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Les mots de l'actualité, AUTODAFÉ   2010-09-10

AUTODAFÉ 2010-09-10

Un autodafé ! C'est souvent le mot qui a été employé à propos de cet ignoble projet de brûler un exemplaire du Coran en Floride. Passons donc sur l'ignominie de la chose pour en venir à ce mot savant qui s'applique assez bien à ce qui est projeté là : brûler volontairement quelque chose pour ce qu'il est ou ce qu'il représente. Le mot est inhabituel en français, ce qui s'explique facilement : il s'agit en fait d'un mot portugais qui a été importé à peu près tel quel. Mais s'agit-il vraiment d'un mot ? En fait, on en entend de trois, qui ont été condensés en un seul, mais qui parfois, notamment dans des textes un peu anciens, est écrit en trois parties : auto da fé . Et littéralement, on pourrait traduire le mot par acte de foi . En effet le premier élément, auto , n'a rien à voir avec des mots comme automatique ou automobile : il ne vient pas du tout du grec auto , qui signifie par soi-même. C'est un mot portugais qui signifie acte , et que souvent on peut prendre dans un sens théâtral : représentation, geste ou action symbolique qui donne l'idée de quelque chose d'autre. Les deux autres mots se comprennent sans difficulté : da fé veut dire de foi .

Un autodafé est donc une représentation de la foi, un geste qui symbolise la foi, c'est-à-dire la croyance en Dieu et l'amour de Dieu. On comprend qu'on insiste : les actions qui sont ainsi nommées sont toujours très violentes, d'une violence délibérée, préméditée. Et ceux qui les commettent tiennent à se justifier, à clamer haut et fort que ces crimes se font au nom de l'amour de Dieu. L'autodafé est donc comme un précipité d'intolérance religieuse. Alors de quoi s'agit-il ? Quelles sont-elles ces actions ? Au départ le mot s'est surtout employé quand on brûlait quelqu'un. L'Inquisition , officine meurtrière qui régnait au beau milieu de l'Eglise n'hésitait pas à brûler ceux qu'on soupçonnait d'hérésie, d'avoir des opinions contraires au dogme catholique, ou même ceux qu'on accusait de sorcellerie. Et on les brûlait vif, supplice terrible et inhumain, mais qui symboliquement représente une double idée : on se débarrasse totalement de ce qu'on brûle ;: ce n'est pas seulement qu'on le met à mort, mais on le détruit, il n'en reste plus que cendres. Et d'autre part, le feu porte bien souvent avec lui une idée de purification. Le mot autodafé voyage donc du portugais au français, s'installant également en espagnol. Mais à partir de la moitié du XIXe siècle, il va s'appliquer, en français, à d'autres actions moins directement cruelles, même si elles restent extrêmement vives : on peut brûler autre chose que des humains. Mais une chose reste constante : l'autodafé veut toujours exprimer le pouvoir le plus absolu, la tyrannie totale, l'impossibilité d'accepter qu'un autre soit différent de vous. On brûle des livres par exemple quand on considère qu'ils sont porteurs de subversion, de danger. Et on se souvient du livre et du film célèbres Fahrenheit 441 : on brûle tous les livres car la culture est dangereuse ; elle empêche qu'on puisse transformer les humains en clones, genres de robots, à la vie et à la pensée mécaniques, conditionnées, et donc faciles à diriger. Coproduction du Centre national de Documentation Pédagogique. http://www.cndp.fr/ Venez découvrir le livre Les Mots de l'Actualité d'Yvan Amar.

AUTODAFÉ   2010-09-10 AUTODAFÉ 2010-09-10 AUTODAFÉ 2010-09-10

Un autodafé ! C'est souvent le mot qui a été employé à propos de cet ignoble projet de brûler un exemplaire du Coran en Floride. Passons donc sur l'ignominie de la chose pour en venir à ce mot savant qui s'applique assez bien à ce qui est projeté là : brûler volontairement quelque chose pour ce qu'il est ou ce qu'il représente. Le mot est inhabituel en français, ce qui s'explique facilement : il s'agit en fait d'un mot portugais qui a été importé à peu près tel quel. Mais s'agit-il vraiment d'un mot ? En fait, on en entend de trois, qui ont été condensés en un seul, mais qui parfois, notamment dans des textes un peu anciens, est écrit en trois parties : auto da fé . Et littéralement, on pourrait traduire le mot par acte de foi . En effet le premier élément, auto , n'a rien à voir avec des mots comme automatique ou automobile : il ne vient pas du tout du grec auto , qui signifie par soi-même. C'est un mot portugais qui signifie acte , et que souvent on peut prendre dans un sens théâtral : représentation, geste ou action symbolique qui donne l'idée de quelque chose d'autre. Les deux autres mots se comprennent sans difficulté : da fé veut dire de foi .

Un autodafé est donc une représentation de la foi, un geste qui symbolise la foi, c'est-à-dire la croyance en Dieu et l'amour de Dieu. On comprend qu'on insiste : les actions qui sont ainsi nommées sont toujours très violentes, d'une violence délibérée, préméditée. Et ceux qui les commettent tiennent à se justifier, à clamer haut et fort que ces crimes se font au nom de l'amour de Dieu. L'autodafé est donc comme un précipité d'intolérance religieuse. Alors de quoi s'agit-il ? Quelles sont-elles ces actions ? Au départ le mot s'est surtout employé quand on brûlait quelqu'un. L'Inquisition , officine meurtrière qui régnait au beau milieu de l'Eglise n'hésitait pas à brûler ceux qu'on soupçonnait d'hérésie, d'avoir des opinions contraires au dogme catholique, ou même ceux qu'on accusait de sorcellerie. Et on les brûlait vif, supplice terrible et inhumain, mais qui symboliquement représente une double idée : on se débarrasse totalement de ce qu'on brûle ;: ce n'est pas seulement qu'on le met à mort, mais on le détruit, il n'en reste plus que cendres. Et d'autre part, le feu porte bien souvent avec lui une idée de purification. Le mot autodafé voyage donc du portugais au français, s'installant également en espagnol. Mais à partir de la moitié du XIXe siècle, il va s'appliquer, en français, à d'autres actions moins directement cruelles, même si elles restent extrêmement vives : on peut brûler autre chose que des humains. Mais une chose reste constante : l'autodafé veut toujours exprimer le pouvoir le plus absolu, la tyrannie totale, l'impossibilité d'accepter qu'un autre soit différent de vous. On brûle des livres par exemple quand on considère qu'ils sont porteurs de subversion, de danger. Et on se souvient du livre et du film célèbres Fahrenheit 441 : on brûle tous les livres car la culture est dangereuse ; elle empêche qu'on puisse transformer les humains en clones, genres de robots, à la vie et à la pensée mécaniques, conditionnées, et donc faciles à diriger. Coproduction du Centre national de Documentation Pédagogique. http://www.cndp.fr/ Venez découvrir le livre Les Mots de l'Actualité d'Yvan Amar.