, monsieur Darzac, le meilleur moyen, le seul, de sauver Mlle Stangerson et de lui rendre la raison, c'est encore de vous faire acquitter ! Un tonnerre d'applaudissements accueillit cette dernière phrase. Le président n'essaya même pas de réfréner l'enthousiasme de la salle. Robert Darzac était sauvé. Il n'y avait qu'à regarder les jurés pour en être certain ! Leur attitude manifestait hautement leur conviction.

Le président s'écria alors : « Mais enfin, quel est ce mystère qui fait que Mlle Stangerson, que l'on tente d'assassiner, dissimule un pareil crime à son père ? — Ça, m'sieur, fit Rouletabille, j'sais pas ! ... Ça ne me regarde pas ! ... »

Le président fit un nouvel effort auprès de M. Robert Darzac.

« Vous refusez toujours de nous dire, monsieur, quel a été l'emploi de votre temps pendant qu'« on » attentait à la vie de Mlle Stangerson ? — Je ne peux rien vous dire, monsieur... »

Le président implora du regard une explication de Rouletabille :

« On a le droit de penser, m'sieur le président, que les absences de M. Robert Darzac étaient étroitement liées au secret de Mlle Stangerson... Aussi M. Darzac se croit-il tenu à garder le silence ! ... Imaginez que Larsan, qui a, lors de ses trois tentatives, tout mis en train pour détourner les soupçons sur M. Darzac, ait fixé, justement, ces trois fois-là, des rendez-vous à M. Darzac dans un endroit compromettant, rendez-vous où il devait être traité du mystère... M. Darzac se fera plutôt condamner que d'avouer quoi que ce soit, que d'expliquer quoi que ce soit qui touche au mystère de Mlle Stangerson. Larsan est assez malin pour avoir fait encore cette « combinaise-là ! ... »

Le président, ébranlé, mais curieux, répartit encore :

« Mais quel peut bien être ce mystère-là ?

— Ah ! m'sieur, j'pourrais pas vous dire ! fit Rouletabille en saluant le président ; seulement, je crois que vous en savez assez maintenant pour acquitter M. Robert Darzac ! ... À moins que Larsan ne revienne ! mais j'crois pas ! » fit-il en riant d'un gros rire heureux. Tout le monde rit avec lui.

« Encore une question, monsieur, fit le président. Nous comprenons, toujours en admettant votre thèse, que Larsan ait voulu détourner les soupçons sur M. Robert Darzac, mais quel intérêt avait-il à les détourner aussi sur le père Jacques ? ...

— « L'intérêt du policier ! » m'sieur ! L'intérêt de se montrer débrouillard en annihilant lui-même ces preuves qu'il avait accumulées. C'est très fort, ça ! C'est un truc qui lui a souvent servi à détourner les soupçons qui eussent pu s'arrêter sur lui- même ! Il prouvait l'innocence de l'un, avant d'accuser l'autre. Songez, monsieur le président, qu'une affaire comme celle-là devait avoir été longuement « mijotée « à l'avance par Larsan. Je vous dis qu'il avait tout étudié et qu'il connaissait les êtres et tout. Si vous avez la curiosité de savoir comment il s'était documenté, vous apprendrez qu'il s'était fait un moment le commissionnaire entre « le laboratoire de la Sûreté »et M. Stangerson, à qui on demandait des « expériences ». Ainsi, il a pu, avant le crime, pénétrer deux fois dans le pavillon. Il était grimé de telle sorte que le père Jacques, depuis, ne l'a pas reconnu ; mais il a trouvé, lui, Larsan, l'occasion de chiper au père Jacques une vieille paire de godillots et un béret hors d'usage, que le vieux serviteur de M. Stangerson avait noués dans un mouchoir pour les porter sans doute à un de ses amis, charbonnier sur la route d'Épinay ! Quand le crime fut découvert, le père Jacques, reconnaissant les objets à part lui, n'eut garde de les reconnaître immédiatement ! Ils étaient trop compromettants, et c'est ce qui vous explique son trouble, à cette époque, quand nous lui en parlions. Tout cela est simple comme bonjour et j'ai acculé Larsan à me l'avouer. Il l'a du reste fait avec plaisir, car, si c'est un bandit — ce qui ne fait plus, j'ose l'espérer, de doute pour personne — c'est aussi un artiste ! ... C'est sa manière de faire, à cet homme, sa manière à lui... Il a agi de même lors de l'affaire du « Crédit universel » et des « Lingots de la Monnaie ! » Des affaires qu'il faudra réviser, m'sieur le président, car il y a quelques innocents dans les prisons depuis que Ballmeyer-Larsan appartient à la Sûreté !


Chapitre 27. Kapitel 27: (2 von 2) Wo Joseph Rouletabille in seiner ganzen Herrlichkeit erscheint Chapter 27 (2 of 2) Where Joseph Rouletabille appears in all his glory Глава 27 (2 из 2): Жозеф Рулетабиль во всей красе (2 de 2) Où Joseph Rouletabille apparaît dans toute sa gloire

Chapitre 27. Chapter 27. (2 de 2) Où Joseph Rouletabille apparaît dans toute sa gloire (2 of 2) Where Joseph Rouletabille appears in all his glory

Rouletabille fut appelé immédiatement à la barre et son interrogatoire, car il s'agissait là plutôt d'un interrogatoire que d'une déposition, reprit. Rouletabille was called immediately to the bar and his questioning, because it was more an interrogation than a deposition, resumed. Le président : President :

« Vous nous avez dit tout à l'heure, monsieur, qu'il était impossible de s'enfuir du bout de cour. "You told us earlier, sir, that it was impossible to run from the end of the yard. “Você nos disse antes, senhor, que era impossível escapar pelo fundo do pátio. J'admets, avec vous, je veux bien admettre que, puisque Frédéric Larsan se trouvait penché à sa fenêtre, au-dessus de vous, il fût encore dans ce bout de cour ; mais, pour se trouver à sa fenêtre, il lui avait fallu quitter ce bout de cour. I admit, with you, I am willing to admit that, since Frederic Larsan was leaning out of his window, above you, he was still in this end of the courtyard; but to find himself at his window, he had had to leave this end of the courtyard. Il s'était donc enfui ! He had therefore fled! Et comment ? And how ? Rouletabille :

« J'ai dit qu'il n'avait pu s'enfuir « normalement... » Il s'est donc enfui « anormalement » ! "I said that he could not run away" normally ... "He therefore fled" abnormally "! Car le bout de cour, je l'ai dit aussi, n'était que « quasi » fermé tandis que la « Chambre Jaune » l'était tout à fait. Because the end of the courtyard, I said it too, was only "almost" closed while the "Yellow Room" was completely closed. Porque o final do pátio, eu também disse, estava apenas "quase" fechado enquanto o "Salão Amarelo" estava completamente. On pouvait grimper au mur, chose impossible dans la « Chambre Jaune », se jeter sur la terrasse et de là, pendant que nous étions penchés sur le cadavre du garde, pénétrer de la terrasse dans la galerie par la fenêtre qui donne juste au-dessus. We could climb the wall, something impossible in the "Yellow Room", throw ourselves on the terrace and from there, while we were leaning over the body of the guard, enter from the terrace into the gallery by the window which gives just to the- above. Larsan n'avait plus qu'un pas à faire pour être dans sa chambre, ouvrir sa fenêtre et nous parler. Larsan only had one more step to be in his room, open his window and speak to us. Ceci n'était qu'un jeu d'enfant pour un acrobate de la force de Ballmeyer. This was child's play for an acrobat of Ballmeyer's strength. Et, monsieur le président, voici la preuve de ce que j'avance. And, Mr. Chairman, here is proof of what I'm saying. Ici, Rouletabille tira de la poche de son veston, un petit paquet qu'il ouvrit, et dont il tira une cheville. Here Rouletabille drew from his jacket pocket a small package which he opened and from which he drew an ankle. « Tenez, monsieur le président, voici une cheville qui s'adapte parfaitement dans un trou que l'on trouve encore dans le« corbeau » de droite qui soutient la terrasse en encorbellement. "Hier, Herr Präsident, hier ist ein Dübel, der perfekt in ein Loch passt, das man noch in der rechten "Konsole" findet, die die Erkerterrasse stützt. "Here, Mr. President, here is an ankle which fits perfectly into a hole which one still finds in the" corbel "on the right which supports the corbelled terrace. "Aqui, senhor presidente, aqui está um tornozelo que se encaixa perfeitamente num orifício que ainda se encontra no" consolo "da direita que sustenta o terraço consolado. Larsan, qui prévoyait tout et qui songeait à tous les moyens de fuite autour de sa chambre — chose nécessaire quand on joue son jeu — avait enfoncé préalablement cette cheville dans ce « corbeau ». Larsan, der alles voraussah und an alle Fluchtmöglichkeiten rund um sein Zimmer dachte - was notwendig ist, wenn man sein Spiel spielt -, hatte diesen Dübel zuvor in diese "Krähe" getrieben. Larsan, who foresaw everything and who thought of all the means of escape around his room - something necessary when one plays his game - had previously stuck this ankle in this "crow". Larsan, que previu tudo e que pensou em todos os meios de fuga em torno de seu quarto - uma coisa necessária quando se joga seu jogo - havia anteriormente colocado este tornozelo neste "corvo". Un pied sur la borne qui est au coin du château, un autre pied sur la cheville, une main à la corniche de la porte du garde, l'autre main à la terrasse, et Frédéric Larsan disparaît dans les airs... d'autant mieux qu'il est fort ingambe et que, ce soir-là, il n'était nullement endormi par un narcotique, comme il avait voulu nous le faire croire. Ein Fuß auf dem Poller an der Ecke des Schlosses, ein anderer Fuß auf dem Knöchel, eine Hand am Sims der Wachtür, die andere Hand auf der Terrasse, und Frédéric Larsan verschwindet in der Luft ... umso besser, dass er sehr ungeschickt ist und an diesem Abend keineswegs von einem Narkotikum betäubt war, wie er uns glauben machen wollte. One foot on the terminal at the corner of the castle, another foot on the ankle, one hand on the cornice of the guard's door, the other hand on the terrace, and Frédéric Larsan disappears into the air ... d ' all the better since he is very unambiguous and that, that evening, he was not put to sleep by a narcotic, as he had wanted us to believe. Nous avions dîné avec lui, monsieur le président, et, au dessert, il nous joua le coup du monsieur qui tombe de sommeil, car il avait besoin d'être, lui aussi, endormi, pour que, le lendemain, on ne s'étonnât point que moi, Joseph Rouletabille, j'aie été victime d'un narcotique en dînant avec Larsan. Wir hatten mit ihm zu Abend gegessen, Herr Präsident, und beim Dessert spielte er uns den Trick mit dem schlafenden Herrn vor, denn auch er musste eingeschläfert werden, damit man sich am nächsten Tag nicht wunderte, dass ich, Josef Rulabille, beim Abendessen mit Larsan ein Opfer von Narkotika geworden war. We had dined with him, Mr. President, and, for dessert, he played us the trick of the man who is falling asleep, for he too needed to be asleep, so that, the next day, we would not have It was not surprising that I, Joseph Rouletabille, had been the victim of a narcotic while dining with Larsan. Du moment que nous avions subi le même sort, les soupçons ne l'atteignaient point et s'égaraient ailleurs. As long as we had suffered the same fate, suspicion did not reach it and wandered elsewhere. Car, moi, monsieur le président, moi, j'ai été bel et bien endormi, et par Larsan lui-même, et comment ! Because, me, Mr. President, me, I was indeed asleep, and by Larsan himself, and how! ... Si je n'avais pas été dans ce triste état, jamais Larsan ne se serait introduit dans la chambre de Mlle Stangerson ce soir-là, et le malheur ne serait pas arrivé ! ... If I had not been in this sad state, Larsan would never have entered Miss Stangerson's room that evening, and misfortune would not have happened! ... »

On entendit un gémissement. We heard a groan. C'était M. Darzac qui n'avait pu retenir sa douloureuse plainte... It was M. Darzac who could not restrain his painful complaint ... « Vous comprenez, ajouta Rouletabille, que, couchant à côté de lui, je gênais particulièrement Larsan, cette nuit-là, car il savait ou du moins il pouvait se douter « que, cette nuit-là, je veillais » ! "You understand," added Rouletabille, "that, sleeping next to him, I particularly bothered Larsan that night, because he knew, or at least he could suspect," that I was awake that night! " "Você entende", acrescentou Rouletabille, "que, dormindo ao lado dele, incomodei particularmente o Larsan naquela noite, porque ele sabia ou pelo menos podia suspeitar" que, naquela noite, eu estava acordado! Naturellement il ne pouvait pas croire une seconde que je le soupçonnais, lui ! Of course he couldn't believe for a second that I suspected him! Mais je pouvais le découvrir au moment où il sortait de sa chambre pour se rendre dans celle de Mlle Stangerson. But I could discover him as he left his room to go to Miss Stangerson's. Il attendit, cette nuit-là, pour pénétrer chez Mlle Stangerson, que je fusse endormi et que mon ami Sainclair fût occupé dans ma propre chambre à me réveiller. He waited that night before entering Miss Stangerson's house until I was asleep and my friend Sainclair was busy in my own room waking me up. Dix minutes plus tard Mlle Stangerson criait à la mort ! Ten minutes later Miss Stangerson was screaming death! Dez minutos depois, a Srta. Stangerson estava gritando morte!

— Comment étiez-vous arrivé à soupçonner, alors, Frédéric Larsan ? - How did you come to suspect, then, Frédéric Larsan? demanda le président. asked the president.

— « Le bon bout de ma raison » me l'avait indiqué, m'sieur le président ; aussi j'avais l'oeil sur lui ; mais c'est un homme terriblement fort, et je n'avais pas prévu le coup du narcotique. - "The good end of my reason" had indicated to me, m'sieur the president; also I had my eye on him; but he is a terribly strong man, and I hadn't foreseen the narcotic hit. - "O bom fim da minha razão" indicou-me, m'sieur o presidente; também eu estava de olho nele; mas ele é um homem terrivelmente forte, e eu não tinha previsto o efeito do narcótico. Oui, oui, le bon bout de ma raison me l'avait montré ! Yes, yes, the good end of my reason had shown it to me! Mais il me fallait une preuve palpable ; comme qui dirait : « Le voir au bout de mes yeux après l'avoir vu au bout de ma raison ! But I needed tangible proof; as if to say: "See it at the end of my eyes after having seen it at the end of my reason!" — Qu'est-ce que vous entendez par « le bon bout de votre raison » ? - What do you mean by "the good end of your reason"? - O que você quer dizer com "o bom fim de sua razão"? — Eh ! - Hey! m'sieur le président, la raison a deux bouts : le bon et le mauvais. Mr. President, reason has two ends: the good and the bad. Il n'y en a qu'un sur lequel vous puissiez vous appuyer avec solidité : c'est le bon ! There is only one that you can lean on solidly: it's the right one! Há apenas um em que você pode se apoiar com firmeza: é o certo! On le reconnaît à ce que rien ne peut le faire craquer, ce bout-là, quoi que vous fassiez ! You can tell by the fact that nothing can make it crack, that end, whatever you do! quoi que vous disiez ! whatever you say! Au lendemain de la « galerie inexplicable », alors que j'étais comme le dernier des derniers des misérables hommes qui ne savent point se servir de leur raison parce qu'ils ne savent par où la prendre, que j'étais courbé sur la terre et sur les fallacieuses traces sensibles, je me suis relevé soudain, en m'appuyant sur le bon bout de ma raison et je suis monté dans la galerie. In the aftermath of the "inexplicable gallery", when I was like the last of the last of the miserable men who do not know how to use their reason because they do not know where to take it, that I was hunched over the earth and on the fallacious sensitive traces, I suddenly got up, leaning on the good end of my reason, and I climbed into the gallery. « Là, je me suis rendu compte que l'assassin que nous avions poursuivi n'avait pu, cette fois, « ni normalement, ni anormalement » quitter la galerie. “There, I realized that the assassin we had been pursuing had not been able, this time, 'neither normally nor abnormally' to leave the gallery. Alors, avec le bon bout de ma raison, j'ai tracé un cercle dans lequel j'ai enfermé le problème, et autour du cercle, j'ai déposé mentalement ces lettres flamboyantes : « Puisque l'assassin ne peut être en dehors du cercle, il est dedans ! So, with the right end of my reason, I drew a circle in which I enclosed the problem, and around the circle, I mentally deposited these flamboyant letters: "Since the assassin cannot be outside the circle, he's in it! Então, com o melhor da minha sanidade, desenhei um círculo no qual travei o problema, e ao redor do círculo, mentalmente depositei essas letras flamejantes: “Como o assassino não pode estar fora do círculo, ele está nele! » Qui vois-je donc, dans ce cercle ? Who do I see in this circle? Le bon bout de ma raison me montre, outre l'assassin qui doit nécessairement s'y trouver : le père Jacques, M. Stangerson, Frédéric Larsan et moi ! The good end of my reason shows me, in addition to the assassin who must necessarily be there: Father Jacques, Mr. Stangerson, Frédéric Larsan and me! O bom final da minha razão mostra-me, além do assassino que necessariamente deve estar lá: o Padre Jacques, o Sr. Stangerson, Frédéric Larsan e eu! Cela devait donc faire, avec l'assassin, cinq personnages. So that had to make, with the assassin, five characters. Or, quand je cherche dans le cercle, ou si vous préférez, dans la galerie, pour parler « matériellement », je ne trouve que quatre personnages. However, when I look in the circle, or if you prefer, in the gallery, to speak "materially", I only find four characters. Et il est démontré que le cinquième n'a pu s'enfuir, n'a pu sortir du cercle ! And it has been shown that the fifth could not escape, could not get out of the circle! Donc, j'ai, dans le cercle, un personnage qui est deux, c'est-à-dire qui est, outre son personnage, le personnage de l'assassin ! So I have, in the circle, a character who is two, that is to say who is, in addition to his character, the character of the assassin! ... Pourquoi ne m'en étais-je pas aperçu déjà ? ... Why had I not noticed it already? Tout simplement parce que le phénomène du doublement du personnage ne s'était pas passé sous mes yeux. Quite simply because the phenomenon of the doubling of the character had not happened before my eyes. Avec qui, des quatre personnes enfermées dans le cercle, l'assassin a-t-il pu se doubler sans que je l'aperçoive ? With whom, of the four people trapped in the circle, could the assassin overtake himself without my seeing him? Certainement pas avec les personnes qui me sont apparues à un moment, dédoublées de l'assassin . Certainly not with the people who appeared to me at one time, split from the murderer. Certamente não com as pessoas que me apareceram em determinado momento, apelidadas de assassino. Ainsi ai-je vu, en même temps , dans la galerie, M. Stangerson et l'assassin, le père Jacques et l'assassin, moi et l'assassin. So I saw, at the same time, in the gallery, Mr. Stangerson and the assassin, Father Jacques and the assassin, me and the assassin. L'assassin ne saurait donc être ni M. Stangerson, ni le père Jacques, ni moi ! The assassin could not therefore be Mr. Stangerson, or Father Jacques, or me! Et puis, si c'était moi l'assassin, je le saurais bien, n'est-ce pas, m'sieur le président ? Besides, if I was the murderer, I would know it, wouldn't I, Mr. President? ... Avais-je vu, en même temps, Frédéric Larsan et l'assassin ? ... Had I seen Frédéric Larsan and the assassin at the same time? Non ! No ! ... Non ! ... No ! Il s'était passé deux secondes pendant lesquelles j'avais perdu de vue l'assassin, car celui-ci était arrivé, comme je l'ai du reste noté dans mes papiers, deux secondes avant M. Stangerson, le père Jacques et moi, au carrefour des deux galeries. Two seconds had passed during which I had lost sight of the assassin, because he had arrived, as I have noted in my papers, two seconds before Mr. Stangerson, Father Jacques and me. , at the crossroads of the two galleries. Cela avait suffi à Larsan pour enfiler la galerie tournante, enlever sa fausse barbe d'un tour de main, se retourner et se heurter à nous, comme s'il poursuivait l'assassin ! It was enough for Larsan to thread the revolving gallery, remove his false beard with a twist of the hand, turn around and run into us, as if he was chasing the assassin! ... Ballmeyer en a fait bien d'autres ! ... Ballmeyer has done many others! et vous pensez bien que ce n'était qu'un jeu pour lui de se grimer de telle sorte qu'il apparût tantôt avec sa barbe rouge à Mlle Stangerson, tantôt à un employé de poste avec un collier de barbe châtain qui le faisait ressembler à M. Darzac, dont il avait juré la perte ! and you can imagine that it was only a game for him to make himself so that he appeared sometimes with his red beard to Miss Stangerson, sometimes to a post employee with a brown beard collar that made him look like to Mr. Darzac, whose loss he had sworn! Oui, le bon bout de ma raison me rapprochait ces deux personnages, ou plutôt ces deux moitiés de personnage que je n'avais pas vues en même temps : Frédéric Larsan et l'inconnu que je poursuivais... pour en faire l'être mystérieux et formidable que je cherchais : «  l'assassin ». Yes, the good end of my reason brought me closer to these two characters, or rather these two character halves that I had not seen at the same time: Frédéric Larsan and the stranger I was chasing ... mysterious and formidable that I was looking for: "the murderer". « Cette révélation me bouleversa. “This revelation overwhelmed me. J'essayai de me ressaisir en m'occupant un peu des traces sensibles, des signes extérieurs qui m'avaient, jusqu'alors, égaré, et qu'il fallait, normalement, « faire entrer dans le cercle tracé par le bon bout de ma raison ! I tried to get hold of myself by taking care of the sensitive traces, the external signs which had until then led me astray, and which, normally, had to be "brought into the circle traced by the right end of my reason ! Procurei me recompor cuidando um pouco dos traços sensíveis, os signos externos que até então me haviam desviado do caminho, e que, normalmente, precisavam ser "encaixados no círculo traçado pela extremidade direita de minha razão. ! « Quels étaient, tout d'abord, les principaux signes extérieurs, cette nuit-là, qui m'avaient éloigné de l'idée d'un Frédéric Larsan assassin : “What were, first of all, the main external signs that night that had taken me away from the idea of a murderer Frédéric Larsan: « 1° J'avais vu l'inconnu dans la chambre de Mlle Stangerson, et, courant à la chambre de Frédéric Larsan, j'y avais trouvé Frédéric Larsan, bouffi de sommeil. "1 ° I had seen the unknown in Mlle Stangerson's room, and, running to Frédéric Larsan's room, I had found Frédéric Larsan there, puffy with sleep. « 2° L'échelle ; "2 ° The scale; « 3° J'avais placé Frédéric Larsan au bout de la galerie tournante en lui disant que j'allais sauter dans la chambre de Mlle Stangerson pour essayer de prendre l'assassin. "3 ° I had placed Frédéric Larsan at the end of the revolving gallery, telling him that I was going to jump into Miss Stangerson's room to try to take the murderer. Or, j'étais retourné dans la chambre de Mlle Stangerson où j'avais retrouvé mon inconnu. Now, I went back to Miss Stangerson's room where I had found my stranger. « Le premier signe extérieur ne m'embarrassa guère. "The first outward sign hardly embarrassed me. Il est probable que, lorsque je descendis de mon échelle, après avoir vu l'inconnu dans la chambre de Mlle Stangerson, celui-ci avait déjà fini ce qu'il avait à y faire. It is probable that when I descended from my ladder, after seeing the stranger in Miss Stangerson's room, he had already finished what he had to do there. Alors, pendant que je rentrais dans le château, il rentrait, lui, dans la chambre de Frédéric Larsan, se déshabillait en deux temps, trois mouvements, et, quand je venais frapper à sa porte, montrait un visage de Frédéric Larsan ensommeillé à plaisir... So, while I returned to the castle, he returned to Frédéric Larsan's room, undressed in two steps, three movements, and, when I knocked on his door, showed a face of Frédéric Larsan asleep with pleasure ... Então, enquanto eu estava entrando no castelo, ele voltava ao quarto de Frédéric Larsan, se despia em dois passos, três movimentos, e, quando eu batia em sua porta, ele mostrava o rosto de Frédéric Larsan adormecido de prazer. ...

« Le second signe : l'échelle, ne m'embarrassa pas davantage. "The second sign: the ladder, didn't embarrass me any more. Il était évident que, si l'assassin était Larsan, il n'avait pas besoin d'échelle pour s'introduire dans le château, puisque Larsan couchait à côté de moi ; mais cette échelle devait faire croire à la venue de l'assassin, « de l'extérieur », chose nécessaire au système de Larsan puisque, cette nuit-là, M. Darzac n'était pas au château. It was obvious that, if the assassin was Larsan, he didn't need a ladder to get into the castle, since Larsan was sleeping next to me; but this scale must have made believe in the coming of the assassin, "from the outside", a necessary thing for Larsan's system since, that night, M. Darzac was not at the castle. Enfin, cette échelle, en tout état de cause, pouvait faciliter la fuite de Larsan. Finally, this scale, in any case, could facilitate Larsan's escape. Finalmente, essa escala, em qualquer caso, poderia facilitar a fuga de Larsan.

« Mais le troisième signe extérieur me déroutait tout à fait. “But the third outward sign completely confused me. Ayant placé Larsan au bout de la galerie tournante, je ne pouvais expliquer qu'il eût profité du moment où j'allais dans l'aile gauche du château trouver M. Stangerson et le père Jacques, pour retourner dans la chambre de Mlle Stangerson ! Having placed Larsan at the end of the revolving gallery, I could not explain that he had taken advantage of the moment when I was going in the left wing of the castle to find Mr. Stangerson and Father Jacques, to return to Miss Stangerson's room! C'était là un geste bien dangereux ! It was a very dangerous gesture! Il risquait de se faire prendre... Et il le savait ! He was in danger of getting caught ... And he knew it! ... Et il a failli se faire prendre... n'ayant pas eu le temps de regagner son poste, comme il l'avait certainement espéré... Il fallait qu'il eût, pour retourner dans la chambre, une raison bien nécessaire qui lui fût apparue tout à coup, après mon départ, car il n'aurait pas sans cela prêté son revolver ! ... And he almost got caught ... not having had time to return to his post, as he had certainly hoped ... He had to have a reason to return to the room very necessary which suddenly appeared to him after my departure, for he would not otherwise have lent his revolver! Quant à moi, quand « j'envoyai » le père Jacques au bout de la galerie droite, je croyais naturellement que Larsan était toujours à son poste au bout de la galerie tournante et le père Jacques lui-même, à qui, du reste, je n'avais point donné de détails, en se rendant à son poste, ne regarda pas, lorsqu'il passa à l'intersection des deux galeries, si Larsan était au sien. As for me, when I "sent" Father Jacques to the end of the right gallery, I naturally believed that Larsan was still at his post at the end of the revolving gallery and Father Jacques himself, to whom, moreover, When I went to his post, I had not given any details. When he passed the intersection of the two galleries, I did not look to see if Larsan was at his. Le père Jacques ne songeait alors qu'à exécuter mes ordres rapidement. Father Jacques only thought of carrying out my orders quickly. Quelle était donc cette raison imprévue qui avait pu conduire Larsan une seconde fois dans la chambre ? What then was this unforeseen reason that had led Larsan into the bedroom a second time? Quelle était-elle ? What was she? ... Je pensai que ce ne pouvait être qu'une marque sensible de son passage qui le dénonçait ! ... I thought that it could only be a sensitive mark of his passage which denounced him! Il avait oublié quelque chose de très important dans la chambre ! He had forgotten something very important in the room! Quoi ? What? ... Avait-il retrouvé cette chose ? ... Had he found this thing? ... Je me rappelai la bougie sur le parquet et l'homme courbé... Je priai Mme Bernier, qui faisait la chambre, de chercher... et elle trouva un binocle... Ce binocle, m'sieur le président ! ... I remembered the candle on the floor and the bent man ... I begged Madame Bernier, who was cleaning the room, to look for ... and she found a binocular ... This binocle, M'sieur President ! ... Lembrei-me da vela no chão e do homem curvado ... Implorei a Madame Bernier, que estava limpando o quarto, que procurasse ... e ela encontrou um binóculo ... Este binóculo, M'sieur Presidente! Et Rouletabille sortit de son petit paquet le binocle que nous connaissons déjà... And Rouletabille took out of his little package the binoculars that we already know ...

« Quand je vis ce binocle, je fus épouvanté... Je n'avais jamais vu de binocle à Larsan... S'il n'en mettait pas, c'est donc qu'il n'en avait pas besoin... Il en avait moins besoin encore alors dans un moment où la liberté de ses mouvements lui était chose si précieuse... Que signifiait ce binocle ? "When I saw this binocular, I was appalled ... I had never seen a binocular in Larsan ... If he didn't wear one, then he didn't need them .. He needed it less then at a time when the freedom of his movements was so precious to him ... What did this binocular signify? ... Il n'entrait point dans mon cercle. ... He did not enter my circle. ... Ele não se encaixava no meu círculo. À moins qu'il ne fût celui d'un presbyte, m'exclamai-je, tout à coup ! Unless he was a presbyopic, I suddenly exclaimed! ... En effet, je n'avais jamais vu écrire Larsan, je ne l'avais jamais vu lire. ... Indeed, I had never seen Larsan write, I had never seen him read. Il « pouvait » donc être presbyte ! He "could" therefore be presbyopic! On savait certainement à la Sûreté qu'il était presbyte, « s'il l'était... » on connaissait sans doute son binocle... Le binocle du « presbyte Larsan » trouvé dans la chambre de Mlle Stangerson, après le mystère de la galerie inexplicable, cela devenait terrible pour Larsan ! We certainly knew at the Sûreté that he was presbyopic, "if he was ..." we probably knew his eyeglasses ... The eyeglass of the "presbyop Larsan" found in Miss Stangerson's room, after the mystery of the inexplicable gallery, it was becoming terrible for Larsan! Ainsi s'expliquait le retour de Larsan dans la chambre ! This was the explanation for Larsan's return to the bedroom! ... Et, en effet, Larsan-Ballmeyer est bien presbyte, et ce binocle, que l'on reconnaîtra « peut-être » à la Sûreté, est bien le sien... ... And, indeed, Larsan-Ballmeyer is quite presbyopic, and this eyeglasses, which we will "perhaps" recognize at the Sûreté, is indeed his ... « Vous voyez, monsieur, quel est mon système, continua Rouletabille ; je ne demande pas aux signes extérieurs de m'apprendre la vérité ; je leur demande simplement de ne pas aller contre la vérité que m'a désignée le bon bout de ma raison ! "You see, sir, what is my system," continued Rouletabille; I don't ask the external signs to teach me the truth; I simply ask them not to go against the truth that the good end of my reason pointed out to me! ...

« Pour être tout à fait sûr de la vérité sur Larsan, car Larsan assassin était une exception qui méritait que l'on s'entourât de quelque garantie, j'eus le tort de vouloir voir sa « figure ». "To be completely sure of the truth about Larsan, for Larsan assassin was an exception which deserved some guarantee, I was wrong to want to see his 'face'. “Para ter certeza da verdade sobre Larsan, como o assassino de Larsan era uma exceção que merecia alguma garantia, eu estava errado em querer ver seu 'rosto'. J'en ai été bien puni ! I was well punished for it! Je crois que c'est le bon bout de ma raison qui s'est vengé de ce que, depuis la galerie inexplicable, je ne me sois pas appuyé solidement, définitivement et en toute confiance, sur lui... négligeant magnifiquement de trouver d'autres preuves de la culpabilité de Larsan que celle de ma raison ! I believe that it is the good end of my reason which took revenge for what, since the inexplicable gallery, I did not lean solidly, definitively and in all confidence, on him ... neglecting magnificently to find d other proof of Larsan's guilt than that of my sanity! Creio que é o fim bom da minha razão que se vingou daquilo que, desde a inexplicável galeria, não me apoiei solidamente, definitivamente e com toda a confiança, nele ... negligenciando magnificamente encontrar d outra prova da culpa de Larsan que não a da minha sanidade! Alors, Mlle Stangerson a été frappée... »

Rouletabille s'arrêta... se mouche... vivement ému. Rouletabille stopped ... blows his nose ... deeply moved. « Mais qu'est-ce que Larsan, demanda le président, venait faire dans cette chambre ? “But what was Larsan,” the president asked, “doing in this room? Pourquoi a-t-il tenté d'assassiner à deux reprises Mlle Stangerson ? Why did he try to murder Miss Stangerson twice? — Parce qu'il l'adorait, m'sieur le président... - Because he adored him, Mr. President ... — Voilà évidemment une raison... - This is obviously a reason ...

— Oui, m'sieur, une raison péremptoire. Il était amoureux fou... et à cause de cela, et de bien d'autres choses aussi, capable de tous les crimes. He was madly in love ... and because of that, and so much more, capable of all crimes. — Mlle Stangerson le savait ? - Did Miss Stangerson know?

— Oui, m'sieur, mais elle ignorait, naturellement, que l'individu qui la poursuivait ainsi fût Frédéric Larsan... sans quoi Frédéric Larsan ne serait pas venu s'installer au château, et n'aurait pas, la nuit de la galerie inexplicable, pénétré avec nous auprès de Mlle Stangerson, « après l'affaire ». - Yes, sir, but she did not know, of course, that the individual who pursued her thus was Frédéric Larsan ... otherwise Frédéric Larsan would not have come to settle in the castle, and would not have, the night of the inexplicable gallery, penetrated with us to Miss Stangerson, "after the affair." J'ai remarqué du reste qu'il s'était tenu dans l'ombre et qu'il avait continuellement la face baissée... ses yeux devaient chercher le binocle perdu... Mlle Stangerson a eu à subir les poursuites et les attaques de Larsan sous un nom et sous un déguisement que nous ignorions mais qu'elle pouvait connaître déjà. I noticed moreover that he had been kept in the shadows and that he had his face continually lowered ... his eyes must have been searching for the lost lens ... Miss Stangerson had to endure the pursuits and the attacks of Larsan under a name and in a disguise that we did not know but that she could already know. — Et vous, monsieur Darzac ! - And you, Monsieur Darzac! demanda le président... vous avez peut-être, à ce propos, reçu les confidences de Mlle Stangerson... Comment se fait-il que Mlle Stangerson n'ait parlé de cela à personne ? asked the president ... you may have, on this subject, received the confidences of Miss Stangerson ... How is it that Miss Stangerson did not mention this to anyone? ... Cela aurait pu mettre la justice sur les traces de l'assassin... et si vous êtes innocent, vous aurait épargné la douleur d'être accusé ! ... It could have put justice on the trail of the murderer ... and if you are innocent, you would have saved the pain of being accused! — Mlle Stangerson ne m'a rien dit, fit M. Darzac. "Mlle Stangerson said nothing to me," said M. Darzac. — Ce que dit le jeune homme vous paraît-il possible ? - Does what the young man says seem possible? » demanda encore le président.

Imperturbablement, M. Robert Darzac répondit : Imperturbably, M. Robert Darzac replied:

« Mlle Stangerson ne m'a rien dit... "Miss Stangerson said nothing to me ... — Comment expliquez-vous que, la nuit de l'assassinat du garde, reprit le président, en se tournant vers Rouletabille, l'assassin ait rapporté les papiers volés à M. Stangerson ? "How do you explain that, on the night of the guard's assassination," resumed the president, turning to Rouletabille, the assassin returned the stolen papers to Mr. Stangerson? ... Comment expliquez-vous que l'assassin se soit introduit dans la chambre fermée de Mlle Stangerson ? ... How do you explain that the assassin broke into Miss Stangerson's closed room? — Oh ! quant à cette dernière question, il est facile, je crois, d'y répondre. as to this last question, it is easy, I believe, to answer. Un homme comme Larsan-Ballmeyer devait se procurer ou faire faire facilement les clefs qui lui étaient nécessaires... Quant au vol des documents, « je crois » que Larsan n'y avait pas d'abord songé. A man like Larsan-Ballmeyer had to easily get hold of the keys he needed or have them made. As for the theft of the documents, "I don't think Larsan had thought of it at first. Um homem como Larsan-Ballmeyer teve que obter facilmente ou ter feito as chaves de que precisava ... Quanto ao roubo dos documentos, "acredito" que Larsan não tinha pensado nisso a princípio. Espionnant partout Mlle Stangerson, bien décidé à empêcher son mariage avec M. Robert Darzac, il suit un jour Mlle Stangerson et M. Robert Darzac dans les grands magasins de la Louve, s'empare du réticule de Mlle Stangerson, que celle-ci perd ou se laisse prendre. Spying everywhere Miss Stangerson, determined to prevent her marriage to Mr. Robert Darzac, he one day follows Miss Stangerson and Mr. Robert Darzac in the department stores of the She-wolf, seizes Miss Stangerson's reticle, which she loses or get caught. Dans ce réticule, il y a une clef à tête de cuivre. Il ne sait pas l'importance qu'a cette clef. He does not know the importance of this key. Elle lui est révélée par la note que fait paraître Mlle Stangerson dans les journaux. It was revealed to him by the note that Miss Stangerson published in the newspapers. Il écrit à Mlle Stangerson poste restante, comme la note l'en prie. He wrote to Miss Stangerson poste restante, as the note requested. Il demande sans doute un rendez-vous en faisant savoir que celui qui a le réticule et la clef est celui qui la poursuit, depuis quelque temps, de son amour. He probably asks for an appointment by letting it be known that the one who has the reticle and the key is the one who has been chasing her, for some time, with his love. Il ne reçoit pas de réponse. He does not receive an answer. Il va constater au bureau 40 que la lettre n'est plus là. He will see in office 40 that the letter is no longer there. Il y va, ayant pris déjà l'allure et autant que possible l'habit de M. Darzac, car, décidé à tout pour avoir Mlle Stangerson, il a tout préparé, pour que, quoi qu'il arrive, M. Darzac, aimé de Mlle Stangerson, M. Darzac qu'il déteste et dont il veut la perte, passe pour le coupable. He goes there, having already taken on the appearance and as much as possible the habit of M. Darzac, because, determined to do everything to have Mlle Stangerson, he has prepared everything, so that, whatever happens, M. Darzac, beloved by Mlle Stangerson, M. Darzac, whom he detests and whose loss he wants, is considered to be the culprit. Ele vai lá, já tendo assumido o encanto e tanto quanto possível o hábito de M. Darzac, pois, determinado a fazer de tudo para ter Mlle Stangerson, ele preparou tudo para que, aconteça o que acontecer, M. Darzac, querido por Mlle Stangerson , M. Darzac, a quem ele detesta e cuja perda ele deseja, é considerado o culpado. « Je dis : quoi qu'il arrive, mais je pense que Larsan ne pensait pas encore qu'il en serait réduit à l'assassinat. "I said no matter what, but I think Larsan didn't think he would be murdered yet. Dans tous les cas, ses précautions sont prises pour compromettre Mlle Stangerson sous le déguisement Darzac. In all cases, his precautions are taken to compromise Miss Stangerson in the Darzac disguise. Larsan a, du reste, à peu près la taille de Darzac et quasi le même pied. Larsan is, moreover, about the size of Darzac and almost the same foot. Il ne lui serait pas difficile, s'il est nécessaire, après avoir dessiné l'empreinte du pied de M. Darzac, de se faire faire, sur ce dessin, des chaussures qu'il chaussera. It would not be difficult for him, if it was necessary, after having drawn the imprint of M. Darzac's foot, to have shoes made on this drawing which he would wear. Não seria difícil para ele, se fosse necessário, depois de ter traçado a marca do pé do Sr. Darzac, mandar fazer sapatos com esse desenho que ele usaria. Ce sont là trucs enfantins pour Larsan-Ballmeyer. These are childish things for Larsan-Ballmeyer.

« Donc, pas de réponse à sa lettre, pas de rendez-vous, et il a toujours la petite clef précieuse dans sa poche. Eh bien, puisque Mlle Stangerson ne vient pas à lui, il ira à elle ! Well, since Miss Stangerson does not come to him, he will go to her! Depuis longtemps son plan est fait. His plan has been made for a long time. Il s'est documenté sur le Glandier et sur le pavillon. He documented himself on the Glandier and on the pavilion. Un après-midi, alors que M. et Mlle Stangerson viennent de sortir pour la promenade et que le père Jacques lui- même est parti, il s'introduit dans le pavillon par la fenêtre du vestibule. One afternoon, when Mr. and Miss Stangerson had just gone out for a walk and Father Jacques himself had left, he entered the pavilion through the vestibule window. Il est seul, pour le moment, il a des loisirs... il regarde les meubles... l'un d'eux, fort curieux, et ressemblant à un coffre-fort, a une toute petite serrure... Tiens ! He is alone, for the moment, he has leisure ... he looks at the furniture ... one of them, very curious, and looking like a safe, has a very small lock ... Here! Ele está sozinho, por enquanto, ele tem tempo livre ... olha os móveis ... um deles, muito curioso, e parecendo um cofre, tem uma fechadura bem pequenininha ... Aqui! Tiens ! Cela l'intéresse... Comme il a sur lui la petite clef de cuivre... il y pense... liaison d'idées. That interests him ... As he has the little copper key on him ... he thinks about it ... connection of ideas. Il essaye la clef dans la serrure ; la porte s'ouvre... Des papiers ! Il faut que ces papiers soient bien précieux pour qu'on les ait enfermés dans un meuble aussi particulier... pour qu'on tienne tant à la clef qui ouvre ce meuble... Eh ! These papers must be very precious for us to have locked them in such a special piece of furniture ... so that we hold so much to the key that opens this piece of furniture ... Hey! Eh ! cela peut toujours servir... à un petit chantage... cela l'aidera peut-être dans ses desseins amoureux... Vite, il fait un paquet de ces paperasses et va le déposer dans le lavatory du vestibule. it can always be used ... as a little blackmail ... it will perhaps help him in his amorous plans ... Quickly, he does a bundle of these papers and goes to deposit it in the lavatory in the hall. Entre l'expédition du pavillon et la nuit de l'assassinat du garde, Larsan a eu le temps de voir ce qu'étaient ces papiers. Between the flag expedition and the night of the guard's assassination, Larsan had time to see what those papers were. Qu'en ferait-il ? What would he do with it? Ils sont plutôt compromettants... Cette nuit-là, il les rapporta au château... Peut-être a-t-il espéré du retour de ces papiers, qui représentaient vingt ans de travaux, une reconnaissance quelconque de Mlle Stangerson... Tout est possible, dans un cerveau comme celui-là ! They are rather compromising ... That night, he brought them back to the castle ... Perhaps he hoped for the return of these papers, which represented twenty years of work, some recognition from Miss Stangerson. Everything is possible, in a brain like this! ... Enfin, quelle qu'en soit la raison, il a rapporté les papiers et il en était bien débarrassé ! ... Finally, whatever the reason, he brought back the papers and he was well rid of them! Rouletabille toussa et je compris ce que signifiait cette toux. Rouletabille coughed and I understood what the cough meant. Il était évidemment embarrassé, à ce point de ses explications, par la volonté qu'il avait de ne point donner le véritable motif de l'attitude effroyable de Larsan vis-à-vis de Mlle Stangerson. He was evidently embarrassed, at this point in his explanations, by his unwillingness to give the real reason for Larsan's appalling attitude towards Miss Stangerson. Son raisonnement était trop incomplet pour satisfaire tout le monde, et le président lui en eut certainement fait l'observation, si, malin comme un singe, Rouletabille ne s'était écrié : « Maintenant, nous arrivons à l'explication du mystère de la Chambre Jaune ! His reasoning was too incomplete to satisfy everyone, and the president would certainly have made the observation to him, if, clever as a monkey, Rouletabille had not cried out: "Now we come to the explanation of the mystery of the Yellow Room! Il y eut, dans la salle, des remuements de chaises, de légères bousculades, des « chut ! There were shuffling of chairs in the room, slight jostling, "shh!" » énergiques. Energetic. La curiosité était poussée à son comble. Curiosity was pushed to its peak.

« Mais, fit le président, il me semble, d'après votre hypothèse, monsieur Rouletabille, que le mystère de la « Chambre Jaune » est tout expliqué. “But,” said the president, “it seems to me, according to your hypothesis, Mr. Rouletabille, that the mystery of the“ Yellow Room ”has been fully explained. Et c'est Frédéric Larsan qui nous l'a expliqué lui- même en se contentant de tromper sur le personnage, en mettant M. Robert Darzac à sa propre place. And it was Frédéric Larsan who explained it to us himself, contenting himself with deceiving the character, by putting Mr. Robert Darzac in his own place. Il est évident que la porte de la « Chambre Jaune » s'est ouverte quand M. Stangerson était seul, et que le professeur a laissé passer l'homme qui sortait de la chambre de sa fille, sans l'arrêter, peut-être même sur la prière de sa fille , pour éviter tout scandale ! It is obvious that the door of the "Yellow Room" opened when Mr. Stangerson was alone, and that the professor let pass the man who left his daughter's room, without stopping him, perhaps even at the request of her daughter, to avoid any scandal! ...

— Non, m'sieur le président, protesta avec force le jeune homme. Vous oubliez que Mlle Stangerson, assommée, ne pouvait plus faire de prière, qu'elle ne pouvait plus refermer sur elle ni le verrou ni la serrure... Vous oubliez aussi que M. Stangerson a juré sur la tête de sa fille à l'agonie que la porte ne s'était pas ouverte ! You forget that Miss Stangerson, stunned, could no longer say prayers, that she could no longer close either the bolt or the lock on her ... You also forget that Mr. Stangerson swore on his daughter's head. agony that the door had not opened! — C'est pourtant, monsieur, la seule façon d'expliquer les choses ! - It is however, sir, the only way to explain things! La Chambre Jaune' était close comme un coffre-fort. Pour me servir de vos expressions, il était impossible à l'assassin de s'en échapper « normalement ou anormalement ». To use your expressions, it was impossible for the assassin to escape "normally or abnormally". Quand on pénètre dans la chambre, on ne le trouve pas ! When you enter the room, you can't find it! Il faut bien pourtant qu'il s'échappe ! However, he must escape! ...

— C'est tout à fait inutile, m'sieur le président... - It is quite useless, m'sieur the president ... — Comment cela ? - What do you mean ?

— Il n'avait pas besoin de s'échapper, s'il n'y était pas ! - He didn't need to escape, if he wasn't! Rumeurs dans la salle...

« Comment, il n'y était pas ? "How, he wasn't there?" — Évidemment non ! - Obviously not! Puisqu'il ne pouvait pas y être, c'est qu'il n'y était pas ! Since he could not be there, it was because he was not there! Il faut toujours, m'sieur l'président, s'appuyer sur le bon bout de sa raison ! It is always necessary, M'sieur l'President, to lean on the good end of his reason! — Mais toutes les traces de son passage ! - But all the traces of its passage! protesta le président.

— Ça, m'sieur le président, c'est le mauvais bout de la raison ! - That, M'sieur President, is the wrong end of reason! ... Le bon bout nous indique ceci : depuis le moment où Mlle Stangerson s'est enfermée dans sa chambre jusqu'au moment où l'on a défoncé la porte, il est impossible que l'assassin se soit échappé de cette chambre ; et, comme on ne l'y trouve pas, c'est que, depuis le moment de la fermeture de la porte jusqu'au moment où on la défonce, l'assassin n'était pas dans la chambre ! ... The right end tells us this: from the moment Miss Stangerson locked herself in her room until the door was smashed, it is impossible that the assassin escaped from this room; and, as we do not find there, it is that, from the moment the door was closed until the moment when it was smashed, the assassin was not in the room! ... A boa dica nos diz o seguinte: desde o momento em que a Srta. Stangerson se trancou em seu quarto até o momento em que a porta foi arrombada, é impossível que o assassino tenha escapado deste quarto; e, como ali não se encontra, é porque, desde o momento em que a porta se fechou até ao momento em que foi quebrada, o assassino não estava no quarto! — Mais les traces ?

— Eh ! m'sieur le président... Ça, c'est les marques sensibles, encore une fois... les marques sensibles avec lesquelles on commet tant d'erreurs judiciaires parce qu'elles vous font dire ce qu'elles veulent ! mister president ... That is the sensitive brands, again ... the sensitive brands with which we make so many miscarriages of justice because they make you say what they want! Il ne faut point, je vous le répète, s'en servir pour raisonner ! It is not necessary, I repeat it to you, to use it to reason! Il faut raisonner d'abord ! We must reason first! Et voir ensuite si les marques sensibles peuvent entrer dans le cercle de votre raisonnement... J'ai un tout petit cercle de vérité incontestable : l'assassin n'était point dans la Chambre Jaune ! Pourquoi a-t-on cru qu'il y était ? Why did we think he was there? À cause des marques de son passage ! Because of the marks of its passage! Mais il peut être passé avant ! But it can be passed before! Que dis-je : il « doit » être passé avant. What am I saying: it "must" be passed before. La raison me dit qu'il faut qu'il soit passé là, avant  ! Reason tells me that it must be there, before! Examinons les marques et ce que nous savons de l'affaire, et voyons si ces marques vont à l'encontre de ce passage avant... avant que Mlle Stangerson s'enferme dans sa chambre, devant son père et le père Jacques ! Let's take a look at the marks and what we know about the case, and see if those marks go against this front passage ... before Miss Stangerson locks herself in her room, in front of her father and father Jacques! « Après la publication de l'article du Matin et une conversation que j'eus dans le trajet de Paris à Épinay-sur-Orge avec le juge d'instruction, la preuve me parut faite que la « Chambre Jaune » était mathématiquement close et que, par conséquent, l'assassin en avait disparu avant l'entrée de Mlle Stangerson dans sa chambre, à minuit. “After the publication of the article in Le Matin and a conversation I had on the way from Paris to Épinay-sur-Orge with the examining magistrate, it seemed to me to be proof that the“ Yellow Room ”was mathematically closed and that, therefore, the assassin had disappeared from there before Miss Stangerson entered her room at midnight. « Les marques extérieures se trouvaient alors être terriblement « contre ma raison ». “The external marks then happened to be terribly 'against my reason'. Mlle Stangerson ne s'était pas assassinée toute seule, et ces marques attestaient qu'il n'y avait pas eu suicide. Miss Stangerson had not been murdered on her own, and these marks testified that there had been no suicide. L'assassin était donc venu avant ! The assassin had therefore come before! Mais comment Mlle Stangerson n'avait-elle été assassinée qu'après ? But how had Miss Stangerson been murdered only afterwards? ou plutôt « ne paraissait-elle » avoir été assassinée qu'après ? or rather "did she appear" to have been murdered only afterwards? Il me fallait naturellement reconstituer l'affaire en deux phases, deux phases bien distinctes l'une de l'autre de quelques heures : la première phase pendant laquelle on avait réellement tenté d'assassiner Mlle Stangerson, tentative qu'elle avait dissimulée ; la seconde phase pendant laquelle, à la suite d'un cauchemar qu'elle avait eu, ceux qui étaient dans le laboratoire avaient cru qu'on l'assassinait ! I naturally had to reconstitute the affair in two phases, two phases quite distinct from each other of a few hours: the first phase during which there had really been an attempt to assassinate Miss Stangerson, an attempt which she had concealed; the second phase during which, following a nightmare she had had, those who were in the laboratory had believed that he was being killed! « Je n'avais pas encore, alors, pénétré dans la « Chambre Jaune ». "I had not yet, then, entered the" Yellow Room ". Quelles étaient les blessures de Mlle Stangerson ? What were Miss Stangerson's injuries? Des marques de strangulation et un coup formidable à la tempe... Les marques de strangulation ne me gênaient pas. Strangulation marks and a great blow to the temple ... The strangulation marks did not bother me. Elles pouvaient avoir été faites « avant » et Mlle Stangerson les avait dissimulées sous une collerette, un boa, n'importe quoi ! They could have been made "before" and Miss Stangerson had hidden them under a collar, a boa, whatever! Car, du moment que je créais, que j'étais obligé de diviser l'affaire en deux phases, j'étais acculé à la nécessité de me dire que Mlle Stangerson avait caché tous les événements de la première phase ; elle avait des raisons, sans doute, assez puissantes pour cela, puisqu'elle n'avait rien dit à son père et qu'elle dut raconter naturellement au juge d'instruction l'agression de l'assassin dont elle ne pouvait nier le passage, comme si cette agression avait eu lieu la nuit, pendant la seconde phase ! For from the moment that I was creating, that I was obliged to divide the affair into two phases, I was forced to tell myself that Miss Stangerson had concealed all the events of the first phase; she had reasons, no doubt, powerful enough for that, since she had not said anything to her father and she naturally had to relate to the examining magistrate the assault on the murderer of which she could not deny the passage. , as if this attack had taken place at night, during the second phase! Pois desde o momento que eu estava criando, que fui obrigado a dividir o caso em duas fases, fui forçado a dizer a mim mesmo que a Srta. Stangerson havia ocultado todos os eventos da primeira fase; ela tinha razões, sem dúvida, poderosas o bastante para isso, já que nada dissera ao pai e que naturalmente devia relatar ao juiz de instrução o assalto ao assassino, do qual não podia negar a passagem., como se assim. O ataque ocorreu à noite, durante a segunda fase! Elle y était forcée, sans quoi son père lui eût dit : « Que nous as-tu caché là ? She was forced to do so, otherwise her father would have said to her, "What did you hide from us there?" Que signifie « ton silence après une pareille agression » ? What does “your silence after such an attack” mean? « Elle avait donc dissimulé les marques de la main de l'homme à son cou. “So she had concealed the marks of the man's hand around her neck. Mais il y avait le coup formidable de la tempe ! But there was the formidable blow to the temple! Ça, je ne le comprenais pas ! I did not understand that! Surtout quand j'appris que l'on avait trouvé dans la chambre un os de mouton, arme du crime... Elle ne pouvait avoir dissimulé qu'on l'avait assommée, et cependant cette blessure apparaissait évidemment comme ayant dû être faite pendant la première phase puisqu'elle nécessitait la présence de l'assassin ! Especially when I learned that a sheep bone had been found in the bedroom, a murder weapon ... She could not have concealed that she had been knocked out, and yet this wound evidently appeared to have been made during the first phase since it required the presence of the assassin! J'imaginai que cette blessure était beaucoup moins forte qu'on ne le disait — en quoi j'avais tort — et je pensai que Mlle Stangerson avait caché la blessure de la tempe sous une coiffure en bandeaux ! I imagined that this wound was much less strong than it was said - in what I was wrong - and I thought that Miss Stangerson had hidden the wound of the temple under a bandaged hairstyle! Imaginei que esse ferimento fosse muito menos severo do que se dizia - no qual me enganei - e pensei que a Srta. Stangerson havia escondido o ferimento na têmpora sob um penteado com bandana! « Quant à la marque, sur le mur, de la main de l'assassin blessée par le revolver de Mlle Stangerson, cette marque avait été faite évidemment « avant » et l'assassin avait été nécessairement blessé pendant la première phase, c'est-à-dire pendant qu'il était là ! “As for the mark on the wall of the hand of the assassin wounded by Miss Stangerson's revolver, this mark had obviously been made 'before' and the assassin had necessarily been injured during the first phase, it is that is, while he was there! Toutes les traces du passage de l'assassin avaient été naturellement laissées pendant la première phase : L'os de mouton, les pas noirs, le béret, le mouchoir, le sang sur le mur, sur la porte et par terre... De toute évidence, si ces traces étaient encore là, c'est que Mlle Stangerson, qui désirait qu'on ne sût rien et qui agissait pour qu'on ne sût rien de cette affaire, n'avait pas encore eu le temps de les faire disparaître ! All traces of the assassin's passage had naturally been left during the first phase: the sheep's bone, the black footsteps, the beret, the handkerchief, the blood on the wall, on the door and on the floor ... Obviously, if these traces were still there, it was because Miss Stangerson, who wished that nothing was known and who acted so that nothing was known about this affair, had not yet had time to make them vanish ! Todos os vestígios da passagem do assassino foram naturalmente deixados durante a primeira fase: o osso de ovelha, as pegadas negras, a boina, o lenço, o sangue na parede, na porta e no chão ... Obviamente, se esses vestígios ainda estavam lá, porque a senhorita Stangerson, que não queria que soubéssemos e que agia de modo que nada soubéssemos desse caso, ainda não tivera tempo de fazê-los desaparecer! Ce qui me conduisait à chercher la première phase de l'affaire dans un temps très rapproché de la seconde. Which led me to look for the first phase of the case very close to the second. Si, après la première phase, c'est-à-dire après que l'assassin se fût échappé, après qu'elle-même eût en hâte regagné le laboratoire où son père la retrouvait, travaillant, — si elle avait pu pénétrer à nouveau un instant dans la chambre, elle aurait au moins fait disparaître, tout de suite, l'os de mouton, le béret et le mouchoir qui traînaient par terre. If, after the first phase, that is to say after the murderer had escaped, after she herself had hurriedly returned to the laboratory where her father found her, working, - if she had been able to enter again in the room for a moment, she would at least have made the sheep bone, the beret and the handkerchief lying on the floor disappear immediately. Mais elle ne le tenta pas, son père ne l'ayant pas quittée. But she did not attempt it, her father having not left her. Après, donc, cette première phase, elle n'est entrée dans sa chambre qu'à minuit. After, therefore, this first phase, she did not enter her room until midnight. Quelqu'un y était entré à dix heures : le père Jacques, qui fit sa besogne de tous les soirs, ferma les volets et alluma la veilleuse. Someone had entered at ten o'clock: Father Jacques, who did his nightly chore, closed the shutters and turned on the night-light. Dans son anéantissement sur le bureau du laboratoire où elle feignait de travailler, Mlle Stangerson avait sans doute oublié que le père Jacques allait entrer dans sa chambre ! In her frustration at the desk in the laboratory where she pretended to work, Miss Stangerson had no doubt forgotten that Father Jacques was going to enter her room! Frustrada com a mesa do laboratório onde fingia trabalhar, a Srta. Stangerson sem dúvida havia se esquecido que o Padre Jacques iria entrar em seu quarto! Aussi elle a un mouvement : elle prie le père Jacques de ne pas se déranger ! So she has a movement: she asks Father Jacques not to disturb himself! De ne pas pénétrer dans la chambre ! Not to enter the room! Ceci est en toutes lettres dans l'article du Matin . This is spelled out in the Matin article. Le père Jacques entre tout de même et ne s'aperçoit de rien, tant la « Chambre Jaune » est obscure ! Father Jacques enters all the same and notices nothing, the "Yellow Room" is so dark! ... Mlle Stangerson a dû vivre là deux minutes affreuses ! ... Miss Stangerson must have lived there for two terrible minutes! Cependant, je crois qu'elle ignorait qu'il y avait tant de marques du passage de l'assassin dans sa chambre ! However, I believe she was unaware that there were so many marks of the passage of the assassin in his room! Elle n'avait sans doute, après la première phase, eu le temps que de dissimuler les traces des doigts de l'homme à son cou et de sortir de sa chambre ! She had probably, after the first phase, only had time to hide the traces of the fingers of the man on her neck and to leave her room! ... Si elle avait su que l'os, le béret et le mouchoir fussent sur le parquet, elle les aurait également ramassés quand elle est rentrée à minuit dans sa chambre... Elle ne les a pas vus, elle s'est déshabillée à la clarté douteuse de la veilleuse... Elle s'est couchée, brisée par tant d'émotions, et par la terreur, la terreur qui ne l'avait fait regagner cette chambre que le plus tard possible... ... If she had known that the bone, the beret and the handkerchief were on the floor, she would also have picked them up when she came back to her room at midnight ... She did not see them, she was undressed by the dubious clarity of the night-light ... She went to bed, broken by so many emotions, and by the terror, the terror which had only made her return to this room as late as possible ... ... Se soubesse que o osso, a boina e o lenço estavam no chão, também os teria recolhido quando regressou ao seu quarto à meia-noite ... Não os viu, foi despida pelo clareza duvidosa da luz da noite ... Ela foi para a cama, quebrada por tantas emoções, e pelo terror, o terror que só a fez retornar a este quarto o mais tarde possível ... « Ainsi étais-je obligé d'arriver de la sorte à la seconde phase du drame, avec Mlle Stangerson seule dans la chambre, du moment qu'on n'avait pas trouvé l'assassin dans la chambre... Ainsi devais-je naturellement faire entrer dans le cercle de mon raisonnement les marques extérieures. "So I was obliged to arrive in this way at the second phase of the drama, with Miss Stangerson alone in the room, as long as the murderer had not been found in the room ... So I had to naturally to bring external marks into the circle of my reasoning. « Mais il y avait d'autres marques extérieures à expliquer. “But there were other outside brands to explain. Des coups de revolver avaient été tirés, pendant la seconde phase. Revolver shots had been fired during the second phase. Des cris : « Au secours ! Shouts: "Help! À l'assassin ! » avaient été proférés ! Had been uttered! ... Que pouvait me désigner, en une telle occurrence, le bon bout de ma raison ? ... What could indicate to me, in such an occurrence, the good end of my reason? Quant aux cris, d'abord : du moment où il n'y a pas d'assassin dans la chambre, il y avait forcément cauchemar dans la chambre ! « On entend un grand bruit de meubles renversés. “There is a loud noise of overturned furniture. J'imagine... je suis obligé d'imaginer ceci : Mlle Stangerson s'est endormie, hantée par l'abominable scène de l'après-midi... elle rêve... le cauchemar précise ses images rouges... elle revoit l'assassin qui se précipite sur elle, elle crie : « À l'assassin ! Au secours ! Help ! » et son geste désordonné va chercher le revolver qu'elle a posé, avant de se coucher, sur sa table de nuit. And her disorderly gesture goes to fetch the revolver which she put down on her bedside table before going to bed. Mais cette main heurte la table de nuit avec une telle force qu'elle la renverse. But that hand hits the nightstand with such force that it knocks it over. Le revolver roule par terre, un coup part et va se loger dans le plafond... Cette balle dans le plafond me parut, dès l'abord, devoir être la balle de l'accident... Elle révélait la possibilité de l'accident et arrivait si bien avec mon hypothèse de cauchemar qu'elle fut une des raisons pour lesquelles je commençai à ne plus douter que le crime avait eu lieu avant, et que Mlle Stangerson, douée d'un caractère d'une énergie peu commune, l'avait caché... Cauchemar, coup de revolver... Mlle Stangerson, dans un état moral affreux, est réveillée ; elle essaye de se lever ; elle roule par terre, sans force, renversant les meubles, râlant même...« À l'assassin ! The revolver rolls on the ground, a shot goes off and is lodged in the ceiling ... This bullet in the ceiling seemed to me, at first, to have been the bullet of the accident ... It revealed the possibility of accident and happened so well with my nightmare hypothesis that it was one of the reasons why I began to no longer doubt that the crime had taken place before, and that Miss Stangerson, endowed with a character of an unusual energy, had hidden it ... Nightmare, revolver shot ... Miss Stangerson, in a terrible state of morale, is awake; she tries to get up; she rolls on the ground, without strength, knocking over the furniture, even moaning ... "To the murderer!" Au secours ! Help ! » et s'évanouit... "And passed out ... « Cependant, on parlait de deux coups de revolver, la nuit, lors de la seconde phase. “However, we were talking about two revolver shots at night during the second phase. À moi aussi, pour ma thèse — ce n'était plus, déjà, une hypothèse — il en fallait deux ; mais « un » dans chacune des phases et non pas deux dans la dernière... un coup pour blesser l'assassin, avant , et un coup lors du cauchemar, après ! For me too, for my thesis - it was no longer a hypothesis - two were needed; but "one" in each of the phases and not two in the last ... a blow to wound the assassin, before, and a blow during the nightmare, after! Or, était-il bien sûr que, la nuit, deux coups de revolver eussent été tirés ? Now, was he quite sure that two revolver shots had been fired at night? Le revolver s'était fait entendre au milieu du fracas de meubles renversés. The revolver had sounded amid the clatter of overturned furniture. O revólver soou em meio ao barulho de móveis tombados. Dans un interrogatoire, M. Stangerson parle d'un coup sourd d'abord, d'un coup éclatant ensuite ! In an interrogation, Mr. Stangerson spoke first of a dull blow, then of a dazzling blow! Si le coup sourd avait été produit par la chute de la table de nuit en marbre sur le plancher ? What if the thud had been produced by the fall of the marble nightstand on the floor? Il est nécessaire que cette explication soit la bonne. This explanation must be the correct one. Je fus certain qu'elle était la bonne, quand je sus que les concierges, Bernier et sa femme, n'avaient entendu, eux qui étaient tout près du pavillon, qu'un seul coup de revolver. I was sure she was the correct one when I learned that the concierges, Bernier and his wife, had heard, they who were very close to the pavilion, only one gunshot. Ils l'ont déclaré au juge d'instruction. They declared it to the investigating judge. « Ainsi, j'avais presque reconstitué les deux phases du drame quand je pénétrai, pour la première fois, dans la « Chambre Jaune ». "So, I had almost reconstructed the two phases of the drama when I entered the 'Yellow Room' for the first time. Cependant la gravité de la blessure à la tempe n'entrait pas dans le cercle de mon raisonnement. However, the severity of the injury to the temple was outside the scope of my reasoning. Cette blessure n'avait donc pas été faite par l'assassin avec l'os de mouton, lors de la première phase, parce qu'elle était trop grave, que Mlle Stangerson n'aurait pu la dissimuler et qu'elle ne l'avait pas dissimulée sous une coiffure en bandeaux ! This wound had therefore not been made by the assassin with the sheep bone, during the first phase, because it was too serious, that Miss Stangerson could not have concealed it and that she did not. had not concealed under a headband hairstyle! Esta ferida, portanto, não tinha sido feita pelo assassino com o osso de ovelha, durante a primeira fase, porque era muito grave, que a Srta. Stangerson não poderia tê-la ocultado e ela não ocultou sob um penteado com bandana! Alors, cette blessure avait été « nécessairement » faite lors de la seconde phase, au moment du cauchemar ? C'est ce que je suis allé demander à la « Chambre Jaune » et la « Chambre Jaune » m'a répondu ! This is what I went to ask the “Yellow Room” and the “Yellow Room” answered me! Rouletabille tira, toujours de son petit paquet, un morceau de papier blanc plié en quatre, et, de ce morceau de papier blanc, sortit un objet invisible, qu'il tint entre le pouce et l'index et qu'il porta au président : Rouletabille took out, still from his small package, a piece of white paper folded in four, and from this piece of white paper came out an invisible object, which he held between his thumb and forefinger and carried to the president. : « Ceci, monsieur le président, est un cheveu, un cheveu blond maculé de sang, un cheveu de Mlle Stangerson... Je l'ai trouvé collé à l'un des coins de marbre de la table de nuit renversée... Ce coin de marbre était lui-même maculé de sang. "This, Mr. President, is a hair, a blond hair stained with blood, a hair of Miss Stangerson ... I found it stuck to one of the marble corners of the overturned nightstand ... This a corner of marble was itself stained with blood. Oh ! un petit carré rouge de rien du tout ! a little red square of nothing at all! mais fort important ! car il m'apprenait, ce petit carré de sang, qu'en se levant, affolée, de son lit, Mlle Stangerson était tombée de tout son haut et fort brutalement sur ce coin de marbre qui l'avait blessée à la tempe, et qui avait retenu ce cheveu, ce cheveu que Mlle Stangerson devait avoir sur le front, bien qu'elle ne portât pas la coiffure en bandeaux ! for he was telling me, this little patch of blood, that when she got up, panicked, from her bed, Mlle Stangerson had fallen with all her high and very brutally on this marble corner which had injured her in the temple, and who had held back that hair, that hair that Miss Stangerson must have had on her forehead, although she was not wearing the headband hairstyle! Les médecins avaient déclaré que Mlle Stangerson avait été assommée avec un objet contondant et, comme l'os de mouton était là, le juge d'instruction avait immédiatement accusé l'os de mouton mais le coin d'une table de nuit en marbre est aussi un objet contondant auquel ni les médecins ni le juge d'instruction n'avaient songé, et que je n'eusse peut-être point découvert moi -même si le bon bout de ma raison ne me l'avait indiqué, ne me l'avait fait pressentir. Doctors said Miss Stangerson was knocked out with a blunt object and as the sheep bone was there, the examining magistrate immediately accused the sheep bone but the corner of a marble nightstand is also a blunt object which neither the doctors nor the examining magistrate had thought of, and which I would not perhaps have discovered myself if the good end of my reason had not indicated it to me, did not let me know. 'had suggested. Os médicos disseram que a Srta. Stangerson foi nocauteada com um objeto rombudo e como o osso de ovelha estava lá, o juiz de instrução imediatamente acusou o osso de ovelha, mas o canto de uma mesa de cabeceira de mármore também é um objeto cego que nem os médicos nem o juiz de instrução haviam pensado, e que eu talvez não tivesse descoberto se os bons fins de minha razão não o tivessem indicado, não me avisado. ”havia sugerido. La salle faillit partir, une fois de plus, en applaudissements ; mais, comme Rouletabille reprenait tout de suite sa déposition, le silence se rétablit sur-le-champ. The hall almost left, once again, in applause; but, as Rouletabille immediately resumed his testimony, silence was immediately reestablished. O salão quase saiu, mais uma vez, em aplausos; mas, como Rouletabille imediatamente retomou seu testemunho, o silêncio foi imediatamente restabelecido.

« Il me restait à savoir, en dehors du nom de l'assassin que je ne devais connaître que quelques jours plus tard, à quel moment avait eu lieu la première phase du drame. “It remained for me to know, apart from the name of the assassin whom I was not to know until a few days later, when the first phase of the drama took place. L'interrogatoire de Mlle Stangerson, bien qu'arrangé pour tromper le juge d'instruction, et celui de M. Stangerson, devaient me le révéler. The questioning of Miss Stangerson, although arranged to deceive the examining magistrate, and that of Mr. Stangerson, were to reveal it to me. Mlle Stangerson a donné exactement l'emploi de son temps, ce jour-là. Miss Stangerson gave her exact schedule that day. Nous avons établi que l'assassin s'est introduit entre cinq et six dans le pavillon ; mettons qu'il fût six heures et quart quand le professeur et sa fille se sont remis au travail. We have established that the assassin entered the lodge between five and six; Let’s say it was a quarter past six when the teacher and his daughter got back to work. C'est donc entre cinq heures et six heures et quart qu'il faut chercher. It is therefore between five and a quarter past five that we must look for. Que dis- je, cinq heures ! What am I saying, five o'clock! mais le professeur est alors avec sa fille... Le drame ne pourra s'être passé que loin du professeur ! but the professor is then with his daughter ... The drama can only have happened far from the professor! Il me faut donc, dans ce court espace de temps, chercher le moment où le professeur et sa fille seront séparés ! So, in this short space of time, I have to look for the moment when the teacher and his daughter will be separated! ... Eh bien, ce moment, je le trouve dans l'interrogatoire qui eut lieu dans la chambre de Mlle Stangerson, en présence de M. Stangerson. ... Well, that moment I find it in the interrogation which took place in Miss Stangerson's room, in the presence of Mr. Stangerson. Il y est marqué que le professeur et sa fille rentrent vers six heures au laboratoire. It is marked that the professor and his daughter return to the laboratory around six o'clock. M. Stangerson dit : « À ce moment, je fus abordé par mon garde qui me retint un instant. Mr. Stangerson said, "At this point I was approached by my guard who held me back for a moment. » il y a donc conversation avec le garde. There is therefore a conversation with the guard. Le garde parle à M. Stangerson de coupe de bois ou de braconnage ; Mlle Stangerson n'est plus là ; elle a déjà regagné le laboratoire puisque le professeur dit encore : « Je quittai le garde et je rejoignis ma fille qui était déjà au travail ! The guard talks to Mr. Stangerson about logging or poaching; Miss Stangerson is no longer there; she has already returned to the laboratory since the professor says again: "I left the guard and I joined my daughter who was already at work!" « C'est donc dans ces courtes minutes que le drame se déroula. “So it was in these short minutes that the drama unfolded. C'est nécessaire ! Je vois très bien Mlle Stangerson rentrer dans le pavillon, pénétrer dans sa chambre pour poser son chapeau et se trouver en face du bandit qui la poursuit. I can see Mlle. Stangerson very well entering the pavilion, entering her room to put down her hat and find herself facing the bandit who is pursuing her. Le bandit était là, dans le pavillon, depuis un certain temps. Il devait avoir arrangé son affaire pour que tout se passât la nuit. He must have arranged his business so that it all happened at night. Il avait alors déchaussé les chaussures du père Jacques qui le gênaient, dans les conditions que j'ai dites au juge d'instruction, il avait opéré la rafle des papiers, comme je vous l'ai dit tout à l'heure, et il s'était ensuite glissé sous le lit quand le père Jacques était revenu laver le vestibule et le laboratoire... Le temps lui avait paru long... il s'était relevé, après le départ du père Jacques, avait à nouveau erré dans le laboratoire, était venu dans le vestibule, avait regardé dans le jardin, et avait vu venir, vers le pavillon — car, à ce moment-là, la nuit qui commençait était très claire — Mlle Stangerson, toute seule ! He then took off Father Jacques' shoes which bothered him, under the conditions that I told the examining magistrate, he had carried out the roundup of papers, as I told you earlier, and he had then slipped under the bed when Father Jacques came back to wash the vestibule and the laboratory ... Time had seemed long to him ... he had got up, after Father Jacques had left, had once again wandered into the laboratory, had come into the vestibule, had looked in the garden, and had seen it coming, towards the pavilion - for at that moment the night which was beginning was very clear - Miss Stangerson, all alone! Jamais il n'eût osé l'attaquer à cette heure-là s'il n'avait cru être certain que Mlle Stangerson était seule ! He would never have dared to attack her at that hour if he had not believed he was certain that Miss Stangerson was alone! Et, pour qu'elle lui apparût seule, il fallait que la conversation entre M. Stangerson et le garde qui le retenait eût lieu à un coin détourné du sentier, coin où se trouve un bouquet d'arbres qui les cachait aux yeux du misérable. And, in order for her to appear to him alone, the conversation between Mr. Stangerson and the guard who held him had to take place at a corner turned away from the path, a corner where there is a clump of trees which hid them from the eyes of the wretch. . Alors, son plan est fait. So his plan is done. Il va être plus tranquille, seul avec Mlle Stangerson dans ce pavillon, qu'il ne l'aurait été, en pleine nuit, avec le père Jacques dormant dans son grenier. He will be quieter, alone with Mlle. Stangerson in this pavilion, than he would have been, in the middle of the night, with Father Jacques sleeping in his attic. Ele ficará mais quieto, sozinho com a Sra. Stangerson neste pavilhão, do que ficaria, no meio da noite, com o Padre Jacques dormindo em seu sótão. Et il dut fermer la fenêtre du vestibule ! And he had to close the hall window! ce qui explique aussi que ni M. Stangerson, ni le garde, du reste assez éloignés encore du pavillon, n'ont entendu le coup de revolver. which also explains why neither Mr. Stangerson nor the guard, moreover still quite far from the pavilion, heard the gunshot. o que também explica por que nem o Sr. Stangerson nem o guarda, aliás ainda muito longe do pavilhão, ouviram o tiro. « Puis il regagna la « Chambre Jaune ». “Then he returned to the“ Yellow Room ”. Mlle Stangerson arrive. Ce qui s'est passé a dû être rapide comme l'éclair ! What happened must have been lightning fast! ... Mlle Stangerson a dû crier... ou plutôt a voulu crier son effroi ; l'homme l'a saisie à la gorge... Peut-être va-t-il l'étouffer, l'étrangler... Mais la main tâtonnante de Mlle Stangerson a saisi, dans le tiroir de la table de nuit, le revolver qu'elle y a caché depuis qu'elle redoute les menaces de l'homme. ... Miss Stangerson must have screamed ... or rather wanted to scream her fright; the man seized her by the throat ... Perhaps he will suffocate her, strangle her ... But Miss Stangerson's groping hand has seized, in the drawer of the nightstand, the gun that she has hidden there since she fears the threats of the man. L'assassin brandit déjà, sur la tête de la malheureuse, cette arme terrible dans les mains de Larsan-Ballmeyer, un os de mouton... Mais elle tire... le coup part, blesse la main qui abandonne l'arme. The assassin already brandishes, on the head of the unfortunate, this terrible weapon in the hands of Larsan-Ballmeyer, a bone of a sheep ... But it fires ... the shot goes off, wounds the hand which abandons the weapon. L'os de mouton roule par terre, ensanglanté par la blessure de l'assassin... l'assassin chancelle, va s'appuyer à la muraille, y imprime ses doigts rouges, craint une autre balle et s'enfuit... The sheep bone rolls on the ground, bloodied by the murderer's wound ... the murderer totters, leans against the wall, imprints his red fingers on it, fears another bullet and runs away ... O osso de ovelha rola no chão ensanguentado pelo ferimento do assassino ... o assassino cambaleia, encosta-se à parede, marca os dedos vermelhos nela, tem medo de outra bala e foge ... « Elle le voit traverser le laboratoire... Elle écoute... Que fait- il dans le vestibule ? "She sees him walk through the lab ... She listens ... What is he doing in the hall?" ... Il est bien long à sauter par cette fenêtre... Enfin, il saute ! ... It takes a long time to jump out of this window ... Finally, he jumps! Elle court à la fenêtre et la referme ! She runs to the window and closes it! ... Et maintenant, est-ce que son père a vu ? ... And now, has his father seen? a entendu ? heard ? Maintenant que le danger a disparu, toute sa pensée va à son père... douée d'une énergie surhumaine, elle lui cachera tout, s'il en est temps encore ! Now that the danger has disappeared, all her thoughts are with her father ... endowed with superhuman energy, she will hide everything from him, if there is still time! ... Et, quand M. Stangerson reviendra, il trouvera la porte de la « Chambre Jaune » fermée, et sa fille, dans le laboratoire, penchée sur son bureau, attentive, au travail, déjà ! Rouletabille se tourne alors vers M. Darzac :

« Vous savez la vérité, s'écria-t-il, dites-nous donc si la chose ne s'est pas passée ainsi ? "You know the truth," he cried, "tell us then if it was not so? — Je ne sais rien, répond M. Darzac. - I don't know anything, replies M. Darzac.

— Vous êtes un héros ! - You are a hero! fait Rouletabille, en se croisant les bras... Mais si Mlle Stangerson était, hélas ! said Rouletabille, crossing his arms ... But if Mlle Stangerson was, alas! en état de savoir que vous êtes accusé, elle vous relèverait de votre parole... elle vous prierait de dire tout ce qu'elle vous a confié... que dis-je, elle viendrait vous défendre elle-même ! in a state of knowing that you are accused, she would relieve you of your word ... she would ask you to say everything she has confided to you ... what am I saying, she would come to defend you herself! ... »

M. Darzac ne fit pas un mouvement, ne prononça pas un mot. Il regarda tristement Rouletabille. He looked sadly at Rouletabille.

« Enfin, fit celui-ci, puisque Mlle Stangerson n'est pas là, il faut bien que j'y sois, moi ! "Anyway," said the latter, "since Miss Stangerson is not here, I must be there!" Mais, croyez-moi, monsieur Darzac, le meilleur moyen, le seul, de sauver Mlle Stangerson et de lui rendre la raison, c'est encore de vous faire acquitter ! But, believe me, Monsieur Darzac, the best way, the only one, to save Mlle Stangerson and restore her sanity, is still to get you acquitted! Un tonnerre d'applaudissements accueillit cette dernière phrase. A thunderous applause greeted this last sentence. Le président n'essaya même pas de réfréner l'enthousiasme de la salle. Robert Darzac était sauvé. Robert Darzac was saved. Il n'y avait qu'à regarder les jurés pour en être certain ! You only had to look at the jurors to be sure! Leur attitude manifestait hautement leur conviction. Their attitude was a strong manifestation of their conviction.

Le président s'écria alors : « Mais enfin, quel est ce mystère qui fait que Mlle Stangerson, que l'on tente d'assassiner, dissimule un pareil crime à son père ? "But after all, what is this mystery that makes Miss Stangerson, who is being tried to assassinate, concealing such a crime from her father?" — Ça, m'sieur, fit Rouletabille, j'sais pas ! ... Ça ne me regarde pas ! ... It's none of my business ! ... Não é da minha conta! ... »

Le président fit un nouvel effort auprès de M. Robert Darzac.

« Vous refusez toujours de nous dire, monsieur, quel a été l'emploi de votre temps pendant qu'« on » attentait à la vie de Mlle Stangerson ? "You still refuse to tell us, sir, what was the use of your time while 'there' was an attempt on Miss Stangerson's life? — Je ne peux rien vous dire, monsieur... » - I can't tell you anything, sir ... "

Le président implora du regard une explication de Rouletabille : The president looked forward to an explanation from Rouletabille: O presidente implorou uma explicação de Rouletabille:

« On a le droit de penser, m'sieur le président, que les absences de M. Robert Darzac étaient étroitement liées au secret de Mlle Stangerson... Aussi M. Darzac se croit-il tenu à garder le silence ! "We have the right to think, M'sieur the President, that the absences of Mr. Robert Darzac were closely linked to the secrecy of Mlle Stangerson ... Also Mr. Darzac believes he is bound to remain silent! ... Imaginez que Larsan, qui a, lors de ses trois tentatives, tout mis en train pour détourner les soupçons sur M. Darzac, ait fixé, justement, ces trois fois-là, des rendez-vous à M. Darzac dans un endroit compromettant, rendez-vous où il devait être traité du mystère... M. Darzac se fera plutôt condamner que d'avouer quoi que ce soit, que d'expliquer quoi que ce soit qui touche au mystère de Mlle Stangerson. ... Imagine that Larsan, who, during his three attempts, put everything in place to deflect suspicion on Mr. Darzac, had, precisely, these three times, appointments with Mr. Darzac in a compromising place, meeting where he was to be treated of the mystery ... M. Darzac will rather be condemned than to confess anything, than to explain anything which touches with the mystery of Mlle Stangerson. Larsan est assez malin pour avoir fait encore cette « combinaise-là ! Larsan is smart enough to have done that "combination again!" Larsan é inteligente o suficiente para ter feito aquela "combinação de novo!" ... »

Le président, ébranlé, mais curieux, répartit encore : The president, shaken but curious, still distributes:

« Mais quel peut bien être ce mystère-là ? "But what could this mystery be?"

— Ah ! m'sieur, j'pourrais pas vous dire ! sir, I couldn't tell you! fit Rouletabille en saluant le président ; seulement, je crois que vous en savez assez maintenant pour acquitter M. Robert Darzac ! said Rouletabille, bowing to the president; only, I believe that you now know enough to acquit M. Robert Darzac! ... À moins que Larsan ne revienne ! ... Unless Larsan comes back! mais j'crois pas ! » fit-il en riant d'un gros rire heureux. Tout le monde rit avec lui.

« Encore une question, monsieur, fit le président. Nous comprenons, toujours en admettant votre thèse, que Larsan ait voulu détourner les soupçons sur M. Robert Darzac, mais quel intérêt avait-il à les détourner aussi sur le père Jacques ? We understand, still admitting your thesis, that Larsan wanted to divert the suspicions on Mr. Robert Darzac, but what interest did he have in diverting them also on Father Jacques? ...

— « L'intérêt du policier ! - "The interest of the policeman!" » m'sieur ! L'intérêt de se montrer débrouillard en annihilant lui-même ces preuves qu'il avait accumulées. The interest of being resourceful by destroying himself the evidence he had accumulated. C'est très fort, ça ! C'est un truc qui lui a souvent servi à détourner les soupçons qui eussent pu s'arrêter sur lui- même ! It is a trick which has often served him to deflect any suspicion which might have rested on himself! Il prouvait l'innocence de l'un, avant d'accuser l'autre. Songez, monsieur le président, qu'une affaire comme celle-là devait avoir été longuement « mijotée « à l'avance par Larsan. Bear in mind, Mr. President, that a case like this must have been "simmered" for a long time in advance by Larsan. Tenha em mente, senhor presidente, que um caso como este deve ter sido "fervido" com bastante antecedência por Larsan. Je vous dis qu'il avait tout étudié et qu'il connaissait les êtres et tout. I tell you that he had studied everything and he knew beings and everything. Estou lhe dizendo que ele estudou tudo e conhecia os seres e tudo mais. Si vous avez la curiosité de savoir comment il s'était documenté, vous apprendrez qu'il s'était fait un moment le commissionnaire entre « le laboratoire de la Sûreté »et M. Stangerson, à qui on demandait des « expériences ». If you are curious to know how he had documented himself, you will learn that for a while he had made the commissioner between "the Security Laboratory" and Mr. Stangerson, who was asked for "experiments". Se você está curioso para saber como ele se documentou, ficará sabendo que por um tempo ele foi nomeado comissário entre o "Laboratório de Segurança" e o Sr. Stangerson, a quem foi solicitado "experimentos". Ainsi, il a pu, avant le crime, pénétrer deux fois dans le pavillon. Thus, before the crime, he was able to enter the pavilion twice. Il était grimé de telle sorte que le père Jacques, depuis, ne l'a pas reconnu ; mais il a trouvé, lui, Larsan, l'occasion de chiper au père Jacques une vieille paire de godillots et un béret hors d'usage, que le vieux serviteur de M. Stangerson avait noués dans un mouchoir pour les porter sans doute à un de ses amis, charbonnier sur la route d'Épinay ! He was made up in such a way that Father Jacques has not recognized him since; but he, Larsan, found the opportunity to steal from Father Jacques an old pair of boots and a worn-out beret, which Mr. Stangerson's old servant had tied in a handkerchief to carry them no doubt to a of his friends, coalman on the road to Épinay! Estava tão maquiado que o padre Jacques não o reconheceu desde então; mas ele, Larsan, encontrou a oportunidade de roubar do padre Jacques um velho par de botas e uma boina surrada, que o velho criado do Sr. Stangerson amarrou com um lenço para levá-los, sem dúvida, a um de seus amigos, carvoeiro da estrada para Épinay! Quand le crime fut découvert, le père Jacques, reconnaissant les objets à part lui, n'eut garde de les reconnaître immédiatement ! When the crime was discovered, Father Jacques, recognizing the objects apart from himself, took care not to recognize them immediately! Ils étaient trop compromettants, et c'est ce qui vous explique son trouble, à cette époque, quand nous lui en parlions. They were too compromising, and that's what explains his trouble at that time when we talked to him about it. Tout cela est simple comme bonjour et j'ai acculé Larsan à me l'avouer. This is all easy as pie and I cornered Larsan to admit it to me. Isso tudo é fácil pra caramba e eu encurralei Larsan para admitir isso para mim. Il l'a du reste fait avec plaisir, car, si c'est un bandit — ce qui ne fait plus, j'ose l'espérer, de doute pour personne — c'est aussi un artiste ! He did it with pleasure, moreover, because, if he is a bandit - which no longer creates doubt, I dare to hope, for anyone - he is also an artist! ... C'est sa manière de faire, à cet homme, sa manière à lui... Il a agi de même lors de l'affaire du « Crédit universel » et des « Lingots de la Monnaie ! ... This is his way of doing things, to this man, his way ... He acted in the same way during the "Universal Credit" and "Ingots de la Monnaie" affair! ... É a sua maneira de fazer, para este homem, a sua maneira de fazer ... Ele agiu da mesma forma durante o caso “Crédito Universal” e “Ingots de la Monnaie”! » Des affaires qu'il faudra réviser, m'sieur le président, car il y a quelques innocents dans les prisons depuis que Ballmeyer-Larsan appartient à la Sûreté ! "Business that will have to be revised, M'sieur President, because there are some innocent people in the prisons since Ballmeyer-Larsan belongs to the Sûreté!" "Negócios que terão de ser revistos, M'sieur Presidente, porque há algumas pessoas inocentes nas prisões já que Ballmeyer-Larsan pertence à Sûreté!"